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LES INSTITUTIONS ET LES ACTEURS DU TOURISME AU KIRGHIZSTAN

Le tourisme au Kirghizstan s’est largement développé à l’époque soviétique. Le pays disposait d’une infrastructure touristique solide et constituait un lieu de vacances bien connu dans l’ensemble de l’Union soviétique. Le pic de fréquentation a eu lieu en 1989 : le nombre de touristes a alors approché les deux millions (en comptant les excursionnistes, les participants à des compétitions sportives ainsi que les touristes intérieurs kirghizes)125. L’offre touristique était articulée autour de 190 centres balnéaires, huit bases d’alpinisme et plus de 10 colonies de vacances.

Il est bien évident que l’histoire soviétique du Kirghizstan a joué un rôle important dans la construction et la popularisation du tourisme actuel. Si à cette époque, il s’agissait principalement du tourisme de masse, il nous incombe de parler également d’autres types de tourisme qui peuvent avoir, sur plusieurs aspects, des effets plus avantageux. Actuellement, la promotion du tourisme effectuée par les organismes publics reste orientée plutôt vers le tourisme de masse. Malheureusement, l’État ne voit qu’un seul type de tourisme au Kirghizstan – c’est le tourisme au lac Issyk-Koul, qui a toutes les caractéristiques du tourisme de masse. Le tourisme d’aventure et les circuits touristiques, notamment « La route de la soie » ne font que subsister grâce à la présence sur le marché d’une dizaine de firmes qui sont les principaux vendeurs de produits touristiques de montagne et d’aventure. D’après notre enquête de terrain de l’été 2010, 12 firmes touristiques sur 75 proposent des itinéraires sur la route de la soie, et seulement 7 firmes sur 75 proposent aux clients les produits du tourisme

d’aventure et des sports extrêmes126. Chaque année, plusieurs sociétés se créent et

125 L’excursion (selon le Grand vocabulaire soviétique, 1978, T. 29, p. 63) est une visite des objets remarquables (patrimoine culturel, musée, entreprise, lieu, terrain, etc.) et une forme d’acquisition de connaissance, menée en règle générale sous la direction d’un guide collectif. Nous pouvons remarquer qu’il y a un volet éducatif (acquisition de connaissance) sur un endroit inconnu présenté par le guide via des explications et descriptions.

disparaissent à cause de l’instabilité du marché et de la forte concurrence127. L’État est pratiquement absent sur le marché du tourisme culturel et d’aventure. Il ne fait aucune promotion à l’étranger. Le ministère du Tourisme avait été supprimé suite aux critiques acerbes des média concernant ses activités (et plus particulièrement les dépenses inutiles consacrée à la création de l’image du « Père Noël est originaire du Kirghizstan », cf. §2.2) et aussi dans l’objectif d’économiser sur le budget de l’État. Ainsi, l’objet de notre travail est de mettre en évidence le caractère essentiel de la présence de l’État dans la régulation du secteur touristique. Une nouvelle institution touristique est nécessaire ; un département du tourisme constitué de 6 personnes avec un budget équivalent à celui de l’office de tourisme d’Autrans, ne peut être en capacité de contribuer efficacement et fondamentalement à la restructuration du secteur touristique.128

§1. Caractéristiques du tourisme kirghize sous le régime soviétique

Le développement touristique dans les pays en transition est différent de celui des pays en voie de développement, où le tourisme interne était un secteur inconnu. Le Kirghizstan, appelé République soviétique sociale kirghize, avait un modèle touristique soviétique. Ce modèle caractérise encore aujourd’hui le tourisme kirghize. En 2013, le secteur du tourisme occupait environ 4,5% du PIB du pays, avec plus d’un million de touristes ; ceci est dû principalement à son pré-positionnement soviétique.

§1.1. Le tourisme dans le système socialiste

L’économie socialiste était caractérisée par la domination absolue de la propriété collective, la gestion centralisée (formellement planifiée par l’État) dans un système autarcique. La production était concentrée au sein de grandes entreprises avec des technologies anciennes et des équipements usés ; le crédit commercial et les investissements étaient interdits. L’État organisait toutes les activités de production, d’éducation, de soins, jusqu’à l’organisation de la culture et des loisirs, pour répondre aux besoins globaux des citoyens. Il s’occupait du temps de repos hors travail tout comme du temps de travail.

