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B. Impact du programme d’ETP sur les traitements et les indicateurs biométriques

2. Impact sur les indicateurs biométriques

a) Une tendance à l’amélioration du bilan lipidique

Concernant le LDL, on notait une diminution minime mais significative entre l’entrée et la sortie du programme (-0.09g/L (p=0.05)).

Pour les TG, la moyenne tendait à descendre en fin de programme (-0.1g/L) mais cette différence n’était pas significative (p=0.06).

Même si la moyenne du HDL, tendait également à descendre, celle-ci restait à 0.50g/l correspondant à un facteur protecteur cardiovasculaire.

Dans les travaux de recherche du Dr FIZE, on notait également une tendance à l’amélioration du bilan lipidique (avec une diminution du LDL et des TG) (1).

Selon les recommandations HAS de février 2017 (35), un traitement par statine doit être mis en place chez les patients diabétiques afin de diminuer le taux de LDL indépendamment de sa concentration initiale.

Pour la plupart des patients DT2, le taux de LDL cible est < 1.3g/l voire 0.7g/l pour ceux ayant un risque cardiovasculaire très élevé. Si notre étude tend à montrer une tendance à l’amélioration du LDL, certains patients inclus ne sont probablement pas suffisamment traités car à très haut risque cardio vasculaire donc au-dessus des objectifs recommandés de 0.7g/l (33). Il aurait été

119 intéressant ici de prendre en compte le calcul du risque cardiovasculaire global ainsi que le traitement hypolipémiant en début et en fin de programme afin de savoir si des modifications ont été opérées dans ce sens.

Néanmoins, il est important de souligner que la HAS préconise l’exploration d’une anomalie lipidique une fois par an (64). Or la durée moyenne de suivi de notre étude étant de 11 mois par patient, les bilans lipidiques étaient souvent recontrôlés à moins d’un an d’intervalle.

b) Une tendance à l’augmentation du tour de taille malgré une tendance à la perte de poids et à la diminution de l’IMC

Lorsque l’on compare les moyennes des TT, poids et IMC en début et en fin de traitement, on constate que les différences ne sont pas significatives mais que le tour de taille a tendance à évoluer dans le sens inverse que celui du poids et de l’IMC.

La plupart des études évaluant l’impact des programmes d’ETP chez patients diabétiques se sont intéressées à l’hémoglobine glyquée. Quelques rares études ont pris en compte le poids.

Dans l’étude du Dr FIZE, on observait une perte de poids significative de 2 Kg, soit une moyenne de -2.42% du poids initial (1). Celle-ci était corrélée à une augmentation de l’activité physique chez près du tiers de la population. Notre étude n’a pas tenu compte de l’évaluation précise de l’AP, ne permettant pas d’en connaître l’impact concret sur la perte de poids de notre population. Dans l’analyse critique de la littérature du Service Evaluation médico-économique et santé publique de la HAS (65) et plus particulièrement dans la synthèse de la revue de la littérature publiée par le NHS, 3 études sur 8 ont démontré un effet positif sur le poids chez les patients DT2 ayant bénéficié de programme se déroulant sur une longue période (1 an ou plus). Cependant, ces effets positifs sont de faible niveau de preuve et ne permettent pas la modélisation d’un programme d’ETP satisfaisant en termes d’efficacité et reproductible.

D’ailleurs, les résultats de l’étude Loveman et al. {Loveman 2003 99} (65) sur l’analyse de l’impact de l’ETP chez les DT2 concernant, entre autres, l’IMC, ne sont pas concluants, notamment [concernant les programmes couvrant un large éventail de thèmes], comme c’est le cas dans notre étude.

120 Ainsi, on pourrait penser que la tendance à l’amélioration de l’IMC et le poids seraient le résultat de l’impact du programme d’ETP notamment sur les RHD des patients.

