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Comme un immense incendie Se déroule à nos regards

L'astre monte,

monte

etverse

Un

feutoujoursplus brûlant,

Et

dansl'éther qu'il traverse,

Comme un

roi puissantseberce Sur son trône étincelant.

Puis à son faîte

suprême

S'arrètant au haut desairs, Ceint son plusbeau diadème,

m

Et semble l'œil de Dieu

même

Qui s'ouvre sur l'univers.

V.

Ainsilong-temps obscuretlong-tempssolitaire, Grandit danslesilenceets'annonceàlaterre L'astrede son génie, à lui-même inconnu;

Dissipant par degrés les ombres

du

mystère Qui,jeune, à tousles

yeux

lecachaient,pauvreetnu.

Son

orientse lève, etde splendeurs sans

nombre

S'illuminesonfront, toujours pensifetsombre;

Etleciel, qui s'éveilleàsamolleclarté, Semble

un

flambeau divinquijettesurson

ombre Comme

une aube degloire etd'immortalité.

Partoutilse faitjour autourdelui; qu'importe

Le

nuagequi passeetquelevent emporte,

Quand

toutleciels'éclaire aux rayons

du

matin,

Et

quel'astrede feudontl'éclatnoustransporte Sedresse

comme un

phareàl'horizon lointain!

Laissez,

quand

déjà l'aube a blanchi la chaumière, Lesaveugles nierl'éclatdelalumière,

Les méchantsla braver,lacraindre tour-à-tour;

Laissez,etbénissantcette lueurpremière,

Dn

soleil quila suitattendezleretour.

Laissez,la nuits'efface et l'ombres'évapore;

Croyez

au journouveau que vousprometl'aurore,

— 17 —

Comptez

sur un midi de feux resplendissant, Etlaissez faire à Dieu,carc'est luiseulquidore Lagloired'ungrand

homme

etlesoleilnaissant.

Le jour,voicile jourquiplane surle

monde

!

De

l'horizon desarts perçantla nuit profonde,

Son nom

long-tempsvoile"rayonneàtous lesyeux

,

Et,

comme

lesoleilsortéclatantde l'onde, D'un Ionsetfroidoublis'élanceradieux.

VI.

Levoici maintenantà son sublimefaîte.

Accueilli chez lesgrands, des peuples recherché, Savie,à cequ'oncroit, n'est plusqu'unjour defête;

Nul

au fonddeson

cœur

nevoitlevercaché.

A

lui seul le secret de sa longue souffrance!

Mais envain tour-à-tour,pourprix deses travaux, Albert

V

de BavièreetCharles

IX

de France

Le

comblent defaveurset

d'hommages

nouveaux;

Vainement

l'Empereuret

l'Homme-Dieu

lui-même,

Celui qui porte au front le plus beau diadème, Etceluiquiduhautdutrône épiscopal

Veille, labible en main, sur l'univers papal,

D'honneurs,de dignitésl'accablant àmesure,

Ont

épuisé pourluileurs bienfaitséclatants;

C'estqu'iln'estpoint, hélas!de

baume

àsablessure, Et quesonmalàluis'accroîtavec le temps;

Qu'boiineurs etdignités,tout ceque

l'homme

envie,

Ne

sontqu'unpoids de plus àsurchargersavie,

— 48 —

Un

reflet lumineux qui s'attache à ses pas Et semble luimontrer, là-bas, dans les ténèbres, Quelque chosed'affreuxquenotre œilnevoitpas;

C'estquetoujoursen proie à sespensers funèbres, Plusaugmentesa gloire etplusautourdelui

Ce

qu'ilcache dans l'ombreà sesyeux arelui; C'estqu'ilporteen soncoeur,volcanquerienn'apaise,

Océan

quigémit soussesflotscourroucés,

Un

malqui leconsume,

un

secret quiluipèse;

Et

que sonbutatteint, sesdésirssurpassés,

Comme

l'aigledes

monts

planait decime en cime, Seul,dansledésespoirquilevientaccabler,

Son

regarddeplushautaplongédansl'abîme;

Qu'il sent son impuissance àjamais lecombler.

VII.

