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Chapitre 3 Résultats et interprétations

3.5 Impact du Grand glissement de Clermont sur la dynamique fluviatile

Tel qu’il a été démontré dans les coupes Martel 2 et Boulianne 1, les glissements de terrain dans la vallée ont déjà obstrué, voire même bloqué la rivière Malbaie. Lorsqu’ils se produisent, les glissements modifient la dynamique fluviatile qui se définit comme suit : le terme fluviatile est un terme général qui réfère à tout ce qui est produit par l’action des rivières et aux organismes vivants dans ces milieux, par exemple les formes, les processus, les sédiments et les organismes d’eau douce. La dynamique, quant à elle, est une branche de la science physique (et une subdivision des mécanismes) qui porte sur le mouvement des corps et les facteurs physiques qui affectent le mouvement tels la force, la masse, le moment (physique) et l’énergie. Le terme dynamique fluviatile est, par conséquent, généralement utilisé en référence à l’écoulement de l’eau, aux mouvements des sédiments et aux caractéristiques géomorphologiques des lits de rivières résultant des interactions entre l’écoulement et le transport des sédiments dans les chenaux alluviaux (Robert, 2003). Au Québec, de nombreux glissements de terrain ont obstrué des rivières, tels Pourpore (1903), Rimouski (1951), South Nation River (1971), St-Ambroise-de-Kildare (1975), Lemieux (1993) et St-Boniface-de-Shawinigan (1996) (Evans et al., 1997). Les impacts les plus communs lorsqu’un glissement bloque une rivière sont les inondations en amont du glissement en raison de la retenue des eaux par les débris et les dommages en aval lorsque les débris cèdent. De même, un important apport de sédiments peut engendrer des changements morphologiques des chenaux et parfois induire l’érosion des bancs d’accumulation ce qui peut mener à de nouveaux glissements (Evans et al., 1997). Normalement, les barrages de débris s’érodent tranquillement. Il se produit un débordement de l’eau au-dessus des débris, ce qui mène à une diminution du volume d’eau derrière la barrière. Cependant, dans certains cas il peut se produire une rupture catastrophique du barrage, ce qui entraîne une inondation très rapide et destructrice comme ce fut le cas pour le glissement de St-Alban en 1894 (Evans et al., 1997).

Lorsque le Grand glissement de Clermont, d’une superficie d’environ 10 208.98 m2 et d’un

volume estimé de 316 478.38 m3, s’est produit, il a fort probablement bloqué la rivière Malbaie. Dans l’objectif de mieux comprendre les répercussions du glissement sur la

115 dynamique fluviatile et sur son environnement immédiat, des coupes stratigraphiques telle la coupe CG, FCG-1 et FCG-2 à proximité du site d’étude, ont été étudiées (figure 63).

Figure 62 : Coupes stratigraphiques excavées à proximité du Grand glissement de Clermont

Coupe CG

Les coupes CG sont situées juste en amont du Grand glissement, sur la rive droite de la rivière Malbaie, donc sur la rive opposée au Grand glissement de Clermont. Les coupes sont aux coordonnées approximatives de 406 166 m. E., 5 284 671 m. N. (figure 63). Plusieurs coupes ont été excavées dans ce talus, dont celle qui a fait l’objet d’étude de mon mémoire de baccalauréat (Guérard, 2009). À l’été 2010, deux autres coupes similaires, CG 1 et CG 2, ont été mises au jour. La coupe qui est présentée est la coupe CG 2.

116 Cette coupe (CG 2) est composée de cinq unités (U1-U5) totalisant environ 675 cm d’épaisseur (figures 64 et 65). L’unité U1 est formée par une rudite, alors que l’unité U2 correspond à des sables stratifiés horizontalement surmontés par un lit de matière organique d’une épaisseur de 2-3 cm. Ce lit a été daté à deux reprises en 2009 et a donné des intervalles d’âges compris entre 1308-1361 et 1395-1435 AD. L’unité U3 est composée de sable à stratifications obliques surmonté par un lit de matière organique de 2 cm d’épaisseur. La datation de ce lit, en 2009, indique qu’il s’est mis en place entre 1521-1577 AD. Ces unités U1, U2 et U3 réfèrent à un environnement fluviatile dont la compétence a diminué dans le temps (granoclassement positif). L’unité U4 consiste en du silt massif avec des graviers et galets avec un lit de charbon de bois à sa base qui a été daté entre 1213 et 1269 AD. L’unité U5 est composée de sable à stratifications entrecroisées, contenant des nodules de silt.

