• Aucun résultat trouvé

Indigénat des essences forestières Indicateur 4

Une essence forestière indigène est une essence se trouvant dans son aire de répartition naturelle (passée ou actuelle) et qui ne nécessite pas d’intervention humaine pour se maintenir et se reproduire au cours du temps. Une essence non indigène désigne à l’inverse une essence introduite15 par l’action

volontaire ou involontaire de l’Homme. À travers le caractère indigène ou non des essences forestières, cet indicateur cherche à refléter le degré d’artificialisation des forêts.

L’introduction d'espèces non indigènes dans les collectivités d'Outre-mer n’est pas récente et les Antilles françaises n’ont bien sûr pas été épargnées par ce phénomène. Or elle peut avoir des conséquences importantes, en particulier dans les écosystèmes forestiers tropicaux insulaires. L’introduction d’essences forestières non indigènes peut notamment entraîner la régression d’autres essences indigènes. Plus largement, ces introductions peuvent avoir des conséquences sur la biodiversité globale des écosystèmes forestiers et leur fonctionnement.

En Martinique, l’inventaire actuel ne permet pas de préciser le nombre exact d’espèces végétales introduites ou indigènes, notamment parce que les non-ligneuses ne sont pas toutes répertoriées dans les principales flore des Petites Antilles (Howard, 1974-1989 ; Fournet, 2002 ; Rollet, 2010). Selon Joseph (2009), malgré l'importance quantitative du potentiel floristique d’introduction et quel que soit le degré d’anthropisation, les paysages végétaux naturels de la Martinique d’aujourd’hui sont constitués d’une proportion importante d’espèces de la flore locale. La Martinique serait d'ailleurs l'île qui héberge le plus grand nombre d'espèces arborées autochtones des Petites Antilles (Délégation permanente de la France auprès de l'UNESCO, 2014). Selon l’Observatoire martiniquais de la biodiversité (2017), la flore de Martinique compte globalement 2 746 espèces de plantes à fleurs (mono- et dicotylédones) incluant notamment les arbres (espèces dicotylédones). Après validation par le Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) en 2016 et par le Conseil national pour la protection de la nature (CNPN) en 2017, environ 45 % de ces plantes phanérogames sont actuellement considérées comme autochtones (i.e. 1 238 espèces) en Martinique (Deal communication personnelle) ; une liste des espèces végétales autochtones a été fixée par arrêté ministériel (Journal

officiel, 2018).

Les essences forestières indigènes des Petites Antilles dominent les peuplements

Pour rendre compte du niveau d’endémisme à l’échelle de la Martinique et des Petites Antilles, une liste provisoire des espèces d'arbres et autres végétaux forestiers d'intérêt éco-régional est proposée dans le tome 4 du rapport de la FAO sur l’évaluation des ressources génétiques forestières (Trébeau et al., 2012)16. Elle comprend un peu plus

d’une centaine d’espèces dont une grande majorité (70 %) est endémique des Petites Antilles et environ un cinquième est endémique strictement de la Martinique. Cette liste est cependant loin d’être exhaustive, le nombre d’essences d’arbres présentes en Martinique étant bien plus élevé. Selon la Deal (2013), qui s’appuie sur une étude de Fiard (1994), la Martinique compte 396 espèces d’arbres dont 20 % sont considérés comme endémiques des petites Antilles.

Les essences exotiques introduites pour la production de bois d’œuvre occupent 5 % des surfaces forestières Sur cette île, les forêts plantées de mahogany grandes feuilles sont les principales forêts composées majoritairement d’espèces introduites (2 400 hectares). D’autres essences d’origine exotique y ont été introduites sur de petites surfaces pour la production de bois d’œuvre comme le mahot bleu (Hibiscus elatus Sw. Malvaceae), sur moins de 10 hectares, et le pin caraïbe (Pinus caribea Morelet Pinaceae) sur moins 20 hectares. Mais au total, les surfaces plantées de ces essences exogènes restent faibles, de l’ordre de 5 % de la surface forestière totale (Trébeau et al., 2012).

