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2.3 Résultats et interprétations

2.3.2 Influence de la nature de l’abrasif

a. Comportement des grains : analyse qualitative

Pour pouvoir comparer le comportement des différents grains abrasifs vis-à-vis de la

microstructure du matériau lors du rayage, on a choisi de caractériser des rayures faites avec des

grains de forme très proches (angle au sommet 2𝜃=90 °, angle d’attaque 𝛽 =45°) et dans les mêmes

conditions de rayage (𝐹

𝑁𝑔

= 20 N). Une première analyse basée sur des observations MEB

complétée par une analyse EDS comme l’illustre l’exemple sur la Figure 2.17. Les différents clichés

MEB montrent que malgré l’aspect de coupe remarqué par la présence des copeaux autour des

rayures, la dégradation des grains d’alumine et de zirconium prédomine à travers la présence des

débris et des fragments au fond de la rayure. Ceci prouve que les grains classiques de type alumine

blanc, brun et zirconium ne résistent pas face aux carbures primaires massifs, riches en vanadium et

en chrome regroupés sous forme de chaines qui dépassent les 50 µm.

Rappelons que la taille des grains dans le cadre de cette étude est assez importante par rapport à

celle qu’on trouve réellement dans les meules de rectification, et malgré cela on remarque que le

facteur taille ici n’a pas d’influence sur la résistance des grains face aux chaines de carbures. Ce point

a été évoqué par Kosel et al. (1981). Les auteurs ont précisé qu’il n'existe pas des règles même

empiriques qui permettent de prédire les effets de taille de grain. Mais à partir des tests comparatifs

d’abrasion des matériaux métalliques contre des grains de silicium de taille allant de 10 µm à 1 mm,

ils ont montré qu’au-delà d'un diamètre critique (100 µm), l'usure est relativement insensible à la

taille de l’abrasif.

Contrairement à ce qui a été observé pour les rayures générées par des grains classiques, les rayures

faites avec des grains CBN (Figure 2.17 (g) et (h)) ne présentent pas de débris ni même de

fragments d’abrasifs lors du passage de l’indenteur sur les chaines de carbure et la rayure parait lisse

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Figure 2.17 Micrographie au MEB des rayures générées par : (a) et (b) Alumine blanc ; (c) et

(d) Alumine brun ; (e) et (f) Zirconium ; (g) et (h) Nitrure de bore cubique CBN (𝐹

𝑁𝑔

=20N)

La première conclusion qu’on peut tirer de cette analyse purement qualitative est que le super

abrasif CBN résiste mieux face aux carbures très durs contenus dans la microstructure de la nuance

HSS.

b. Exploitation des profils latéraux : profondeur de pénétration

Les mesures interférométriques des rayures ont permis d’extraire les profils latéraux de la

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Figure 2.18 Profils latéraux générées par différents grains abrasifs

Ces profils latéraux donnent une idée sur les profondeurs atteintes par les grains lors du rayage

avec le même effort normal et en négligeant toutefois le retour élastique.

Il est clairement notable que sous une même charge appliquée, la profondeur de la rayure faite par

l’indenteur CBN est trois à quatre fois plus importante que celles réalisées par les autres grains

abrasifs.

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Rappelons que la caractérisation en coupe transversale du matériau illustrée sur la Figure 2.13(a) ,

montre que le plan de pénétration de l’indenteur est dense en chaine de carbure de large taille qui

peuvent constituer un obstacle devant les grains dans le sens normal à la direction du rayage. Ces

observations permettent ainsi de confirmer les conclusions tirées des examens des rayures au MEB.

c. Relation entre dureté de l’abrasif et volume de matière déplacé

La dureté constitue la grande différence entre les abrasifs classiques et les super abrasifs. On

propose ici d’étudier, sous différentes charges, l’évolution du volume de matière déplacée au cours

du rayage en fonction du rapport entre la dureté de la matrice de l’acier 𝐻

𝑚𝑎𝑡

(820 Hv) et la dureté

de l’abrasif 𝐻

𝑎𝑏𝑟

puis entre la dureté de l’abrasif et la dureté du carbure de type M

7

C

3

H

M7C3

(2600

Hv)

,

le carbure le plus présent et le plus volumineux dans la matrice de la nuance étudiée.

