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III.1 Mise en évidence de la cavitation autour des centres d’amorçage

Chapitre III :Microscopies et mécanismes de déformation

B. III.1 Mise en évidence de la cavitation autour des centres d’amorçage

L’observation des faciès de rupture a apporté d’autres renseignements concernant les mécanismes d’endommagement. Les éprouvettes axisymétriques entaillées ont une géométrie qui permet la localisation de la déformation, donc de l’endommagement. Comme le rayon en fond d’entaille est moins sévère que celui des éprouvettes fissurées, l’amorçage de la propagation ne se fait pas automatiquement en fond d’entaille. L’observation macroscopique des faciès de rupture de toutes les éprouvettes AE indique que l’amorçage se déroule au cœur de l’éprouvette, suivi d’une propagation radiale menant à une rupture finale sur les bords. La figure III.17 illustre ce résultat où la matière la plus déformée se situe sur le ligament extérieur de l’éprouvette.

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Figure III.17 Observation macroscopique d’un faciès de rupture d’éprouvette AE0.8, à 20°C et 2,5.10-3 mm/s en pilotage de réduction diamétrale

Un examen plus approfondi des faciès de rupture indique que l’amorçage se fait pour les trois rayons d’étude à 20°C dans le cœur de l’éprouvette. Des relevés des positions des centres d’amorçage pour différents essais sont proposés sur la figure III.18. Le cercle extérieur représente la section minimale des éprouvettes AE. Le manque de points relatifs aux AE4 s’explique par une importante déformation des faciès de ces éprouvettes à rupture, due à une grande ductilité. Cette déformation empêche la localisation précise du centre d’amorçage.

Figure III.18 Relevé des positions des centres d’amorçage, pour une éprouvette de 2 mm de rayon initial à 20°C et différentes vitesses

Les centres d’amorçage peuvent prendre différentes formes, ils se situent soit nettement en surface, soit sous la surface de rupture (cf. Figure III.19). L’observation des faciès réciproques montre qu’on retrouve souvent d’un côté un ligament de matière étirée et sur l’autre faciès la cavité correspondante (cf. Figure III.20). Néanmoins dans la plupart des cas, l’amorçage de la rupture se fait sur une impureté présente initialement dans le matériau, autour de laquelle s’est développée une importante cavitation.

Figure III.19 Observations de centres d’amorçage sur éprouvettes AE à 20°C et 2,5.10-3 mm/s en pilotage de réduction diamétrale

1 mm - 2 -1.5 - 1 -0.5 0 0.5 1 1.5 2 -2 -1 0 1 2 R=1,6 mm R=0,8 mm R=4mm

Impuretés sur le faciès Impuretés sous le faciès

Figure III.20 Observations d’un faciès de rupture et de son réciproque sur éprouvettes AE à 20°C et 2,5.10-3 mm/s en pilotage de réduction diamétrale

Les analyses semi-quantitatives EDX réalisées au MEB sur ces impuretés révèlent qu’elles contiennent généralement des sels de sodium ou de potassium. Dans certains cas également, les centres d’amorçage sont du PVDF uniquement, qui a probablement fondu à l’extrusion et mal cristallisé ensuite. Néanmoins, l’observation des faciès montre que ces impuretés sont extrêmement rares mais que leur faible nombre suffit à générer une concentration de contraintes, source d’une cavitation locale et d’un amorçage de la rupture. Les résultats de deux analyses EDX réalisées sur deux impuretés sont donnés sur la figure III.21.

Figure III.21 Résultats d’analyse EDX sur deux particules identifiées comme étant les centres d’amorçage

Comme l’indique la figure III.20a, une grosse cavité s’est formée autour de la particule d’impureté. Cette cavité est à l’origine de l’amorçage puis de la propagation de l’endommagement. Autour de ce centre, la propagation est radia le, avec la présence fréquente de cercles concentriques visibles sur le faciès de la figure III.22. Une importante cavitation s’est également développée autour et les cavités peuvent dans certains cas atteindre 10 µm de diamètre. Il est assez difficile de savoir si ces cavités sont issues de cavités préexistantes ou de cavités formées en cours de processus d’endommagement. Plusieurs hypothèses peuvent alors être faites : tout d’abord la probabilité pour que des cavités soient systématiquement situées en cercle autour du centre d’amorçage paraît discutable. Ensuite, si on compare leur nombre par rapport à une autre zone moins déformée, on observe qu’elles sont ici en quantité plus importante. Alors, même si certaines cavités étaient initialement présentes, il paraît tout a fait envisageable que certaines de ces cavités se soient formées ici au moment de l’apparition de l’endommagement. Ensuite la contrainte hydrostatique a permis de les faire croître.

