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Hypersurfaces de Danielewski à un paramètre

Partie II : Plongements des hypersurfaces de Danie-

4.2.2 Hypersurfaces de Danielewski à un paramètre

Dans le premier chapitre, nous avons vu (théorème 1.3.13) comment, étant donnée une hypersurface de Danielewski X = V (P ), construire une hyper- surface sous forme standard Xs= V (Ps) isomorphe à X.

On peut ainsi calculer, comme dans la proposition 1.3.17, une forme stan- dard (Xs)c pour chaque fibre V (P − c) du polynôme P . En fait, on a même

mieux : les familles (Xs)c | c ∈ C

etV (P − c) | c ∈ C sont isomorphes ! (au sens de la définition 4.1.26)

On dira que la famille (Xs)t | t ∈ C

est une forme standard de l’hy- persurface de Danielewski à un paramètre X(t) d’équation P = t.

(On utilise la lettre t dans la notation X(t) pour insister sur le fait que t est vu comme un paramètre ; alors que l’utilisation de la lettre c signifie que l’on travaille avec une constante c fixée.)

Définition 4.2.20. Soient n > 0 un entier et Q(t, x, z) ∈ C[t, x, z] un poly- nôme tel que Q(t, 0, z) soit, vu comme polynôme de (C[t])[z], unitaire et de degré au moins deux.

La famille V (xny − Q(t, x, z)) | t ∈ C est alors appelée hypersurface de

Danielewski à un paramètre ou encore hypersurface de Danielewski à coeffi- cients dans C[t].

On la note XQ,n(t) ou plus simplement X(t) quand il n’y a pas d’ambiguïté.

Deux hypersurfaces de Danielewski à un paramètre X1(t) et X2(t) sont dites

isomorphes si elles le sont en tant que familles d’hypersurfaces de C3.

On définit naturellement, comme pour les hypersurfaces de Danielewski, une notion de forme standard pour les hypersurfaces de Danielewski à un pa- ramètre, en disant qu’une hypersurface de Danielewski X(t) est sous forme standard si la familleV (Pt) | t ∈ C

qui la définit est une famille d’hyper- surfaces de Danielewski sous forme standard. C’est-à-dire si, pour tout t ∈ C, le polynôme Pt ∈ C[t, x, y, z] est de la forme Pt = xny − p(t, z) − xq(t, x, z)

avec degz(q(t, x, z)) < degz(p(t, z)).

Le théorème 1.3.13 reste vrai dans ce cadre et on montre, avec la même preuve, le résultat suivant :

Théorème 4.2.21. Soit X(t) = XQ,n(t) une hypersurface de Danielewski à

un paramètre. Notons Q(t, x, z) = p(t, z) + xq(t, x, z).

On peut alors déterminer, par un procédé algorithmique, une forme stan- dard Xs(t) de X, c’est-à-dire un polynôme qs(t, x, z) ∈ C[t, x, z] vérifiant

degz(qs) < degz(p) et tel que les familles d’hypersurfaces de C3, X(t) =

 V (xny − Q(t, x, z)) | t ∈ C et X s(t) =  V (xny − p(t, z) − xq s(t, x, z)) | t ∈ C , soient isomorphes.

Preuve. Il suffit de reprendre ici la preuve du théorème 1.3.13.

En effet, comme p(t, z) est, vu comme polynôme de (C[t])[z], unitaire, on peut effectuer la division euclidienne de n’importe quel polynôme f ∈ (C[t])[z] par p. Dès lors, il existe bien des polynômes qs(t, x, z), πt = π(t, x, z) et

Rt= R(t, x, z) tels que degz(qs(t, x, z)) < degz(p(t, z)) et

Il suffit alors de choisir des polynômes ft = f (t, x, z) et gt = g(t, x, z) tels

que

(1 + xπ(t, x, z))f (t, x, z) + xng(t, x, z) = 1,

et de considérer les familles d’endomorphismes de C3, (Φ

s)t et (Φs)t, définis respectivement par (Φs)t(x, y, z) = (x, (1 + xπt)y + Rt, z) et (Φs) t(x, y, z) = x, fty + gt(p(t, z) + xqs(t, x, z)) − ftRt, z  . On vérifie finalement que

