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Instrumentation des ouvrages

Partie 2 : Présentation des travaux de recherche

4. Comportement des ouvrages

4.2. Instrumentation des ouvrages

La connaissance réelle de la réponse du massif à une sollicitation naturelle ou anthropique est une des clefs de voûte de notre travail. En effet, de nombreuses hypothèses peuvent être proposées en laboratoire, avec des logiciels, des lois de comportement ou des expérimentations très sophistiquées, si elles ne sont pas comparées concrètement à des mesures de terrain, elles restent hypothétiques. Ces enregistrements sur le terrain sont néanmoins souvent très difficiles à obtenir, souvent à cause des coûts engendrés.

L’instrumentation in situ d’ouvrages au rocher peut être relativement différente de ce qui se fait dans les sols. De par la structure discontinue du massif, les déplacements sont en général relativement faibles (sauf en cas d’instabilité marquée) et localisées à des endroits critiques (souvent les discontinuités). L’instrumentation choisie doit être adaptée à la géologie

et la morphologie du site, aux enjeux rencontrés et mise en regard avec les moyens financiers disponibles. Les mêmes propositions ne seront évidemment pas faites s’il s’agit d’une instabilité de falaise marquée ou bien si l’on se place dans un site « laboratoire » destiné à mieux comprendre les phénomènes étudiés.

J’ai été ainsi confrontée à ces différents cas : sur des sollicitations opérationnelles j’ai participé aux choix d’instrumentation à mettre en place sur des instabilités avérées. Dans le cas des mouvements de versants au niveau du Pallat (RN116, voir précision sur le site en annexe), par exemple, il a été procédé à la mise en place et au suivi d’une quarantaine de cibles disposées sur l’ensemble de la zone (Figure 46). Les cibles sont des prismes optiques placés sur des barres d’acier de 28 mm foncées dans les sols de surface ou scellées dans la roche sur une hauteur de 1,50 m. Ces cibles sont suivies par un tachéomètre de précision pour obtenir une précision infra-centimétrique dans les 3 directions de l’espace.

Figure 46 : Implantations GPS des désordres et des cibles sur le MNT du versant

D’un point de vue « connaissance du comportement du massif », plusieurs pistes ont également été explorées : en 2006 puis 2007 j’ai été à l’instigation de la réponse à deux appels à projet de l’ANR. Le but de la recherche envisagée était de profiter du chantier d’Ax-les-Thermes, où plusieurs talus de plus de 600 m de long et jusqu’à 48m de haut allaient être creusés. Nous souhaitions ainsi développer notre connaissance selon quatre axes :

1. Acquisition et traitement des informations géométriques sur le site : la connaissance du terrain consécutive à l’étude de tracé devait être complétée par une approche beaucoup plus exhaustive du site permettant de collecter des informations en trois dimensions du massif d’étude. Différents niveaux de complexité du massif devaient être pris en compte comme « données d’entrées » aux modèles numériques et comme indicateurs de l’état du talus.

2. Caractérisation mécanique du massif rocheux : différents essais de laboratoire allant de la simple reconnaissance mécanique classique (compression simple) à une caractérisation beaucoup plus fine (mise au point d’une loi de comportement des discontinuités rocheuses en rapport avec leur rugosité) est envisagée. Cette partie devait être complétée par le recueil et l’analyse des mesures in-situ.

3. Modélisation numérique du massif : elle devait comporter une étape de modélisation géométrique à l’aide de différents géomodeleurs et une étape de modélisation

mécanique à différents niveaux, du plus simple (dimensionnement du soutènement suivant les différentes recommandations classiquement utilisées au plus complexe (analyse dynamique en milieu discret) en passant par l’étude de la comparaison de modèles 2D et 3D en milieux continus ou discontinus.

4. Suivi de chantier en vue d’identifier de façon systématique et permanente les facteurs de risque source de danger immédiat ou lointain : la méthode « observationnelle » est au cœur de notre démarche, nous l’associons systématiquement aux avis d’experts que nous essayons d’étayer par l’obtention de données quantifiables. Une base de données géoréférencées était prévue.

Les projets comprenaient plusieurs partenaires universitaires et du monde de l’entreprise. J’en ai assuré la coordination et le portage. Des modèles numériques ont été réalisés en vue du pré dimensionnement de l’instrumentation (rapport de recherche n°16-75-009-2006 / 16-009 / 01). Malheureusement ces projets n’ont pas été retenus, et compte tenu des impératifs de chantier, nous avons fait le choix de ne pas les représenter en 2008.

En suivant une idée similaire, c’est à dire profiter d’un grand chantier pour parfaire notre connaissance du massif rocheux, je suis en train de monter un projet de recherche avec l’Inéris et la DREAL Midi-Pyrénées. Le but du travail engagé est de suivre le creusement du tunnel de St Béat, en milieu rocheux et fracturé, par une méthode de surveillance géophysique innovante basée sur le traitement du bruit sismique et connue sous la dénomination d’« interférométrie du champ diffus ». Ce projet est actuellement encore en cours de discussion pour les aspects liés au financement des forages nécessaires à la mise en place des capteurs. Je le détaille plus longuement dans les perspectives ( 6).

Enfin, dans le cadre de l’opération de recherche « Maîtrise des risques de mouvements de terrain en zone urbaine ou sensible » j’ai initié un travail de recensement des zones rocheuses « actives » pour comparer les modes de suivi de ces zones tels qu’ils sont actuellement pratiqués dans le réseau des Laboratoires Régionaux. Je réalise ce travail afin de sensibiliser les acteurs du réseau aux particularités liées aux mouvements rocheux et d’essayer d’uniformiser si possible les pratiques. Cet aspect est un travail à moyen voire long terme, mais il est important de ne pas perdre la connaissance acquise lors du renouvellement des générations, voire lors du changement des compétences provoquées par la réforme de l’état.