Une apparente « immunité écosystémique » probablement transitoire

En Martinique, la progression de plantes introduites reste étonnamment faible : selon Joseph (2009), quel que soit l’étage de végétation et le stade dynamique, les forêts sont dominées par des espèces locales. Cependant, la résistance aux plantes exogènes n’est pas totale puisque l’on observe leur timide installation dans certains milieux de l’étage inférieur et moyen (tulipier du Gabon (Spathodea campanulata P. Beauv.), arbre à caoutchouc (Funtumia elastica (P.Preuss) Stapf), acacia de Saint-Domingue (Dichrostachys

15 En dehors de l’aire de répartition et de dispersion naturelle et potentielle de l’essence considérée.

16 Cette liste est reprise elle-même d’un document produit dans le cadre de la phase I du projet REDOM (création d'un réseau écologique dans les DOM) que

cinerea (L.) Wight & Arn.), etc.). L’apparente « immunité

écosystémique » de la Martinique et plus généralement des Petites Antilles est probablement transitoire. La dégradation sans cesse renouvelée des écosystèmes

sera de nature à permettre une réelle invasion des plantes introduites avec une plausible modification des paysages à long terme (Joseph, 2009).

Références bibliographiques et précisions méthodologiques

Deal (Guadeloupe et Martinique), 2013. Les invasions biologiques aux Antilles Françaises. Diagnostic et état des lieux

des connaissances. 88p.

Délégation permanente de la France auprès de l'UNESCO, 2014. Aires volcaniques et forestières de la Martinique.

Candidature au patrimoine mondial de l’UNESCO. http://whc.unesco.org/en/tentativelists/5881/.

Fiard J.P., 1994. Les forêts du nord de la montagne Pelée et des édifices volcaniques du piton Mont-Conil et du Morne-

Sibérie. Diplôme universitaire de phytoécologie tropicale et aménagement insulaire, Université des Antilles et de la

Guyane, Martinique. 595p.

Fournet J., 2002-Flore illustrée des phanérogames de Guadeloupe et de Martinique. CIRAD-Ed. Gondwana, Montpellier. 2 vol., 2538p.

Gargominy O. (ed.), 2003. Biodiversité et conservation dans les collectivités françaises d’outre-mer. Collection Planète Nature. Comité français pour l’UICN, Paris. 246p.

Howard R. A., 1974 – 1989. Flora of the Lesser Antilles: Leeward and Windward Islands. Vol. 1-6, Editeur Arnold Arboretum, Harvard University. Jamaica Plain, Mass.

Joseph P., 2004. La problématique du développement durable dans les Petites Antilles (quelques enseignements

généraux). Archives-ouvertes, Hall. 23p.

Joseph P., 2009. La végétation forestière des Petites Antilles - Synthèse biogéographique et écologique, bilan et

perspectives. Karthala, Paris. 490p.

Journal officiel, 2018. Arrêté du 8 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire de la Martinique. JORF n°0041 du 18 février 2018 texte n°6. NOR : TREL1704135A. 27p.

Observatoire martiniquais de la biodiversité, 2017. http://www.biodiversite-martinique.fr/flore/2-plantes-fleurs Rollet B., 2010. Arbres des Petites Antilles - tome 2 : description des espèces. ONF, Paris, Basse-Terre. 914p."

Trébeau M., Schneider J.-B. et Doré R., 2012. Rapport FAO Évaluation des ressources génétiques forestières. Contribution au rapport national, Tome 4 - Volet ONF Martinique - Version 1. 33p.

En résumé, bien que l’inventaire actuel ne permette pas de préciser le nombre exact d’espèces végétales introduites ou indigènes, les peuplements forestiers sont constitués principalement d’essences indigènes. Quelques essences d’origine exotique comme le mahogany grandes feuilles, le mahot bleu et le pin caraïbe ont été introduites en Martinique pour la production de bois d’œuvre mais les surfaces plantées restent faibles (5 %). Quelques plantes introduites s’installent timidement dans certains milieux de l’étage inférieur et moyen (tulipier du Gabon, arbre à caoutchouc, acacia de Saint-Domingue...).

MARTINIQUE Critère 4 Diversité biologique des forêts