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4 Application de l’approche combinée au réseau étudié

4.6 Illustration de l’intérêt pratique de ces bornes

Nous souhaitons montrer dans ce paragraphe comment les résultats précédents peuvent être utilisés en pratique.

4.6.1 Premier exemple

Supposons qu’on souhaite dimensionner la taille maximale (notée Q) de la file d’attente précédente, de sorte qu’on puisse garantir sur 100h de fonctionnement une probabilité de perte de trame inférieure à 10-9.

On commence par calculer combien de trames peuvent arriver au maximum en 100h. On calcule donc la valeur de l’enveloppe globale (somme des enveloppes de tous les flux) pour la valeurt=60×60×100=360000s. On trouve 1,06. 1013 bits, ce qui correspond dans le pire des cas (avec une taille minimale de trames de 84 octets) à 15.64 milliards de trames.

Dans un deuxième temps, on cherche à évaluer la probabilité de perdre une trame. Une trame sera perdue si, au moment où elle arrive, la taille courante de la file d’attente est égale à Q. Ceci impliquerait que le nombre de bits présents dans la file, au moment de l’arrivée de la trame, serait supérieur àQ×Smin. La probabilité de perdre une trame est donc inférieure à la

probabilité que la taille de file d’attente soit supérieure à Q×Sminbits. Cette probabilité est bornée par la courbe suivante, obtenue conformément au paragraphe 2.2.5.1.

1E-24 1E-22 1E-20 1E-18 1E-16 1E-14 1E-12 1E-10 1E-08 1E-06 0.0001 0.01 1 0 100000 200000 300000 400000 500000 600000

taille en bits au moment de l'arrivée d'une trame

b o rn e s u r la p ro b a b ilit é d e d é p asser c e tt e t a ille

La probabilité de perdre une trame en 100h est inférieure au nombre de trames pouvant passer dans le port considéré durant 100h, multiplié par la probabilité que chacune d’entre elle soit perdue au moment de son arrivée. Pour atteindre l’objectif fixé, il faut donc que Q soit tel que la probabilité de perdre chacune des trames soit inférieure à 6.39. 10-20. Ceci est le cas pour des tailles supérieures à 473215 bits, ce qui implique Q supérieur ou égal à 705 trames.

On vient donc de montrer que dimensionner la taille de file d’attente à 705 trames suffit pour garantir que sur 100h de fonctionnement, la probabilité de perdre une trame est inférieure à 10-9, ce qui représente un gain d’environ 8% par rapport à un dimensionnement fondé sur la seule borne déterministe.

4.6.2 Deuxième exemple

Un autre cas pratique d’utilisation est le suivant : l’analyse déterministe du réseau fournit comme borne pour le port le plus chargé du réseau 769, or la taille physique de la file d’attente est inférieure de 20 % à cette valeur (on prend comme exemple 612). On ne peut donc pas garantir avec cette borne que la file d’attente ne débordera jamais ; on va utiliser les résultats ci-dessus pour majorer cette probabilité de perte de trame, par exemple sur une heure de fonctionnement.

Avec le même calcul que précédemment, on montre que la file d’attente reçoit au maximum 156,4 millions de trames en une heure. Il y aura perte de trame s’il se trouve plus de 612 trames (612×84×8=411264bits au minimum) dans la file au moment où en arrive une nouvelle. Donc la probabilité de perdre une trame sera inférieure à la probabilité que la taille de file d’attente dépasse 411264 bits, soit 1. 10-11. La probabilité de perdre une trame durant une heure de fonctionnement sera donc inférieure à 156,4.106×1.10−11 =1,5.10−3, ce qui correspond à moins d’une trame perdue toutes les 600.

Conclusion

Le but de ce chapitre était de compléter notre analyse du fonctionnement du réseau, en essayant d’estimer les probabilités d’occurrence des cas pires, pour lesquels nous avons majoré certaines quantités dans les chapitres précédents. Pour ce faire, nous avons utilisé des résultats présentés par Vojnović, qui propose une méthode combinée déterministe- stochastique. Comme pour le calcul déterministe, nous avons montré que cette méthode

s’applique bien au contexte considéré, notamment grâce à la notion de VL qui permet de bien caractériser les entrées dans le réseau. D’autre part, nous avons proposé une méthode permettant d’appliquer ces résultats à un réseau avionique, en fonction de la connaissance du réseau dont on dispose. Enfin, nous avons montré comment obtenir à partir de ces résultats des informations sur la répartition du nombre de trames dans une file d’attente, ou sur le délai subi par les trames.

Les résultats obtenus confirment bien l’intuition que les bornes déterministes sont largement supérieures aux valeurs atteintes dans la très grande majorité des cas. L’ordre de grandeur de cette différence est même très intéressant : on sait en effet qu’en aéronautique, on accepte dans le cadre de la méthode de conception « safe-life » des probabilités de 10-9 ce qui est tout à fait le cas ici.

Dès lors, on peut songer utiliser cette méthode pour atteindre deux buts précis. Le premier serait naturellement de redimensionner les éléments du réseau. On pourrait en effet concevoir de relâcher la contrainte de non perte de trame, pour adopter une contrainte du type « probabilité de perdre une trame < ε », avec ε connu. De ce fait, les tailles de files d’attente pourraient être largement diminuées. Bien entendu, une telle approche ne saurait être retenue qu’en accord avec les autorités de certification.

Une autre application de la méthode combinée peut concerner les procédures de test, par exemple lors de la recette des commutateurs. En effet, compte tenu du débit du réseau, il est très difficile d’équiper les appareils pour mesurer des valeurs en temps réel. Un des rares paramètres que l’on peut mesurer est le nombre de trames perdues, puisque ces évènements doivent être enregistrés par les commutateurs selon la norme ARINC 664. Dès lors, en faisant varier le trafic entrant dans un commutateur, on peut vérifier qu’il suit bien les probabilités de perte prévues par la méthode.

Les travaux futurs devraient chercher à établir de meilleures bornes sur la probabilité de perdre des trames, alors que la méthode actuelle est entièrement dérivée du domaine des bits. D’autre part, il faudrait également établir des formules concernant la probabilité de perte de trames à long terme, qui seraient plus faciles à interpréter dans le contexte aéronautique ; on rappelle que pour l’instant Vojnović n’a démontré des formules de ce genre que dans le cas temps discret.

Un axe de recherche que nous avons envisagé est celui d’une méthode d’analyse fondée exclusivement sur ces résultats de type statistique, sans recours à une analyse déterministe préalable. L’idée fondatrice de cette étude est qu’à partir de la fonction de répartition du délai obtenue, on peut obtenir un encadrement de l’enveloppe des flux en sortie : on sait majorer la probabilité que l’accroissement d’un flux durant un intervalle donné soit comprise entre deux valeurs. De cette façon, la propagation des enveloppes n’utiliserait plus les résultats déterministes.

CONCLUSION