((Φs)t)∗(xny − p(t, z) − xq(t, x, z)) = (1 + xπt)(xny − p(t, z) − xqs(t, x, z)) ((Φs) t)∗(xny − p(t, z) − xqs(t, x, z)) = ft(xny − p(t, z) − xq(t, x, z)) et que (Φs)t ◦ (Φs)t(x, y, z) = (x, y − (xny − p(t, z) − xqs(t, x, z))gt, z) et (Φs) t◦ (Φs)t(x, y, z) = (x, y − (xny − p(t, z) − xq(t, x, z))gt, z). 

D’après la proposition 4.1.27, établir la classification des polynômes PQ,n

à équivalence près revient à classifier les hypersurfaces de Danielewski à co- efficients dans C[t] correspondant aux fibres des polynômes PQ,n; et donc à

classifier leurs formes standards. Le résultat suivant montre que cette classi- fication permet en fait de connaître les classes d’isomorphie d’une famille, a priori plus grande, d’hypersurfaces de Danielewski à un paramètre.

Théorème 4.2.22. Soit X(t) = XQ,n(t) une hypersurface de Danielewski

à coefficients dans un anneau de polynôme C[t] définie par une équation de la forme xn

y = Q(t, x, z) = p(z) − t + xq(t, x, z) avec p(z) ∈ C[z] et q(t, x, z) ∈ C[t, x, z].

Alors, on peut construire, par un procédé algorithmique, un polynôme ˜

q(x, z) ∈ C[x, z] tel que la famille ˜X(t) = Xp(z)−t+x˜q(x,z),n(t) soit isomorphe

à X(t).

Preuve. On va raisonner par induction en montrant que, pour tout entier 1 6 i 6 n, il existe des polynômes qi(x, z) ∈ C[x, z] et πi(t, x, z) ∈ C[t, x, z]

tels que

p(z) − t + xq(t, x, z) ≡ (1 + xπi(t, x, z))(p(z) − t + xqi(x, z)) mod (xi).

Leur existence est évidente pour i = 1. Supposons donc que les polynômes qi et πi soient construits pour un certain i. Notons ri le polynôme vérifiant

On peut écrire ri(t, z) = ri(t − p(z) + p(z), z) = ri(p(z), z) + (p(z) − t)˜πi(t, z)

pour un certain polynôme ˜πi(t, z). L’égalité suivante est alors vraie modulo

(xi+1) : Q(t, x, z) ≡ 1 + xπi(t, x, z) + xiπ(t, z)˜  p(z) − t + xqi(x, z) + xiri(p(z), z)  . On a ainsi obtenu l’égalité voulue ; ce qui nous permet de conclure, comme dans la preuve du théorème précédent, que X(t) est isomorphe à la famille Xp(z)−t+xqn(x,z),n(t) d’équation x

n

y = p(z) − t + xqn(x, z). 

Remarquons que, quand n = 2, l’application des algorithmes décrits dans les preuves des théorèmes 4.2.21 et 4.2.22 est immédiate. On arrive ainsi au résultat suivant.

Proposition 4.2.23. Soit X(t) une hypersurface à coefficients dans C[t] définie par une équation de la forme x2y = p(z) − t + xq(t, z).

Si on pose d = deg(p) et que l’on note qi les polynômes vérifiant

q(t, x, z) = Pd−1i=0 ziq

i(t, p(z)), alors les trois familles suivantes sont iso-

morphes : 1. X(t) =nV x2y − p(z) + t − xPd−1 i=0 ziqi(t, p(z))  | t ∈ Co; 2. Xs(t) = n V x2y − p(z) + t − xPd−1 i=0 z iq i(t, t)  | t ∈ Co; 3. eX(t) =nV x2y − p(z) + t − xPd−1 i=0 ziqi(p(z), p(z))  | t ∈ Co.

