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C - Des inégalités territoriales en partie inexpliquées

Ces inégalités peuvent être importantes : les taux d’attribution de l’AAH suite à une première demande vont de 0,9 à 3,2 pour 1 000 habitant selon les départements 37. S’agissant des décisions défavorables des médecins conseils de la sécurité sociale en matière de reconnaissance de l’invalidité, celles-ci variaient en 2008 de 13 % en Bretagne à plus de 30 % en Alsace-Moselle ou dans la région Nord-est. Le même phénomène d’inégalités se retrouve dans le traitement de la reconnaissance de l’inaptitude avec des taux de rejets qui vont de 13 à 35 % 38.

Des analyses infrarégionales montrent des inégalités parfois encore plus marquées entre les territoires et indiquent des évolutions divergentes dans le temps.

Ces inégalités ne jouent pas toutes dans le même sens, même pour des allocations pour lesquelles on pourrait penser que les déterminants sont en partie communs. Ainsi, ce ne sont pas les mêmes départements qui recourent le plus à l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) (cartes 1).

36 OCDE 2006 « Vivre et travailler plus longtemps ».

37 Rapport de la Cour des comptes sur l’AAH 2010.

38 Rapport de la Cour des comptes sur l’invalidité et l’inaptitude 2010.

Cartes 1 Proportion d’enfants âgés de moins de 20 ans bénéficiaires de l’AEEH parmi les enfants de moins de 20 ans, par département (à droite) et Taux de bénéficiaires de l’AAH pour 1000 personnes (à gauche)

Source : CNAF 2008

Le constat des inégalités territoriales de perception des différents revenus de remplacement suscite plusieurs questions : ces inégalités reflètent-elles des pratiques locales d’attribution laxistes ? Sont-elles le fruit de comportements opportunistes de certains financeurs cherchant à reporter la charge sur d’autres ? Conduisent-elles à une iniquité du traitement des personnes selon leur localisation ? Sont-elles déterminées par l’environnement (les caractéristiques du marché du travail local, l’offre d’établissements médico-sociaux …) ?

Des travaux ont été conduits pour expliciter les écarts constatés en matière d’AAH39. Ils concluent à l’absence d’effet de l’offre départementale d’équipement, du potentiel fiscal ou du degré d’urbanisation, mais au lien avec la pauvreté des ménages, la proportion de personnes handicapées parmi les demandeurs d’emploi et la part des plus de 45 ans parmi les 20/59 ans. La prise en compte du contexte local à partir des variables choisies et des données disponibles n’explique qu’une partie des écarts et ne renseigne pas sur le sens de la causalité (les liens entre pauvreté et AAH résultent pour partie du fait que l’AAH est versée sous condition de ressources, mais il y a aussi des relations entre

39 CNSA, DREES, DGCS

pauvreté et état de santé ; entre niveaux des ressources, catégories socioprofessionnelles et handicap etc..).

Une analyse qualitative conduite avec 23 maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) montrait également une corrélation entre les modalités d’examen des demandes et le taux d’attribution de l’AAH : une composition pluridisciplinaire de la commission d’examen des demandes et un contact direct avec le demandeur conduisent plus fréquemment à accorder l’AAH.

Ces disparités territoriales peuvent refléter des inégalités de traitement des demandes d’AAH, ce qui a incité la Direction générale de la cohésion sociale et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) à élaborer un plan national pour l’harmonisation des pratiques, intégré à la COG Etat/CNSA :

− les travaux d’analyse des disparités d’attribution vont être poursuivis et donner lieu à l’élaboration de fiches permettant à chaque MDPH de se situer par rapport aux moyennes nationales ;

− les services concernés ont choisi de travailler de façon pragmatique à l’homogénéisation des pratiques professionnelles de ceux qui sont chargés de prendre les décisions d’attribution.

La Direction générale de l’action sociale et la Direction décentralisation d’une part importante de l’action sociale (les MDPH sont présidées par les conseils généraux), la création des Agences régionales de santé reprenant une partie de leurs attributions et de leurs effectifs, la modification de leur périmètre suite à la RGPP et la faiblesse de leurs effectifs sur ces questions (sur 96 Directions départementales de la cohésion sociale, 17 ont sur ces sujets moins de 2 agents de catégorie A en équivalent temps plein) avaient conduit à un désengagement sur ces questions du handicap.

L’expérimentation conduite dans 8 départements entre janvier et juin 2011 a permis :

− d’identifier les moyens humains consacrés à l’AAH dans chaque direction départementale de la cohésion sociale ;

− de mettre en place des outils de pilotage (tableaux de bord départementaux et nationaux permettant un meilleur pilotage) permettant de faire des comparaisons entre département et d’analyser les caractéristiques des bénéficiaires ;

− d’élaborer un outil d’aide à la décision pour apprécier la restriction substantielle et durable à l’emploi, condition d’octroi de l’AAH pour les personnes dont le taux d’incapacité est compris entre 50 et 80 % ;

− d’améliorer le partenariat local.

Cette démarche, qualifiée d’exemplaire par le comité de suivi RGPP, est déployée depuis le 14 septembre 2011 par cohortes d’une quinzaine de départements entre octobre 2011 et mars 2012. Destinée à remobiliser les services déconcentrés sur l’allocation aux adultes handicapés (AAH), elle doit également se traduire par une participation effective et plus efficace de l’Etat aux réunions de la commission départementale d’attribution de l’AAH et par une plus grande homogénéisation des pratiques. Des actions de formation sont donc conduites en direction des référents AAH de chaque département mais aussi des agents des Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) et des membres des équipes pluridisciplinaires des Commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Les DIRECCTE, dont certaines ont été mobilisées dans le cadre des expérimentations, seront, selon la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, impliquées dans la généralisation des partenariats avec les Directions régionales de la jeunesse et de la cohésion sociale et les Agences régionales de santé afin de mieux articuler accompagnement professionnel et accompagnement social.

S’agissant de l’invalidité et suite au rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de 2010, la Direction de la sécurité sociale réfléchit à des actions qui pourraient être déployées avec la caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS) de identiques soient conduits dans le champ de l’invalidité.