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Identification d’une longueur caractéristique

des gradients de contrainte

Comme expliqué au Chapitre1, les gradients de contrainte introduits par les défauts dans les structures nécessitent un traitement spécifique. Une évaluation au point chaud de la durée de vie a tendance à sous- estimer la durée de vie. En effet, lors de l’identification du critère de fatigue sur des éprouvettes lisses, toute la section de l’éprouvette subit la même contrainte. Dans le cas d’un défaut, la contrainte maximale est atteinte au bord du trou et décroît rapidement. Le volume sollicité à de grands niveaux de contrainte est donc faible. La méthode du volume est choisie ici car son application à des défauts de morphologies complexes est directe. La contrainte effective du critère de fatigue est calculée pour chaque point d’intégration. Avant de procéder à l’estimation de la durée de vie, la moyenne de cette grandeur est calculée sur une sphère de rayon la longueur caractéristique.

2.5.1 Dépouillement des essais sur éprouvettes avec défauts calibrés

Des essais mécaniques sur des pièces contenant des défauts calibrés sont mis en place pour déterminer la longueur caractéristique. Des éprouvettes tubulaires trouées sont utilisées. Le plan de ces éprouvettes est donné en Annexe C. Une machine servo-hydraulique de 250 kN est utilisée. Les éprouvettes ont subi le traitement thermique choisi à la Section 2.2.3 et présentent donc une microstructure représentative de celle de la ZF. Chaque éprouvette est percée de 44 trous. Trois diamètres de trous ont été choisis : 500 µm, 300 µm et 50 µm. Les éprouvettes subissent des cycles symétriques à force imposée. Le signal imposé est de forme triangulaire, de fréquence 0,5 Hz. Les essais sont interrompus régulièrement pour observer tous les trous et les fissures qui s’y amorcent et se propagent. La Figure 2.23 présente l’évolution des fissures près d’un trou de 300 µm. L’éprouvette est sollicitée, dans ce cas, entre 60 et -60 kN, ce qui correspond à une amplitude de contrainte ∆σ/2 de 800 MPa dans la section utile de l’éprouvette. Au moment de l’écriture du mémoire, cet essai est le seul qui ait été mené à son terme, les autres étant en cours.

250 cycles 300 cycles 350 cycles 400 cycles 450 cycles

Figure 2.23 – Propagation de fissures autour d’un défaut artificiel calibré dans une éprouvette tubulaire multi-perforée. Le trou a un diamètre de 300 µm. La force maximale imposée à l’éprouvette est 60 kN. L’axe de sollicitation est horizontal.

L’observation régulière de tous les trous permet d’obtenir une statistique de l’évolution des longueurs de fissures. Il est alors intéressant, pour une longueur critique de fissure donnée, notée ac, de compter le

nombre total de fissures est de 88 (2 par trou). La taille critique de fissure ac est ici fixée à 200 µm. Cela

correspond à une fissure de l’ordre de grandeur d’un ex-grain β. La Figure2.24montre que c’est entre 200 et 250 cycles que la première fissure atteint 200 µm. Entre 300 et 350 cycles, la moitié des fissures ont atteint cette longueur. Lorsque l’essai est arrêté à 450 cycles, 84 des 88 fissures ont atteint la longueur critique. Bien sûr, cette courbe dépend de la taille des trous et du chargement appliqué. L’objectif de cette section est de trouver une longueur caractéristique qui permet de retrouver une durée de vie proche de celle de l’expérience. La dispersion observée expérimentalement, héritée des hétérogénéités à l’échelle de la microstructure, n’est pas rendue par la simulation numérique. Une durée de vie cible doit donc être fixée. Ce choix peut être plus ou moins conservatif : il est possible de se fixer comme durée de vie le nombre de cycles nécessaire à ce que 10 % ou 50 % des fissures atteignent la longueur critique. Les durées de vie associées peuvent être lues sur la Figure2.24grâce aux lignes horizontales pointillées. Ainsi, la durée de vie pour l’approche plus conservative (10% des fissures plus longues que ac) est de 260 cycles, alors qu’elle est de 325 cycles pour l’autre (50% des

fissures plus longues que ac).

Figure 2.24 – Évolution du nombre de fissures dont la longueur dépasse une longueur critique ac pour

différentes valeurs de ac. Les données sont issues d’un essai sur une éprouvette dont les trous ont un diamètre

de 300 µm. L’essai est piloté en force entre 60 et -60 kN.

2.5.2 Simulation de l’essai pour la calibration de la longueur caractéristique Rc

Simplification de la géométrie

La taille des trous est très faible devant la taille des éprouvettes et devant la distance entre deux trous. Nous allons ici vérifier qu’il est possible d’obtenir une bonne estimation de la durée de vie de la pièce en ne simulant qu’un seul des 44 trous. Pour ce faire, un maillage de l’éprouvette pour les plus gros trous (500 µm) est réalisé. Le maillage de la géométrie complète peut être observé sur la Figure2.25. Un autre maillage ne comportant qu’un seul des 44 trous est construit. L’application de conditions de symétrie (déplacement normal nul) permet de restreindre le domaine de simulation à un huitième de l’éprouvette.

