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III - Fonctionnalisation de membranes nanofibreuses par des nanoréservoirs actifs (Publication n°3)

“ Smart hybrid materials equipped by nanoreservoirs of therapics ”

FACCA S, MENDOZA-PALOMARES C, FERRAND A, FIORETTI F, MAINARD D, BENKIRANE-JESSEL N. ACS Nano, 2011, 6, 483-90

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III.1 Résumé du travail

Objectifs

Avec l’augmentation de l’espérance de vie, l’incidence des pathologies touchant les personnes âgées augmentent, notamment la dégénérescence arthrosique au niveau des articulations (Levy et al, 1993). A l’heure actuelle, le traitement curatif de référence reste le remplacement arthroplastique. Mais l’évolution des nanobiotechnologies, a permis de voir l’émergence de biomatériaux qualifiés de « bioactifs » car fonctionnalisés, puis de dits « vivants », car contenant un contingent cellulaire. L’objectif de ce travail a été de créer un biomatériau, qui permette la réparation d’un défect cartilagineux avec plusieurs caractéristiques spécifiques. Première caractéristique, le biomatériau doit être résorbable et de petite taille pour permettre une implantation de type « mini-invasive » et réduire le temps de convalescence post-opératoire. Seconde caractéristique, le biomatériau doit être fonctionnalisé par des facteurs de croissance pour favoriser la prolifération cellulaire. Dernière caractéristique, le biomatériau doit être capable de régénérer le complexe os-cartilage id est le tissu cartilagineux mais aussi son sous-sol : l’os sous-chondral.

Méthodes

Pour répondre à ces 3 caractéristiques, nous avons en premier lieu fabriqué une membrane par

électro-filage (ou electrospinning), technique approuvée par la FDA (Kenawy et al, 2003).

Ces membranes résorbables sont constituées de nanofibres (d’environ 500 nm de diamètre)

d’un polymère le PCL (Poly ε-CaproLactone). En second lieu, ces membranes ont été

nanofonctionnalisées par des facteurs de croissance (la BMP-2) sous forme de nanoréservoirs

enfouis dans le film de multicouches par simple immersion alternant BMP-2 et un polycation

le DGL (Dendigraft poly(L-lysine). Enfin, ces membranes nanostructurées ont été rendues « vivantes » par adjonction de cellules de type ostéoblastes ou chondrocytes primaires. Ces membranes fonctionnalisées ou pas, ont testées in vitro avec des ostéoblastes en culture, afin de vérifier leur capacité d’ostéoinduction. Puis elles ont été implantées chez des souris

« nude » in vivo en sous-cutanée et sur des défects osseux crâniens (calvaria). Les explants

ont été analysés après 1 et 2 mois par plusieurs techniques, en immunofluorescence, en microcopie électronique, en microspectroscopie confoncale, en histologie et en

111 nanoindentation, pour confirmer leurs propriétés d’induction d’os ou d’une unité os sous-chondral-cartilage en fonction du contingent cellulaire ajouté.

Résultats principaux

L’architecture de nos membranes nanofibreuses est une architecture fibrillaire 3D, qui mime et reproduit celle d’une matrice et qui permet ainsi aux cellules de se retrouver dans des conditions physiologiques. L’incorporation de principes actifs a été suivie par la technique de « microbalance à quartz » (QCM-D). Cette technique a permis de voir l’adsorption

progressive de la BMP-2 dans le film de multicouches : réalisant ainsi des nanoréservoirs de

facteurs de croissance, qui vont être libérés progressivement avec la dégradation des

multicouches de DGL. L’analyse des membranes avec nanoréservoirs, testées in vitro avec

des ostéoblastes humains, retrouve une augmentation de l’expression génique des protéines de

type ostéocalcine, bone sialoprotéine et ostéopontine par rapport aux membranes contrôle

sans nanoréservoirs. A 21 jours, les membranes avec nanoréservoirs ont induit une

minéralisation de la matrice extra-cellulaire. L’analyse in vivo confirme ces résultats

d’ostéoinduction, lorsque que les membranes ont été implantées avec des ostéoblastes. Ces membranes implantées avec en plus un contingent chondrocytaire ont aussi une capacité d’induction d’une unité os-cartilage.

Conclusions du travail

Durant ce travail, nous avons démontré que ces membranes nanofibreuses, ainsi fonctionnalisées par des nanoréservoirs de BMP-2, se sont avérées biocompatibles. Ces implants sont capables in vitro comme in vivo d’une régénération osseuse et cartilagineuse. Ils sont intéressants par leur petite taille permettant une implantation « mini-invasive », par leur propriété de biorésorption, par leur activité biologique (relargage progressif de facteurs de croissance, la BMP-2 étant protégée dans ses nanoréservoirs). L’importance de ce travail réside dans la régénération de l’os sous-chondral en induisant la formation de l’unité os-cartilage. Il en découle un intérêt dans la prise en charge des défects cartilagineux post-traumatiques ou post-arthrosiques.

Mots clés : nanofibres, membranes, nanoréservoirs, os sous-chondral, régénération ostéoarticulaire.

