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Influence de la grossesse sur la néphropathie lupique :

Matériels et Méthodes

III. Influence de la grossesse sur le lupus :

2- Influence de la grossesse sur la néphropathie lupique :

Malgré les avancées thérapeutiques ces dernières décennies et l’amélioration de la prise en charge de la néphropathie lupique, les grossesses chez ces patientes demeurent à haut risque de complications maternelles et fœtales, et également d’exacerbation de la maladie lupique. [121]

L’atteinte rénale au cours du lupus est présente dans 60 à 80 % des cas. Elle précède les autres manifestations de plusieurs années dans 3 à 6% des cas. Mais généralement, elle apparaît après le diagnostic, dans plus d’un tiers des cas. [121]

Il est intéressant de noter que dans certains cas, la néphropathie lupique peut être révélée par la grossesse, d’où l’intérêt d’une surveillance étroite et régulière du sédiment urinaire et de la fonction rénale au cours de la grossesse. [125]

L’étude de Puthet J.C [139] en 2015, intéressant 65 grossesses survenue chez 44 patientes lupiques suivies dans 9 centres hospitaliers français, a objectivé 5 cas de néphropathie lupique révélée par la grossesse. Alors qu’une rémission complète de la maladie était obtenue depuis plus de 24 mois dans 74 % des cas, 20% des patientes ont eu une poussée lupique. Une complication maternelle survient lors de 40 % des grossesses, principalement une prééclampsie (18 %) dont le risque est d’autant plus important que la fonction rénale est dégradée ou la protéinurie est augmentée à la conception. Le taux de mortalité périnatale est calculé à 6,8 %, la prématurité à 25 %, et le RCIU à 15 %. [139]

Selon les différentes séries de la littérature, la fréquence des poussées lupiques ré nales au cours de la grossesse varie en fonction de l’activité de la maladie avant la conception. Comme montré dans le tableau XXXVIII, elle varie de 7 à 33 % chez des patientes lupiques en rémission pendant au moins six mois avant la conception versus 61 à 67 % lorsque la grossesse est menée en pleine activité lupique.

Tableau XXXVIII. Evolution de la néphropathie lupique au cours de la grossesse. [125]

Etude Nombre de femmes

avec néphropathie lupique

Nombre de grossesses Nombre de poussée lupique rénale (%)

Ovasiu et al., 1991 25 53 6 (11%)

Packham et al., 1992 41 64 31 (48%)

Julkunen et al., 1993 16 26 7 (38%)

Le Thi Huong et al., 2002

22 32 4 (13%)

A. Radoui, 2006 12 20 10 (50%)

Puthet JC. 2015 44 65 13 (20%)

Dans notre série, 40% des patientes ont une atteinte rénale. Cependant, une seule patiente, soit 8,33%, a eu une poussée de sa glomérulonéphrite lupique type IV au cours de la grossesse. Et une deuxième patiente a eu une poussée de sa GNL type VI en postpartum, soit 8,33%.

Selon l’étude de Carmona et al, il n’existe pas de différence significative en ce qui concerne l’issue de la grossesse et l’â ge gestationnel entre les femmes porteuses d’une néphropathie de classe III ou IV (groupe 1 : 42 grossesses chez 35 femmes), II ou V (groupe 2 :12 grossesses chez dix femmes) ou exemptes de néphropathie (groupe 3: 54 femmes). Cependant, l’hypertension et la prééclampsie étaient plus fréquentes (37 %) dans le groupe 1 que dans les groupes 2 et 3 (11 %) et le poids à la naissance était plus bas. [111]

Selon l’étude de Tandon et al, comparant 78 grossesses chez 53 femmes ayant une néphropathie lupique à 78 patientes lupiques non enceintes avec atteinte rénale, Il n y a pas de différence en terme de survenue d’une détérioration de la fonction rénale. Ainsi que l’incidence de poussée rénale est similaire entre les deux groupes (45 % versus 42 %). [111]

Dans l’é tude de A. Radoui [125], 50 % des patientes ont présenté une exacerbation de la néphropathie lupique pendant la grossesse et 25 % après l’accouchement. Les principaux facteurs prédictifs de cette exacerbation étaient une conception après une courte durée de rémission et la présence d’une néphropathie lupique classe IV. [125]

Plusieurs études ont attesté que la grossesse peut aggraver la fonction rénale chez les femmes porteuses d’une insuffisance rénale chronique. Ainsi, une clairance de la créatinine inférieure à 50ml∕min ou une créatinine > 140 μmol/l augmentent le risque de la décompensation rénale pendant la grossesse. Le taux de naissance vivante dans ce contexte varie de 20 à 95% et dépend de la créatininémie de base.

En cas de dégradation de la fonction rénale ou d’anomalies massives du sédiment urinaire , la PBR peut ê tre réalisée pendant la gestation. [114]

Tableau XXXIX. Retentissement de la grossesse sur la fonction rénale [140]

Séries Nombre de

grossesses

Altération de la fonction rénale

Aucune Transitoire Définitive

Boumpas (99) 6 1 (17%) 2 (33%) 3 (50%) Hayslett (92) 16 13 (81%) 3 (19%) 0 (0%) Fine (100) 37 25 (68%) 7 (19%) 5 (14%) Jungers (93) 26 20 (77%) 4 (15%) 2 (8%) Jhons. (101) 26 19 (73%) 4 (15%) 3 (12%) Oviasau (96) 28 22 (79%) 6 (21%) 0 (0%) Pasoto (102) 46 40 (87%) 6 (13%) 0 (0%)

Au total, il faut chercher certains éléments cliniques et biologiques qui ont une valeur prédictive d’une poussée rénale au cours de la grossesse [139], notamment:

l’absence de rémission complète de la néphropathie lupique (NL) à la conception (p<0,001).

Une conception après une courte durée de rémission ou une inactivité de la NL inférieure à 12mois (p= 0,003)

L’hypertension artérielle Un sédiment urinaire actif

la présence d’anticorps anti-ADN natifs positifs (p<0,0001) un C4 bas (p = 0,004)

Une créatininémie élevée

Il faut noter qu’une créatinine supérieure à 140 μmol/l est associée à une augmentation du risque d’hypertension artérielle et d’insuffisance rénale progressive. Le risque maternel ainsi que le risque fœtal de complications sont tellement élevés que la grossesse n’est pas autorisée en présence d’une insuffisance rénale. [114]

En cas d’atteinte rénale, il existe certaines contre-indications relatives à la grossesse, notamment : la persistance d’une glomérulonéphrite proliférative diffuse, la présence d’un syndrome néphrotique sévère ainsi que d’une hypertension artérielle sévère ou mal contrôlée . Ces contre -indications sont relatives car elles peuvent ê tre modulées en cas de traitement efficace.

Cependant, la présence d’une néphropathie lupique quiescente depuis au moins six mois avant la conception , une protéinurie inférieure à 3g/jr, une pression artérielle parfaitement contrô lée, et une créatininémie inférieure à 140 μmol/l (avec une clairance de la créatinine supérieure à 60 ml/min) sont des facteurs de bon pronostic ainsi pour la maman et le fœtus également. [114]

L’évolution des poussées rénales au cours de la grossesse est imprévisible. Elle peut être dramatique avec installation d’une insuffisance rénale, et même aboutir à la mort maternelle. Cependant, une interruption thérapeutique de grossesse peut être discutée dans quelques situations de néphropathie lupique active qui mettent en jeu le pronostic vital maternel. [121]