• Aucun résultat trouvé

En revanche, pour les lois de comportement non-linéaires, différentes bornes ont été proposées et améliorées à plusieurs reprises ([46], [39], [38]). Néanmoins, leur optimalité n’est pas démontrée de sorte qu’il est a priori possible de raffiner les estimations existantes. Dans ce chapitre, on se propose de décrire une nouvelle méthode pour calculer des bornes sur la conductivité effective de milieux hétérogènes isotropes dont la loi de com- portement est non-linéaire. On s’appuie pour cela sur la méthode, dite de translation [31], qui est en fait liée à la méthode d’énergie ou de "compacité par compensation" [34], [43] introduite par F. Murat et L. Tartar dans le cadre de l’homogénéisation stochastique.

Après avoir rappelé les résultats relatifs à l’homogénéisation stochastique en régime linéaire et l’établissement des bornes de Hashin-Shtrikman pour le problème de la conduc- tivité, on considère le cas des milieux hétérogènes caractérisés par une loi de comportement non-linéaire (en fonction puissance). On expose alors une méthode originale aboutissant à de nouvelles bornes sur la conductivité effective applicable à des milieux hétérogènes non-linéaires 2D isotropes. L’approche est basée sur la méthode de translation, dont on rappellera les principales caractéristiques. On couple ensuite la méthode de translation à l’idée d’immersion, consistant à dupliquer artificiellement l’espace dans lequel le pro- blème physique est posé. Nous montrerons que cette stratégie d’accroître artificiellement la dimension du problème, est susceptible de faire apparaître de nouvelles bornes, poten- tiellement meilleures que les estimations existantes.

Ce chapitre correspond au travail en cours [A3].

6.2

Homogénéisation stochastique en régime linéaire

Revenons sur le problème général de la conductivité linéaire : (

− div(Aε∇uε) = f dans Ω

uε = 0 sur ∂Ω

(6.2)

où Aεvérifie l’hypothèse de coercivité, c’est à dire qu’il existe deux réels α, β, 0 < α <

β, tels que :

(

(Aεγ, γ)≥ αkγk2

kAε(x)γk ≤ βkγk

(6.3)

On désigne par M(α, β, Ω) l’ensemble des matrices vérifiant l’hypothèse de coercivité. Le premier chapitre de la première partie traitait le cas d’un milieu composite périodique et linéaire. On cherche dans ce chapitre à aborder le problème de conductivité pour un milieu non-périodique.

Dans le cas général (pas nécessairement périodique), on sait qu’il est possible de trouver une sous-suite extraite telle que :

(

i) uε′−⇀ u0 faiblement dans H01(Ω)

ii) Aε′∇uε′−⇀ ξ0 faiblement dans (L2(Ω))N

(6.4)

Chapitre 6. Bornes sur la conductivité effective de milieux hétérogènes non-linéaires

− div ξ0 = f dans Ω.

La question que l’on se pose alors est de savoir si l’on peut trouver une relation générale entre u0 et ξ0, ainsi qu’une équation limite sur u0. Pour le cas périodique, on sait que c’est

en fait toute la suite uε qui converge vers la solution u0, unique solution du problème de

conductivité : (

− div(A0∇u0) = f dans Ω

u0 = 0 sur ∂Ω

(6.5)

où A0 est la matrice homogénéisée pour laquelle on dispose d’une méthode de construction

explicite (voir en particulier Eq. (1.16) au chapitre 1). La matrice A0 est donc dans ce cas

uniquement déterminée.

En revanche, dans le cas non-périodique, la situation est plus délicate. Les limites faibles u0 et ξ0 dépendent a priori de la sous-suite extraite considérée, et ne sont plus uni-

quement déterminées. Ainsi, le fait que la matrice de conductivité Aεsoit dans M(α, β, Ω)

implique toujours l’existence d’une matrice A0 telle que ξ0 = A0∇u0, mais A0 est dépen-

dante de l’extraction choisie (comme u0 et ξ0) et n’est pas uniquement déterminée.

Ceci amène alors à définir des notions de convergence particulières nécessaires pour l’étude du cas aléatoire. Le problème de relier ξ0 à u0 dans le cas général a largement été

étudié dès la fin des années 1960. Le premier travail sur le sujet est dû à S. Spagonolo [42], qui introduit la notion de G-convergence associée au problème elliptique de conductivité (6.2) dans le cas où la matrice de conductivité Aε est symétrique.

6.2.1

G-convergence

On dit qu’une suite de matrices Aε symétriques et appartenant à M(α, β, Ω) G-

converge vers une matrice symétrique A0 appartenant à M(α, β, Ω) si pour toute donnée

f appartenant à H−1(Ω), la solution u

ε du problème :

(

− div(Aε∇uε) = f dans Ω

uε= 0 sur ∂Ω

est telle que

uε−⇀ u0 faiblement dans H01(Ω)

où u0 est l’unique solution du problème

(

− div(A0∇u0) = f dans Ω

u0 = 0 sur ∂Ω

On a alors le résultat suivant, dit de compacité, associé à la G-convergence (voir [42]) : Theorem 6.2.1 Soit Aε une suite de matrices symétriques appartenant à M (α, β, Ω).

