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b Contrôle de l’activité électrique

4. Insuline, métabolisme mitochondrial, et prise alimentaire

Récemment, il a été démontré dans l’hypothalamus que la régulation du métabolisme mitochondrial est un mécanisme indispensable aux effets des hormones anorexigène (leptine) et orexigène (ghréline). En effet, l’inhibition de la prise alimentaire induite par la leptine dépend de l’accumulation du taux cytosolique en acides gras via l’inhibition de leur entrée dans la mitochondrie (Gao et al. 2007). A l’inverse, la stimulation de la prise alimentaire induite par la ghréline dépend de la diminution du taux cytosolique en acides gras via la stimulation de leur entrée dans la mitochondrie (Andrews et al. 2008). Dans le cas de la ghréline, il a aussi été mis en évidence que la respiration mitochondriale est augmentée et que son action orexigène est dépendante de l’augmentation de l’activité de la protéine mitochondriale UCP2 (UnCoupling Protein 2) qui permet de diminuer la quantité d’EAOs générées par l’augmentation de la respiration. Ainsi, par leur action sur le métabolisme mitochondrial, les hormones (leptine et ghréline) peuvent réguler de manière appropriée l’homéostasie énergétique.

L’action de ces hormones est rendue possible grâce aux propriétés de l’AMPK (AMP- Activated Kinase) qui joue un rôle stratégique dans la régulation de l’homéostasie énergétique (Hardie 2003, Kahn et al. 2005). Cette enzyme est activée par l’AMP (Adénine Mono- Phosphate) par trois mécanismes qui sont inhibés par l’ATP. L’existence de cette triple régulation rend le système extrêmement sensible à la moindre variation du rapport AMP/ATP, et ainsi aux variations de la concentration en métabolites. Typiquement, l’activité cérébrale de l’AMPK est augmentée en condition de déficit énergétique, permettant ainsi d’augmenter les apports et de diminuer les dépenses d’énergie, et inversement en cas d’excès énergétique (FIGURE 15). Ainsi, le jeûne, l’hypoglycémie et la ghréline induisent son activation dans l’hypothalamus, et à l’inverse, l’hyperglycémie, les acides gras, la leptine et l’insuline diminuent son activité (Minokoshi et al. 2004, Kim et al. 2004a). De façon cohérente, l’activation directe de l’enzyme au niveau hypothalamique stimule la prise alimentaire (Andersson et al. 2004, Minokoshi et al. 2004) alors que son inhibition entraîne une hypophagie associée à une diminution du poids corporel (Minokoshi et al. 2004, Kim et al. 2004b). Au niveau intracellulaire, l’AMPK activée inhibe l’activité enzymatique de l’ACC (acetyl-CoA carboxylase) et donc consécutivement influence le métabolisme mitochondrial (cf III.2.c). C’est en modulant l’activité de l’AMPK, de manière opposée, que la leptine et la

ghréline exercent leurs effets opposés sur le métabolisme mitochondrial, et successivement sur la prise alimentaire (Benani et al. 2007, Andrews et al. 2008) (FIGURE 15).

La leptine est une hormone anorexigène dont les effets hypothalamiques sur la voie de signalisation de la PI3K, de l’AMPK, sur l’activité électrique neuronale, l’expression des gènes de NPY et POMC, la prise alimentaire et les dépenses énergétiques sont similaires à ceux de l’insuline (Plum et al. 2006a). Etant donné leur très forte synergie d’action dans l’hypothalamus, il est fortement probable que l’insuline module également le métabolisme mitochondrial. Renforçant ces présomptions, il est effectivement connu que l’insuline peut moduler le métabolisme mitochondrial. En effet, dans le SNC et les tissus périphériques sensibles à l’insuline, l’insuline stimule ou inhibe l’activité de la pyruvate déshydrogénase, en fonction de sa concentration (Rinaudo et al. 1986b, Rinaudo et al. 1986a, Kim et al. 2006b). Cette enzyme convertit le pyruvate issu du métabolisme du glucose en acétyl-CoA, au sein de la matrice mitochondriale. L’oxydation de ce dernier par le cycle de Krebs permet d’alimenter la chaîne respiratoire mitochondriale (CRM), productrice d’ATP et d’EAOs. De plus, dans les