Figure 2.19 Volume de matière déplacé en fonction de : (a) rapport 𝐻

𝑚𝑎𝑡

/𝐻

𝑎𝑏𝑟

, (b) rapport

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On constate que dès que le rapport 𝐻

𝑚𝑎𝑡

/𝐻

𝑎𝑏𝑟

dépasse 0.2 (Figure 2.19 (a)), et le rapport

𝐻

𝑀7𝐶3

/𝐻

𝑎𝑏𝑟

s’approche de l’unité Figure 2.19(b), le volume de matière enlevé est au plus faible,

ceci est valable pour les différents niveaux de force normale appliquée. En effet, face aux grains

abrasifs classiques de type Alumine blanc ou brun et Zirconium qui ont une dureté comparable ou

inférieure à celle des carbures de type M

7

C

3

, la résistance à l’usure abrasive du matériau est assez

élevée. Cette résistance n’est pas souhaitée dans le cadre de la présente étude qui a pour objectif de

trouver le bon outil pour rectifier le matériau HSS. D’autre part, on remarque qu’au niveau des

abrasifs classiques (rapport de dureté supérieur à 1) la variation de volume varie en fonction de la

dureté ce qui montre que pour ces abrasifs de duretés proches, il y a d’autres propriétés qui

interviennent tels que la friabilité, la résistance à haute pression et le pouvoir de coupe (Tanguy

1985).

La dureté constitue un paramètre clé qui conditionne la résistance à l’usure abrasive de l’HSS.

Dans ce contexte, les critères de résistance à l’abrasion sont difficiles à établir du fait des

regroupements aléatoires des carbures dans le matériau, de l’influence des autres caractéristiques des

grains abrasifs comme la friabilité, …. Il est clair que l’usure abrasive ou le pouvoir abrasif, dans ces

conditions, est contrôlé par le taux d'élimination de la phase de carbure qui protège la matrice de

l'attaque directe par les particules abrasives. Ces dernières doivent avoir une dureté largement

supérieure aux carbures présents dans le matériau. En effet, ces carbures agissent comme une

barrière pour interrompre le mouvement des particules abrasives lors de leur contact avec le

matériau selon Kazemipour et al. (2010).

d. Corrélation entre les efforts et la morphologie de la rayure

La Figure 2.20 montre un exemple des évolutions typiques de la force tangentielle 𝐹

𝑇𝑔

lors des

essais de rayage réalisés dans les mêmes conditions avec des grains en alumine ensuite avec un

indenteur en CBN.

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Figure 2.20 Corrélation entre l’effort tangentiel de rayage et la morphologie de la surface rayée

sous une charge 𝐹

𝑁𝑔

=20 N avec : (a) Al

2

O

3

, (b) ZrK , (c) CBN

Au cours du rayage 𝐹

𝑇𝑔

varie beaucoup pour les deux types d’abrasif traduisant ainsi

l’endommagement du matériau par un phénomène discontinu lié à la profondeur des écailles qui en

résultent (Figure 2.20). D’autre part, la matrice martensitique est riche en carbures primaires qui

résistent bien à l’usure abrasive mais ils sont susceptibles d’être arrachés (Kosel and Fiore 1981)

comme l’illustre les cavités présentes sur les images MEB (Figure 2.21). Sauf que les courbes des

efforts tangentiels de rayage avec des grains en alumine et en zirconium, tracés sur la Figure 2.20

(a)&(b), présentent une série de chutes brutales tout au long de la rayure. Ces dernières peuvent

être reliées aux mécanismes de fragmentation des grains abrasifs observés dans le paragraphe 2.3.2-a

qui sont occasionnés par la présence des carbures primaires rencontrés dans la matrice comme le

montre les micrographies MEB illustrées sur la Figure 2.21.

En effet, lorsque la dureté de l’abrasif est supérieure à celle des carbures comme dans le cas du

CBN, le carbure est arraché ou fragmenté mais se retrouve rayé.

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Figure 2.21 Micrographie MEB des fond des rayures réalisées avec un indenteur CBN

(𝐹

𝑁𝑔

=20N)