Alors il existe une sous-suite Aε′ et une matrice A0 appartenant à M (α, β, Ω) telles que

la sous-suite Aε′ G-converge vers A0.

La G-convergence a ensuite été étendue au cas des matrices appartenant à M(α, β, Ω) mais plus nécessairement symétriques. Cela a conduit à définir la notion de H-convergence développée par F.Murat et L.Tartar dans [34] et [35].

6.2. Homogénéisation stochastique en régime linéaire

6.2.2

H-convergence

On dit qu’une suite de matrice Aε appartenant à M(α, β, Ω) H-converge vers une

matrice A0 appartenant à M(α, β, Ω) si pour toute donnée f appartenant à H−1(Ω), la

solution uε du problème :

(

− div(Aε∇uε) = f dans Ω

uε = 0 sur ∂Ω

est telle que (

i) uε−⇀ u0 faiblement dans H01(Ω)

ii) Aε∇uε−⇀ ξ0 faiblement dans (L2(Ω))N

où u0 est l’unique solution du problème

(

− div(A0∇u0) = f dans Ω

u0 = 0 sur ∂Ω

Ainsi, la notion de H-convergence est plus générale car elle s’applique à des suites de matrices qui ne sont plus nécessairement symétriques. En outre, elle suppose non seule- ment la convergence faible de la solution uε mais aussi celle de la suite de vecteurs Aε∇uε.

Cette hypothèse supplémentaire par rapport à la G-convergence est en fait essentielle pour préserver le résultat de compacité.

La notion de H-convergence est ainsi caractérisée par le résultat de compacité suivant : Theorem 6.2.2 Soit Aε une suite de matrices appartenant à M (α, β, Ω). Alors il existe

une sous-suite Aε′ et une matrice A0 appartenant à M (α, β, Ω) telles que la sous-suite Aε

H-converge vers A0.

Ce résultat de compacité est à la base de l’élaboration de bornes optimales sur la conductivité effective de milieux hétérogènes isotropes linéaires.

6.2.3

Bornes optimales

Le théorème de compacité associé à la H-convergence affirme que toute suite de ma- trices Aε appartenant à M(α, β, Ω) admet une sous-suite qui H-converge vers une certaine

matrice A0 appartenant à M(α, β, Ω). Considérons alors le cas de la conductivité linéaire

isotrope :

(

− div(γε∇uε) = f dans Ω

uε = 0 sur ∂Ω

(6.6)

où α ≤ γε ≤ β, ce qui correspond à un cas particulier du problème de conductivité

général (6.2) avec une matrice de conductivité isotrope : Aε = γεI.

Dans ce cas particulier, la matrice Aε est symétrique, de sorte que A0 est aussi la

G-limite de Aε. A0 est par conséquent aussi symétrique et admet donc N valeurs propres

Chapitre 6. Bornes sur la conductivité effective de milieux hétérogènes non-linéaires

Dans une configuration périodique, la conductivité suit une loi de mélange périodique de période ε : γε= γ1χ1( x ε) + γ2χ2( x ε). Dans ce cas, on sait construire la matrice homogénéisée A0.

En revanche, dans le cas non-périodique, on ne sait pas définir explicitement A0, qui

n’est en général pas nécessairement isotrope même si la suite Aε l’est.

On cherche alors à caractériser A0 dans une configuration non-périodique. Considérons

un mélange stochastique isotrope de deux phases, pour lequel la matrice de conductivité Aε est de la forme γεI, avec :

γε(x) =

(

γ1 si x ∈ Ωε1

γ2 si x ∈ Ωε2

c’est à dire que :

γε(x) = γ1χΩε

1(x) + γ2χΩε2(x)

avec

Ωε1∪ Ωε2 = Ω et Ωε1∩ Ωε2 = où χΩε

i, définie pour i = 1, 2 sont les fonctions caractéristiques associées aux ensembles

Ωε

i. On suppose que la fraction volumique des deux phases constitutives est fixée :

kΩε 1k kΩk = θ, kΩε 1k kΩk = 1− θ, 0 < θ < 1.

Dans ce cas, on peut montrer (voir [28] pour la démonstration) que les valeurs propres de la matrice A0 vérifient les inégalités suivantes :

               γg ≤ λi ≤ γa, i = 1 . . . N, N X i=1 1 λi− γ1 ≤ 1 γg − γ1 + N − 1 γa− γ1 N X i=1 1 γ2− λi ≤ 1 γ2− γg + N − 1 γ2− γa (6.7)

où γa et γg correspondent aux moyennes arithmétiques et géométriques respective-

ment :     γa= θγ1+ (1− θ)γ2 γg =  θ γ1 +1− θ γ2 −1 (6.8)

Dans le cas N = 2 et isotrope, pour lequel, A0 = λI, on a λ− ≤ λ ≤ λ+ où λ±

correspondent au bornes de Hashin-Shtrikman [22], bien connues en physique :

λ = θγ1+ (1− θ)γ2+ γ2 (1− θ)γ1+ θγ2+ γ1 γ1, λ+ = θγ1+ (1− θ)γ2+ γ1 (1− θ)γ1+ θγ2+ γ2 γ2. (6.9)