• Aucun résultat trouvé

3. M ILIEU DE CONSERVATION

3.5. Identification des polluants externes et internes

L’identification des polluants aéroportés* permet d’évaluer la corrosivité de l’environnement et leur effet nuisible* sur les collections. Elle devait être réalisée à l’aide d’un enregistreur AirCorr I Plus qui présentait malheureusement un défaut de fabrication lors de son installation et n’a ainsi pas pu être utilisé pour cette étude.

Dans un premier temps, il s’agit de cibler les polluants représentatifs des agents nocifs dans notre cas d’étude. Trois polluants nocifs pour l’acier ressortent dans la littérature : SO2, NO2 et O3. Cependant, il existe peu de données quantitatives pour affirmer l’hypothèse selon laquelle de forts dommages puissent être créé par l’ozone43. La piste de ce polluant est donc écartée.

La formation de rouille peut être activée par la présence d’impureté comme des sels (qui entravent la formation d’une couche d’oxyde), la poussière ou les polluants acides44. Les acides organiques volatils (considérés comme composés organiques volatils*) comme l’acide acétique ou l’acide formique présentent un danger particulier pour le plomb mais pas l’acier, tout comme les acides organiques non volatils45, ils ne seront donc pas pris en compte dans le cadre de notre étude.

41 Grzywacz, 2006, p.31

42 Le coupon en cuivre était absent lors du relevé et a été retrouvé plus tard au sol. Il n’est donc plus une référence fiable.

43 Tétreault, 2003, p.14

44 Selwyn, 2004, p.113

La poussière englobe les particules fines et grossières, classées selon leur diamètre. Les particules fines – PM2,5 (entre 0,05 et 2 µm) sont associées aux composés sulfurés et nitreux ou encore les sels46. Elles sont difficiles à filtrer et ont tendance à s’accumuler dans un milieu. Pour contrôler les concentrations de PM2,5, il faut avant tout contrôler les concentrations de PM10 (>10 µm).

Les polluants nuisibles, leurs sources ainsi que leur impact possible sur la R25 L. sont présentés dans le Tableau 6 ci-dessous.

Tableau 6 Polluants nuisibles, leurs sources et les risques pour la Renault 25 Limousine

Polluant Sources Risques pour un véhicule

SO2 Combustion des matières fossiles (carburants)47

Activités industrielles

Dépôts acides48

NO2 Combustion des matières fossiles (carburants) Activités industrielles49 Dépôts acides Favorise l’action du SO2 Particules PM2,5 PM10

Forte concentration de trafic, composants corrosifs50, activités humaines

Dépôts de particules

hygroscopiques sur une surface : augmentation ponctuelle de l’HR et accélération du processus de corrosion

Le modèle IMPACT* a été utilisé pour évaluer la concentration de ces polluants au sein de la réserve R+2. Il s’agit d’un modèle prédictif en ligne qui permet de déduire la concentration interne de trois polluants (NO2, SO2 et O3) à partir des concentrations externes. Le calcul se fait sur la base du volume de la pièce, l’HR interne, la température et les matériaux constitutifs de la réserve (murs, sols). Les concentrations externes ont été obtenues auprès de M. Pierre Robellet, responsable du pôle de surveillance chez ATMO Grand Est, association en charge de la surveillance de la qualité de l’air dans la région Grand Est. Une moyenne a pu être calculée sur une année concernant les taux des concentrations du NO2 et des particules PM2,5 et PM10. Le SO2 n’est plus mesuré sur l’agglomération Mulhousienne vu les faibles niveaux enregistrés ces dernières années. La valeur utilisée se base donc sur le site du Vieux-Thann qui est à proximité de la ville mais également des sites industriels à risque. Elle sert de valeur de référence mais ne peut être utilisée que pour formuler des hypothèses.

46 Tétreault, 2003, p.14 47 Finlayson-Pitts, 2008, p.136 48 Dilmann et al., 2013, p.41 49 Tétreault, 2003, p.13 50 ISO 9223, 2012

Bien qu’il soit impossible d’instaurer des normes générales d’expositions aux polluants51, une comparaison des valeurs limites présentes dans la littérature est possible et permet une estimation de la corrosivité d’un environnement.

