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Les coûts indirects et directs liés à la schizophrénie sont estimés en France à 15 milliards d’euros chaque année. Les soins en lien avec la maladie (traitements, consultations, hospitalisations) sont la première source de dépense auxquels s’ajoutent les coûts des complications psychiatriques et addictives, somatiques et iatrogènes.

Les coûts indirects sont également nombreux du fait d’une importante surmortalité dans la schizophrénie (espérance de vie inférieure de 10 ans versus population générale avec 10% de suicide soit 3000 décès par suicide en France par an, décès prématurés liés aux comorbidités addictives) et une invalidité conséquente ( 3ème selon l’OMS, dans le groupe des dix maladies

entrainant le plus d’invalidité, 20% des patients nécessitant une hospitalisation au long cours ou un placement dans un centre médico-social).

Or comme nous venons de l’expliquer, un retard de prise en charge avec un allongement de la psychose non traitée majore les coûts de la maladie à cause d’une rémission plus lente, plus de résistance aux traitements, plus de rechutes et un moins bon fonctionnement social.

Le repérage précoce est donc un enjeu majeur dans la réduction des dépenses de santé liées à la schizophrénie.

Le bénéfice attendu de la prévention, permettant des prises en charge précoces, est important. Selon un rapport britannique de 2014, un euro investi pour la prévention en ferait épargner 15 (65).

11.2 Prévention primaire

11.2.1 L’objectif

La prévention dans le domaine de la schizophrénie se situe entre la prévention primaire et la prévention secondaire. Mais il s’agit surtout d’une prévention dite ciblée puisqu’elle intervient chez une population spécifique (le risque de transition dans la population générale ou chez les apparentés de malades étant trop faible pour une prévention plus élargie).

L’enjeu est de faire venir aux soins des jeunes qui, même s’ils ont déjà des symptômes non spécifiques et des plaintes, ne viendraient pas consulter spontanément.

Il est donc important de former les professionnels et pas seulement médicaux mais plus largement ceux qui sont en contact avec des adolescents, afin qu’ils puissent les repérer et les orienter vers les centres spécialisés qui se développent actuellement (et qui semblent montrer des résultats intéressants dans la baisse des taux de transition).

11.2.2 Les outils

Tout d’abord il semble important de former les professionnels de santé de première ligne au dépistage des premiers signes des troubles psychiatriques ce qui faciliterait l’orientation et le suivi ultérieur des patients. En Suisse, la programme Swiss Early Psychosis Project débuté en 1999 a permis de former plus de 800 médecins généralistes aux signes d’alerte précoces de la psychose. Stratégie qui est également prônée dans les programmes canadiens.

L’information et la destigmatisation en population générale sont également un deuxième pilier de la prévention. En effet, les idées reçues concernant la psychiatrie ont des conséquences sur les patients, l’observance des traitements et l’accès aux soins. La diffusion d’informations de qualité auprès de la population est également entravée par cette stigmatisation ce qui constitue un frein au repérage précoce de signaux d’alerte et aux demandes de consultations. L’auto stigmatisation est la source de sentiment de honte, de mésestime de soi et de culpabilité à la fois chez le patient mais aussi chez son entourage (71).

Des programmes d’actions voient le jour portés par cette constatation et les recommandations internationales qui affichent comme un enjeu prioritaire la lutte contre la stigmatisation. Ils associent des campagnes de communications et des interventions de proximité. Time to change en est un exemple en Angleterre, qui a permis selon une étude de 2013 (72) de diminuer le niveau de discrimination déclaré par les patients suivi en psychiatrie de 11,5% en moyenne avec une amélioration dans les difficultés pour obtenir et conserver un emploi.

Ces programmes peu développés en France semblent être un atout majeur dans la prévention en matière de santé mentale et notamment dans le repérage et la prise en charge précoce de la schizophrénie.

11.3 La place du diagnostic

11.3.1 Pour le professionnel

Dans ce domaine d’intervention précoce, le clinicien ne pourra pas s’appuyer sur un diagnostic clairement établi, puisqu’il n’existe pas encore de diagnostic de syndrome de psychose atténué dans le DSM, et que même dans les cas de premier épisode psychotique l’évolution reste incertaine. Ce changement de paradigme oblige donc le clinicien à s’inscrire dans une démarche probabiliste à laquelle il n’est pas formé et qui peut le mettre en difficulté dans le contexte actuel où l’annonce diagnostique est importante (priorité de santé publique depuis les années 2000).

De plus, il est important de rappeler que les critères dits UHR ne peuvent être posés que par des praticiens formés, travaillant très souvent dans des structures de soins spécialisées ou dans un but de recherches.

11.3.2 Pour le patient et son entourage

Même si l’objectif du repérage précoce est d’améliorer le pronostic et la qualité de vie des patients par une prise en charge précoce, la question des conséquences de l’annonce du statut de risque de psychose sur lui et son entourage peut se poser.

L’annonce peut être vécue positivement, permettant une meilleure compréhension des troubles et une forme de reconnaissance de la souffrance favorisant le soutient que ce soit médical ou familial.

Toutefois il semble important de prendre en considération la détresse que peut générer une telle annonce sur un individu et le risque d’auto stigmatisation.

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