FIGURE 15 : Représentation schématique potentielle du contrôle de la prise alimentaire via la modulation du métabolisme mitochondrial par les facteurs métaboliques et hormonaux. La prise alimentaire est inhibée par l’augmentation du taux cytosolique en acides gras (par la leptine) ou du taux d’EAOs (par les AGL), et stimulée par la diminution du taux cytosolique en acides gras et du taux d’EAOs (par la ghréline). Schéma modifié à partir de Lam et coll. (Lam et al. 2005b).

tissus périphériques, l’insuline stimule l’activité de la cytochrome c oxidase, une enzyme clé du fonctionnement de la CRM, et induit la transcription des gènes codant pour la cytochrome c oxydase et pour la NADH déshydrogénase, une autre enzyme clé de la CRM (Stump et al. 2003). De façon cohérente avec ces effets, l’insuline augmente la synthèse d’ATP. L’insuline peut aussi inhiber la respiration mitochondriale, ce qui permet de rediriger les flux métaboliques vers les voies de stockage d’énergie, notamment vers la synthèse de glycogène (Finocchietto et al. 2008). Cet effet s’accompagne d’une production d’EAOs mitochondriales. Les auteurs proposent que ces effets opposés de l’insuline sur le métabolisme mitochondrial dans les tissus périphériques soient liés aux besoins énergétiques de l’organisme. Ainsi, lorsque les apports sont insuffisants, l’insuline favoriserait l’oxydation cellulaire du glucose, tandis que lorsqu’ils sont suffisants, l’insuline favoriserait préférentiellement la mise en réserve de l’énergie.

Par conséquent, l’insuline, comme la leptine ou la ghréline, est fortement susceptible de réguler l’homéostasie énergétique via le taux cytosolique en acides gras et/ou le ratio ADP/ATP et/ou le taux d’EAOs, dérivés de la modulation du métabolisme mitochondrial. Nous avons vu que le canal KATP est considéré comme un véritable « senseur métabolique » en raison de la régulation de son activité par trois éléments en lien étroit avec le fonctionnement mitochondrial : le taux cytosolique en acides gras, le ratio ADP/ATP, et le taux d’EAOs (cf III.A.1.d). Les voies de signalisation des principaux facteurs métaboliques (glucose, acides gras) et hormonaux (insuline et leptine) impliqués dans cette régulation convergeraient vers cette même protéine. En effet, les KATP sont impliqués dans la réponse électrique des neurones sensibles au glucose et/ou à l’insuline, dans les effets de l’insuline sur la production hépatique de glucose, et leur implication a été envisagée dans la sensibilité aux acides gras (cf III.A.1.d ; III.A.2.c ; III.B.3.b). De plus, ils interviennent dans la réponse électrique des neurones sensibles à la leptine (Spanswick et al. 1997). Ainsi, les canaux KATP représentent un maillon fondamental de la régulation hypothalamique de l’homéostasie énergétique (Plum et al. 2006a). Par leur action opposée sur le métabolisme mitochondrial, les hormones (insuline, leptine et ghréline) pourraient moduler de manière opposée l’activité des KATP, permettant ainsi une régulation appropriée de l’homéostasie énergétique en fonction du contexte métabolique (déficit ou excès énergétique).

Depuis quelques années, le rôle crucial du métabolisme mitochondrial, et plus particulièrement des EAOs dans le contrôle nerveux de la balance énergétique et dans la

signalisation périphérique et centrale de l’insuline commence à émerger. Cependant, leur implication dans l’effet anorexigène de l’insuline restait à déterminer. Ainsi, notre travail expérimental de thèse a essentiellement porté sur le rôle des EAOs, notamment celles dérivées des activités de la NADPH oxydase (NOX) et de la chaîne respiratoire mitochondriale (CRM) dans le contrôle hypothalamique de la prise alimentaire assuré par l’insuline. Dans la suite de cette introduction bibliographique, nous allons faire un point rapide sur les EAOs, leur production et leur métabolisme, avant de décrire les arguments en faveur de leur implication dans les cascades de transduction de l’insuline.

IV.

LES

EAOs :

SECONDS

MESSAGERS

DE

LA

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