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II.A. Etat des connaissances sur les calderas

D'un relief volcanique à une caldera plane

I- II.A. Etat des connaissances sur les calderas

I-II.A.1. Modèle classique de vidange d'une chambre magmatique

Les calderas sont des dépressions plus ou moins circulaires, de tailles variées : de moins d'un kilomètre de diamètre jusqu'à 35 sur 75 km (la Garita caldera ; Lipman, 2000a). Les plus petites calderas (<5 km de diamètre) sont courantes dans la partie sommitale des volcans basaltiques ou andésitiques. Les plus grandes sont quant à elles le plus souvent attribuées à des éruptions de très grands volumes de laves ignimbritiques (de l'ordre de 1 à 5000 km3 ; Fig. I-9).

Figure I-9 : Quelques éruptions bien documentées associées à des calderas (Lipman, 2000a).

La formation des calderas est un thème très documenté et étudié à partir de différentes approches. Classiquement, le mécanisme auquel on attribue la genèse de telles structures est l'effondrement du toit d'une chambre magmatique suite à sa vidange, lors

d'une éruption de grande ampleur, généralement des éruptions ignimbritiques (e.g. Smith and Bailey, 1968 ; Druitt and Sparks, 1984 ; Scandone, 1990 ; Lipman, 1997). Sur les volcans à laves moins évoluées où les volumes de magmas impliqués dans les éruptions sont plus faibles, l'hypothèse d'un tel effondrement (une caldera de grandes dimensions) associé à une seule éruption est contestable. On évoque alors (1) la subsidence par incréments dus à la vidange progressive du magma basaltique (Skilling, 1993; Munro and Rowland, 1996) ou (2) la subsidence due à la présence d'un complexe intrusif, impliquant que la roche subsidée est "consumée" progressivement en profondeur (Walker, 1988).

Dans les vingt-cinq dernières années l'étude des calderas a permis une meilleure compréhension de leur structure. Des méthodes de terrains et des méthodes expérimentales ont été utilisées pour les étudier telles que la cartographie de structures érodées (e.g. Lipman, 1984 ; Branney and Kokelaar, 1994), la description de calderas résurgentes (Newhall and Dzurisin, 1988), la modélisation analogique (e.g. Komuro et al., 1984 ; Komuro, 1987 ;Marti et al., 1994 ;Roche et al., 2000 ;Acocella et al., 2000 ; Troll et al., 2002) ou à travers la modélisation numérique du champ de contrainte autour d'un réservoir magmatique (Gudmunsson, 1988, 1998; Folch and Marti, 2004). Il subsiste cependant de nombreuses inconnues sur la structure profonde et les mécanismes d'effondrement des calderas.

I-II.A.2. Classification des calderas

Les calderas sont classées en fonction de critères géométriques (Lipman, 2000b) mais également en fonction de la composition dominante des évènements éruptifs associés à leur effondrement (Cole et al., 2005). La profondeur de la chambre magmatique impliquée, sa forme, sa taille et le volume de produits volcaniques éjecté lors de la formation de la caldera ont une influence sur la morphologie de la dépression résultante. Trois cas extrêmes sont généralement mentionnés dans la littérature pour décrire le mécanisme de subsidence : (1) l'effondrement en piston, (2) l'effondrement chaotique (piecemeal) et (3) le downsag, que l'on peut traduire par "affaissement". On peut distinguer un quatrième type d'effondrement : l'effondrement "en entonnoir" (funnel caldera) pour lequel différentes origines ont été proposées (se référer à Roche et al., 2000). Chaque caldera se forme dans un environnement unique et possède son propre mécanisme de formation, souvent influencé par la tectonique régionale. On peut donc retrouver des éléments d'un ou plusieurs des mécanismes décrits sur un même effondrement et chaque

caldera est en quelque sorte unique. La subsidence asymétrique des calderas de type trap-door est par exemple un intermédiaire entre l'effondrement en piston et le downsag. Ces calderas pourraient être liées à des éruptions de faible volume, à une chambre magmatique asymétrique ou à l'influence de la tectonique régionale (Lipman, 1997 ; Fig. I-10).

Figure I-10 : Différentes géométries de subsidence en relation avec la profondeur et la géométrie de la chambre magmatique sous-jacente (d'après Lipman, 1997).