potassium 20 µm 20 µm sodium 20 µm 20 µm

a

b

Figure III.22 Observation de cercles concentriques autour de centres d’amorçage

A une échelle plus petite, la cavitation ne se résume pas à ces grosses cavités. Entre ces cavités, la matière a été fortement déformée. Les ligaments de matière ont été étirés dans le sens de propagation. De très petites cavités en très grand nombre sont visibles. Elles ont une taille comprise entre 30 et 50 nm et semblent plus ou moins sphériques. Elles se situent entre les chaînes macromoléculaires et semblent se localiser plutôt entre les sphérolites. Ces observations sont en accord avec les résultats de Castagnet qui par rétrodiffusion de la lumière indiquait la présence de cette taille de cavités intersphérolitiques [Castagnet, 1998].

Figure III.23 Observations de la zone entourant la zone d’amorçage pour des essais réalisés à 20°C et 2,5.10-3 mm/s

Les observations permettent d’affirmer que non seulement la phase amorphe a été beaucoup sollicitée, mais également la phase cristalline. Les observations montrent que des sphérolites ont été totalement déformés, et de leur forme sphérique initiale, il ne reste qu’une forme allongée (cf. Figure III.23 c,d,f,

et cf. Annexe III.2.b). Du sphérolite initial, on retrouve un cœur très cristallisé et des lamelles qui

semblent avoir été complètement étirées. Ces sphérolites allongés suivent la même direction que les chaînes étirées. Cette observation souligne le caractère anisotrope de la déformation finale. Bien que la cavitation intra-sphérolitique n’ait pu être visualisée lors de notre étude, les observations de Castagnet [Castagnet, 1998] mais également les travaux de Plummer et Kausch [Plummer et Kausch, 1996] sur les polymères semi-cristallins le démontrent. La phase amorphe, située entre les lamelles fortement

20 µm 20 µm 500 nm 500 nm 500 nm 200 nm 200 nm 200 nm 10 µm

a

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c

d

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g

orientées par rapport à la direction de sollicitation, est considérée comme un fluide contraint entre deux plaques rigides (les lamelles cristallines). La déformation imposée permet un certain écoulement de cette phase laissant place à la formation de micro-cavités. Des observations similaires sur du HDPE ont montré la transition entre une structure parfaitement sphérolitique et une structure fibrillaire au delà d’un certain niveau de déformation plastique [Dasari et al, 2002]. L’anisotropie de déformation est ainsi présente dans un premier temps avant l’amorçage sur toute la zone entaillée, dans le sens de traction. Les sphérolites, les chaînes amorphes et les cavités sont alors orientés perpendiculairement au faciès de rupture. Cette anisotropie est révélé e notamment par les observations d’éprouvettes microtomées dans le sens de traction. Puis, après l’amorçage, la propagation génère une seconde anisotropie. C’est celle -ci qu’il est possible d’observer sur les faciès de rupture : orientation des cavités et des chaînes macromoléculaires dans le sens de propagation.

Une dernière remarque peut être faite concernant les zones d’amorçage en fonction de la température. A 20°C, dans un rayon de 20 µm autour du centre d’amorçage, aucune grosse cavité n’est présente. En revanche, au delà de ce rayon elles se développent aléatoirement. En diminuant la température, le rayon critique diminue également (cf. Figure III.24). A -50°C, les cavités se situent à 6 µm du centre d’amorçage. Ainsi une diminution de température induit une concentration de contrainte, d’où un confinement de la zone concernée par l’endommagement.

Figure III.24 Répartition des cavités autour du centre d’amorçage à 20°C, -10°C et –50°C