Nous avons vu comment rendre une instance métrique en augmentant les
dis-tances. On étudie maintenant l’évolution de la métricité lorsque l’on diminue les
distances. Les instances réduites sont telles que la somme des offsets appliqués à
l’instance initiale est la plus grande possible. Or cette somme est toujours positive.
Les instances métriques n’ont donc aucune garantie de rester métrique après
réduc-tion. Malgré cela, existe-t-il des instances réduites qui sont métriques et si oui, quelle
est leur forme ?
Nous utiliserons les notations suivantes. Soient I = (V, E) un graphe complet
non orienté avec des coûts positifsc
esur les arêtes,
E
0={e∈E |c
e= 0} et I
0= (V, E
0),
E
∗={e∈E |c
e>0} et I
∗= (V, E
∗).
On remarque queI
0et I
∗sont complémentaires.
Théorème 4.7 L’instance I est réduite et métrique si et seulement si toutes les
propositions suivantes sont vraies.
1. I
0est une union de cliques disjointes de taille au moins deux,
2. les arêtes incidentes à deux mêmes cliques de I
0ont le même coût,
3. l’inégalité triangulaire est respectée pour tout triplet de sommets pris dans trois
cliques distinctes de I
0.
Preuve : Nous allons faire la démonstration en cinq étapes : d’abord montrer que
les arêtes de coût nul couvrent les sommets de l’instance réduite par des sous-cliques
disjointes de taille au moins deux, puis que les arêtes restantes, celles de coût non
nul, forment une seule composante connexe, qu’elles ont le même coût entre deux
mêmes parties et que l’inégalité triangulaire est respectée entre plusieurs parties, et
enfin l’équivalence.
D’après la propriété 4.3, tous les sommets deI sont incidents à une arête de coût
nul, donc I
0est le graphe induit par E
0. De plus, d’après l’inégalité triangulaire,
si deux arêtes d’un triangle sont de coût nul, la troisième l’est aussi. Ainsi tout
sous-ensemble de sommets connexe dans I
0forme une clique. On en déduit queE
0CHAPITRE 4. MODIFICATION D’INSTANCES
Figure 4.6: Caractérisation d’une instance réduite métrique. Les cercles
représen-tant des cliques de coût nul partitionnent les sommets du graphe. Toutes les arêtes
entre deux cliques, représentées par une arête en pointillé, sont de même coût. Le
graphe formé par les cercles et les arêtes en pointillé est métrique.
Le résultat précédent implique que le graphe I
∗, restreint aux arêtes de coût
non nul, est connexe ou sans arêtes. En effet, s’il n’est pas connexe, alors le graphe
complémentaire, qui est I
0, contient une coupe du graphe complet I, c’est-à-dire
toutes les arêtes entre deux ensembles partitionnant les sommets. Ceci représente
un ensemble connexe contenant tous les sommets deI. Or toute composante connexe
deI
0est une clique. Dans ce cas,I
0est alors tout le graphe I etI
∗n’a pas d’arêtes.
D’après la propriété 4.3, toute arête de coût non nul est adjacente à au moins
une arête de coût nul. Or, d’après l’inégalité triangulaire, dans un triangle, si une
arête a un coût nul, le coût des deux autres arêtes est égal. Ainsi, toutes les arêtes
entre deux parties ont le même coût. De proche en proche, entre deux sous-cliques
de coût nul, les arêtes ont le même coût non nul, qu’on notec
ijentre les sous-cliques
i et j (point 2).
Par ailleurs, s’il y a au moins trois sous-cliques de coût nul, il apparaît des
triangles sans arêtes de coût nul, lorsqu’on prend chaque sommet dans une clique
disjointe. Dans ce cas-là, il faut que l’inégalité triangulaire y soit respectée (point 3).
Pour prouver l’équivalence, il faut montrer que la caractérisation donnée est une
instance métrique réduite. Il y a deux types de coûts d’arêtes : 0 et c
ijstrictement
positif. Avec ces coûts, deux configurations violent l’inégalité triangulaire. Soit le
triangle a une arête de coût positif et deux de coût nul. Or cette configuration est
proscrite, car les arêtes de coût nul forment des sous-cliques disjointes et donc tout
triangle dont deux arêtes ont un coût nul appartient à une telle clique. Soit il existe
un triangle sans arêtes de coût nul tel que c
ij+c
jk< c
ik, qui n’est possible qu’entre
des sommets appartenant à des cliques disjointes. Or l’inégalité triangulaire est bien
respectée entre les parties, ce qui rend aussi cette configuration impossible.
Enfin, pour vérifier que la caractérisation représente une instance réduite, on
montre que la valeur de la solution de son problème de réduction d’instances associé
5. ÉTUDES EXPÉRIMENTALES
est nulle. Tout sommet appartient à une unique clique. Or, quand on additionne les
contraintes du programme linéaire (4.4) associées aux arêtes d’une clique de coût
nul, on obtient que la somme des offsets sur la clique est nulle. En considérant toutes
les cliques disjointes et de taille au moins deux, couvrant les sommets du graphe, on
en déduit que la solution optimale est de coût nul.
Ce théorème est une caractérisation des instances réduites métriques, schématisée
par la figure 4.6. Cette description donne une méthode pour diminuer la taille de
l’instance lorsqu’on cherche à la résoudre. En effet, on peut décomposer le tour
optimale. Celui-ci est composé de chemins hamiltoniens dans chaque composante
connexe du sous-graphe I
0restreint aux arêtes de coût nul, qui sont des cliques
disjointes couvrant le graphe. Ces chemins sont ensuite reliés entre eux chacun par
une arête de I
∗. Cela revient à trouver un cycle hamiltonien dans le graphe obtenu
par contraction des composantes connexes de I
0, qui est une clique dont la taille
correspond au nombre de composantes connexes deI
0et les coûts sur les arêtes sont
non nuls de coûtc
ijentre les sommets représentant les contractions des sous-cliques
de coût nulietj. La taille de la nouvelle instance ainsi obtenue est au moins divisée
par deux. Toutefois il n’y a aucune garantie de pouvoir itérer le processus, car la
réduction d’une instance métrique ne reste pas forcément métrique.
Si l’on souhaite rester sur l’ensemble des instances métriques, on peut poser le
problème de réduction d’instances sous contrainte de rester métrique. Il en découle
également une nouvelle mesure de performance stable en évaluant les algorithmes
sur ces instances réduites. On suppose qu’une caractérisation des telles instances
pourrait être développée en s’appuyant sur les travaux déjà fait pour la réduction
non métrique. Ces travaux pourrait avoir des répercussion dans l’étude de
l’approxi-mation du TSP métrique, pour lequel est conjecturé l’existence d’un algorithme de
facteur
43
, en donnant des instances où la mesure de performance est maximum.
5 Études expérimentales
Ces travaux évaluent l’impact de la réduction d’instances pour des études
expéri-mentales. Nous mesurons les variations de performances des méthodes de résolution
entre les instances réduites et initiales. Nous commençons par étudier un algorithme
de recherche locale, invariant par modification par offset, pour mesurer l’écart avec
les mesures habituelles. Puis nous appliquons l’étude à des méthodes gloutonnes,
dont le comportement est sensible aux modifications par offset, pour observer
l’im-pact sur ces méthodes.
CHAPITRE 4. MODIFICATION D’INSTANCES
5.1 Impact de la réduction d’instances sur la performance
Dans le document
Caractérisation des instances difficiles de problèmes d'optimisation NP-difficiles
(Page 82-85)