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CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

2. Les alliages d’aluminium-lithium

2.3. Comportement en corrosion et corrosion sous contrainte des alliages aluminium-lithium

2.3.3. Influence des traitements thermiques

Niskanen et al. [41] ont étudié deux alliages binaires contenant différentes quantités de lithium : 0,91% Li et 2,85% Li. Ils ont mesuré à la fois le potentiel libre et le potentiel de corrosion de ces deux alliages en fonction du temps de maintien à 200°C ou 250°C. L’ensemble des résultats est synthétisé dans le Tableau I-8. Il ressort de cette étude que le traitement thermique entraine une modification à la fois du potentiel de corrosion et du potentiel libre de l’alliage. Ces deux potentiels sont modifiés avec la durée du traitement thermique mais aussi avec la température de celui-ci.

Tableau I-8 : Synthèse de l'évolution du potentiel libre et du potentiel de corrosion des alliages binaires Al -0,91% Li et Al - 2,85% Li dans une solution à 3,5% NaCl à température ambiante [41].

Composition

de l’alliage Durée du maintien (h)

Potentiel libre (V/ECS) Potentiel de corrosion (V/ECS) Al - 0,91 % Li 0 -0,736 -0,727 Al - 2,85 % Li 0,25* -0,739 -0,692 Al - 2,85 % Li 12* -0,782 -0,725 Al - 2,85 % Li 24* -,0762 -0,698 Al - 2,85 % Li 336* -1,469 - Al - 2,85 % Li 168† -1,597 -0,755 Al - 2,85 % Li 336† -1,347 -

* : Maintien à la température de 200°C ; † : Maintien à 250°C.

Kertz et al. [50] ont réalisé un diagramme Temps - Température - Sensibilité à la corrosion pour un alliage Al - 1,8% Li - 2,70% Cu - 0,6% Mg - 0,3% Zn afin de reporter les sensibilités de l’alliage à la corrosion intergranulaire et/ou par piqûres suivant les températures et les temps de revenu subis par l’alliage (Figure I-21).

Ce diagramme délimite l’existence entre une sensibilité à la corrosion par piqûres uniquement et une sensibilité conjointe à la corrosion par piqûres et à la corrosion intergranulaire. Pour des températures supérieures à 450°C, l’alliage est uniquement sensible à de la corrosion par piqûres. Entre 300°C et 400°C, l’alliage est sensible à la corrosion par piqûres et devient sensible à la corrosion intergranulaire pour des durées de revenu très courtes. Enfin, pour des

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températures inférieures, il faut des temps de revenu plus longs pour sensibiliser l’alliage à la corrosion intergranulaire.

Figure I-21 : Modes d’endommagement en corrosion d’un alliage Al - 2,7% Cu - 1,8% Li en fonction des traitements thermiques [50].

Les auteurs relient la sensibilité de l’alliage à la corrosion intergranulaire à la présence de précipités T1 au niveau des joints de grains ainsi qu’à la présence d’une PFZ (Precipitate Free

Zone) avec une déplétion en cuivre et en lithium. Ainsi, suivant l’état métallurgique, l’alliage Al - 1,8% Li - 2,70% Cu - 0,6%Mg - 0,3%Zn ne présente pas le même type de corrosion. Li et al. [51] se sont intéressés à la tenue à la corrosion feuilletante d’un alliage Al-Li selon son état métallurgique. Ils ont montré qu’à l’état T6 (Tableau I-4), l’alliage était sensible à la corrosion exfoliante alors qu’à l’état T8, sa sensibilité à ce type de corrosion diminuait. Les auteurs expliquent cette différence de comportement par la présence d’un plus grand nombre de précipités T1 ainsi que des précipités T2 au niveau des joints de grains à l’état T6 par

rapport à l’état T8. De la même manière, Moran et al. [52] ont étudié l’influence de l’état métallurgique sur le comportement en corrosion exfoliante d’un alliage 2199 (Al 2,3% Cu - 1,4% Li.) (Figure I-22).

La dénomination « P » désigne le fait que l’alliage présente une faible sensibilité à la corrosion exfoliante alors que « ED » désigne une forte sensibilité à la corrosion exfoliante. Différents types d’essais de corrosion accélérée ont été réalisés à savoir une exposition de 4 années à l’air marin, une exposition au brouillard salin MASTMAASIS durant 2 ou 4 semaines, et enfin une exposition suivant les normes EXCO (immersion durant 2 ou 4 jours dans une solution NaCl/NO3 à pH inférieur à 4) et ANCIT (solution EXCO avec AlCl3 ;

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6H2O). Il ressort que, selon les conditions d’exposition de l’alliage et son état métallurgique,

la sensibilité à la corrosion exfoliante est très variable.

Figure I-22 : Comparaison du comportement en corrosion exfoliante de l'alliage 2199 lors de différents essais de corrosion accélérée, en fonction du temps de revenu, du T3 au T8 [52].

Si l’on considère une exposition marine qui semble être la plus représentative d’un endommagement réel et les états T3 et T8, utilisés à l’échelle industrielle, l’alliage 2199 est peu sensible à la corrosion exfoliante.

De la même manière, Jiang et al. [35] ont étudié la sensibilité d’un alliage Al-Cu-Li 2197 à la corrosion exfoliante par le biais d’essais de corrosion accélérée. Les résultats qu’ils ont obtenus sont regroupés dans le Tableau I-9.