Pour formuler des lignes directrices sur l’exposition qui soit justifiables, il faut cerner le rapport quantitatif entre un polluant et son effet sur un l’acier52. On utilise généralement la CSENO*, qui représente la concentration qui se situe immédiatement sous la concentration à laquelle un effet nuisible est observé. La CSENO doit être évaluée par expérimentation, et aucune valeur n’est disponible concernant le rapport acier-polluant53. Quand il est impossible de déterminer la CSENO avec certitude, on peut quantifier le rapport exposition-effet à l’aide de la DMENO* (CMENO* x période de temps), qui correspond aux doses cumulatives auxquelles les premiers signes d’effets nuisibles sont observés. Moyennant une concentration unique (comme dans notre cas d’étude), la CMENO est alors prise comme valeur de référence par défaut54.

Le Tableau 7 ci-dessous résume les valeurs obtenues, pouvant faire office de CMENO.

Tableau 7 Concentration des polluants internes et externes à la réserve, comparée aux valeurs limites avant un effet nuisible observable

Polluant Concentration externe moyenne (ppba) Concentration interne moyenne b (ppb) Valeur limite* (Thomson, 1986 c) Valeur limite (Gryzwacz, 2006 d) SO2 10 8 3,8 0,4 - 2 NO2 21 19 5,3 2 - 10 PM2,5 11 µg/m3 - - - PM10 17 µg/m3 - 10 µg/m3 -

a Conversion utilisée : µg/m3 = (ppb)*(12,187)*(M)/(273,15+20) où M représente le poids moléculaire du gaz et 20 la température moyenne en °C.

b Calculée à l’aide du modèle IMPACT55

c Valeurs attribuées à des matériaux à haute sensibilité

d Valeurs attribuées pour l’acier en fonction de sa sensibilité au polluant56

51 Gibson, 1999, p.73

52 Tétreault, 2003, p.21

53 Ces valeurs ne sont pas non plus existantes pour le fer concernant les polluants pointés dans cette étude.

54 Tétreault, 2003, p.23

55 Voir Fig. 23 et Fig. 24, p.69

Les valeurs sont jusqu’à 10 fois supérieures aux limites imposées pour le SO2. Cependant, ces valeurs ne correspondent pas avec certitude à la concentration interne à la réserve. La piste de la présence de SO2 s’oriente plus vers la combustion du carburant de la R25 Limousine, qui est susceptible d’avoir produit de forte concentration de ce polluant et ainsi créer des dépôts au niveau du soubassement. Une élévation de la teneur en SO2 à la surface du métal provoque la formation de gouttelettes microscopiques d’acide sulfurique qui accélèrent la formation de la corrosion57. Enfin, sous des conditions normales, les dommages créés par le SO2 et les oxydes de sulfates sur le métal augmentent avec une augmentation de l’HR et de la température58. Une corrélation sera donc nécessaire entre l’évolution thermo-hygrométrique de la réserve et la présence du polluant.

La concentration interne moyenne de NO2 est également supérieure aux valeurs limites imposées. Ce polluant est susceptible de se dissoudre dans l’eau (à une HR élevée) à la surface d’un métal et former de l’acide nitrique, corrosif pour l’acier59.

A noter qu’il s’agit à la fois d’une surveillance quantitative* (concernant le SO2 et NO2) et qualitative* (pour PM2,5 et PM10) afin d’évaluer les effets des polluants. Concernant la poussière, il est possible par simple observation de déduire qu’une forte concentration de particule fines et grossières est présente dans la réserve : les véhicules ne sont pas entièrement nettoyés lorsqu’ils sont utilisés puis remis en réserve, les châssis sont huileux et de ce fait recouvert d’une fine couche de poussière.

Sur des longues périodes, l’exposition à des concentrations faibles de polluants est aussi nocives pour les matériaux qu’une exposition courte à des concentrations élevées60.

Dans la suite de ce dossier, les hypothèses concernant la présence ou non de ces polluants seront suivies et possiblement confirmées par des observations et analyses faite directement au niveau du soubassement de la R25 Limousine.

57 Tomsin, 2007 [En ligne]

58 U.S. DHEW, 1969, p.53

59 Thomson, 1986, p.152

Documents relatifs