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Chapitre III – Comportement plastique et à rupture d’un acier medium Mn à

3. Comportement sous sollicitations dynamiques : étude de la résilience

3.2. Interprétation

Les essais Charpy confirment les résultats observés sur les éprouvettes lisses : le comportement fragile du DT 900 se manifeste pour des températures plus élevées que pour le DT 850. Il présente des plateaux fragile et ductile inférieurs à ceux du DT 850. Le lissage à l’aide de la loi en tangente hyperbolique semble pertinent puisqu’il est très proche des points expérimentaux, notamment dans le domaine de transition (malgré le nombre limité d’essais réalisés du fait de la faible quantité de matière disponible). Il donne une température de transition ductile/fragile globale de -45 °C pour le DT 850 et de -13 °C pour le DT 900 (Figure IV-24).

L’observation des faciès de rupture des éprouvettes Charpy confirme les différents modes de rupture associés à chaque région microstructurale et qui avaient déjà été décrits à partir des observations sur éprouvettes lisses. La transition depuis une rupture interfaciale vers une rupture ductile dans les régions FG se fait progressivement. En effet, sur les quatre éprouvettes DT 900 rompues à -40 °C, la rupture est totalement interfaciale dans les zones FG, alors que sur l’éprouvette rompue à -20 °C, la rupture se traduit par des cupules ductiles avec des facettes au fond de ces cupules dans les régions FG (Figure IV-25). A -20 °C, la rupture s’est amorcée par microfissuration aux interfaces ferrite/martensite, ces microfissures se sont propagées puis se sont émoussées pour conduire à une rupture finale ductile (Figure IV-25-a)). Quand la température d’essai diminue, l’émoussement a lieu pour des distances de propagation interfaciale plus longues, jusqu’à ce que finalement la fissure ne s’émousse plus et que la rupture soit totalement interfaciale, comme à -80 °C. Ce mécanisme de rupture fragile des zones FG est identique à celui observé sur les nuances UFG (cf. Chapitre III, section 3.2.). La transition ductile/fragile des régions FG se situe donc entre -40 et -20 °C. Cette transition est similaire sur le DT 850, à ceci près que la température de transition a été estimée autour de -60 °C.

0 10 20 30 40 50 60 -100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 E n er g ie su rf ac iq u e ab so rb ée ( J. cm -2) Température (°C) DT 850 DT 900 DT 850 DT 900 A 32,5 J.cm-2 24 J.cm-2 B 25,5 J.cm-2 22 J.cm-2 TT -45 °C -13 °C C 20 °C 20 °C deux points de mesure deux points de mesure

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a) b)

Figure IV-25 : Faciès de rupture sur éprouvettes Charpy, observés au MEB, sur la nuance DT 900 a) rupture interfaciale des régions FG à -40 °C, b) rupture ductile des régions FG à -20 °C

A l’inverse, la transition ductile/fragile des grains de ferrite δ est plus douce. Sur le DT 900, pour les éprouvettes rompues de 0 à -20 °C, un mélange de rupture fragile par clivage et de rupture ductile est observé, avec une augmentation de la fraction de facettes de clivage quand la température diminue (Figure IV-26-b) et c)). Ce n’est qu’à -40 °C et en dessous que la rupture des gros grains δ est totalement fragile (Figure IV-26-a)). La température de transition des grains de ferrite δ a donc été déterminée comme la température pour laquelle il y a à peu près autant de surfaces clivées que de surfaces ductiles (les cupules dans δ étant faciles à identifier du fait de leur grande taille, par rapport à elle des cupules des zones FG). Elle a été estimée respectivement à -40 °C et -20 °C pour le DT 900 et le DT 850.

Enfin, la Figure IV-26-d) montre qu’à température ambiante, la rupture du DT 900 est complètement ductile. Aucune facette de clivage n’a été observée, alors que sur les éprouvettes lisses du DT 900, quelques-unes étaient observées. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer. Premièrement, la température autour de l’entaille de l’éprouvette Charpy peut localement atteindre jusqu’à 100 °C, au moment de l’impact [Tanguy, 2005]. Les atomes subissent alors une température supérieure à la température ambiante, affectant leur sensibilité au clivage. Une autre raison pourrait être un plus fort effet TRIP pour les essais Charpy en raison de l’augmentation de la tension hydrostatique du fait de la présence de l’entaille. Toutefois, cela est peu probable puisque cette augmentation signifie une augmentation de la triaxialité, or une plus forte triaxialité augmente le risque de rupture par clivage.

Le Tableau IV-8 résume les températures de transition ductile/fragile associées à chaque région microstructurale, ainsi que la température de transition globale. Il en ressort que pour les deux nuances, la température de transition des grains de ferrite δ est la plus proche de la température de transition ductile/fragile globale. En conséquence, dans le cas des éprouvettes Charpy, l’énergie à rupture semble être contrôlée par les grains de ferrite δ.

Enfin, comme pour les éprouvettes lisses, aucune facette de clivage de seulement quelques micromètres n’a été observée, même sur les éprouvettes Charpy rompues à -80 °C. Cela confirme que, dans les conditions d’étude, seule la ferrite δ est sensible au clivage.

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a) b)

c) d)

Figure IV-26 : Faciès de rupture sur éprouvettes Charpy, observés au MEB, sur la nuance DT 900 a) clivage des grains δ à -40 °C, b) mélange de clivage et de rupture ductile dans les grains δ à -20 °C, c) mélange de clivage et de rupture ductile dans les grains δ à 0 °C, d) rupture totalement ductile à 22 °C

grains de ferrite δ régions FG {α + γr} TT globale DT 850 -40 °C -60 °C -45 DT 900 -20 °C - 40 < T < -20 °C -13

Tableau IV-8 : Température de transition ductile/fragile pour chaque région microstructurale de chaque nuance, déterminée par analyse des fractographies, et température de transition ductile/fragile globale estimée à partir des énergies de rupture

3.3. Synthèse

Les essais Charpy ont permis de confirmer que chaque région microstructurale possède ses propres mécanismes de rupture et sa propre température de transition ductile/fragile. Pour les gros grains de ferrite δ, une transition douce d’une rupture par clivage vers une rupture ductile a lieu. Elle se fait respectivement autour de -40 et -10 °C sur le DT 850 et le DT 900. Les régions FG {α + γr} présentent, quant à elles, une transition brutale d’une rupture interfaciale vers une rupture

ductile. Elle intervient respectivement, autour de -60 et -30 °C sur le DT 850 et le DT 900. La comparaison de ces températures de transition à la température de transition ductile/fragile globale montre que l’énergie à rupture semble contrôlée par les gros grains de ferrite δ.

10 µm 10 µm

10 µm 10 µm

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4. Synthèse des travaux sur la famille DT