127 Parmi plus de 2 200 agences touristiques, plus de la moitié déclare un revenu négatif auprès des organismes fiscaux (le service fiscal de la République kirghize) ; chaque année, entre 70 et 100 firmes sollicitent la liquidation et plus de 200 sociétés se créent dans le domaine touristique.

Le tourisme dans une économie socialiste avait une place importante. Il répondait à la doctrine centrale des « communistes » retenue des travaux de K. Marx : la satisfaction des besoins en repos, en temps libre de la société pour la reproduction de la main-d’œuvre et l’amélioration de la productivité. Le tourisme de santé et le tourisme sportif étaient les principales orientations du tourisme soviétique. Ils s’inscrivaient pleinement dans les directives de l’État : il s’agissait d’un tourisme « social » assurant le repos et la satisfaction des besoins des travailleurs, les loisirs des étudiants et l’éducation des écoliers par le voyage. Le tourisme n’avait pas de dimension marchande.

Le modèle socialiste distinguait trois types de clientèle touristique (Bensahel et Samson, 1999) :

- Le tourisme officiel interne (national), fortement développé et basé sur le tourisme de santé.

Ce type de tourisme était prioritaire et entrait dans les compétences de l’État qui équipait en centres de repos et stations balnéaires des destinations adaptées au tourisme de masse (la mer Noire, le lac Issyk-Koul). L’Union soviétique à elle seule pouvait cumuler un nombre important et suffisant de touristes pour remplir les gigantesques structures mises en place.

- Le tourisme informel, appelé « dikii » (sauvage) concerne principalement les touristes

intérieurs. Il est peu structuré et basé sur les intérêts individuels des touristes qui organisaient eux-mêmes leurs voyages (environ 40 millions de voyageurs) (Radvanyi et Thorez, 1976). Ce type de tourisme est apparu en réponse à l’insuffisance de l’offre d’une part, mais aussi en raison du décalage progressif entre l’offre et la demande. Les places dans les centres touristiques étaient limitées et distribuées par l’État. Par exemple, en 1989, seulement un tiers de la demande était satisfait par l’offre en URSS (Tatarinov, 1999). Ainsi, sans le contrôle de l’État, presque tout le monde pouvait se permettre d’acheter un bon de voyage, car la croissance du salaire était plus rapide que le prix des bons de voyage. Par exemple, dans les années 1980, les prix des cures d’une semaine dans un établissement de repos correspondaient environ au salaire moyen mensuel, et le plus souvent, une partie du prix du bon de séjour était payée par l’État.

Le tourisme informel a développé de nouveaux types de tourisme, et celui-ci s’est diversifié. Les amateurs d’alpinisme, d’escalade, de trekking, de découverte se sont multipliés et le

camping a commencé à se développer. Les touristes ont commencé à explorer, individuellement ou en groupe, des zones peu connues mais remarquables par leurs atouts naturels. De cette façon, certaines zones ont commencé à gagner en popularité via le « bouche-à-oreille » et les clubs d’amateurs se sont multipliés. Par exemple, le Kirghizstan était l’un des endroits préférés des alpinistes pour toute l’Union soviétique.

- Le tourisme international, faiblement développé et contrôlé par l’État. Le nombre de lits

pour les étrangers (hors URSS) était limité à 100 000 places par an. Pour tout ce qui concernait l’accueil et l’hébergement des touristes étrangers, l’organisation « Intourist » gardait le monopole. Le nombre de touristes internationaux était très marginal en raison de la condition géopolitique de cette époque.