Preuve. Pour démontrer cette proposition, il suffit de calculer, comme dans la preuve du théorème 4.2.21, une forme standard pour les familles X(t) et

˜

X(t). On vérifie que ces formes standards sont bien, dans les deux cas, la famille Xs(t) de l’énoncé. 

Le corollaire suivant illustre bien l’intérêt de travailler avec des familles d’hypersurfaces quand on veut prouver que deux polynômes sont équiva- lents. Il va nous conduire aux formes normales pour les polynômes PQ,n.

Celles-ci sont inspirées des formes standards réduites des hypersurfaces de Danielewski.

Corollaire 4.2.24. Tout polynôme PQ,2 = x2y − Q(x, z) définissant une

hypersurface de Danielewski XQ,2 est équivalent à un polynôme de la forme

x2y − p(z) − x deg(p)−2 X i=0 ziq i(p(z)).

Preuve. Soit PQ,2 un tel polynôme. On peut supposer, d’après le lemme

1.3.8, que degxQ(x, z) < 2. Notons alors p(z) = Q(0, z), d = deg(p) > 2 et

Q(x, z) = p(z) + x

d−1

X

i=0

ziqi(p(z)) pour certains polynômes qi ∈ C[1].

Alors, d’après la proposition précédente, les familles d’hypersurfaces n V PQ2 + t  | t ∈ Co et nV x2y − p(z) + t − xPd−1 i=0 ziqi(t)  | t ∈ Co sont isomorphes. Or, cette dernière est clairement isomorphe à une famille de la forme nV x2y − p(z) + t − xPd−2

i=0 z iq˜

i(t)



| t ∈ Co. Il suffit en effet de consi- dérer, comme dans la preuve de la proposition 1.3.20, un automorphisme de la forme (x, y, z) 7→ (x, y, z − xαqd−1(t)), pour une certaine constante α ∈ C.

On conclut finalement – après avoir utilisé une nouvelle fois la proposition 4.2.23 –, grâce à la proposition 4.1.27.  En appliquant le théorème de classification 4.2.3 aux polynômes considé- rés ci-dessus, on constate que, si deux tels polynômes sont équivalents, ils le sont via un automorphisme affine.

Proposition 4.2.25. Soient Q1 et Q2 deux polynômes de C[x, z] de la forme

Qi(x, z) = pi(z) + x deg(pXi)−2

j=0

zjqi,j(pi(z)) pour i = 1, 2.

Alors, les polynômes PQ1,2 et PQ2,2 sont équivalents si et seulement si ils le sont via un automorphisme affine de C[x, y, z].

Preuve. Supposons que deux polynômes PQ1,2 et PQ2,2 définis comme ci-dessus soient équivalents. D’après le théorème 4.2.5, il existe alors des constantes a, α, ∈ C∗, β ∈ C et un polynôme B ∈ C[2] tels que

Q1(ax, αz + β + xB(x, Q2(x, z))) ≡ Q2(x, z) mod (x2).

Il vient ainsi que p1(αz + β) = p2(z), que deg(p1) = deg(p2) = d > 2 et que d−2 X j=0 zjq2,j(p2(z)) = B(0, p2(z)) · p′1(αz + β) + a d−2 X j=0 (αz + β)jq1,j(p1(αz + β)) = B(0, p2(z)) · (α−1p′2(z)) + a d−2 X j=0 (αz + β)jq 1,j(p2(z)).

Le lemme 1.3.18 permet alors de conclure que B(0, ·) = 0 et donc que Q1(ax, αz + β + xB(x, Q2(x, z))) ≡ Q1(ax, αz + β) mod (x2).

Finalement, on a montré que Q1(ax, αz + β) = Q2(x, z). Les polynômes

PQ1,2 et PQ2,2 sont donc équivalents via l’automorphisme de C

3 défini par

(x, y, z) 7→ (ax, a−2y, αz + β).