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Implication en santé publique

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during college years: a longitudinal study on the i-Share

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T- J, Chen M-H (2018) Risk of suicide attempts in adolescents and young adults with attention-deficit

3. Implication en santé publique

Les travaux de cette thèse pris dans leur ensemble confirment et apportent des éléments nouveaux sur le lien entre l’estime de soi et un spectre large de conséquences en santé, allant

155 des comportements liés à la santé, en passant par la santé perçue, et pour finir aux idées

suicidaires. Une estime de soi faible entrainerait la mise en place de comportements néfastes pour la santé, une santé globale perçue par l’étudiant moins bonne et une plus forte propension aux pensées suicidaires, le tout reflétant un profil pathologique de l’estime de soi. Au contraire une estime de soi plus élevée est associée à des comportements bénéfiques pour la santé, une meilleure santé perçue et moins de pensées suicidaires. Ceci est en accord avec les études empiriques menées chez les adolescents et les adultes (Baumeister et al., 2000; Mann et al., 2004; Orth, Robins, & Widaman, 2012). Le champ de la recherche théorique sur l’estime de soi permet de comprendre les mécanismes impliqués dans cette association. Selon les travaux de Harter, le fait de présenter une bonne estime de soi par une meilleure conscientisation de sa valeur peut permettre aux individus de faire de meilleurs choix notamment en adoptant des comportements favorables à la santé (Harter, 1999). D’autre part, une estime de soi élevée, par l'attribution d'un regard positif sur les aléas de la vie, augmente la capacité à mettre en place des stratégies adaptées (Harter, 1999). Ceci permet de faire face aux situations du quotidien ce qui augmente la capacité à ressentir du bien-être et plus globalement la capacité de résilience (Harter, 1999). Il reste cependant certains aspects ne suivant pas cette logique ; on peut citer la consommation d’alcool et le nombre de partenaires sexuels qui étaient plutôt associés à une haute estime de soi. Ce résultat n’est pas complètement contre-intuitif chez des étudiants à l’université et des jeunes adultes. En effet, ce sont des comportements socialement acceptés dans cette population et qui font partie d’expériences communes à cette tranche d’âge. Une autre explication de ces résultats pourrait être l’effet des hauts niveaux d’estime de soi associé au narcissisme. En effet certains auteurs, comme Baumeister, interrogent et alertent sur l’influence néfaste pour les comportements et la santé de hauts niveaux d’estime de soi quand ceux-ci sont associés à du narcissisme (Baumeister et al., 2000).

Cette thèse met aussi en évidence la pertinence de la période des études universitaires pour mener des interventions ciblant l’estime de soi. D’une part, les études démontrent que l’estime de soi est associée à la santé chez les étudiants. D’autre part, l’université est un environnement propice à la mise en place et à l’évaluation d’interventions. La population ciblée est bien délimitée et présente à un même endroit à un même moment. De plus, les infrastructures de l’université peuvent servir d’appui aux interventions (e.g. les espaces santé, le tutorat, les services de vie étudiante, le Centre Régional des Œuvres Universitaires et Scolaires (Crous)). La création d’un Centre National d’Appui à la Qualité de vie des étudiants en santé en France pourrait également être un tremplin pour la mise en place d’intervention ciblant l’estime de soi. Il reste à déterminer quelles interventions seraient efficaces dans ce contexte particulier. Il existe des interventions variées mais peu ont été évaluées et peu ciblent la population étudiante Cependant, certaines interventions semblent prometteuses. Nous pouvons citer les interventions basées sur l’activité physique qui ont montré une bonne efficacité (Ekeland et al., 2005; Liu et al., 2015) et qui semblent d’autant plus pertinentes que la revue de la littérature menée dans le cadre de cette thèse a montré que l’estime de soi et l’activité physique étaient associés. Les thérapies cognitivo-comportementales représentent également une solution efficace mais impliquent une implémentation ciblée sur des groupes à risques. D’autres interventions pourraient être pertinentes (e.g. mentorat, meilleure connaissance de soi, programmes éducatifs) mais doivent encore être évaluées afin de savoir

156 si elles sont efficaces. Finalement, il existe plusieurs possibilités en termes d’interventions et

je recommanderai une mise en place à différents niveaux. D’une part, une intervention plutôt universelle, ciblant un spectre large d’étudiant et s’appuyant sur une approche positive pourrait être proposée. Celle-ci pourrait s’appuyer sur de l’activité physique couplée à des exercices de connaissance de soi à faire individuellement (par le biais d’une application smartphone par exemple). L’approche positive parait centrale pour réussir à toucher un public large. Contrairement aux approches traditionnelles de psychiatrie ou de psychologie qui visent à élucider les causes d’une maladie mentale et développer des stratégies thérapeutiques, la psychiatrie ou psychologie positive proposent d’étudier les « caractéristiques psychosociales positives » telles que la résilience, l’optimisme et l’engagement social (Seligman & Csikszentmihalyi, 2000; Seligman et al., 2005). Cette approche vise à améliorer le bien-être plutôt que de soulager les symptômes psychologiques. En effet, les évènements cliniques étant assez rares à ces âges, l’approche de psychiatrie positive permet d’étudier une caractéristique déjà présente, pouvant être optimisée et qui a un impact potentiel sur la santé à long terme. Ceci est totalement applicable à l’estime de soi qui pourrait être renforcée chez les étudiants et permettrait de moduler les états de stress ou d’anxiété lié à cette période de la vie (Dumont & Provost, 1999; Karatas & Cakar, 2011). Une approche préventive plutôt que curative est également plus acceptable et pertinente chez les jeunes. Se sentant plus concernés par l’optimisation d’une capacité et par la perspective immédiate de gestion de leurs états de stress inhérents aux études, les étudiants s’investiraient possiblement plus dans ce type d’intervention. D’autre part, des interventions ciblées pourraient être proposées à des étudiants déjà en difficultés et présentant une estime de soi basse. Des interventions de type thérapies cognitivo-comportementales pourraient être proposées dans ce contexte (Kolubinski et al., 2018; Lim et al., 2010; Terp et al., 2019). Pour finir, les interventions de type mentorat pourraient être proposées dans le cadre de filière ou de période rendant les étudiants plus vulnérables à une diminution de leur estime d’eux-mêmes (par exemple lors de la première année commune aux études de santé) (King et al., 2002). Ces interventions devront être évaluées en prenant en compte l’effet sur le niveau d’estime de soi (global et dimensionnel si possible) mais aussi la santé perçue qui permet d’avoir une idée globale de l’impact sur la santé.

Enfin, le rôle de l’estime de soi au cœur des mécanismes d’action du TDA/H sur les pensées suicidaires ont des implications cliniques. Rappelons que le TDA/H est présent à l’université et 25% des aides ou des aménagements des études est en rapport avec ce trouble dans de nombreux pays (Weyandt & DuPaul, 2006). En France le TDA/H reste relativement mal connu. Les travaux de cette thèse permettent pour la première fois de mettre en évidence le fait que l’estime de soi joue un rôle de médiateur entre les symptômes du TDA/H et les pensées suicidaires chez les étudiants. Ceci ouvre de nouvelles perspectives pour identifier les étudiants souffrant de TDA/H et potentiellement plus vulnérables aux pensées suicidaires du fait de leur estime de soi plus faible. Ainsi, l’évaluation de l’estime de soi doit être recommandée dans la prise en charge du TDA/H aux côtés de l’évaluation des symptômes dépressifs, afin qu’une prise en charge spécifique puisse leur être proposé en lien avec la problématique suicidaire (Haute Autorité de Santé, 2014; Mazet & Darcourt, 2000).

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