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Interaction, acquisition et développement des répertoires verbaux

Chapitre 2 : Bilinguisme et acquisition des langues chez les jeunes issus de l’immigration30

I.2.7. Interaction, acquisition et développement des répertoires verbaux

Nous nous attacherons dans ce qui suit àprésenter une description du développement2 du répertoire verbal des sujets bilingues et comment le recours à une autre langue s’effectue selon le contexte et la situation de communication. Comme le soulignent Rémy PORQUIER & Bernard PY (2004 : 53), le contexte et la dimension socioculturelle sont d’une grande importance :

Dans le cas d’acquisition en milieu social, on a affaire à une extrême diversité de configuration, parmi lesquelles les dimensions socioculturelles (communautés ethniques et culturelles d’origine et d’insertion, pratiques culturelles et religieuses, activité et statut professionnels, etc.) et psycho-sociales (attitudes, motivation, représentations) ainsi que l’âge et les situations personnelles et familiales, ne sont pas a priori préétablies ni cernées ou regroupées par quelque cadre institutionnel.

Cette situation de communication est caractérisée par la divergence et la convergence de deux codes et aussi parles formes mixtes qui en sont le résultat. Partant du principe que l’approche communicative précise que l’acquisition d’une langue se fait à travers les échanges, on peut considérer que l’usage varié (asymétrique) des deux langues ou les deux en même temps nous conduit forcément à des compétences

2 Nous entendons par développement le fait de construire un système de communication à partir des ressources langagières mobilisées de part et de l’’autre lors des interactions.

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communicatives bilingues. Le sujet parlant qui est en situation de contact avec une autre langue est un futur bilingue peu importe son degré de compétence et la nature de son répertoire.

I.2.7.1. L’acquisition d’une langue

Les travaux behavioristes qui s’inscrivent dans le domaine de l’acquisition des langues et qui sont basés sur le stimulus-réponse ont toujours été recommandés dans la situation d’enseignement-apprentissage des langues car l’acquisition du langage est essentiellement fondée sur des facteurs externes qui favorisent renforcement des comportements visés. L’approche constructiviste, PIAGET (1946), est fondée sur l’étude du caractère endogène de l’acquisition. La vision de l’auteur en question s’explique par l’importance qu’il accorde au développement cognitif. C’est dire, que cette approche insiste sur les préalables cognitifs en montrant que l’acquisition passe par des systèmes relativement stables. A son tour, Jean PIAGET (Ibid.) précise que la pensée n’est pas structurée par le langage, mais elle en est sa base. Cette affirmation est justifiée par l’existence d’un substrat biologique inné (fonctionnel et cognitif).

Pour que se différencier de l’approche constructiviste de PIAGET, Noam

CHOMSKY (1971) a mis l’accent sur les dispositions innées chez l’individu (capacités programmées qui permettent l’apprentissage d’une langue). Ce que N.CHOMSKY

(Ibid.) appelle « Dispositif d’Acquisition Linguistique » correspond aux traits généraux de la grammaire « universelle » qui stipulent l’existence d’un dispositif générateur d’un fond commun. Lev VYGOTSKY (1997) et Jérôme BRUNER (1983) s’intéressent quant à eux à une approche constructiviste qui met en avant l’interaction. Lev VYGOTSKY

(Ibid.) développe l’approche constructiviste en envisageant que le contact avec le milieu est privilégié au développement linguistique. Tandis que l’acquisition elle se réalise, selon Jérôme BRUNER (Ibid.), par l’union du LASS (Language Acquisition Support Sytem) [« le système interactionnel qui assure l’étayage » traduction proposée par Pierre BANG (1996)] et le LAD (Language Acquisition Device).C’est sa manière pour dire c’est l’interaction qui assure l’apprentissage. Il affirme également qu’on : « Acquiert pas le langage en se contentant d’être un spectateur mais en l’utilisant »

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I.2.7.2. Interactionnisme et acquisition naturelle d’une langue

L’interactionnisme a permis l’émergence de nouveaux modèles d’acquisition dans les milieux naturel et guidé. Wolfgang KLEIN (1989) explique dans ces travaux que l’acquisition naturelle se développe naturellement grâce à la communication quotidienne. L’apprentissage est stimulé par la réorganisation, la reformulation et l’amélioration des acquis parce que dans ce type d’acquisition l’apprentissage n’est pas guidé de manière systématique, il est réfléchi ce qui permet à l’apprenant de réussir sa communication. Il ajoute que l’objectif ultime du sujet parlant est d’assurer le succès à sa communication en en essayant de comprendre et de se faire comprendre. En ce sens, il attire l’attention sur l’aspect attentif et conscient de l’acquisition (KRASHEN, 1986).

De manière générale, nous notons la présence de nombreuses recherches s’intéressant à la problématique de l’acquisition dans le milieu naturel (VERONIQUE, 1992). Signalons dans ce contexte, que l’acquisition des langues chez les adultes migrants établis dans des pays industrialisés a fait l’objet de beaucoup de recherches. On avance que la condition nécessaire qui soit en mesure d’assurer une intégration sociale est celle de l’apprentissage de la langue du pays d’accueil. Ce besoin social a orienté les recherches vers la mise en œuvre des méthodes pédagogiques capables de fournir des solutions aux problèmes rencontrés dans ce cas de figure.

En effet, nous constatons, depuis les années 70, l’émergence de travaux sur l’apprentissage et l’acquisition d’une langue qui s’intéresse particulièrement aux pratiques langagières observées en milieu naturel. Cette importance est expliquée par des motivations théoriques de nature didactiques et sociolinguistiques. Les pratiques langagières des travailleurs migrants étaient l’objet d’étude des recherches faites sur l’acquisition en milieu naturel. Sur le terrain de la recherche, la pertinence de ces travaux a permis une mise en relief de différentes conceptualisations liées à l’acquisition - apprentissage et à d’autres phénomènes en rapport avec la didactique des langues et la sociolinguistique. C’est donc le milieu naturel qui favorise la recherche et qui permet d’analyser les questions en rapport avec l’acquisition et l’appropriation d’une deuxième langue par les apprenants ou les migrants dans le pays d’accueil. Rémy

POQUIERconsidère qu’une telle importance est expliquée par la nature de la recherche dirigée vers des stratégies de communication authentiquesmais aussi et variées :

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La diversité des stratégies envisagées, ainsi que la prégnance des situations de communication, exigent que la recherche en ce domaine s’oriente vers l’observation des situations authentiques et non seulement de situations expérimentales ou institutionnelles dont le caractère factice exclut le plus souvent d’authentiques stratégies de communication, au profit de stratégies scolaires.

(POQUIER, 1979 : 49)

L’acquisition d’une langue étrangère en milieu naturel et donc considéré comme champ de recherche qui se au carrefour de plusieurs disciplines telles que la didactique des langues, la psycholinguistique, l’ethnographie de la communication, la sociolinguistique interactionniste, etc.

Les travaux réalisés par Daniel VERONIQUE (1992), Jo ADITTY& Marie-Thérèse VASSEUR (1999) sur l’apprentissage et l’acquisition des langues montrent des ruptures épistémologiques variées qui ont certes conduit à de nouvelles et fécondes perspectives de recherches, mais qui font dire que le chemin qui reste à parcourir est à la fois long et pénible.