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Insertion dans les systèmes de production existants : changements d’usage

1.4 Conclusion

2.1.2 Insertion dans les systèmes de production existants : changements d’usage

Comme déjà évoqué en introduction, la durabilité des biocarburants dépend étroitement de leurs effets sur les émissions de gaz à effet de serre, la disponibilité des denrées alimentaires à des prix abordables, et la biodiversité (Directive Energies Renouvelables EU 2009/28/EC).11. Ces trois éléments dépendent à leur tour des changements dans l’affectation des sols (directs et indirects) induits par la culture de biomasse.

Dans cette partie, pour éclairer la question de la durabilité du miscanthus en Bourgogne, nous décrivons l’incidence de l’adoption du miscanthus par les agriculteurs de l’échantillon sur les changements (directs) d’usage des sols. Au total, les agriculteurs de notre échantillon cumulent 123 parcelles en miscanthus12 , soit 292 ha environ (près de 5 ha en moyenne par adoptant).

Nous caractérisons le changement d’usage par le précédent cultural (rotation de cultures, prairie permanente, gel permanent, autre usage) et les sols par leur caractère marginal ou non.

11. Disponible à : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:140:0016:0062:fr:PDF. 12. Sur ces 123 parcelles, 3 ont en fait été semées avec du panic érigé et 1 est mixte miscanthus / panic érigé. Pour simplifier, et sans que cela n’ait d’incidence notable sur les résultats présentés, nous les assimilons à des parcelles en miscanthus.

Tableau 2.1 – Itinéraire technique standard du miscanthus en Bourgogne.

Année 1

Après une culture Après une prairie permanente ou une

jachère

• Préparation du sol • Préparation du sol

labour (15 j. avant la plantation au plus tard) désherbage (septembre) : glyphosate reprise à la herse rotative labour (15 j. à 3 sem. après)

reprise au vibroculteur (décembre-janvier) reprise à la herse rotative (15 j. avant la plantation)

désherbage (si nécessaire) : glyphosate • Plantation (25 mars – 10 mai)

mise en terre avec une planteuse à pommes de terre modifiée : 20 500 rhizomes/haa roulage désherbage : antigerminatif fertilisation : aucune • Désherbage (à vue) antidicotylédones : 2 passsages antigraminées : 1 passage Année 2

• Maîtrise des adventices broyage (janvier)

désherbage (10 mars – 25 mars, selon état de la parcelle) : glyphosate antidicotylédones : 1 passage si mauvaise levée

• Fertilisation : 50 u/ha de PK

• Récolte (15 février – 10 avril), dès 8 t MS/ha fauchage-pressage : bottes carrées

stockage : de préférence sous abri chargement

Années 3 à 14

• Fertilisation : 50 u/ha de PK

• Récolte (15 février – 10 avril), >14 t MS/ha fauchage-pressage : bottes carrées

