• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 : RECHERCHE EN MILIEU ECOLOGIQUE

1. L’Etude synchronique

1.1. Intégration socio-affective : le questionnaire sociométrique

Cet outil psychosociologique permet de faire émerger la cartographie socio-affective d’un groupe (Ancelin-Schützenberger, 1972 ; Parlebas, 1992, op. cit.). Il offre l’opportunité, comme le précise son fondateur J. L. Moreno, de « la mesure des relations inter-humaines » (1970, XLI). Le procédé est assez simple : on demande à chaque élève d’une classe de nous dire avec qui il souhaiterait être, mais aussi ne pas être, dans l’optique d’une situation d’intense communication affective future.

Une sortie scolaire prévue en toute fin d’année, où les deux groupes se retrouveront afin de participer à des Activités Physiques de Pleine Nature (APPN), facilite le travail du chercheur

et servira de critère d’appréciation. Ce critère nous laisse penser que nous obtiendrons des réponses d’une grande sincérité de la part des élèves.

Le questionnaire sociométrique proposé est constitué de 6 questions : deux questions d’ordre électif (choix et rejets) et deux d’ordre perceptif (choix et rejet) et deux questions concernant

le leadership (choix et rejet)33.

Précisons que certaines règles doivent être respectées lors de ce passage de questionnaire. Parlebas (1992,op.cit.) invite notamment l’utilisateur à respecter trois principes fondamentaux afin de garantir l’intérêt de l’outil : acquérir une connaissance approfondie du groupe et de son contexte (ce sont « nos » élèves et « nos » cours d’EPS), susciter une intense motivation chez les répondants (à l’aide du critère d’appréciation et de l’image qu’on a pu véhiculer) et mettre en confiance les acteurs en préservant la confidentialité des réponses. Lors de la passation, le sollicitant (chercheur ou enseignant) doit rester présent et séparer les élèves par un espace raisonnable. En outre, à la lumière des caractéristiques de nos élèves en situation de handicap, nous leur avons laissé un laps de temps plus important afin de remplir le document. Certaines précisions ont pu le cas échéant, leur être apportées.

Une fois les questionnaires remplis, les données recueillies pourront être réunies au sein d’un tableau sociométrique (Schéma 1, Annexes 1.1). Ce dernier offre la possibilité d’établir des scores rassemblant la somme des réponses des participants. Ces scores individuels et collectifs sont recueillis en extrémité de ligne (Scores d’émission) et en extrémité de colonne (scores de réception). Parlebas leur attribue une signification relationnelle constituant une manière de constater « certaines tendances que l’on retrouve régulièrement dans la plupart des groupes » (ibid., p. 81). Nous pourrons à la suite de ces résultats construire un sociogramme des choix et des rejets réciproques. Comme le précise Parlebas, ce sociogramme rend

33

1) Parmi vos camarades de classes, quels sont ceux avec lesquels vous aimeriez participer à des Activités Physiques de Pleine nature ? (choix) ; Essayer de deviner ceux qui vous ont choisi. Quels sont ceux qui, à votre avis, dans votre groupe, vous ont choisi à participer à ces Activités de Pleines Natures ? (Perception de choix) ; 3) Pour que votre équipe marche bien, il faut éviter que vous soyez avec des camarades que vous appréciez moins. Parmi les camarades de votre groupe, quels sont ceux avec lesquels vous ne souhaiteriez pas être ? (Rejets) ; 4) Essayer de deviner ceux de votre groupe qui ne voudraient pas que vous coopériez avec eux. A votre avis, quels sont les camarades qui ne souhaiteraient pas que vous coopériez avec eux ? (Perception de rejets) ; 5) Pour certaines activités, il faudra nommer des chefs, des responsables. Quels sont ceux de votre classe et de votre groupe que vous aimeriez avoir comme responsable, comme chef de groupe ? (choix de leader) ; 6) Pour que votre équipe marche bien, et pour que cela soit plus agréable pour vous, il vaut mieux que vous ayez un chef de groupe qui vous convienne. Parmi vos camarades, quels sont ceux que vous n’aimeriez pas avoir comme chef de groupe ? (rejet de leader).

Leadership Choix Attente de choix

Æ Æ ˪ − −

Rejet Attente de rejet Réciprocité Attente confirmée

Ë ± Ł − ═

Rejet du leader

Schéma 1 : Ensemble des symboles retenus caractérisant les données recueillies au sein du tableau

sociométrique 34. Les cellules sont divisées en cinq parties. Le coin en haut à gauche est réservé au choix affectif. Le coin en haut à droite à l’attente de choix. Le coin en bas à gauche est réservé au rejet tandis que dans le coin en bas à droite nous aurons l’attente de rejet. Le centre est réservé au leadership (le symbole est barré quand il y a rejet de celui-ci). De plus, la réciprocité dans un choix, un rejet ou une attente, le symbole sera en gras alors que pour la confirmation d’une attente, le symbole sera souligné.

