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Importance de la truffe

Partie II : Modèle d’étude : Qu’est ce que la Truffe ?

B. Importance de la truffe

1. Intérêts gastronomiques et culturels

Comme nous avons pu le voir, la truffe a toujours pris une place spéciale durant l’Histoire. Ceci est sans doute dû à son intérêt aromatique et culinaire ainsi qu’à sa rareté qui fait d’elle un produit de luxe, validant l’adage « Tout ce qui est rare est précieux » (« La Chose est tant plus presiouse Come a trouver est plus penouse » (Isopet de Lyon, 50, 17) «E ogni cosa rara, Dicie un dicreto, ch'è tenuto rara » (Barberino) tous deux cités dans (Singer 1947). D’un point de vue gastronomique, à travers l’Histoire, les Hommes ont appris à la cuisiner grâce au savoir de grands noms de la cuisine comme Marcus Gavius Apicius, cuisiner officiel de l’empereur Tibère. Un grand nom de la gastronomie française, Brillat-Savarin, a su créer des plats la mettant en valeur (Brillat-Savarin 1825). La truffe se présente comme un mets délicat rentrant dans la composition de nombreux plats qu’elle sublime (Annexe 2). La

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Truffe, qu’elle soit Truffe de Bourgogne, Truffe noire du Périgord ou Truffe blanche d’Alba fait partie intégrante de certaines régions de France et d’Europe (Espagne et Italie). Dans toutes ces régions, de nombreux évènements existent pour la promouvoir d’un point de vue culturel comme les foires, les marchés. La truffe est aussi célébrée par l’existence d’associations et de confréries à travers les pays et les régions. En Côte d’Or par exemple, l’association « La Truffe Côte d’Orienne » tient le rôle de relai pour le syndicat des producteurs de truffes de la Côte d’Or, tant vis-à-vis de ses actions et objectifs qu’au niveau de sa reconnaissance par les instances interrégionales et nationales (http://www.truffedebourgogne.asso.fr/). De même, « La Confrérie de la Truffe de Bourgogne » contribue elle aussi, depuis 1994, à promouvoir la truffe de Bourgogne et son rayonnement par l’existence de manifestations (http://www.confreriedelatruffedebourgogne.asso.fr/).

2. La trufficulture

La trufficulture est la culture de la truffe. Différentes techniques et étapes sont menées en trufficulture afin d’optimiser la production, le cavage (récolte) et la commercialisation. C’est au début du 19ème siècle que Joseph Talon mit au point la première technique de trufficulture (Hall et al. 2003). Il sema des glands récoltés sous

un chêne truffier Tuber melanosporum et une dizaine d’année plus tard, de

nombreuses truffes furent récoltées. Même s’il fut imité et copié, cette technique resta toutefois très aléatoire avec des résultats plus ou moins probants. Cependant, il est à noter que grâce à lui, la récolte de la truffe n’était plus seulement une simple cueillette comme pour d’autres champignons mais une récolte réfléchie et anticipée. A partir de ce moment, de nombreuses plantations truffières ont vu le jour et notamment après l’invasion du phylloxera dans les années 1870 qui poussa certains

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viticulteurs à changer leurs vignobles en plantations truffières. Tuber melanosporum

fut la première espèce Tuber cultivée mais nous verrons que d’autres espèces sont

depuis cultivées. A partir du début du 20ème siècle, la production de truffe baissa

drastiquement (Lefevre and Hall 2001; Olivier 2000). Par exemple en France, elle

passa de plus de 1000 tonnes par an au début du 20ème siècle à moins de 100 tonnes

par an en 2001 (Tuber melanosporum et Tuber brumale confondus) (Figure 22) (Hall

et al. 2003). Différentes raisons peuvent être invoquées comme l’exode rural et les conséquences des deux grandes guerres par exemple.

Ce n’est que dans les années 1960/1970 que des techniques d’inoculation, plus scientifiques, donnèrent de meilleurs résultats. Les premières expérimentations d’inoculations de plants truffiers ont été menées par une équipe italienne en 1967 sur

le modèle Tuber maculatum Vitt. / Pinus strobus L. (Fassi and Fontana 1967). En

France, les premiers essais ont eu lieu sur Tuber melanosporum au sein de l’Institut

National de la Recherche Agronomique (INRA) de Clermont-Ferrand en 1970 en reprenant les découvertes fondamentales des Italiens (Chevalier and Grente 1979). De façon simplifiée, la technique de base consiste à inoculer soit les graines de plante-hôte soit les jeunes plantules avec les spores de truffes sur support de culture stérile.