§1.2. Les destinations touristiques de l’URSS

L’URSS développait en majeure partie le tourisme de santé ; successivement, quelques grandes régions spécialisées et dédiées au tourisme se sont formées. Ces régions ont été repérées pour leurs caractéristiques environnementales et climatiques129 qui favorisaient l’amélioration de la santé et du bien-être des touristes. Ces régions étaient généralement bien dotées par l’État (subventions du comité central des syndicats, du parti communiste de l’Union soviétique, du parti communiste de la jeunesse, dit le Komsomol, du budget de l’État, etc.) en matière d’infrastructures d’accueil, de loisirs et de communication. Le revenu de ces régions était essentiellement basé sur le paiement des services touristiques et sur les dotations. L’État planifiait le développement de ces régions, les volumes et la structure des investissements. En conséquence, la croissance du tourisme officiel était limitée par les dotations. Il existait par ailleurs des ressources humaines formées (capital humain) et une culture du tourisme pour les habitants de ces pays (régions). Le territoire du Kirghizstan, grâce à la particularité de sa nature et à la beauté de ses paysages, comptait plusieurs destinations touristiques. Pour cette raison, le Kirghizstan a hérité principalement d’une grande infrastructure de tourisme balnéaire (cf. Annexe n°11, villes de Cholpon-Ata, Bosteri et autres), qui forme encore actuellement une base importante de tourisme de masse. En 1970 et 1980, 27 zones de repos ont été aménagées avec des infrastructures touristiques (Lunkin et Lunkina, 1987, cité par Schmidt, 2011).

(www.budget.okmot.kg).

§1.3. L’organisation du tourisme en URSS

Le modèle économique du tourisme soviétique intérieur disposait de plusieurs produits touristiques qui généralement étaient très homogènes. Les vacanciers obtenaient un poutiovka,

ou un bon de voyage, qui leur permettait de séjourner et/ou de profiter d’autres offres touristiques (excursions, soins, activités sportives, etc.) dans les régions concernées. Ces bons de voyage étaient distribués par des organismes publics comme le « Soviet du Tourisme », ou auprès des organisations syndicales locales qui prenaient en charge une partie du prix. Ainsi, chaque année, environ 100 millions de personnes bénéficiaient de ces poutiovka. Ils étaient répartis entre les différentes entreprises en fonction de la demande de l’année précédente (Radvanyi J. et Thorez P., 1976). Une petite partie seulement des poutiovka était mise en vente par des agences, qui contournaient ainsi le système en place ; évidemment, dans ce cas, le touriste payait la totalité du prix du bon de voyage.

Grace aux avantages sociaux, le coût du tourisme représentait seulement 3% des dépenses de la population soviétique (Radvanyi J. et Thorez P., 1976). Pour les écoliers, il existait plusieurs « camps de pionniers » (colonies de vacances). Les stations thermales (sanatoriums) étaient considérées comme des centres de repos et des centres de traitement en même temps (cf. Annexe n°1). En résumé, le tourisme soviétique était caractérisé par la faible dépendance entre l’offre et la demande, la forte présence des dotations de l’État, la faible spécialisation des entreprises, l’orientation générale du tourisme vers les employés et les touristes intérieurs. En 1989, année de l’essor du tourisme soviétique au Kirghizstan, les produits touristiques suivants étaient disponibles :

‐ Le traitement médical et récréatif, le repos, la remise en forme, la dotation de

l’industrie du tourisme, le bon de séjour.

‐ Le tourisme littoral avec pension complète et le tourisme intérieur « organisé », repos mer/montagne, hôtels spécialisés, bases touristiques.

‐ Le tourisme de montagne avec trekking, alpinisme organisé, excursions, itinéraires sportifs et touristiques.

§2. La transition vers l’économie de marché : opportunités et contraintes

La transition vers l’économie de marché faut synonyme d’opportunités à saisir mais aussi de contraintes à prendre en compte dans le nouveau processus de développement qui s’ouvrait

aisée mais stabiliser la machine une fois lancée était de toute évidence un exercice délicat. La stabilisation de la transition est un double processus (Samson, 2005) :

- de mise en cohérence de l’ensemble des dynamiques économiques, institutionnelles et politiques ;

- d'accumulation des trois biens systémiques issus de ces dynamiques : le profit comme

résultat des dynamiques économiques, l'information comme résultat des dynamiques

institutionnelles et la légitimité des hommes politiques et du pouvoir comme résultat de la démocratisation. L’absence ou le mauvais fonctionnement de ces dynamiques créent des contraintes et instabilités dans la transition.

