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Impact des niveaux d’eau extrêmes sur les barrières : de l’érosion à la

Chapitre 1 : État des connaissances sur les submersions marines et leur signature

1.1. Les submersions marines

1.1.2. Impact des niveaux d’eau extrêmes sur les barrières : de l’érosion à la

Sallenger (2000) a proposé une échelle d’impact des tempêtes sur les barrières littorales en comparant les altitudes de la transition entre le haut de plage et la barrière (Dlow) et de la crête de la barrière (Dhigh) avec les altitudes minimum (Rlow) et maximum (Rhigh) atteintes par le runup (setup + swash) induit par les vagues (Fig. 1.10).

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Figure 1.10. À droite, définition des variables utilisées dans la mesure de l’impact des tempêtes sur les barrières littorales. À

gauche, définition des quatre régimes caractérisant l’impact des tempêtes sur les barrières. Le seuil entre les régimes de swash et de collision est en pointillé car sa valeur, ou Rhigh/ Dhigh= Dlow/ Dhigh, est dépendante du profil de plage, tandis que tous les autres seuils sont uniques (d’après Sallenger, 2000).

Il définit ainsi quatre régimes (Fig. 1.10) :

(1) Le régime de swash : Le jet de rive est confiné à la plage et n’affecte pas la dune (Fig. 1.11). En condition de tempête, la plage s’érode et le sable est transporté vers le large par les courants de retour ou latéralement par le jet de rive ou le courant de dérive littorale, où il est redéposé ; et ne retournera à la plage qu’au retour de conditions plus calmes, sous l’action des courants oscillatoires principalement dirigés vers la côte en conditions de beau temps (Héquette, 2001).

(2) Le régime de collision est atteint à partir du moment où l’altitude maximum du runup atteint celle de la base de la barrière, ou la dépasse, forçant l’érosion du pied de dune et éventuellement le glissement de blocs depuis la partie supérieure de la dune,

Page 53 ce qui engendre la formation d’une encoche d’érosion littorale (e.g., Castelle et al., 2015 ; Fig. 1.12).

(3) Le régime d’overwash intervient lorsque l’altitude maximum du runup égale ou dépasse la crête de la barrière. Il y a alors franchissement de la dune par « paquets de mer » (Fig. 1.13). Ce régime peut être détaillé en deux sous régimes, comme proposé par Donnelly et al. (2006) : (1) si Rhigh=Dhigh, la vague vient mourir sur la crête de la dune ; ainsi, le sable érodé et transporté depuis la plage et le front de la dune se dépose sur la crête, ce qui engendre une accrétion de la crête de la dune ; (2) si Rhigh>Dhigh, l’écoulement lié à la vague dépasse la crête de la dune ; la limite entre érosion et dépôt se décale vers le continent ; la crête de la dune s’érode et le dépôt se fait dans la zone en arrière de la dune.

Figure 1.11. Photo d’une plage en régime de swash pendant une tempête, le pied de dune n’est pas touché

(Masselink and van Hetteren, 2014).

(4) Le régime d’inondation : Lorsque Rlow≥Dhigh, la barrière est continuellement inondée et les volumes d’eau de mer pénétrant dans les terres peuvent être très importants (Fig. 1.14).

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Figure 1.12. À gauche, barrière en régime de collision pendant une tempête, le pied de dune est sapé par les vagues

(Masselink and Van Hetteren, 2014). À droite, le sapage des dépôts en pied de dune déstabilise le front de la dune, entraînant le glissement de blocs sur le front de la dune et la création d’une encoche d’érosion littorale (Pointe de Gatseau, sud de l’île d’Oléron).

Figure 1.13. Franchissement d’une brèche dans la dune par des paquets de mer lors d’une surcote combinée à une marée

haute au sud de l’île d’Oléron en février 2016.

La barrière pouvant être fortement érodée au cours d’une tempête, son altitude maximum, ou Dhigh, peutdiminuer au cours de l’évènement. En conséquence, si une brèche se crée dans la barrière, une côte subissant un régime de collision peut ponctuellement passer en régime d’overwash.