stockage : de préférence sous abri chargement

Année 15

• Remise en état de la parcelle : essais en cours

2.1. Pratiques agronomiques Le premier critère est usuel dans l’évaluation de la durabilité des bioénergies. Le deuxième critère varie selon la définition donnée au qualificatif marginal. En effet, il n’existe pas de consensus sur les caractéristiques d’une parcelle marginale. Certains auteurs privilégient une définition « utilitaire » (l’usage fait de la parcelle, ce qui revient au critère du précédent cultural), et d’autres une définition économique moins restrictive. En général, la première définition qualifie de marginales les parcelles non utilisées pour la production alimentaire. Dans cette étude, c’est le second type de définition qui est préféré : une parcelle est dite marginale si elle significativement moins rentable que le reste des parcelles de l’exploitation à cause de coûts de production élevés (y compris en travail), de rendements faibles ou d’autres contraintes. Contrairement à la définition utilitaire, cette définition est relative : si deux parcelles ont des caractéristiques similaires, l’une pourrait être qualifiée de marginale et l’autre de non marginale, en fonction des autres parcelles de l’exploitation à laquelle chacune d’entre elles appartient. De plus, la significativité de la différence de rentabilité entre parcelles a été laissée à l’appréciation des agriculteurs puisque ce sont eux qui ont désigné les parcelles marginales de leur exploitation, après que la définition économique leur ait été donnée. Ici, le caractère marginal est donc aussi une notion subjective.13 La ou les raisons pour lesquelles certaines parcelles sont qualifiées de marginales ont également été identifiées lors de l’enquête : qualité du sol, éloignement, taille, pente, forme, autre. Toutes ces raisons sont suceptibles de diminuer la rentabilité des parcelles,mais d’augmenter les performances du miscanthus en termes de durabilité. Par exemple, plus le potentiel de rendement est faible, plus le volume de production alternative perdu (alimentaire notamment) est faible. Plus la parcelle est éloignée, plus les émissions de gaz à effet de serre évitées sont importantes (en particulier si la production remplacée était exigeante en opérations culturales). Il en est de même pour les parcelles dont la géométrie diminue la rapidité d’exécution des opérations culturales (débit de chantier).

Dans le Tableau 2.2 figure la répartition des surfaces de miscanthus de notre échantillon en fonction du précédent cultural. Les surfaces en miscanthus se sont directement substituées à des rotations de cultures pour 66% d’entre elles, à du gel permanent pour 30%, et à des prairies permanentes à 1%. En 2009, la SAU cumulée des adoptants est utilisée à 83% par des rotations de cultures, à 11% par des prairies permanentes et à 3% par du gel permanent.14 Il semble

13. La définition du qualificatif marginal est également discutée au Chapitre 4, Section 4.4.2. 14. Les chiffres sont similaires si on considère le parcellaire des non adoptants.

Tableau 2.2 – Précédent cultural des parcelles en miscanthus

Précédent cultural Surface cumulée

ha %

Rotation de cultures 193,9 66

Prairie permanente 3,5 1

Gel permanent 86,5 30

Autre usage 0,4 0

Information non communiquée 7,4 3

Total 291,7 100

donc que le miscanthus soit planté préférentiellement sur des parcelles en gel, puis sur des parcelles en culture. Les prairies permanentes paraissent très peu impactées par l’implantation de miscanthus.

Dans le Tableau 2.3 figure la répartition des surfaces de miscanthus de notre échantillon en fonction de leur caractère marginal ou non, et des raisons pour lesquelles certaines d’entre elles sont marginales. La quasi-totalité des adoptants (92%) déclare avoir des parcelles marginales. En moyenne, elles représentent 22 ha par exploitation, soit 11% de la SAU (45% au maximum). Or, elles représentent aussi 56% des surfaces en miscanthus. On en déduit qu’en moyenne le miscanthus est préférentiellement implanté sur des parcelles marginales, mais qu’il ne s’agit pas d’une condition générale à l’adoption du miscanthus. Les raisons évoquées par les agriculteurs pour expliquer le caractère marginal des parcelles sont le plus souvent la qualité du sol (granulométrie, cailloux, profondeur, hydromorphie ou caractère séchant), l’éloignement par rapport aux bâtiments principaux de l’exploitation, puis la petite taille. Une forme irrégulière, une proximité avec des bois ou des habitations, et une localisation enclavée sont d’autres raisons souvent évoquées. Notons que la plupart des parcelles marginales cumulent plusieurs de ces raisons (53% deux raisons et 10% trois raisons, les agriculteurs évoquant une raison unique pour seulement 37% des parcelles marginales en miscanthus).

Dans la zone étudiée, le miscanthus est donc préférentiellement cultivé sur des parcelles marginales, après un gel permanent, ce qui est un signe positif pour le bilan environnemental de cette culture, et le problème de sa compétition avec les productions alimentaires. Néanmoins, une part importante du miscanthus est cultivée à la place de cultures traditionnelles (67% des surfaces) et/ou sur des terres non marginales (44%). De plus, cette part est susceptible

2.2. Conditions économiques

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