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Les inégalités d’accessibilité aux ressources : une entrée par les ressources urbaines

2-Lille : la métropole multipolaire et le tournant post-industriel

4- Les inégalités d’accessibilité aux ressources : une entrée par les ressources urbaines

La croissance de la ségrégation et le renforcement des inégalités urbaines se font ressentir non seulement sur l’accès au marché de l’emploi, mais aussi sur l’ensemble des aménités urbaines (Avenel, 2004). Si les inégalités d’accès à l’emploi ont été largement étudiées sur l’angle du spatial mismatch (Kain, 1968; Korsu et Wenglenski, 2010), peu de travaux ont été consacrés à l’analyse du rôle d’autres types de pratiques qui pourraient également témoigner d’importantes inégalités socio-spatiales. Si l’emploi demeure une variable davantage importante pour l’analyse des inégalités socio-spatiales, du fait de son important poids lors du choix des localisations résidentielles, d’autres travaux font remarquer que l’emploi ne concerne qu’une partie de la population et proposent d’élargir le débat vers d’autres dynamiques métropolitaines. Dans la littérature française, des travaux comme ceux de Caubel (2006) sur l’accès aux équipements dans la métropole lyonnaise, Motte-Baumvol (2008) sur la dépendance automobile et l’accès aux services en périurbain et de Delage (2012) sur les mobilités pour achats dans la métropole parisienne, mettent l’accent sur différents types de ressources urbaines. Les travaux portant sur le Brésil sont néanmoins plus rares, voire inexistants, du fait du manque d’une base de données nationale détaillant la localisation des activités dans l’espace urbain. En effet, comme précisé dans le chapitre 3, la majorité des travaux se concentrent sur les déplacements domicile-travail.

3.1- Les ressources urbaines : des marqueurs des inégalités sociales

Selon Allen (2015), il existe deux raisons majeures pour lesquelles la littérature urbaine a mis récemment l’accent sur le rôle des ressources urbaines. La première renvoie au dynamisme économique qui est associé à leur concentration et diversité dans un endroit donné. Elle suppose que la provision d’équipements et d’activités engendre des avantages qui suscitent le développement des activités économiques. Par ailleurs, une deuxième entrée met en évidence qu’un accès favorable aux ressources urbaines contribuerait avec la qualité de l’expérience urbaine. Dans un contexte d’évolution des modes de vie et des besoins des individus, les aménités urbaines doivent répondre aux aspirations des populations.

L’absence d’équipements dans certains quartiers populaires ou la densité de services dans les quartiers centraux peuvent être interprétées à la fois comme un effet et comme un

élément de la production des inégalités (Michel et Ribardière, 2017). Les ressources urbaines ressortent ainsi comme des marqueurs des inégalités socio-spatiales. Cette problématique se décline différemment selon les individus et leur localisation dans l’espace urbain, mais aussi selon les ressources que chacun peut potentiellement mobiliser comme les ressources économiques.

Le recours aux ressources dans l’espace urbain est exprimé par la relation entre un besoin et les activités disponibles. Ainsi, l’étude des « ressources urbaines » doit passer par l’identification de ces besoins, afin de repérer les activités, services et biens auxquels les individus souhaitent accéder. Les pratiques quotidiennes des ménages deviennent des sources révélatrices de leurs besoins, puisque les motifs de déplacement expriment eux-mêmes un besoin.

3.2- Comment définir les ressources urbaines ?

Il n’y a pas de consensus sur la définition des « ressources urbaines » : celle-ci peut englober une multiplicité d’éléments, des équipements et services aux réseaux sociaux des individus. Dans ses travaux de thèse, Caubel (2006) définit un « panier de biens » qui est considéré comme « l’interprétation des motifs de déplacements les plus récurrents – structure a minima – des individus, quelle que soit leur appartenance à des groupes sociaux, leur niveau de vie ou leur position sociale.» (Caubel, 2006, p. 179). Il souligne que la définition d’un panier de biens unique pour tous les individus, quelque que soit leur appartenance sociale ou niveau de vie, se justifie du fait que les motifs de déplacement les plus récurrents au-delà du travail et des études restent assez comparables. La définition de ce panier se fait en croisant les motifs des enquêtes ménages-déplacements et les travaux de Kaufmann (2000), qui décline des activités relatives aux sphères domestique, personnelle et de sociabilité/loisirs (Figure 4.10).

Figure 4.10- Définition d’un panier de biens selon Caubel

Motte-Baumvol (2006) pour sa part s’appuie sur la classification de l’Inventaire Communal de l’INSEE (aujourd’hui remplacé par la Base Permanente des Équipements), en retenant quatre gammes de services différents : la gamme de base (alimentation générale, tabac, école primaire, garage etc.), la gamme de proximité (médecin généraliste, pharmacie, bureau de poste, boulangerie, coiffeur etc.), la gamme intermédiaire (dentiste, supermarché, collège, magasin de meubles/vêtements/chaussures, banque etc.) et la gamme supérieure (hôpital, cinéma, laboratoire d’analyse).

Dans cette étude, les ressources urbaines seront envisagées comme les activités liées aux besoins quotidiens des individus, tel que les supermarchés, restaurants, services administratifs, services de santé etc. Ces activités sont regroupées en quatre types principaux d’activités : les commerces, les démarches, la santé et les loisirs. En effet, ces critères correspondent à ceux qui figurent dans les enquêtes ménages déplacements, aussi bien que les principales activités quotidiennes des individus. Pourtant, à l’opposé de Caubel (2006), les motifs « visites aux amis/famille » et « recherche d’emploi », appartenant respectivement aux catégories de loisirs et démarches, ne seront pas retenus. En effet, les déplacements pour les visites ne peuvent pas être repérés de la même manière que des bases de données concernant la distribution des ressources urbaines, car il s’agit des adresses des particuliers. Les tableaux détaillés de la gamme d’équipements retenus (qui sera utilisée dans le terrain français) figurent dans l’Annexe 4.5.