Figure 22 : Production de Tuber melanosporum et de Tuber brumale en France de 1903 à 2001.

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L’apport d’inoculum se fait par une préparation à base de broyat de truffes (donc apport de spores). Cet inoculum est mis au contact des jeunes racines de plants hôtes (Chevalier et al. 1973). C’est la technique d’inoculation la plus employée par les pépiniéristes et est la plus efficace. D’autres techniques cependant existent pour inoculer les plants-hôtes comme l’apport d’inoculum via des racines porteuses de mycorhizes (technique d’inoculation par contact) (Chevalier and Grente 1973). L’inconvénient de cette méthode est le risque d’apporter des contaminations de la « plante-mère ». Enfin, une autre technique consiste à utiliser des cultures mycéliennes de truffes comme inoculum (Chevalier and Grente 1973; Fontana and Palenzona 1969; Palenzona et al. 1972). La production de mycéliums purs en grande quantité reste cependant le problème principal pour son utilisation à grande échelle. Elle reste tout de même utilisée en laboratoire. Côté plante, plusieurs essences végétales peuvent être utilisées pour la culture truffière. Le choix des espèces

végétales se fait en fonction des préférences écologiques de l’espèce Tuber choisie mais

aussi de celles de plante elle-même (Chevalier and Frochot 2002). En France, de façon générale, deux essences d’arbres sont les plus utilisées : les chênes (chêne vert (Quercus ilex L.) et chêne pubescent (Quercus pubescens L.) en région méridionale ;

chêne pédonculé (Quercus robur L.) et chêne sessile (Quercus petraea Matt.) en

climat plus tempéré) et le noisetier commun (Corylus avellana L.) adapté à tout

climat mais qui est gourmand en eau. Le charme, le pin noir d’Autriche, le cèdre ou le tilleul sont également des plantes utilisées par les pépiniéristes pour produire des plants truffiers. Les plants, une fois inoculés poussent dans un substrat désinfecté et ayant les propriétés physico-chimiques appropriées au maintien de la mycorhization (Mannozzi-Torini 1970). L’enjeu est d’éviter toute contamination par d’autres espèces fongiques tout au long de l’établissement de la symbiose. Une fois la colonisation

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racinaire quasiment complète, les plants sont plantés en champs. Une autre phase de la trufficulture prend le relais : le maintien de la mycorhization et donc l’entretien de la truffière. Cette phase ne sera pas développée dans ce rapport, cependant il est important de citer que l’antécédent cultural de la truffière (Frochot et al. 1990), les conditions pédoclimatiques locales et le travail du sol et de la truffière sont des éléments importants en trufficulture.

Après les années 1970 et donc, après l’essor de la mise au point de plants truffiers, la commercialisation de ces derniers s’est effectuée, notamment sous licence INRA par la société AGRI-TRUFFE. Cette commercialisation et production à grande échelle a permis un regain en trufficulture, et de nos jours plusieurs pépiniéristes français sont producteurs de plants truffiers. En France, la Fédération Française de la Trufficulture (FFT) regroupe certains trufficulteurs et a pour rôle de coordonner les différents acteurs et partenaires de la filière trufficole. La FFT, depuis 1999 fait partie du Groupement Européen Tuber (GET) qui rassemble les principaux pays européens producteurs comme l’Italie et l’Espagne par exemple.

A travers cette partie, nous avons vu que la truffe prend une part importante, que ce soit sur un plan culturel et historique qu’économique avec la filière trufficole. Dans la dernière partie, nous allons voir plus en détails les caractéristiques de la truffe de Bourgogne Tuber uncinatum. Nous verrons également quelles sont ses propriétés et en quoi elles rendent cette espèce intéressante sur un plan génétique et aromatique.

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IV. La Truffe de Bourgogne

Tuber uncinatum est communément appelée « Truffe de bourgogne ». Comme son nom l’indique, on la trouve en région Bourgogne mais pas seulement. Dans la prochaine partie, nous verrons tout d’abord que sa position taxonomique n’est pas clairement établie. Puis, nous verrons les diverses propriétés et caractéristiques du taxon.