On peut observer que lorsque l’alliage est traité à 175°C, les profondeurs moyenne et maximale atteintes par les défauts de corrosion sont supérieures à celles mesurées pour l’alliage maintenu à 160°C, et cela quelle que soit la durée de maintien à cette température. De plus, pour une même température, plus le temps de maintien augmente, plus la sensibilité à la corrosion augmente. Les auteurs expliquent ces phénomènes en considérant qu’en augmentant la durée et/ou la température de revenu, la taille des T1 augmente ainsi que la

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Tableau I-9 : Synthèse des profondeurs de propagation des défauts de corrosion intergranulaire suivant la durée de revenu [35]. Température (°C) Durée de revenu (h) Profondeur moyenne (mm) Profondeur maximale (mm) 175 18 0,133 0,186 175 40 0,153 0,200 175 56 0,169 0,212 160 10 0,042 0,055 160 32 0,052 0,064 160 80 0,082 0,103

Les alliages Al-Cu-Li présentent donc, comme l’alliage 2024 traditionnellement utilisé dans l’aéronautique, une certaine sensibilité à la corrosion intergranulaire. Pour l’alliage 2024, il a été montré par différents auteurs que l’application d’une contrainte mécanique modifiait la sensibilité de l’alliage à la corrosion intergranulaire. Ainsi, le comportement en corrosion sous contrainte de l’alliage 2024 a été étudié par Christel Augustin [53] qui a montré que l’alliage 2024 présentait une forte sensibilité à la corrosion sous contrainte puisque l’application d’une contrainte (quelle qu’elle soit), entraine une augmentation de l’endommagement en corrosion de l’alliage tant du point de vue de la profondeur de propagation des défauts de corrosion que de leur densité. Des études sur le comportement en corrosion sous contrainte d’un alliage Al- 2,5% Cu - 1,9% Li ont été réalisées en traction, avec des vitesses de déformation de 10-5, 10-6, 10-7 et 10-8 par Davo [54]. Les résultats obtenus ont montré, par contre, une faible sensibilité de l’alliage à la corrosion sous contrainte.

Connolly et al. [55] se sont intéressés à l’évolution de la sensibilité à la corrosion sous contrainte des alliages 2090 (Al – 2,56% Cu – 2,15% Li) et 2096 (Al – 2,84% Cu – 1,75% Li) en fonction du temps de revenu. Les auteurs ont réalisé des revenus à 160°C pour différentes durées de traitement thermique. Les essais de corrosion correspondent à une alternance de phases d’immersion et d’émersion dans une solution à 0,6 mol.L-1 de NaCl ; pendant ces

essais, les échantillons sont sollicités mécaniquement en traction, le déplacement étant imposé de façon à avoir une contrainte initiale de 100% à 110% de la limite d’élasticité du matériau

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avant les 60 jours est reporté sur la Figure I-23. Sur la Figure I-23, T3 et T8 font référence aux états métallurgiques précédemment décrits dans le Tableau I-4.

Figure I-23 : Pourcentage d'échantillons (a) de l'alliage 2096 et (b) de l'alliage 2090 ayant rompu avant les 60 jours d’essai [55].

Les notations UA4 et UA 10 désignent l’état sous-vieilli (durant 4 ou 10 heures) alors que la notation OA 70 et OA120 fait référence à un état survieilli (les notions de sur- et sous- vieillissement se réfèrent à l’état T8).

A l’issue des essais, les auteurs ont constaté qu’aucun des échantillons T3 et T8 n’avait rompu avant les 60 jours contrairement aux autres conditions. Les auteurs expliquent ce phénomène en considérant la forte réactivité des précipités T1 qui vont se dissoudre rapidement, ne

permettant pas la propagation de fissures.

Une étude similaire réalisée par Moran et al. [52] a montré qu’à l’état métallurgique T8, l’alliage 2099 était très peu sensible à la corrosion sous contrainte après une exposition marine (Figure I-24). Cependant, contrairement à l’étude précédente, l’état T3 semble sensible à la corrosion sous contrainte puisqu’un grand nombre d’éprouvettes ont rompu rapidement. De plus, on note que plus la durée du revenu s’allonge à partir de l’état T3, plus la sensibilité à la corrosion sous contrainte diminue.

b) a)

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Figure I-24 : Synthèse de la sensibilité à la corrosion sous contrainte de l'alliage 2099 suivant son état métallurgique [52].

Les différences observées entre ces derniers résultats et ceux obtenus par Connolly et al [55] peuvent s’expliquer par des différences dans la composition chimique des alliages étudiés. Li et al. [56] ont étudié le comportement en corrosion sous contrainte de l’alliage 2195 à l’état T3. Celui-ci a été immergé dans une solution à 3,5 % de NaCl et soumis à une contrainte de 490 MPa qui est très proche de sa limite d’élasticité. A l’issue de l’essai, les auteurs ont constaté que l’alliage était bien plus endommagé lors de l’application d’une contrainte. Lee et al. [57] ont travaillé sur le même alliage mais se sont intéressés à l’influence de la durée du revenu à 160°C sur cette sensibilité. Les résultats obtenus sont présentés sur la Figure I-25.

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A la vue des résultats, il ressort que la sensibilité de l’alliage 2195 à la corrosion sous contrainte diminue avec la durée du revenu. Ainsi, plus on s’approche de l’état « vieilli au pic », plus la sensibilité à la corrosion sous contrainte diminue.

L’ensemble des résultats décrits précédemment a montré que la microstructure et donc les propriétés mécaniques ainsi que le comportement en corrosion des alliages d’aluminium- lithium sont étroitement liées aux traitements thermomécaniques subis par l’alliage. Ainsi, il est évident que, lorsque deux tôles d’alliage d’aluminium seront soudées par FSW qui est un procédé d’assemblage thermomécanique, il y aura une forte modification de la microstructure ainsi que du comportement en corrosion du matériau au niveau du joint soudé.

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