La datation obtenue avec les charbons de bois ne concorde pas avec les trois dates obtenues en 2009, à partir des lits de matière organique au sommet des unités U2 et U3. En effet, d’un point de vue stratigraphique, ces trois dates, qui sont plus récentes que celle obtenue à partir du lit de charbon de bois, devraient se situer, dans la coupe, au-dessus du lit de charbon de bois. Ainsi, il est probable que ce lit formé de charbon de bois qui s’insère à la base du silt massif (U4) ait été transporté à même le silt lors du glissement ou qu’il provienne d’un arbre assez âgé.

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Figure 63 : Chronostratigraphie de la coupe CG 2, Clermont, Charlevoix-Est, adaptée de Guérard (2009)

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Coupe FCG

Les coupes FCG (FCG 1 et FCG 2) sont en amont et sur la même rive que le Grand glissement, donc sur la rive opposée aux coupes CG 1 et CG 2, aux coordonnées 406 325 m. E., 5 284 623 m. N. (figure 63).

La coupe FCG 1 est d’une épaisseur de 375 cm et comporte trois unités (U1-U3) (figures 66 et 68). L’unité U1 est formée par du sable grossier à stratifications horizontales avec des lits de minéraux lourds, graviers et petits galets. À son sommet, il y a un lit de sable organique discontinu. L’unité U2 consiste en un silt-argileux qui ne semble pas en place puisqu’il contient des lentilles de sable, des poches de matière organique, des morceaux de bois enfouis et des galets mesurant plus de 10 cm de longueur. Cette unité perturbée présente des stratifications dans toutes les directions. Dans cette unité, un morceau de bois a été daté entre 1522 et 1574 AD. Le contact entre les unités U1 et U2 est franc. L’unité sommitale U3 est une rudite de galets à matrice sableuse beige.

La coupe FCG 2 est située à environ 17 m plus en aval de la coupe FCG 1. D’une épaisseur de 285 cm, elle est formée par quatre unités (U1-U4) (figures 67-69). L’unité U1 correspond à du sable grossier stratifié que l’on retrouve aussi à la base de la coupe FCG 1. L’unité U2 consiste en une rudite composée de galets et d’une matrice de sable grossier à gravier. L’unité U3 est formée par du sable moyen qui incorpore un lit de matière organique qui a été daté entre 1732 et 1782 AD. L’unité U4 est une rudite qui est aussi présente dans la coupe FCG 1. La postériorité de cette date et l’absence de silt à cet endroit semblent indiquer une phase d’accalmie après le processus de glissement.

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Figure 67:Coupe FCG 1, U1 et U2

123 À partir de la coupe C2RGG, excavée à l’exutoire du glissement et des coupes CG 2 et FCG 1 situées juste en amont, il est possible d’identifier un évènement de glissement qui a obstrué la rivière sur une importante distance étant donné l’emplacement de ces coupes (Figure 63). En effet, dans la coupe C2RGG, un lit de matière organique sous-jacent à une unité silteuse perturbée de glissement de terrain a été daté entre 1523 et 1559 AD (figure 70). Un peu plus en amont, sur la rive gauche de la rivière, une seconde unité silteuse très perturbée a été observée dans la coupe FCG-1. Un morceau de bois incorporé dans les débris a donné un âge compris entre 1522 et 1574 AD. Enfin, la datation obtenue en 2009 au sommet de l’unité 3 de la coupe CG-2 a été datée entre 1521 et 1577 AD. Ce lit de matière organique a été enfoui suite à un glissement de terrain. Ainsi, toutes ces coupes qui ont des dates très rapprochées pourraient être liées à un évènement de glissement très important qui pourrait correspondre au Grand glissement de Clermont. Les datations effectuées sur du bois et des lits de matière organique indiquent que ce glissement est survenu entre 1520 et 1580 AD.

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