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Partie 2 : Physiopathologie de l’infection par le virus d’Epstein-Barr

II. Infection par l’EBV

II.1. Infection in vitro

Les différentes étapes de l’infection des lymphocytes B par l’EBV ont été mises en

évidence dans des modèles de culture cellulaire in vitro. La première étape de l’infection est la

fixation de l’EBV à la surface du lymphocyte B. Cette fixation résulte de l’interaction entre la

glycoprotéine virale gp350 et le récepteur CD21 présent à la surface des cellules B. La

pénétration du virus dans la cellule requiert un complexe, constitué des glycoprotéines virales

gH, gL et gp42, qui se fixe au CMH de classe II (Molesworth et al., 2000).

Après pénétration du virus dans la cellule, la nucléocapside transite jusqu'à l’enveloppe

nucléaire et libère l’ADN viral linéaire dans le noyau. Grâce au promoteur viral Wp, les

protéines de latence EBNA2 et EBNA-LP sont exprimées. Après 12h d’infection, les protéines

LMP1, EBNA3A, 3B et 3C sont exprimées à partir du promoteur viral Cp. Progressivement au

cours de l’infection, le génome viral se circularise pour former un épisome. Cet épisome viral

sera répliqué en même temps que les chromosomes cellulaires au cours de la phase S. A ce stade,

le processus d’immortalisation est accompli.

L’expression des gènes de latence codant les protéines membranaires LMP2 et les ARN

EBER et BART finalise l’établissement de la latence de type III, caractéristique des lymphocytes

B infectés par l’EBV in vitro. Au terme de l’infection, le nombre d’épisomes au sein de chaque

cellule est en moyenne de 10 à 100 copies et reste stable. Ces lymphocytes B infectés obtenus

sont alors capables de proliférer indéfiniment, de transmettre à leurs cellules-filles les copies de

l’épisome viral et de générer ainsi des LCL (Middeldorp et al., 2003). Dans de rares cas, l’ADN

de l’EBV semble pouvoir s’intégrer au génome de la cellule hôte (Takakuwa et al., 2005).

II.2. Infection in vivo

II.2.1. Déroulement de l’infection dans l’organisme

Généralement, la contamination par l’EBV se fait par voie salivaire. Le virus se retrouve

alors dans l’oropharynx de l’hôte et peut se loger à l’intérieur des cryptes amygdaliennes. Le

virus doit alors franchir la barrière de cellules épithéliales avant d’infecter des lymphocytes B.

Cependant, on ne sait pas si ces cellules épithéliales sont effectivement la "porte d’entrée" du

virus dans l’organisme. En effet, les muqueuses, qui peuvent être en contact avec la salive

contaminée, sont très infiltrées de lymphocytes, ce qui pourrait permettre un contact direct entre

l’EBV et des lymphocytes B à ce niveau. Ainsi plusieurs hypothèses sont possibles pour

expliquer l’entrée du virus dans l’organisme :

- L’EBV infecte directement les lymphocytes B sans infecter les cellules épithéliales. Des

expériences d’hybridations in situ sur des biopsies d’amygdales de patients atteints de MNI ont

révélé que l’EBV n’est présent que dans les lymphocytes B. Le modèle proposé suggère un

contact direct des virions avec les cellules B au niveau des cryptes (Anagnostopoulos et al.,

1995). En effet, des cellules lymphoïdes peuvent infiltrer l’épithélium formant ainsi un

« lymphoépithélium ». Cette structure pourrait permettre à l’EBV d’être directement en contact

avec des lymphocytes B.

- L’EBV infecte des cellules épithéliales puis les lymphocytes B. Des expériences de

co-culture de cellules épithéliales issues d’amygdales et de lymphocytes B infectées par l’EBV ont

révélé que les cellules épithéliales peuvent être infectées par l’EBV (Pegtel et al., 2004).

L’interaction entre l’EBV et les cellules épithéliales fait intervenir les glycoprotéines gH et gL

de l’enveloppe virale et des intégrines présentes à la surface des cellules épithéliales (Borza et

Suite à la primo-infection, les lymphocytes B infectés expriment un programme de latence

de type III et prolifèrent (Kurth et al., 2000). Cette première phase d’infection virale induit une

forte réponse immunitaire des lymphocytes T spécifiques des antigènes de latence III qui aboutit

à la lyse de nombreuses cellules infectées. Ceci se traduit parfois, lors de la MNI, par une

hyperlymphocytose qui reflète une expansion des lymphocytes T CD8+ activés. Cependant,

certaines cellules échappent à cette réponse immunitaire en diminuant l’expression de leurs

gènes de latence et forment le réservoir de lymphocytes B mémoires dans lesquelles aucune des

protéines de latence n’est exprimée (latence virale de type 0). Lors des divisions cellulaires, ces

lymphocytes B mémoires expriment EBNA1 et occasionnellement LMP2A (Qu & Rowe, 1992 ;

Babcock et al., 2000). Ces lymphocytes B mémoires infectés gagnent ensuite la circulation

périphérique.

Figure 13 : Modèle de l’infection in vivo par l’EBV. (1, 2) Primo-infection au niveau des muqueuses

de l’oropharynx. Les lymphocytes B peuvent être infectés soit directement soit indirectement. (3) Cycle réplicatif . (4) Limitation de l’expansion des cellules B infectées en latence III par le système immunitaire. (5) Echappement à la réponse immunitaire par les cellules infectées n’exprimant pas de gènes de latence (latence 0). (D’après http://www.medscape.com/viewarticle/711824_2)

Parfois, l’EBV peut déclencher une phase lytique dans les lymphocytes B différenciés en

plasmocytes afin de produire de nouveaux virions. Cette différenciation plasmocytaire serait à

l’origine de l’induction du cycle lytique de l’EBV (Laichalk & Thorley-Lawson, 2005). Les

virions produits peuvent infecter de nouveaux lymphocytes B ou des cellules épithéliales de

l’oropharynx, assurant ainsi, la persistance de l’EBV dans l’organisme, ainsi que sa transmission

(figure 13).

II.2.2. Contrôle de l’infection virale

Le système immunitaire joue un rôle capital dans la limitation de l’infection primaire par

l’EBV. Lors de la primo-infection, l’infection des cellules épithéliales et/ou des lymphocytes B

entraîne une réponse immunitaire cellulaire. Les cellules NK sont les premières cellules

impliquées dans le contrôle de l’infection par le système immunitaire. Elles entraînent la lyse des

cellules infectées et permettent de limiter la transformation des lymphocytes B par l’EBV en

sécrétant de l’IFN2 (Strowig et al., 2008).

Les lymphocytes T interviennent également dans ce contrôle de l’infection. Les CD8+

reconnaissent les antigènes provenant des protéines de latence (EBNA3A, 3B, 3C, LMP1 et

LMP2A) et des protéines du cycle lytique (ZEBRA et Rta), et les CD4+ sont capables de

reconnaître certains antigènes de protéines du cycle lytique (ZEBRA et BMLF1) et de latence

(EBNA3C et EBNA1) (Hislop et al., 2007).