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Implication des aspects cognitifs dans la plongée

B. Accident de décompression (ADD)

3. Implication des aspects cognitifs dans la plongée

Plusieurs problèmes de santé peuvent être engendrés par la pratique de la plongée, la plupart ayant été l’objet de recherches depuis de nombreuses années. Nous nous limiterons ici à relater les études qui ont investigué les aspects neurologiques et neuropsychologiques.

Les observations portent le plus souvent sur des plongeurs professionnels travaillant souvent dans des conditions beaucoup plus extrêmes que celles rencontrées par le plongeur amateur. Les résultats des études, s’intéressant aux lésions cérébrales visibles en résonance magnétique et causées par la plongée, divergent.

Par exemple, les recherches menées par Fueredi (Fueredi,1991), comparant 19 plongeurs professionnels ayant travaillé lors de la construction d’un tunnel à 30 sujets (choisis dans une population normale). Les IRM cérébrales des plongeurs démontrent un nombre plus important de lésions dans la matière blanche, relativement à la population contrôle. Cependant, bien qu’aucun des plongeurs ne présente de trouble neurologique, il n’est pas précisé si certains d’entre eux ont été sujets à des accidents de décompression. Cette étude n’a pas mis en évidence de corrélation entre la gravité ou le nombre de lésions et l’index d’exposition; les sujets ne différaient pas non plus significativement du groupe contrôle dans les tests neuropsychologiques.

Un groupe allemand (Hutzelmann 2000), a essayé de répliquer les résultats avec 59 plongeurs professionnels et un groupe contrôle de 48 sujets, mais n’a mis en évidence aucune différence significative. Par contre, une équipe japonaise (Yanagawa 1998) étudiant 25 plongeurs professionnels démontre à nouveau une différence significative du nombre de lésions entre les contrôles (25 sujets) et les plongeurs.

Reul (Reul 1995) qui étudiait par contre des plongeurs amateurs (52 plongeurs), en les comparant à des contrôles (50 sujets), a mis en évidence significativement plus de lésions hyper-intenses chez les plongeurs que les non-plongeurs. Ces lésions se trouvent en majorité dans la substance blanche sous-corticale et les noyaux gris centraux. Aucun facteur de risque (nombre de plongée, nombre d’année de pratique, durée moyenne des plongées, profondeur moyenne des plongées, ou accidents de décompression) n’a pu être identifié, autre que la

évidence un nombre de sujet plus important avec des lésions visibles sur l’IRM que le groupe contrôle. Dans cette étude, une corrélation entre le nombre de lésions, une hypercholestérolémie et des remontées lors des plongées de plus de 10m/min a pu être établie (Tripodi 2004).

Edmonds, lors de ses recherches sur les plongeurs d’Ormeaux en Australie (Edmonds 1985, 1987) met en évidence des déficits dans les tests neuropsychologiques, par rapport à la norme. Il est cependant important de noter que cette population est très peu contrôlée et plusieurs de ces plongeurs ont subi un ou plusieurs accidents de décompression, et ne peuvent de ce fait être considérés comme des plongeurs non pathologiques.

D’autres groupes ont étudié des plongeurs professionnels n’ayant jamais eu d’accident de décompression, par exemple, en Norvège, Bast-Pettersen (Bast-Pettersen 1999) a étudié les effets neuropsychologiques à long terme de la plongée. La conclusion de l’auteur était que la seule différence significative retrouvée entre les plongeurs (20) et le groupe contrôle (32) portait sur un temps de réaction légèrement augmenté pour les premiers, sans troubles neuropsychologiques associés.

Tetzlaff (Tetzlaff 1999) lors d’une étude sur 20 plongeurs professionnels (air comprimé), versus 20 contrôles, a montré une diminution des capacités cognitives chez les plongeurs sous forme de diminution de la flexibilité mentale (TMTB), de la poursuite visuelle (symbol digit test), de la mémoire spatiale, ainsi que lors du rappel verbal ; ces problèmes mnésiques corrélant avec le nombre d’années de pratique et la profondeur maximale à laquelle les plongeurs descendent. Le nombre de lésions sur les IRM ne diffèrent pas entre les deux groupes, par contre, au sein du groupe « plongée » leur nombre corrélait avec les heures totales de plongée. La corrélation entre les données imagerie et les tests neuropsychologiques ne mettaient pas en évidence de résultats significatifs.

Aarli et son équipe (Aarli 1985), quant à eux, ont mis en évidence des troubles mnésiques et de la concentration, chez des plongeurs professionnels, juste après une plongée simulée en caisson à -350 m La même équipe (Todnem 1991) retrouve un nombre plus élevé de lésions sur les IRM des plongeurs que sur ceux des sujets contrôles lors d’une étude concernant 40 plongeurs professionnels ayant exécuté des plongées profondes (190-500m). Ces plongeurs

Vaernes et collaborateurs (Vaernes 1987) ont étudié les effets neurologiques et neuropsychologiques immédiats sur 10 plongeurs professionnels chez qui ils ont reproduit les conditions de plongée à 350m sous heliox dans un caisson hyperbare, avec l’administration de tests neuropsychologiques, lors de la compression et à distance. Les auteurs mettent en évidence des problèmes mnésiques lors de la plongée, ainsi que jusqu’à un mois après. Une deuxième étude a été menée auprès de 82 plongeurs professionnels divisés en deux groupes selon leur profondeur de plongée moyenne, testés avant, juste après puis 2-3 fois jusqu’à trois ans et demi après leur plongée profonde. On observe une diminution des performances mnésiques et des tests complexes visuo-moteurs chez les plongeurs jusqu’à une année après leur plongée profonde (Vaernes 1989).

Enfin, Edmonds (Edmonds 1985, 1987, 1992) dans sa revue d’articles concernant les problèmes cognitifs et neurologiques liés à la plongée met en évidence des changements aigus et temporaires dus à la toxicité des mélanges gazeux, à l’hypoxie, aux embolies gazeuses ainsi qu’aux accidents de décompression. Tout en reconnaissant la possibilité d'un cumul d'événements conduisant à une diminution des capacités intellectuelles lors de plongées répétées et excessives, l’auteur ne relate aucun article étudiant ces conditions, et il reste donc à mettre en évidence que cette sommation d’événements pourrait avoir une influence sur d’éventuels problèmes neurologiques ou neuropsychologiques.

Bien que les effets de la plongées sur les capacités cognitives d’un sujet restent controversés, la majorité des auteurs s’entendent pour admettre que l’on constate un certain ralentissement lors d’épreuves de flexibilité, ainsi que des troubles mnésiques discrets. La plupart de ces études impliquent toutefois des plongeurs professionnels, qui de surcroît ont subi des accidents de décompression. Il est donc difficile d’extrapoler, sur cette base là, des résultats pour une population de plongeurs amateurs prudents qui n’auraient jamais eu de problème de décompression.