• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4 – Discussion

4.1 Cause géologique (sismique)

Le séisme de 1663 fut le plus fort à être survenu dans l’est du Canada. Il a provoqué l’important glissement du mont des Éboulements dont les éboulis ont formé la presqu’île de Saint-Joseph-de-la-Rive. Il aurait aussi induit le premier grand glissement de Saint-Jean- Vianney selon Locat (2008), qui propose que l’épicentre se trouvait au Saguenay et que le séisme fût d’une magnitude d’au moins 7,6. Ce tremblement de terre a aussi engendré des glissements de terrain le long des rivières Shipshaw, Betsiamites, Pentecôte, Batiscan, Saint-Maurice, du Gouffre et Saguenay (Gouin, 2001; Filion et al., 1991; Locat, 2008). Il a induit des processus de liquéfaction, sous forme de volcans de sable, qui ont été rapportés dans la vallée de la rivière du Gouffre à proximité de Baie-Saint-Paul (Gouin, 2001; Locat, 2008).

126 Les séismes de 1860, 1870 et de 1925 auraient aussi engendré des phénomènes de liquéfaction dans la région de Charlevoix (Lamontagne et al., 2008). Dans le cas du tremblement de terre de 1925, une incertitude demeure. Lamontagne et al. (2008) indiquent qu’une liquéfaction associée à ce tremblement de terre, serait probablement survenue proche de Saint-Urbain, mais il semble manquer d’informations pour confirmer cet évènement.

Filion et al. (1991) ont documenté la chronologie des glissements de terrain survenus dans la vallée de la rivière du Gouffre (Charlevoix-Ouest). Cette étude basée sur 37 datations au radiocarbone et sur la dendrochronologie de troncs d’arbres conservés dans les dépôts de glissement a démontré que les glissements sont majoritairement récents. En effet, 33 des 37 datations sont postérieures à 600 BP, ce qui correspond en âge Anno Domini (AD) aux années 1300. Les glissements recensés dans le cadre de cette étude, sont survenus entre environ 1340 et plus près de 1800 AD (figure 71). Il y a eu deux périodes où les datations sont concentrées, soit entre 1440-1470 et 1620-1680.

127

Figure 70 : Liste des dates au 14C effectuées le long de la vallée de la rivière du Gouffre (adapté de Filion et al., 1991)

Dans l’étude de Filion et al. (1991), les dates fournies par sept troncs d’arbre enfouis, indique qu’il y aurait possiblement eu des glissements de terrain dans la vallée du Gouffre entre 1540 et 1600 AD, cette période a aussi été identifiée dans la vallée de la Malbaie. L’étude de Filion et al. (1991) a mis en évidence deux évènements de glissements de terrain qui se sont produits suite à l’important séisme de 1663 AD. Dans la vallée de la rivière Malbaie, la datation de morceaux de bois enfouis sous de l’argile dans la coupe

128 Boulianne 11/2, a donné un âge médian de 1663. C’est la seule date que nous pouvons relier directement avec le séisme. En effet, les intervalles de dates associés à des glissements de terrain se situent entre 1454 et 1602 AD, hormis pour la coupe Girard (figure 72). On obtient un âge médian de 1570 pour quatre échantillons (tableau 8), et de 1510 et 1550 pour deux autres échantillons.

Figure 71 : Intervalles des datations, selon les années

Cependant, il faut demeurer prudent avec les intervalles de dates obtenus à l’aide du logiciel de calibration Calib 6 de Reimer et al. (2009), car parfois les probabilités sont très similaires. En effet, dans le cas de la datation 285 +/- 15 BP (2 sigma), qui correspond à un lit de matière organique de la coupe C2RGG (U2) et à un tronc d’arbre dans la coupe Butte de sable Turcotte, on obtient trois intervalles de dates. Il y a 49,4 % des chances que

129 l’évènement daté soit compris entre 1523-1559 AD, 48,1 % entre 1630-1653 AD et seulement 2,5 % entre 1562-1571 AD. La médiane pondérée calculée à l’aide du logiciel est de 1568 AD. Dans ce cas, deux des intervalles de dates pourraient s’avérer possibles, ce qui rend notre interprétation moins fiable. En effet, puisqu’il y a 48,1 % des chances que l’évènement soit survenu entre 1630-1653 AD, nous pouvons nous demander s’il pourrait être associé au séisme de 1663. De plus, le matériel daté, associé à des mouvements de terrain, consiste majoritairement à des morceaux de bois et à des charbons de bois. Alors si les morceaux de bois ou les charbons de bois proviennent du cœur de l’arbre, la datation obtenue correspond à l’âge de formation du cœur de l’arbre qui est plus ancien que l’âge de la mort de l’arbre. Ainsi, nos dates pourraient être celles de la formation de l’arbre, ce qui signifie que l’âge de la mort de l’arbre serait plus récent. Par conséquent, le glissement pourrait correspondre au séisme de 1663. Or, nous n’avons pas daté que les troncs d’arbres, mais aussi la matière organique provenant de l’humus de sols, et les dates coïncident avec celles obtenues sur les troncs d’arbres. De ce fait, dans le cadre cette étude, il semble important de spécifier que les intervalles des datations provenant de Reimer et al. (2009) ont des probabilités plus élevées entre les années 1450 et 1600 AD et que des lits de matière organique, qui sont plus fiables dans ce contexte, ont été datés dans les coupes C2RGG et CG 2 (Guérard, 2009). Il n’est donc pas possible d’affirmer hors de tout doute que les glissements sont survenus vers 1570 AD. Toutefois, l’abondance des datations autour de 1570 fait en sorte qu’il est fort probable que des glissements se soient produits lors de cette période.

Une seconde étude réalisée en 2008 le long de la rivière du Gouffre a porté sur un glissement rotationnel multiple, à trois surfaces de glissement. Ce glissement s’est produit le 7 avril 2006 suite à un séisme de magnitude de 4.1 sur l’échelle de Richter. L’étude de ce glissement a permis de découvrir un paléosol enfoui vers 1550 AD qui aurait pu être enseveli lors d’un glissement de terrain (Fillion, 2008). Dans cette étude, la date carbone corrobore l’hypothèse qu’il y aurait eu d’importants glissements de terrain entre 1550 et 1600 qui pourraient être reliés à un évènement sismique survenu dans Charlevoix. Si ce séisme n’a pas été aussi documenté dans les archives que celui de 1663, c’est qu’il n’y avait pas encore à cette époque (vers 1570) d’établissement européen tant dans la région que dans Québec.

130

Documents relatifs