Aux

vallons de Meising, sur la pente affaissée Qu'arrosent de I'Amber les flots capricieux,

Quand

ils'arrête seul, seulavecsa pensée

,

Comme un

augedéchuquisesouvient des cicux;

Quand

danscefrais asileaux clôtures de chêne,

Voyant

les fleurstomberet lesarbres jaunir, Parfoisilse recueille,etdesa finprochaine Par

un

beausoird'automne aimeàs'entretenir;

Quand

laissant au hasard flotter ses rêveries,

Le

reposlui revient,etqu'ilsentprésents Sadouce Regina,leursdeuxfilleschéries, Et ses fils, noble espoir du déclin de ses ans;

— 49 —

Que

tout luiporte aucœur, quelajeune famille L'entoure de tendresseetde soins empresses,

Comme

au troncdel'ormeaulariante charmille Marie avec

amour

ses bras entrelaces;

Dans

ces

moments

qu'oncroitpleins d'extase profonde, D'ivresse sansmélange etdepurs abandons,

l'onnediraitplusquerienlui

manque

au

monde, Où

semblelebonheurluiprodiguer sesdons;

Dans

cecalme apparent d'un

cœur

quisepossède, L'œil le moins exercé découvrirait d'abord

A

travers sonsouris un penserqui l'obsède Etqu'ilcacheavec soin,

comme

on cache un remord;

Car

toujours sursonfrontsedessine one ride,

Car

sonaccentesttriste,incréduleou

moqueur, Car

sonœil a toujours quelque chosed'aride

Qui

levoile,échappé desfêluresdu cœur.

Même quand

ilsourit,

on

sentquesur seslèvres

Un

baume,quel qu'il soit, n'est pas

exempt

defiel,

Et que toujours, ôDieu!des biens donttulesèvres

Le

souvenir corromptcequ'ilgoûtedemiel;

Que

latristessehabiteensesregardssicalmes, Et que,

comme

oppressé par

un

poids étouffant, Celuiquilève

un

frontbrillant de tant de palmes

,

A

son

nom

prononcé tremble

comme

unenfant.

Et souvent, parbesoin plus que par habitude, Seuls, àtravers lesboisse frayant dessentiers,

— 50 —

Ses pas,amisdel'ombreetdelasolitude,

Loinde touslesregardss'envontdes joursentiers;

Etlà,lefrontpenché,s'accoudant contre

un

arbre Et baissant verslaterre

un

œilvoilédepleurs,

Sombre,

immobileetpaleetglacé

comme un

marbre,

Ilregarde àsespieds naîtreetmourirlesfleurs;

Prête l'oreille au vent qui mollement soupire, Ecoute dans son

cœur

l'échodeses regrets....

Etsaforce

succombe

etsoncourage expire

Comme un mât

quise brise et

pend

sursesagrès.

Sou

souffle,qu'interrompt

un

éternel

murmure,

Yeut en vain concentrersaplainteetsontourment;

On

entendraitalors,toutbas, sousla ramure S'échapperde sonsein

comme un

gémissement.

Venez, sivous l'osez, vous que sa gloire tente,

Qui

croyezla

mer

calmeausilencedes(lots,

Venez

voir la victime à vos pieds haletante, Contempler sondélire etcompter sessanglots:

VIII.

« J'ai puvaincreletemps,j'ai pu dompterl'envie, Laisserau

monde

un

nom

quinepérira pas,

Me

créer une place à

moi

seul dans la vie Etde

mon

existence, au désespoir ravie, Faire honte en passantaux heureuxd'ici-bas

;

51

J'ai

pu

,

moi

dans lafouleexilevolontaire,

Voirlesrois lesplusgrandsm'admettreà leurscôtes, Frotter à

mes

haillons leur pourpretributaire, Prosternerdevant

moi

lesgloiresdelaterre

,

Etpâlirau contactdenosdeuxroyautés;

J'ai

pu

par

ma

touchante et sublime harmonie, Apaisant dans son

cœur

lesouvenir desmorts,

De

Charles

IX

e'teint ranimerle génie

Quand

le monstre,

écumant

sur son lit d'agonie,

Pour

expiersoncrimeinventaitdes remords;

J'ai

pu

voir tout

un

peuple,(etj'enrougis

moi-même),

— O

Dieu, pardonnez-leur, pardonnez-leur,

mon

Dieu!

Me

confondre enses

vœux

avecl'Êtresuprême, Et dans sonfol

amour

,dans son délire extrême

,

Frapper d'un

nom

mortellesvoûtes

du

Saint-Lieu, (a)

Ettoujoursdevantmoi,

comme

unesentinelle,

Ce nom

béni par eux dans l'ombres'est dressé;

Rien n'enput effacerlatacheoriginelle, Et

comme un

ferbrûlantsonempreinte éternelle

De mon

frontqu'ilflétriten

mon àme

a passé;

Elle est là, toujours là, vivante, indélébile,

De mes

traits obscurcis cachant

mal

larougeur,

Comme un

spectre,lanuit, quivousfixeimmobile, Puiss'éloigne,ettoujoursplushâveetplus débile,

Vous

laissepalpitantsous

un

remordsvengeur.

Lassus! toujours ce

nom

dont leur foule idolâtre

M'a

poursuivitrenteans,trenteans sansse lasser;

— 52 —

Lassus,toujours Lassus, jamais

Roland De

Lattre, Jamaisce

nom

qu'enfant,

ma mère

,aucoindel'àtre,

Dans un

baiserd'amour m'appritàprononcer!... »

IX.