§2.1. Les dynamiques économiques

Après la rupture des liaisons et la chute de la production dans les pays en transition, la fonction des dynamiques économiques était de libérer l'initiative privée pour pouvoir entreprendre et mettre en route un cercle vertueux économique : profit-investissement-emploi-productivité-revenu-épargne-demande-profit. L’une des premières étapes fut la libéralisation économique. Le premier président de la République kirghize, A. Akaev, a mis en place plusieurs réformes de protection et d’amélioration des initiatives privées pour développer la création des petites et moyennes entreprises (PME). L’une des conditions nécessaires à une dynamique économique favorable est la baisse des taux d’inflation et des taux d’intérêt, afin de rendre possibles les anticipations sur les investissements. Pour actionner le marché, à cette étape, le rôle des institutions est indispensable.

Le marché n’est pas accepté facilement au Kirghizstan. Chaque pays de CEI avait des difficultés différentes pour démarrer le nouveau système de fonctionnement économique en raison d’« un décalage entre les exigences des dynamiques économiques et les systèmes de normes et de valeurs de la société » (Samson, 2005), avec la présence du « marché noir », « le marché établi par la loi mais rejeté par la société ». Dans ce contexte de non-convergence avec les contraintes culturelles, la libéralisation peut conduire à l’hyperinflation et à l’instabilité économique. Au Kirghizstan, la mauvaise politique fiscale de l’État, liée à la hausse des taux d’intérêts et des taux de fiscalité, a contribué à freiner l’instauration d’un marché sain et, encore de nos jours, l’économie informelle représente 40% à 60% du PIB130.

Au Kirghizstan, les cercles vertueux ne semblent pas avoir démarré facilement ; la récession économique a perduré jusqu’en 1996 (avec en moyenne 13% de baisse du PIB par an)131, et en 1998, la crise en Russie a également touché l’économie kirghize. Dès lors, l’insatisfaction croissante de la population vis-à-vis de la baisse du niveau de vie et l’enrichissement de certaines catégories de personnes, avec leurs apparitions incessantes sur la scène politique, ont conduit au déclenchement de deux révolutions (en 2005 et en 2010) qui se sont soldées par la fuite des deux premiers présidents. Pourtant, le rôle des responsables politiques est important, car ce sont eux qui doivent « identifier les seuils sociétaux qui séparent les réactions positives et les apprentissages cumulatifs des agents économiques, et les comportements de rejet ou déviants » (Samson, 2005). Mais, les responsables politiques kirghizes sont les premiers à adopter un comportement de rejet des normes législatives, et tous les agents économiques, dans la foulée, vont participer à la croissance du marché noir.

§2.2. Les dynamiques institutionnelles

D’après l’analyse de North (cf. Partie I, chapitre 1), les institutions sont les « règles du jeu » du marché dans une société. Elles réduisent les incertitudes sur le comportement des agents économiques. La « confiance » entre les agents est un « lubrifiant » dans leurs relations et donc la condition primordiale pour les dynamiques économiques.

L’État est un acteur majeur dans la mise en place et la protection des règles du jeu du marché, c’est-à-dire que son rôle n’est pas l’intervention absolue dans les mécanismes du marché mais seulement la bonne surveillance de son fonctionnement. Dans plusieurs ouvrages, la faiblesse des institutions dans les pays de la CEI est remarquée, et le Kirghizstan n’est pas une exception. La faiblesse de l’État et des institutions augmente l’incertitude et les coûts de transactions132 ; la confiance est en baisse, le droit de propriété est très peu protégé, ce qui explique la chute de la production et la récession pendant les cinq premières années du capitalisme au Kirghizstan. Des institutions « bienfaisantes » doivent garantir le respect des droits de propriété pour inciter les individus à investir et à participer à la vie économique, limitant l'action des « puissants » qui peuvent s’approprier les revenus ou les investissements d'autrui ou encore fausser les règles du jeu. Ces institutions doivent aussi lutter contre les

tendances autodestructrices du marché (concentration et monopoles, comportements prédateurs et criminels), et permettre le bon déroulement de ses fonctions. La sphère monétaire et financière dépend aussi de la force des institutions et de l’État, qui doit contrôler le système bancaire.

