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Hypothèse explicative 1 : Ils ont des traits psychopathiques, mais ils n’ont pas été

Chapitre V – Discussion et conclusion

5.1. Interprétation des résultats

5.1.1. Hypothèse explicative 1 : Ils ont des traits psychopathiques, mais ils n’ont pas été

Une première hypothèse explicative de ces résultats est la possibilité que les fraudeurs présentent des traits psychopathiques, mais qu’il n’a pas été possible de les détecter. Ceci pourrait s’expliquer par la faible puissance statistique inhérente à la taille de l’échantillon, par la nature des mesures ou par le classement des participants dans les différents groupes.

5.1.1.1.Taille de l’échantillon et puissance statistique

La faible puissance statistique induite par la taille réduite de l’échantillon a pu limiter les probabilités de détecter des différences réelles entre les groupes de participants. Cette faiblesse pourrait occasionner une erreur statistique de type II (β). Elle consisterait à se tromper en acceptant une hypothèse nulle qui est fausse, donc ne pas relever une différence existante. Howell (1998) suggère qu’une puissance

statistique acceptable serait de 80% (donc une probabilité de 20% de commettre une erreur de type II).

La détermination de la taille de l’échantillon nécessaire pour obtenir une puissance statistique acceptable est un processus itératif basé sur la connaissance de la population étudiée. Nous ne disposions pas d’une telle connaissance en entreprenant le présent projet. Nous méconnaissions en effet les moyennes attendues ou du moins la différence probable entre les groupes. Cohen (1988) propose une méthode permettant de surmonter le problème découlant de l’absence de données portant sur ces paramètres (Howell, 1998; Laurencelle, 2007). Il suggère de déterminer la taille de l’échantillon selon la taille de l’effet attendu (d de Cohen), c’est-à-dire l’ampleur des différences prévisibles et attendues entre les groupes. Pour un effet attendu modéré (d de Cohen de 0.5) à seuil de signification 0.05 et une puissance statistique de 80%, la taille de l’échantillon souhaitable serait de 102 participants au total. Pour un effet attendu faible (d de Cohen de 0.2) à seuil de signification 0.05 et une puissance statistique de 80%, la taille de l’échantillon souhaitable serait de 620 participants au total.

Ces principes statistiques appliqués à la présente étude suggèrent que l’ajout de 22 participants dans le groupe de fraudeurs et de 36 participants dans le groupe d’AAV (passant ainsi à deux groupes égaux de 44 participants chacun), ce qui aurait fait augmenter la puissance statistique pour les analyses portant sur le score total du PPI de 10,2% à 80%. Aussi, si le groupe de fraudeurs et le groupe d’ASV avaient été constitués de 31 participants chacun (plutôt que 23 et 19) la puissance statistique aurait été de 80,3% plutôt que de 63,4%.

Le nombre de participants requis est établi en partant de l’idée que les analyses seront menées sur deux groupes. Plus il y a de groupes, plus il faudra de participants. D’ailleurs, Howell (1998) rappelle, au sujet des groupes comparés que les groupes de tailles inégales réduisent la puissance statistique des tests pouvant être menés. Tel est le cas de l’étude actuelle puisque le groupe de fraudeurs est constitué de plus du double de participants que le groupe d’AAV.

de plus grande taille aurait rendu possible l’utilisation des analyses de covariances (ANCOVA) qui aurait permis de vérifier les impacts de l’âge et du genre sur les résultats obtenus et de contrôler leurs effets (Anastasi, 1994; Howell, 1998; Urbina, 2004).

5.1.1.2.Psychométrie : mesures et styles de réponse

Il est possible que des différences réelles entre les groupes de participants existent, mais que les instruments utilisés n’aient pu les détecter. La psychopathie est un concept complexe à mesurer et les fraudeurs sont probablement de bons menteurs habiles à cacher leurs travers. La littérature indique que les fraudeurs connaissent généralement les attentes sociales et savent y correspondre. Cette tendance, nommée désirabilité sociale, consiste donc à se présenter sous un jour favorable (Mills & Kroner, 2006). Les répondants ont généralement tendance à vouloir se présenter favorablement (Paulhus, 2003). Mais les fraudeurs ont-ils une plus forte propension que les autres groupes de participants? Se fondant sur cette hypothèse, Gagnon (2008) a remis en question la justesse de ses résultats (obtenus auprès des mêmes participants que ceux qui se sont prêtés à la présente étude) :

«…nous présumons qu'il se peut que nous ayons participé au même processus qui s'exerce entre un fraudeur et une victime. Nous jugeons que les fraudeurs spécialisés ont peut-être été aptes à truquer les deux tests psychométriques; ils ont donc réussi dans un sens à nous tromper et à nous manipuler, de la même façon qu'ils ont berné et floué les victimes de leurs actes frauduleux» (Gagnon, 2008, p.141).

Ainsi, les fraudeurs auraient menti en répondant aux questions pour bien paraître. Le score des fraudeurs spécialisés sur l’échelle de Suppression du MMPI-2 de l’étude de Gagnon (2008) était de 50,6. Bien qu’ils aient obtenu le score le plus élevé de tous les groupes, indiquant ainsi une tendance à minimiser l’ampleur de leur problème, ce score n’est pas problématique puisqu’il se situe en deçà de 65. Un score de 65 aurait indiqué un problème marqué de désirabilité sociale pouvant remettre en question les résultats (Duckworth & Anderson, 1995).

Les échelles de vérification des styles de réponses du PICTS et du PPI n’indiquent pas de particularité quant à la possibilité de manipulation de l’instrument

de mesure par le groupe de fraudeurs. Les fraudeurs obtiennent d’ailleurs des scores comparables aux autres groupes sur ces échelles et ces scores sont considérés comme des résultats valides par les auteurs des instruments.

5.1.1.3.Classement des participants et homogénéité des groupes

Il est possible que des différences réelles entre les groupes de participants existent, mais que leur détection ait été réduite par des erreurs d’attribution des participants dans les différents groupes. En fait, 15,4% des 52 répondants n’ont pas fourni d’information quant à leurs antécédents criminels. Plus d’informations officielles quant à l’historique des participants auraient probablement favorisé un classement plus précis des participants, et ainsi, une meilleure homogénéité des groupes, ce qui aurait facilité la détection de différences entre eux (si des différences existent vraiment).