Ses cheveux sont épars, son haleine glace'e Se refuse

un moment

au poids desapensée;

La

terre sous ses pas tourne; son front pensif Se relève, agité d'un élan convulsif.

Ilmarche,ettoutsoncorpstressaille, Etsespleurs, envainessuyés, Entrela ronceetlabroussaille Suivent la tracedesespieds.

Puis, laissant ses regards flotter dans l'étendue,

— Comme

pour

y

chercher quelqueétoileperdue Qui,dirigeant versnous soncours silencieux,

Dernierrayond'espoir,s'éteignitdanslescieux,

D'un

souvenirrempli decharmes L'image redoublant ses

maux

,

Savoix,quis'éteintdansleslarmes, Laisseencoreexhaler ces

mots:

X.

« Bordsriants de la Trulle,ô plaines fortunées!

Berceau de

mon

enfance, où je reçus le jour;

Où,

d'uncieltoutd'azur doucesfleurscouronnées, Si calmes ont passé

mes

premières années,

Villesichère à

mon amour

;

Mons,

ôtoi quim'aimais,ù

ma

seule patrie! (n)

Où mou

père reposeauprès de nos aïeux;

Si riche de ton sol et de ton industrie,(c)

Toi qu'en

mourant

j'invoque avecidolâtrie, Toivers quisetournent

mes

yeux;

O murs

concitoyens,6 cite' maternelle,

Où Dd

Brucque, à son art parlant en souverain,

Rend

aux sièclesvieillisleursplendeursolennelle, Etsculpte des héroslame'moiree'ternelle

Debout

danslemarbre ou l'airain; (d)

D'Albe,

promenant

lemeurtreetl'incendie

,

Mesura

sontriomphe ausangqu'il averse'.... (e)

Maisqui renaisenfin,souslescoupsagrandie,

Comme,

aupremiersoleil,plus belle etreverdie, Laplaineoùl'orage apasse;

Bcisseret, rendant sous sa

plume

savante

Un

sensaux livressaintsmallus et

mal

compris, Faitéclater

du

Christlaparole vivante Et rallume, auxéclairsdeson

âme

fervente,

La

foi,cesoleildesesprits; (f)

Bouzanton,séchant deslarmesorphelines, Inaugureau malheur sestoitshospitaliers;(c)

jaillissentà(lotsmille ondes cristallines,

Du

templede"NValtrudeaux

Sœurs

Apostolines,

Du

Béguinageaux Écoliers;

Etque

domine

au loin,desonfront séculaire,

Comme un

géant debout à l'Orient vermeil

,

— 34 —

Latoni

immense

etsvelte, auflancquadrangulaire, Qui, des vents déchaînes conjurantlacolère,

Veilled'enhaut sur tonsommeil!

O

toi qui m'accueillis, meurtripar latempête, Souriant,pauvre mère,à

mes

premiers accents,

Et dressas une couche où reposer

ma

tête,

Et m'endormisenfant par

un doux

chant defête, Bercé dans tes bras caressants;

Comme

encesjours enfuis de

ma

blondejeunesse,

Eu

cet avrilsi pur d'affrontscontagieux.

,

Si, le matin, avant que lesoleil renaisse, Jepouvaisdanstes murs, sansqu'on

me

reconnaisse,

Porter

mes

pas religieux;

XI.

Revoircelte églisemodeste

coulaient

mes

premiers beauxjours,(h) Contempler encorcequireste

De

cettecoupolecéleste

Que

le tempsdémolit toujours;

Le jubéd'où

ma

voix sifraîche S'élançait

comme

unvold'oiseau, La tantvieille chaire oùl'on prêche Ledieu qui naquitdanslacrèche Ettientunsceptre de roseau;

Retrouver l'humble sacristie D'oùpuisant l'encenset le sel,

— 55 —

J'allaischercherlasainte hostie, Etvenais a l'Eucharistie Entonner l'hymneuniversel;

Ceslieuxsichersoù

mon

jeune âge Se prit sisouvent à rêver,

Et

ces amis

du

voisinage

Que

dans

mon

long pèlerinage J'aicrusisouvent retrouver!

Avec

eux,unefoisencore,

Réveillé's avantlematin,

Gravirce

mont

quefaitéclore

La

douce hlancheur del'aurore

,

Plusbeau queleMont-Aventin;(j)

Ce mont

Panisel dontlachaîne

A

l'Estbornenotrehorizon,

Et dans la

campagne

prochaine S'étend,

comme un énorme

chêne Devantle seuild'unemaison;

biensouvent

ma main

lutine,

Parmi

lesbranchesdusureau,

A

travers l'herbeetl'êglantine,

Avec

uneadresseenfantine Dénichait l'humblepassereau.

Eden

de

ma

vie,où

mon âme

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