En conséquence, la condition indispensable à la réussite d’une bonne transition est un État avec une autorité forte et une légitimité politique pour garantir la stabilité, mettre en œuvre de nouvelles formes institutionnelles et cadrer les agents économiques. Malheureusement, en réalité, l’État était très faible au Kirghizstan, subissant constamment la pression de groupes d’intérêts et la corruption. « Ces prescriptions viennent de haut mais le haut était faible » (Samson, 2005). L’État ne pouvait pas effectuer son nouveau rôle et accompagner la transformation économique pour installer l’économie de marché. De plus, l’économie de marché est théoriquement de nature décentralisée et privée, mais dans le processus de transformation du Kirghizstan, les comportements opportunistes se sont accrus pour profiter d’une législation avantageuse, pour implanter des structures monopolistiques, pour acheter des postes de dirigeants étatiques, etc.

§2.3. Les dynamiques politiques

Il existe un lien entre performance du marché, amélioration des résultats économiques et renforcement de l’autorité du gouvernement. Inversement, la baisse des activités économiques et l’inefficacité du marché augmente la difficulté de la transition et conduisent à une perte de légitimité du gouvernement. Lorsqu’une large catégorie de la population ne perçoit pas l’amélioration du niveau de vie qui doit découler de leurs efforts, la stabilité politique est compromise. Or, la stabilité politique est l’une des conditions les plus importantes du développement économique. Les dynamiques politiques permettent au « système politique de représenter les différents intérêts économiques dans la société et d’assurer l’expression des vœux et des préférences des citoyens ».

Il y a deux types de légitimité des pouvoirs politiques : la légitimité démocratique, c’est-à-dire la confiance des citoyens dans les nouvelles règles du jeu politique et l'ordre constitutionnel démocratique ; et la légitimité politique, à savoir la confiance des citoyens dans les forces politiques à la tête de l'État dans le cadre des institutions. Pour la mise en place des dynamiques économiques efficaces, le renforcement des légitimités démocratiques et

politiques est nécessaire. La liberté d’expression et de la presse, qui facilite l’activité politique et y participe, est une composante essentielle de la légitimité démocratique.

La transition économique s’accompagne d’une autre transition : de l’autoritarisme à la démocratie. Dans ce processus, l’expérience démocratique et culturelle pré-communiste du pays est importante. Une autre contrainte dans ce processus de transition est le résultat de la lutte entre des groupes conservateurs attachés au passé et ceux qui mènent la politique économique depuis le changement vers la démocratisation.

§2.4.La transition économique du Kirghizstan

Le Kirghizstan a opté pour la « thérapie de choc » dans son processus de transition avec une privatisation massive, bien que pas tout à fait complète. Comme en Russie, certaines réformes se sont réalisées par étapes et se sont poursuivies jusqu’en 1997. Et, comme dans la plupart des autres nouveaux États indépendants (NEI)133, la transition a été plus subie que souhaitée par la population. Le jeune État kirghize était trop faible pour appliquer les nouvelles règles du jeu. Les habitudes de recevoir des ordres et d’être sous l’emprise de Moscou n’aidaient pas à la gestion de nouvelles autorités indépendantes. C’était en quelque sorte une « jungle » ; les groupements d’entreprises et de personnes, issus de l’ancien système, ont réussi à reprendre les usines et entreprises les plus lucratives et la plupart des ressources productives, en particulier le secteur des matières premières. Ensuite, ces « prédateurs »134, très bien placés dès le début, ont commencé à s’intégrer au pouvoir politique par des moyens corruptifs. Une fois dans la place, ils ont continué à poursuivre leurs objectifs individuels (protection de leur propre business, promotion, recherche de profit).

La crise de la transition a eu des répercussions sur les plans économique, politique et social aux niveaux national et territorial. Le Kirghizstan, comme les autres pays d’Asie centrale

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