Page 55 Les submersions marines résultent des régimes d’overwash et d’inondations. De manière similaire à Sallenger (2000), Cariolet (2011) distingue différents modes de submersion marine (Fig. 1.15) qui peuvent survenir aussi bien sur des barrières naturelles comme des dunes de sable, que sur des ouvrages anthropiques de tels que les digues :

Figure 1.14. Submersion continue des défenses côtières de la Nouvelle Orléans, en bordure du lac Pontchartrain

lors du passage de l’ouragan Katrina en août 2005 (crédit photo : D. McClosky).

• La submersion par franchissement de paquets de mer, qui correspond au régime d’overwash de Sallenger (2000), au cours duquel les vagues viennent se briser sur la barrière et où seule une partie du volume d’eau franchit la barrière à chaque vague, ou au passage des vagues les plus hautes. Ce mode de submersion peut être qualifié de « wave overtopping » (Pullen et al., 2007) quand ce sont des structures de défense côtière qui sont concernées ; à ne pas confondre avec l’ « overtopping » défini par Orford et Carter (1982) où le jet de rive atteint tout juste la crête de la barrière sableuse, engendrant ainsi du dépôt de sédiment sur la crête de la dune.

• La submersion par rupture de barrière résulte de l’érosion de la barrière par les vagues principalement en régime de collision. Ce régime érosif de la partie frontale de la barrière peut perdurer pendant un temps très long. Il est généralement dû à une modification des apports sédimentaires par la dérive littorale à la suite de la mise

Page 56 en place de structures anthropiques comme des épis, ou une migration de passe de marée, ou encore à des conditions de vague de tempête (Matias et al., 2009 ; Chaumillon et al., 2014). Cette phase érosive réduit l’épaisseur et éventuellement la hauteur de la dune en certains points de faiblesse lesquels peuvent être des portions de dune moins épaisses, ou des zones de dépression dans l’altitude de la dune. Ces zones peuvent être la conséquence: (1) d’un antécédent morphologique comme une ancienne passe de marée refermée, des alternances de crochons et de dépressions en arrière de la dune sur les flèches sableuses, une ancienne zone de rupture du cordon (e.g., Phantuwongraj et al., 2013) ; (2) de l’action du vent ; ou encore (3) du piétinement par l’homme ou les animaux (Matias et al., 2008). C’est généralement au niveau de ces points de faiblesse et de plus faible altitude de la crête de la barrière que les brèches se mettent en place. En effet, lors d’une tempête, l’altitude de la barrière (Dhigh) n’étant pas uniforme, l’impact du niveau d’eau sera variable et les premières zones à subir l’overwash seront ces points de moindre altitude. L’overwash localisé va contribuer à l’érosion ponctuelle de la crête de la dune (Matias et al., 2009), et accentuer les points de faiblesse qui vont rapidement céder. L’ouverture d’une brèche permet une submersion localisée et canalisée, ainsi que la pénétration rapide de gros volumes d’eau dans la zone en arrière de la barrière.

Figure 1.15. Les différents modes de submersions des barrières littorales. Les ruptures de digues existent aussi mais ne sont

Page 57 • La submersion par débordement ou par rupture totale correspond au régime

d’inondation de la barrière et est généralement due à un niveau d’eau extrême qui dépasse en altitude l’ensemble de la crête de la barrière. Ce type de submersion entraîne l’inondation très rapide des zones côtières normalement protégées, par des volumes d’eau très importants, comme cela a été le cas lors de l’ouragan Katrina et la submersion de la ville de la Nouvelle Orléans (Fig. 13). La submersion par débordement d’une barrière sableuse est plus fréquente sur les flèches sableuses où les dunes sont généralement de plus faible altitude, après des périodes d’overwash répétées qui ont suffisamment amoindri l’altitude la dune, ou par élargissement de brèches qui peuvent éventuellement devenir coalescentes à d’autres brèches (Donnelly et al., 2006). Ce type de submersion engendre généralement une érosion très importante de la barrière, laissant derrière elle une dune rasée (e.g., Donnelly et al., 2006 ; McCall et al., 2010).