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III.2 Article

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III.3 Résultats et discussion

Le tissu cartilagineux contrairement au tissu osseux, une fois altéré n’a pas de capacité d’autorégénération (Hunsiker, 2002). Son atteinte peut-être localisée (cas des ostéochondrites) ou diffuse (arthrose, arthrites inflammatoires ou septiques). L'arthrose est une affection dégénérative chronique d'une très grande fréquence : on estime le nombre de patients arthrosiques consultant chaque année en France à 3,5 millions. Ce chiffre devrait encore croître dans les années à venir, face à l’augmentation de l’espérance de vie et de la population de gens âgés. L’arthrose touche aussi le sujet jeune, car elle peut être secondaire à un traumatisme (fracture articulaire, évolution secondaire d’une rupture ligamentaire…). Dans toutes ces circonstances, la problématique reste la même : comment régénérer l’unité ostéo-chondrale (id est le cartilage et son sous-sol : l’os sous-chondral) sans avoir recours aux arthroplasties de remplacement articulaire. Des techniques chirurgicales à visée curative existent mais quelle est la qualité du néocartilage à distance ? Les premières visent à remplacer du cartilage soit par un procédé de mosaïque-plastie (Robert, 2011) soit par des

techniques de greffe en prélevant du cartilage costal par exemple (Tropet et al, 2006) (Obert

et al, 2011) (Huard et al, 2011) (Zapparterra et al, 2011). Les secondes visent à stimuler la moelle osseuse sous-jacente, comme le fraisage-avivement de l’os sous-chondral sous arthroscopie avec injection secondaire intra-articulaire de cellules souches autologues (Saw et al, 2009) (Saw et al, 2011) ou la réalisation de microfractures (Gomoll et al, 2010).

Le problème de la régénération du cartilage est d’arriver à régénérer du cartilage avec son sous-sol nutritif : l’os sous-chondral. Il faut donc pour reformer cette unité os-cartilage trois conditions : une matrice 3D, des facteurs de croissance et des contingents cellulaires de différentes lignées. La première condition était de reproduire la MEC 3D : elle a été remplie grâce à l’obtention de membranes nanofibreuses. D’une part les fibres de polymère (PCL) composant la MEC sont résorbables et d’autre part sa structure est fibrillaire avec des fibres de petite taille. En effet, l’idée était de mimer la MEC de tissu cartilagineux. Car les MEC ont une architecture naturelle de type fibrillaire et les biomatériaux doivent se rapprocher de cette architecture. Les fibres avec un diamètre de moins de 700 nm sont colonnisées facilement par les cellules. Or la méthode d’electrospinning nous a permis de déposer et de former des fibres

de PCL pouvant atteindre une taille comprise entre à 50 et 700 nm (Kenawy et al, 2003). La

121 de nanoréservoirs tapissant les nanofibres de PCL. Ces nanoréservoirs permettent, de protéger la BMP-2 d’une lyse trop rapide, et une libération prolongée de ce médicament stocké ainsi à faible concentration et non cytotoxique. C’est la dégradation enzymatique des cellules qui va libérer le principe actif des nanoréservoirs, en parallèle de la dégradation des nanofibres de polymères (PCL). La BMP-2 a été stockée dans l’architecture nanofibrillaire de notre membrane par un simple procédé d’adsorption sans liaison covalente. Elle reste ainsi dans sa forme active. L’analyse en QCM-D a permis de constater la bonne construction du film de

multicouches (DGLG5-BMP-2)n et son épaisseur. Des nanoréservoirs ont bien été observés en

microscopie à balayage à la surface des nanofibres de PCL, par rapport aux membranes non fonctionnalisées.

Ces membranes nanostructurées ont été testées in vitro sur des ostéoblastes primaires

en culture. En immunofluorescence, on a pu constater une expression du gène de

l’ostéocalcine, de la protéine bone sialoprotein, et de l’ostéopontine, caractéristique de

l’ostéoformation seulement avec les membranes nanofonctionnalisées. Après 21 jours de culture, une minéralisation a aussi été constatée avec un dépôt de phosphate de calcium. Puis ces membranes nanostructurées ont été testées in vivo en site calvaria pour voir leur capacité d’ostéoinduction : là aussi de l’os s’est formé à la surface des membranes, mais seulement si elles étaient nanofonctionnalisées avec nos nanoréservoirs de BMP-2. De l’os bien minéralisé est aussi constaté sur les explants, après seulement un mois d’implantation.

Ces membranes nanostructurées ont été testées in vivo en position ectopique pour voir

leur capacité d’induction de néocartilage et d’os sous-chondral, puis en position in situ en

calvaria pour évaluer leur biocompatibilité. Dans ces 2 sites d’implantation, nos membranes nanostructurées avec les nanoréservoirs sont capables d’induire à leur surface : une première couche intermédiaire d’os sous-chondral et une seconde couche de cartilage, très bien visualisées en coupe histologique.

L’intérêt de ces membranes réside surtout dans leur utilisation de nanoréservoirs. Dans la pratique courante certains facteurs de croissance, comme la Rh-BMP-2 ou Rh-BMP-7 (InductOs® ou Osigraft®) sont utilisés dans la cure des pseudarthroses des os longs (Obert et al, 2009) (Gindraux et al, 2010). Mais à des doses de l’ordre du mg/L de Rh-BMP-2 sur des éponges de collagène ou libre pour la Rh-BMP-7. Les nanoréservois permettent d’une part, d’utiliser des doses nanométriques et d’autre part de protéger la molécule, qui reste active sur le site implantatoire plusieurs semaines et sans effets secondaires.

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IV - Propriétés nanomécaniques des membranes nanofibreuses