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Afin de déterminer les plages de températures optimales à étudier, des essais de liquéfaction hydrothermale ont été menées en cellules de DSC. Ces expériences doivent permettre d’étudier le comportement de la biomasse en milieu hydrothermal en fonction de la température, et également de mesurer la dépense énergétique de ce procédé.

La limitation à ce type d’essai réside dans le volume réduit de la cellule (20 µL). La masse de travail est donc limitée (3 mg de microalgues pour 12 µL d’eau) et augmente donc les problèmes liés à une prise d’échantillon non homogène. De plus, il est impossible de déterminer la pression au sein de l’enceinte à un instant t (si la pression autogène de vapeur d’eau peut aisément être déterminée, il n’est pas possible de déterminer la quantité de gaz créé par réactions chimiques).

Deux expériences ont pu être menées. Elles se sont déroulées entre 25 °C et 300 °C, avec une vitesse de chauffe de 2 °C/min, permettant de compenser l’inertie thermique des creusets en acier (cette vitesse de chauffe a été optimisée sur des composés de référence). Cette vitesse

est différente de celle appliquée lors des liquéfactions en enceintes de 50 mL et 300 mL (qui s’approche de 5 °C/min), les phénomènes observés seront donc potentiellement différents.

Après avoir atteint la température de 300 °C, celle-ci a été maintenue à cette valeur durant une heure. Après refroidissement à 25 °C, un deuxième cycle de chauffe jusqu’à 300 °C à 2 °C/min a été imposé sur le même échantillon, afin de vérifier la réversibilité des réactions.

La courbe DSC liée au premier essai ne présente qu’un seul pic exothermique (Figure 3-3), à 219 °C, superposée à une parabole, correspondant à l’énergie fournie par le système pour chauffer l’eau (le creuset de référence ne contenant pas d’eau). La présence d’un pic exothermique est probablement lié à l’hydrolyse des polysaccharides. En effet, il est connu dans la littérature que la formation de monosaccharides à partir de polysaccharides en milieu subcritique se fait entre 200 °C et 250 °C. Ainsi, l’hydrolyse de la lignine et de l’hémicellulose peut débuter à 190 °C, alors que l’hydrolyse de la cellulose n’est complète qu’au-delà de 260 °C. [2], [3] De manière moins probable, ce pic pourrait correspondre à l’hydrolyse des protéines, qui ne se déroule de manière générale que très rarement en dessous de 230 °C. [3] Après avoir atteint la température de consigne de 300 °C, plus aucun pic n’a été observé.

Figure 3-3 : Courbes DSC de liquéfaction hydrothermale

L’intégration de ce pic, entre 185 °C et 250 °C conduit à une énergie de 26,99 J/g d’échantillon placé dans le creuset, composé à 20% de microalgues. En considérant que

l’énergie libérée est uniquement due à l’hydrolyse des liaisons osidiques, l’énergie libérée durant cette hydrolyse est donc de 134,95 J/g de microalgues.

Au deuxième cycle, plus aucun pic n’apparait, ce qui signifie que la réaction observée lors du premier cycle est non réversible. Ceci est donc cohérent avec une réaction d’hydrolyse des polysaccharides. A l’instar du premier cycle, aucun pic n’a été observé après avoir atteint des conditions isothermes à 300 °C.

Cet essai semble assez reproductible, compte-tenu de la faible prise d’échantillon. En effet, une deuxième expérience menée dans des conditions similaires a montré un comportement très proche de celui observé lors de la première expérience (Figure 3-4). Un pic exothermique est observé à la même température précisément (219 °C, intégrant pour une énergie de 117,93 J/g de microalgues), et une absence de signal est observée à partir du moment où des conditions isothermes sont atteintes. La seule différence appréciable visuellement réside dans la zone autour de 125 °C. Lors de la première expérience, aucune transition n’a pu être observée dans cette zone, tandis que lors de la deuxième expérience, un signal est observé (intégration de 62,95 J/g de microalgues).

Figure 3-4 : Répétabilité de l’essai de liquéfaction hydrothermale en cellule DSC

Il semble donc qu’une température supérieure à 220 °C soit nécessaire pour que des réactions commencent à se dérouler.

Afin d’appréhender au mieux les expériences de liquéfaction hydrothermale et d’identifier les paramètres semblant influencer les propriétés viscoélastiques des matériaux hydrophobes isolés, une étude préliminaire a été menée sur le lot 4 de microalgues (se présentant sous la forme d’une pâte contenant environ 80% d’eau en poids). Les expériences ont été menées à partir d’environ 28 g de pâte de microalgues.

Quelles que soient les conditions de liquéfaction appliquées, trois phases ont pu être isolées :

- une phase hydrophobe, composée d’un mélange intime entre une huile viscoélastique noire et des résidus solides bruns ;

- une fraction hydrophile orangée, se retrouvant en milieu aqueux ; - une phase gazeuse.

Après une purge du système, les deux premières fractions (Figure 3-5) sont facilement séparables par simple gravité.

Figure 3-5 : Photographies des différentes fractions obtenues par liquéfaction hydrothermale (phase aqueuse à gauche, mélange entre l’huile et les résidus solides à droite)

Dans l’idéal, la fraction composée de l’huile et des résidus solides pourrait directement être utilisée comme matériau de substitution au bitume. Ce procédé d’isolement serait alors peu onéreux et plus « vert » qu’une extraction Soxhlet, puisqu’il ne nécessiterait pas l’utilisation de solvants organiques. Des caractérisations rhéologiques ont donc été menées en ce sens.

La Figure 3-6 représente le comportement rhéologique de deux phases hydrophobes obtenues dans ces conditions différentes :

- 250 °C pendant 30 minutes (bleu) ; - 300 °C pendant 30 minutes (rouge).

Dans ce cadre, il semble que la teneur en résidus solides soit le paramètre pertinent permettant d’expliquer les variations de rhéologie. En effet, après solubilisation de la bio-huile dans du CH2Cl2, il a été montré que la phase hydrophobe obtenue à 250 °C est composée à 67% de résidus solides, tandis que la phase hydrophobe obtenue à 300 °C est composée à 44% de résidus solides. Ces teneurs en particules se répercutent directement sur les propriétés rhéologiques puisque la fraction contenant le plus de particules est également celle présentant la rigidité la plus élevée, ainsi que l’angle de phase le plus bas. Ainsi, les résidus solides, dispersés au sein de l’huile, pourraient jouer un rôle similaire à celui des asphaltènes dans les bitumes pétroliers, conférant au matériau final une rigidité accrue. Ces résultats sont confirmés par l’analyse des courbes de Black (Figure 3-7). En effet, celles-ci indiquent une structuration partielle du matériau et un comportement plus élastique que visqueux, avec une continuité des isothermes dans l’espace de Black.

Figure 3-6 : Comportement rhéologique (norme du module complexe en haut, angle de phase en bas ; isochrones 1 Hz) de deux phases hydrophobes possédant des charges en résidus solides différentes

Figure 3-7 : Courbes de Black de deux phases hydrophobes possédant des charges en résidus solides différentes

Les résidus solides ont donc un rôle prédominant dans le comportement rhéologique de la phase hydrophobe. Or, la composition et la quantité de ces résidus solides dispersés au sein de l’huile sont directement dépendantes du lot de microalgues étudié. En effet, celles-ci contiennent des quantités variables de sels de culture, et notamment du carbonate de calcium. Il a donc été décidé par la suite d’isoler la bio-huile des résidus solides, afin de s’affranchir d’une source de variabilité supplémentaire.

III– Influence des conditions opératoires sur les rendements