En revanche, l’augmentation de la moyenne du TT étant de 0.03 cm, il est difficile d’en tirer des conclusions… Serait-elle liée à une augmentation de la masse maigre en lien avec une potentielle augmentation de l’AP au sein de notre population à l’issue du programme d’ETP ? Afin de l’évaluer, un calcul de l’impédancemétrie à l’entrée et à la sortie du programme aurait été nécessaire.

Enfin, rappelons que selon les recommandations conjointes européennes et américaines de 2012 prenant en compte les résultats des études ACCORD, ADVANCE, VADT et UKPDS, une perte de poids, même modeste (5 à 10% du poids initial), chez le patient DT2, suffit à améliorer l’équilibre glycémique. Cependant, celle-ci doit répondre à des objectifs fixes individualisés , répondant à un programme diététique et sportif élaboré en accord avec le patient (66). Ainsi, un programme d’ETP ne se substitue pas à un suivi individuel qui permettrait des résultats plus probants grâce à la prise en compte des habitudes alimentaires et du niveau d’activité physique du patient, mais également d’autres facteurs tels que le stress, le mode de vie, les facteurs sociaux et familiaux, l’environnement, la motivation et de la phase de changement dans laquelle se situe le patient (37) (cf. Phases de changement de Prochaska & DiClemente).

c) Une amélioration significative de l’HbA1c

Notre étude montre une nette amélioration de l’équilibre glycémique à l’issue du programme d’ETP. En effet, on note une perte significative de 0.8 points d’HbA1c sur la moyenne finale et ce, sans modification significative du traitement pharmacologique antidiabétique, indiquant un réel impact du programme éducatif sur l’équilibre glycémique.

Ce chiffre est essentiel lorsque l’on sait que la survenue des complications micro et macrovasculaires chez le diabétique sont directement liées au taux d’hémoglobine glyquée. D’ailleurs l’étude UKPDS réalisée de 1977 à 1991, impliquant 20 centres britanniques de diabétologie et 3867 patients, montraient déjà le bénéfice considérable d’un équilibre glycémique correct quant à la survenue d’évènements liés au diabète (- 12% de complications avec – 0.9 points d’HbA1c chez les patients traités de façon intensive par rapport à ceux traités de façon conventionnelle)(66,67).

121 Une méta-analyse des essais ACCORD, VADT et ADVANCE a même montré qu’une réduction de 1% de l’HbA1c réduisait le risque relatif d’IDM de 15% (66).

Notre résultat est d’autant plus remarquable que dans la seule étude similaire menée en Martinique (celle du Dr FIZE (1)), on observait une amélioration significative de 0.3 points soit plus de 2 fois moins importante que la nôtre. Ces résultats sont néanmoins à nuancer puisque la population n’y était pas strictement superposable à celle de notre étude (plus âgée (64, 9 ans en moyenne)).

Nos résultats sont en accord avec les données de la littérature dont la plupart des études s’accordent sur l’impact positif de l’ETP sur l’équilibre glycémique chez les patients diabétiques. Ainsi, une étude menée en 2014 à l’hôpital de jour du service de diabétologie de l’hôpital de la Pitié à Paris sur 204 patients, montrait une perte significative de 0,47±1 % (p<0,001) à 6 mois du début du programme (68). De même, le programme d’ETP du réseau Association Réseau Vichy Diabète (ARVD), lancé en 2002, a permis de diminuer le taux d’HbA1c chez 56% des patients DT2 (69). Cet effet positif sur le taux d’HbA1c se vérifie dans de nombreuses autres études (revue de la littérature de Worswick et al. en 2013, étude look AHEAD, DESMOND 1 et 3 et les méta- analyses de Norris en 2002, de la Cochrane Collaboration en 2003 (- 0.8% p<0.00001), de Sojhania et al. en 2006 …)(1,70).

