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La MA, la principale cause de démence dans le monde, est devenue un véritable problème de santé publique. Les prévisions mondiales sont inquiétantes car le nombre de personnes atteintes de démences devrait atteindre 82 millions en 2030 et 152 millions d'ici 2050 en absence de traitements efficaces et de diagnostic précoce. Chaque année ce sont plus de 9,9 millions de nouveaux cas de démence qui sont diagnostiqués dans le monde, soit un nouveau cas tous les 3 secondes.

Cependant, après plus de 100 ans de recherche sur la MA et de découvertes importantes dans le domaine, il reste d’importants défis à relever. En effet, comme nous avons pu le voir dans ce chapitre, l’origine exacte de la MA reste méconnue et les signes cliniques présentent une forte hétérogénéité ce qui explique l’absence de traitements efficaces, les failles et les limites du diagnostic actuel.

Progressivement, la MA s’installe et engendre des dommages irréversibles au SNC entrainant une altération neuronale, une perte synaptique et un déclin des fonctions cognitives globales. Les deux principales caractéristiques neuropathologiques de la MA sont les plaques amyloïdes au niveau extracellulaire et les DNF liées à l’hyperphosphorylation de la protéine Tau au niveau intracellulaire. Les mécanismes de la formation des plaques séniles et des DNF sont inconnus mais ceux-ci vont se propager petit à petit dans différentes régions cérébrales. Une des hypothèses serait l’implication des vésicules extracellulaires dans la propagation toxique des plaques et des DNF. Ces deux caractéristiques neuropathologiques représentent les critères du diagnostic dit certain de la MA par une analyse du cerveau en post-mortem. Durant les deux dernières décennies, de nombreuses approches thérapeutiques ont ciblé les voies de l’Aβ et de Tau afin de prévenir ou de stopper la progression de la MA avec des résultats non satisfaisants. Ces nombreux échecs révèlent le caractère multifactoriel de la MA et la nécessité de commencer un traitement le plus rapidement possible avant l’altération irréversibles du SNC. Tout comme la plupart des maladies chroniques, la MA commence insidieusement à s’installer en absence de symptômes (stades précliniques) puis progresse doucement avec l’apparition de troubles cognitifs légers (phase MCI). À ce stade, les patients peuvent encore éviter la démence et demeurer MCI jusqu’à la fin

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de leur vie. Il est encore difficile d’identifier les personnes à risque de développer une démence de type Alzheimer ou encore de comprendre pourquoi certaines personnes évoluent vers la démence et d’autres non. Néanmoins, ces deux phases représentent une opportunité importante que ce soit pour le diagnostic et pour le début d’un traitement afin de prévenir la conversion vers la démence et sa progression.

C’est pourquoi, au vu de l’évolution lente de la MA, de son caractère irréversible et compte tenu de sa détection tardive, il est primordial d’identifier des biomarqueurs pour un diagnostic fiable et précoce afin de modifier les facteurs de risque et de ralentir sa progression. Les efforts dans ce domaine se concentrent principalement sur l’analyse du niveau d’Aβ et de la protéine Tau totale ou hyperphosphorylée dans le LCR ou dans le cerveau par imagerie cérébrale. Cependant, malgré l’introduction récente de ces biomarqueurs dans les critères de diagnostic de l’IWG-2 et du NIA-AA, leur utilisation est restreinte car ils présentent des limites de sensibilité et spécificité et se révèlent invasifs et couteux dans de nombreux pays. Ainsi, l’identification de marqueurs périphériques et la mise à jour des critères actuels sont indispensables pour permettre un diagnostic certain et rapide de la MA. De plus, il est également essentiel d'élargir notre vision de la pathogenèse au-delà de l’hypothèse de la protéine Tau et de l’Aß et d’identifier de nouveaux biomarqueurs potentiels.

L'association entre le stress oxydatif et les principales caractéristiques neuropathologiques de la MA est maintenant clairement établie. Le stress oxydatif est impliqué dans chacun des mécanismes pathogéniques étudiés et apparaitrait bien avant l’apparition des troubles cognitifs et des plaques Aβ in vivo chez des animaux transgéniques. De plus, on observe en post-mortem une grande quantité cérébrale de produits d'oxydation chez les sujets MCI ou chez les patients atteints de la MA. La présence précoce du stress oxydatif a également été confirmée dans le sang ou dans le LCR des patients MCI mais peu d’études ont étudié leur association possible avec les données cliniques comme les scores cognitifs.

Récemment, dans le domaine des biomarqueurs, les études s’intéressent également aux vésicules extracellulaires périphériques. Les vésicules extracellulaires, libérées par de nombreux types cellulaires comme les cellules du SNC, sont impliquées dans

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l’élimination de constituants cellulaires (lipides, protéines, ARN, …), dans la communication intracellulaire et seraient responsables de la propagation cérébrale des protéines toxiques (Tau, Aβ, …) dans les maladies neurodégénératives. Elles sont capables de passer la barrière hémato-encéphalique et de se retrouver dans la circulation sanguine. Ainsi les vésicules extracellulaires périphériques pourraient renfermer des biomarqueurs potentiels ainsi que des protéines d’origine neuronale reflétant les mécanismes pathologiques centraux. Cependant, peu d’études ont été réalisées dans ce nouveau domaine de recherche. L’investigation du contenu des vésicules extracellulaires plasmatiques ouvrent de nombreuses perspectives.

De ce fait, l’hypothèse de cette thèse se décompose en deux parties. Tout d’abord, un profil de biomarqueurs périphériques liés au stress oxydatif dans le plasma peut constituer une signature moléculaire potentielle pour le diagnostic du stade MCI et de la progression de la MA et peut être associé au déclin cognitif. Dans un second temps, le contenu protéique des vésicules extracellulaires plasmatiques totales peut représenter un nouvel outil afin d’identifier des signatures moléculaires potentielles pour le diagnostic du stade MCI et de la progression de la MA.

Ce travail se décompose en 3 objectifs spécifiques, décrits ci-dessous : Objectif 1 :

Identification d’un profil de marqueurs plasmatiques lié au stress oxydatif et leur association au scores cognitifs chez les sujets MCI et les patients atteints de la MA à différents stades de la maladie.

Objectif 2 : Dosage des protéines pathogéniques de la MA dans les exosomes totaux plasmatiques comme un nouvel outil potentiel pour prédire le stade MCI et la progression de la MA.

Objectif 3 : Étude du niveau de protéines d’origine cérébrale, impliquées dans les mécanismes pathogéniques de la MA, dans les vésicules extracellulaires plasmatiques pour le diagnostic des sujets MCI et de la progression de la MA.

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CHAPITRE II

3.

ARTICLE 1: BLOOD-BASED REDOX-SIGNATURE AND THEIR

ASSOCIATION TO THE COGNITIVE SCORES IN MCI AND

ALZHEIMER’S DISEASE PATIENTS

Statut de l’article : Publié dans le journal Free Radical Biology and Medicine,

Volume 130, January 2019, Pages 499-511

Auteurs de l’article : Morgane Perrotte a,b, Aurélie Le Page c , Marianne Fournet a, Mélanie Le Sayec a, Éric Rassart d, Tamas Fulop c, Charles Ramassamy a,b

a

INRS-Institut Armand-Frappier, Laval, QC, Canada

b

Institut sur la Nutrition et les Aliments Fonctionnels, Laval University, Québec, Canada

c

Department of Medicine, Geriatric Division, Research Center on Aging, Université de Sherbrooke, QC, Canada

d

Université Québec à Montréal, Dept. Sciences biologiques, QC, Canada