Le modèle B identifié plus tôt dans ce chapitre est utilisé. Le chargement est appliqué via des conditions de pression à l’extrémité de l’éprouvette. Les calculs sont arrêtés dès qu’ils atteignent un état stabilisé. Le champ de contrainte équivalente de von Mises est tracé au dernier pic de chargement pour une éprouvette avec des trous de 500 µm sur la Figure 2.25. Alors que la contrainte est de l’ordre de 800 MPa dans la section de l’éprouvette, un gradient de contrainte est visible près de chaque perçage. Localement, la contrainte équivalente de von Mises atteint 1100 MPa.

2.5. IDENTIFICATION D’UNE LONGUEUR CARACTÉRISTIQUE 41

σVM

Figure 2.25 – Carte de contrainte équivalente de von Mises au dernier pic de chargement. Les conditions de symétrie appliquées permettent de restreindre le domaine de simulation à un huitième de l’éprouvette. Le détail permet de visualiser le raffinement de maillage près des perçages et le gradient de contrainte qui s’y développe.

La Figure 2.26 présente l’évolution de la durée de vie estimée par le modèle en fonction de la longueur caractéristique pour les deux simulations. Dans ce cas, la force appliquée à l’extrémité de l’éprouvette varie entre 60 et -60 kN. La Figure2.26 présente une bonne adéquation entre les deux courbes : l’écart maximal entre les durées de vie estimées avec les deux géométries est de l’ordre de 12 %. La simulation avec un seul trou est 10 fois plus rapide que celle avec tous les trous. De plus, l’exemple présenté est le plus défavorable car il considère les trous de plus grande taille. Les résultats présentés dans la suite seront donc obtenus par la simulation avec la géométrie simplifiée.

Figure 2.26 – Comparaison des durées de vie obtenues pour la géométrie réelle (44 trous) et la géométrie simplifiée (1 trou) pour des longueurs caractéristiques allant de 50 à 500 µm. Ces simulations sont réalisées avec des trous de 500 µm de diamètre. La force appliquée à l’éprouvette varie entre 60 et -60 kN.

Calibration de la longueur caractéristique Rc

Au moment de la rédaction de ce mémoire, un seul essai est disponible pour calibrer la longueur caracté- ristique. Il a été réalisé sur une éprouvette avec des trous de diamètre 300 µm. Le chargement en force varie

entre 60 et -60 kN. Une simulation sur la géométrie simplifiée est réalisée jusqu’à la stabilisation de la réponse mécanique. Le champ de contrainte effective du critère de durée de vie est obtenu par post-traitement du cycle stabilisé. Le calcul de la moyenne est réalisé pour plusieurs longueurs caractéristiques. La Figure2.27 présente les résultats obtenus. Pour cet essai, la durée de vie expérimentale de 325 cycles est retrouvée pour une longueur caractéristique Rc de 125 µm, tandis que celle de 260 cycles l’est pour Rc=110 µm.

Figure 2.27 – Évolution de la durée de vie estimée en fonction de la longueur caractéristique utilisée en post-traitement. Les lignes pointillées représentent les durées de vie cibles (260 et 325 cycles). Une simulation sur géométrie simplifiée (1 trou de 300 µm) a été réalisée.

Ces valeurs de Rc sont utilisées dans la suite du mémoire. Dès que de nouveaux résultats seront disponibles

(notamment sur des trous de taille différente), leur pertinence pourra être évaluée.

2.5.3 Calcul numérique d’un diagramme de Kitagawa

Grâce à la longueur caractéristique Rccalibrée, l’impact de la taille d’un défaut sur la durée de vie peut

être quantifié. Dans cette section, le calcul simple d’un défaut sphérique pris dans une matrice infinie est mené. L’application de conditions de symétrie permet de réduire le domaine de simulation à un huitième de sphère dans un cube. Le maillage est réalisé en hexaèdres. Un raffinement dans le voisinage du défaut est appliqué pour bien capter les gradients de contrainte et et déformation plastique. La Figure2.28présente le maillage utilisé. Le schéma de raffinement hiérarchique appliqué est celui proposé dans [Schneiders 2000]. Il a été implémenté dans Z-Set [Z-Set 2019] au cours de cette thèse. Le diamètre du défaut est cent fois plus petit que le côté du cube.

σ eff [M P a ] 100 1200

Figure 2.28 – Vue du huitième de domaine simulé. Le champ tracé est celui de la contrainte effective. Le raffinement de maillage est hiérarchique : des éléments d’un maillage grossier sont divisés en éléments de plus petite taille et des zones de transition sont insérées.

2.6. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 43