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Impact factor 2016 Hematological Oncology: 3

c) Discussion

L’ensemble de ces travaux souligne qu’en 2008 à 2010 les inégalités d’accès aux soins des patients atteints de MM persistaient du fait de

i) facteurs démographiques et géographiques (âge et lieu de résidence) ii ) facteurs liées à la maladie (caractère symptomatique du MM ou non) iii) facteurs organisationnels (niveau du centre, spécialité du praticien, RCP)

Les facteurs non modifiables : démographie/géographie et reliés à la tumeur

Les facteurs démographiques et géographiques sont bien connus en oncologie solide. En effet, plus un patient est éloigné d’un centre de prise en charge et plus il est âgé, plus la qualité des soins a tendance à diminuer21, 25. Dans notre travail, la qualité du bilan

diagnostique et d’extension n’est pas directement influencée par l’âge et la distance. Mais il existe une interaction très significative entre ces 2 paramètres qui sont des facteurs de confusion bien connus.

Dans notre travail, l’âge tient une place particulière. En effet, le niveau de compliance diminue avec l’âge et ces 2 facteurs ont un impact de façon indépendante sur la survie globale. La problématique de l’âge est que le vieillissement peut être totalement harmonieux autorisant un traitement avec les molécules adaptées, gages d’une meilleure survie. Mais le vieillissement peut ne pas être harmonieux. Le clinicien est alors tenté de réduire le traitement, voire de ne pas en donner du tout. Dans cette étude populationnelle rétrospective nous ne disposons pas de données d’évaluation gériatrique standardisée. Cela nous aurait permis de différencier les patients pouvant réellement bénéficier du traitement optimal des autres. Par ailleurs dans le MM, l’évaluation gériatrique standardisée semble avoir un rôle pronostique notable40. Ainsi, nous aurions pu affiner le rôle du

vieillissement, plus que de l’âge dans la survie des patients atteints de MM. Néanmoins, il semblerait pertinent que les recommandations prennent en compte ce phénomène afin d’optimiser le traitement pour les patients.

Une des originalités de ce travail est aussi la comparaison des patients atteints de myélome indolent (avant les nouvelles définitions des événements définissant le myélome multiple9) avec ceux qui sont symptomatiques. Cela a permis de montrer qu’une maladie

indolente était moins bien explorée qu’une maladie symptomatique au niveau du bilan pronostique. Probablement, cela est lié au fait que le médecin ne traite pas le malade de façon immédiate et estime de fait que le patient est de bon pronostic.

Les facteurs modifiables : les facteurs organisationnels

Les facteurs démographiques et géographiques, ainsi que ceux liés à la maladie sont non (ou difficilement) modifiables. Mais il est possible d’influer sur les facteurs organisationnels. La mise en place de la RCP a permis d’améliorer la qualité des bilans diagnostiques et d’extension. Cela a donc permis de mieux différencier les patients ayant un critère CRAB des autres et donc de traiter les patients qui en avaient réellement l’indication. La RCP permet aussi la centralisation des décisions thérapeutiques, permettant au patient de bénéficier du meilleur traitement. Seulement 10 % des traitements n’était pas conformes aux recommandations. Ce faible taux est responsable d’un manque de puissance des analyses qui peut expliquer l’absence de la RCP dans le modèle. Une autre façon d’appréhender le problème est de s’intéresser à la marge de progression : la RCP permettrait d’optimiser le traitement chez 10 % des patients. De plus il semble que la RCP soit le lieu de l’adaptation du traitement en fonction des comorbidités et de l’âge, ou encore mieux du vieillissement. Reste la problématique de la gestion des toxicités des traitements spécifiques au myélome qui peut impacter la survie des malades, comme le risque thrombotique lié aux IMIDs41. Une des alternatives dans l’organisation des soins pour les

traitements injectables (Bortézomib, Carfilzomib, Daratumumab) est de réaliser l’injection le premier jour en centre expert puis le reste des injections dans le centre hospitalier de recours. Une autre organisation possible est celle d’un centre expert qui travaille en réseau

sur une aire géographique déterminée. Différentes possibilités sont mises en place pour cela : RCP centralisée, médecin assistant partagé, consultations avancées. A notre connaissance, ces deux organisations de soins n’ont jamais été évaluées.

Ces constats sont probablement une partie de l’explication concernant la différence de survie en fonction du volume de patients avec MM traités par an32. La différence de survie

dans cette étude est importante : elle varie de 21 à 49 mois selon le volume du centre.

Une limite dans notre travail : le niveau socio-économique

La principale limite de notre travail est l’absence de données socio-économiques. Initialement nous avions prévu le recueil de la profession, bien qu’il soit un marqueur imparfait du niveau socio-économique37. Néanmoins nous nous sommes heurtés à près de

30 % de données manquantes, voire 50 % en considérant que le statut de « retraité » ne qualifie pas le niveau socio-économique de façon valide. Or le niveau socio-économique est une variable bien connue pourvoyeuse d’inégalité d’accès aux soins. Cette limite nous a permis d’engager une réflexion sur l’évaluation du niveau socio-économique. Contrairement à certains registres et notamment suédois, nous ne pouvons pas avoir accès aux données de déclarations de revenus des patients.

Une des techniques validées et utilisés par de nombreux registres (dont le National Cancer Registry aux Etats-Unis32, 42 est celle de l’indice de déprivation corrélé à une unité

géographique de 2000 personnes. Cette caractéristique permet de connaître le niveau socio-économique moyen de la parcelle dans laquelle le patient vit. En France, l’EDI est donc connu pour chaque IRIS suite au travail de l’INSEE36, 37. Cet index est construit sur

des données socio-démographiques simples dont la valeur moyenne est appliquée à l’IRIS. Parallèlement, FRANCIM en partenariat avec Plateforme ERISC - Equipe Cancers et Préventions - UMR 1086 INSERM de Caen (Pr Guy Launois) a mis en place la collecte de cette information. Elle s’effectue par envoi des données de géolocalisation à l’équipe de Caen. Cette dernière envoie ensuite l’IRIS et l’EDI au registre qui intègre ces données dans

sa base. Nous espérons pour les futures études pouvoir utiliser ces données afin d’ajuster au mieux nos résultats.

IV) Perspectives

a) Analyse de la survie

Ce travail en cours porte sur l’analyse des facteurs de la prise en charge initiale liés à la survie globale. Nous en avons profité pour mettre en place aussi la survie nette selon la méthode de Pohar-Perme En effet, cette méthode permet de modéliser la survie qui serait observée si la seule cause de décès était le MM. Nous ne disposons pas pour l’ensemble des décès des patients atteints de MM de la cause réelle du décès. Si les courbes de survie observées et de survie nette sont proches, c’est un argument pour penser que la majorité des décès sont liés à l’hémopathie.

L’analyse statistique est un modèle de Cox avec nécessité d’une interaction dépendante du temps pour l’âge, maintenant stabilisée. Mais le modèle final n’a pas été encore retenu. L’objectif est de dégager les facteurs de la prise en charge initiale qui influencent la survie globale afin de caractériser ceux qui sont à l’origine d’inégalités d’accès aux soins.

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