I-II.A.3. Modèle de fluage d'un système hydrothermal

Les modèles "classiques" décrivent les mécanismes associés à l'effondrement du toit d'une chambre magmatique au cours de sa vidange tandis que le travail présenté dans ce mémoire s'intéresse à la formation de calderas par fluage du système hydrothermal d'un édifice volcanique. Cette hypothèse a été proposée par Merle and Lénat (2003) pour expliquer la formation de l'Enclos Fouqué sur le Piton de la Fournaise (Ile de la Réunion). Lors d'un glissement de flanc, la réduction des contraintes latérales sur le système hydrothermal central du volcan aurait favorisé le fluage des roches altérées vers la bordure

libre créé et entraîné l'effondrement d'une pseudocaldera au dessus de ce système hydrothermal.

Dans ce chapitre, nous nous sommes attachés à reproduire une topographie initiale représentative de la réalité et à étudier ses modifications et son influence sur les processus de déformation. Les modèles analogues ont été construits de façon à reproduire des cônes volcaniques de pentes typiques des volcans boucliers (≈ 15°) et des stratovolcans (≈ 30°).

I-II.B. D'un cône volcanique à une caldera plane, approche expérimentale - From steep-slope volcano to flat caldera floor

L'altération hydrothermale à grande échelle dans un édifice volcanique a été décrite par exemple sur le Mont Rainier (Washington). Les produits de déstabilisation du volcan, remaniés dans les coulées de débris d'Osceola, contiennent une très grande proportion d'argiles identifiés comme des produits d'altération hydrothermale (Vallance and Scott, 1997; Reid et al., 2001). Sur le Piton de la Fournaise, l'altération hydrothermale est également importante comme le montre l'abondance de minéraux hydrothermaux dans les affleurements de basaltes dégagés par la Rivière Langevin qui entaille (Cf. Michon and Saint-Ange, sous presse et chapitre III) profondément le massif et également dans les produits d'éruptions phréatomagmatiques survenues sur le volcan (Mohamed-Abchir, 1996).

Les calderas sont des structures importantes dans les environnements volcaniques et sont généralement le lieu d'une activité hydrothermale intense (Bibby et al., 1995) et de reminéralisations (e.g. Lipman and Sawyer, 1985 ; Goff and Gardner, 1994 ; Eaton and Setterfield, 1993). La circulation de fluides (eaux infiltrées et gaz hydrothermaux) à haute température altère profondément la roche engendrant des pertes de volumes et la production d'argiles susceptibles de fluer sous leur propre poids.

Sur la base de ces informations nous nous sommes orientés sur des modèles analogiques reproduisant une zone ductile de grandes dimensions. Ces expériences reproduisent un cône volcanique où une altération étendue a produit un volume important de roche hydrothermalisée au sein de l'édifice.

Ce sous-chapitre est présenté sous la forme d'un article dans Geophysical Research Letters (sous presse en Avril 2007). Il introduit le sujet de fond de ce manuscrit, la formation des calderas par fluage du système hydrothermal. On s'intéresse ici aux modifications de la topographie d'un cône volcanique lors de la formation d'une caldera. Cette partie de l'étude a été inspirée par le cas de Nuku Hiva (Marquises, Polynésie française), et semble apporter une explication viable à la morphologie des structures caldériques de cette île (voir chapitre II).

RESUME DE L'ARTICLE

La plupart des expériences de laboratoire sur les effondrements de calderas ont consisté en la vidange d'un réservoir sous une couche horizontale sans tenir compte de la présence d'un cône sus-jacent (l'analogue de l'édifice volcanique). La surcharge et le rôle de la topographie sont donc négligés de sorte que la topographie finale du plancher de la caldera est directement liée à la topographie initiale. De plus, la subsidence d'une caldera est généralement attribuée à l'effondrement du toit d'une chambre magmatique en lien avec des éruptions émettant de grandes quantités de produits volcaniques. Les expériences analogiques montrent que la déformation d'un corps argilisé résultant de l'altération hydrothermale dans un édifice volcanique peut, sous certaines conditions, reproduire la structure globale d'une caldera. En particulier, on observe une modification de la topographie à l'intérieur de l'effondrement jusqu'à obtenir une caldera plane. Le fluage du système hydrothermal sous-jacent semble être une explication alternative lorsque ce plancher horizontal ne peut être expliquée par le resurfaçage (recouvrement par une activité volcanique syn- et post-caldera, érosion).

From steep-slope volcano to flat caldera floor