A noter néanmoins que certaines de ces études, de même que les recommandations internationales, nuancent ces résultats positifs en mettant l’accent sur le risque d’hypoglycémie associé à un équilibre glycémique strict. Ainsi, les 3 études ADVANCE, VADT et ACCORD dont les objectifs glycémiques étaient compris entre 6 et 6.5% d’HbA1c ne sont pas parvenu à démontrer une diminution significative du risque cardiovasculaire (prouvée secondairement dans le cadre d’études plus récentes). Dans l’étude ACCORD, on a même déploré une augmentation de 22% du taux de mortalité chez les sujets ayant bénéficié d’un traitement intensif (66).

Quoi qu’il en soit toutes s’accordent sur l’intérêt d’un contrôle glycémique précoce dans l’histoire de la maladie sur la diminution du risque de survenue des complications liées au diabète (66). Enfin, il faut tout de même préciser que malgré la perte considérable de points d’HbA1c dans notre étude, la moyenne finale était de 7.8%, donc au-dessus des objectifs glycémiques des recommandations internationales < 7% en moyenne (27,66), d’autant que notre population était jeune. Néanmoins, l’impact du programme n’en reste pas moins probant, faisant supposer une

122 persistance de l’amélioration de l’hémoglobine glyquée dans le temps. En témoigne une tendance à l’augmentation du taux de patients dont l’HbA1c était < 7% en fin de programme (passant de 19.4 % à 27.8% (p=0405)).

Pour finir, il ne faut pas oublier que dans le cadre d’un programme d’ETP, l’équilibre glycémique résulte de plusieurs phénomènes complexes relevant de facteurs subjectifs directement en lien avec l’intervention éducative elle-même, mais aussi de [la motivation des patients, des compétences des éducateurs, des aspects organisationnels et financiers] rendant chaque programme unique donc par essence difficilement comparable (70).

d) Une amélioration significative de la tension artérielle

Dans notre étude, on a observé une augmentation du taux de patients ayant une bonne TA entre l’entrée et la sortie du programme d’ETP, passant de 21.1% à 52.6% et cette différence était significative (p= 0.004).Ces résultats rejoignent ceux du réseau ARVD, dont le programme d’ETP était adressé aux patients DT1 et DT2, qui retrouvent une diminution de la TA chez 22% des patients (69).

De façon générale, dans la revue de la littérature, il est difficile de mettre en évidence une amélioration significative des paramètres biocliniques, dont la TA, autres que l’HbA1c. Cependant, la plupart concluent à une tendance en faveur de l’ETP (70).

A noter que dans notre étude le traitement anti hypertenseur en début et en fin de programme n’ont pas été pris en compte. Ainsi, il est difficile d’évaluer l’impact réel du programme sur ce paramètre.

En théorie, dans les recommandations, les objectifs tensionnels des diabétiques sont une TA <130/80 mmHg (71). Cependant, en médecine de ville, une TA < 140/90 mmHg n’entraînera pas systématiquement de modification du traitement anti hypertenseur, d’autant qu’il existe une grande variabilité inter-individuelle.

Le rôle de l’ET sera donc de contribuer à l’amélioration les paramètres biocliniques (IMC, TA, TT, poids) autres que l’HbA1c mais elle ne se substituera pas au rôle du médecin traitant dans le suivi du patient diabétique.

123 e) Au total, un impact globalement positif du programme d’ETP

Madin’Santé sur les patients DT2

D’un point de vue général, le programme a permis une amélioration des paramètres biométriques de notre population, sans modification du traitement pharmacologique, qui s’est traduite par :

- Une diminution significative du taux d’HbA1c et de la TA.

- Une tendance à l’amélioration du bilan lipidique (diminution significative du LDL, diminution des TG et maintien du HDL à un taux protecteur).

- Une tendance à la perte de poids et à la diminution de l’IMC.

Ces résultats, bien que non significatifs pour certains, encouragent fortement l’ETP de façon générale et plus particulièrement la poursuite de ce programme Madin’Santé pour son impact positif prévisible à moyen et long terme sur la survenue des complications liées au diabète et le risque cardio vasculaire des patients DT2.

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