34

Scores d’émission : Æ Somme des choix : expansivité d’amitié du sujet ; Æ Somme des attentes de choix : popularité perçue par le sujet ; ‒ Somme des rejets : expansivité d’antipathie du sujet ; ‒ Somme des attentes de rejets : impopularité perçue par le sujet ; Ë Somme des choix réciproques : nombre de choix réciproques impliquant le sujet ; − Somme des rejets réciproques : nombre de rejets réciproques impliquant le sujet ; Ë Somme des attentes de choix réciproques : nombre d’attentes de choix réciproques impliquant le sujet ; − Somme des attentes de rejets réciproques impliquant le sujet ; ± Somme des attentes de choix confirmés : nombre d’attente de choix exactes du sujet ; ═ Somme d’attentes de rejets confirmés : nombre d’attentes de rejets exactes du sujet ; ∟ Somme des choix de leader : expansivité de choix de leadership ; Ł: Somme des rejets de leader : expansivité de rejet de leadership. Scores de réception : Æ (choix) Popularité du sujet ; Æ(attente) Expansivité d’amitié du sujet perçue par les autres ; ‒ (rejet) Impopularité du sujet ; ‒ (attente) Antipathie du sujet perçue par les autres ; ± Exactitude des attentes de choix d’autrui à l’égard du sujet ; ═ Exactitude des attentes de rejet à l’égard d’autrui ; ˪ Statut de choix de leadership du sujet ; Ł: Statut de rejet de leadership du sujet. ADR MAR T O N ADR Æ Æ Ë ± MAR _ _ Ë TON Ë ± Ë

manifeste « l’ossature majeure du groupe. Il met à découvert la structure des liaisons à double sens qui, à ce titre, compte parmi les plus solides et les plussusceptibles de trouver un prolongement dans le comportement réel des personnes » (ibid, p. 106). Une fois ce sociogramme façonné pour notre classe, nous aurons des informations précieuses sur la constitution de sous-groupes et sur l’intégration sociale « virtuelle » de chacun de nos élèves au sein de la classe.

Il s’agira néanmoins d’aller plus loin en construisant un tableau des dyades (Annexes 1.2). Ce dernier va offrir l’opportunité de comparer les données issues de nos outils. Une dyade représente la synthèse, le condensé des relations entre deux personnes. Il va être possible, pour le traitement des résultats, d’affecter des valences positives au choix (+1) et à l’attente de choix (+1) mais aussi des valences négatives au rejet (-1) et à l’attente de rejet (-1).

Pour plus de clarté, nous illustrons nos propos au travers du tableau 2. Imaginons que Louis et Alban se choisissent mutuellement et qu’ils s’attendent de surcroît à être choisis l’un par l’autre. Dans ce cas, il n’y a pas de nuage dans la relation qui unit les deux acteurs. La valence de la dyade (Vd) est égale à +4 (+1+1+1+1). On peut parler, à la suite de Maisonneuve, de

« dyade harmonique parfaite » (1968). À l’opposé, si Alban et Louis s’étaient rejetés et s’attendaient à être rejetés de manière réciproque, la valence de la dyade aurait atteint son minimum, soit -4 (-1-1-1-1). Ainsi, la valence d’une dyade sera toujours encadrée par ses deux extrêmes : -4 < Vd < +4.

Le tableau des dyades présente un intérêt majeur, dans la mesure où il va aussi permettre de généraliser ce calcul au niveau intra-sous-groupal (cohésion socio-affective endogroupe) mais aussi inter-sous-groupal (cohésion socio-affective exogroupe). Dans cette optique, il suffira de calculer la somme de la valence des dyades d’un sous-groupe (ou entre deux sous-groupes) puis de la diviser par le nombre de dyades correspondantes.

Autrement dit, il s’agit de la moyenne des valences de l’ensemble des dyades considérées. In

fine, cet indice (α) s’étalera lui aussi entre + 4 et – 4. À + 4, la cohésion socio-affective au

sein du sous-groupe sera tout à fait harmonieuse tandis qu’à – 4, le climat y sera maussade. Dans un souci pédagogique, nous illustrons pour un sous-groupe fictif de 3 personnes le calcul de cet indice (Tableau 2).

Tableau 2 : Ce tableau des dyades permet de calculer l’indice de cohésion d’une dyade ainsi que les indices de

cohésion socio-affective (a) intra-sous-groupaux et inter-sous-groupaux. Pour la dyade Louis/Tristan, l’indice est nul (+1+1-1-1). Pour les indices intra-sous-groupaux et inter-sous-groupaux, on calculera la somme des valences des différentes dyades puis on la divisera par le nombre de dyades correspondantes. Pour notre sous- groupe Louis/Tristan/Alban, nous obtenons un indice de cohésion socio-affective de +1,67 (α = (0+4+1) / 3 = 1,67).

Le questionnaire sociométrique a été remis à nos élèves de sixième à la fin d’un de nos cours d’EPS hebdomadaire. Les élèves de l’IME avaient quitté le gymnase. La semaine suivante, c’était au tour des élèves de l’IME de le remplir, à la fin du cours, en l’absence des élèves de sixième. Différer la passation d’une semaine pour nos deux publics a été nécessaire dans la mesure où nous voulions être pleinement disponibles pour les élèves de l’IME, comme nous l’avons souligné précédemment.

Une fois les données du questionnaire recueillies et traitées, comment mettre en évidence, au sein du jeu sportif choisi, des indices comparables à ceux que nous venons de décrire ?