Dès 1970, Stern et Howard introduisent la simulation numérique Poisson -
Schrö-dinger appliquée à l’étude de structures MOS [1,2]. Les bases de la simulation
auto-cohérente y sont posées, ainsi que diverses approximations analytiques, les moyens
informatiques, à l’époque limités, ne permettant que difficilement la résolution
nu-mérique “exacte”. Ces études restent cantonnées à la simulation de l’effet de champ
dans le substrat (diélectriqueSiO
2non simulé), et en condition d’inversion
électro-nique (cas nMOS).
Les effets quantiques dans une structure MOS induisent un décalage du
bary-centre de charges à l’interface du substrat, comme on peut le constater sur la Figure
2.1. La zone désertée entre l’interface et le pic de charge est appeléedarkspace. De
l’ordre du nanomètre, la modélisation de cet effet n’était pas de première
impor-tance dans les années 1970, les dispositifs les plus avancés présentant des épaisseurs
de SiO
2de grille de plusieurs dizaines de nanomètres.
La simulation Poisson-Schrödinger s’est rendue indispensable à la fin des années
1980, une fois l’épaisseur d’oxyde en-dessous des 10 nanomètres et le darkspace non
négligeable. Modélisant désormais les électrons et les trous [3], elle permet
théorique-ment de s’affranchir de l’approximation de la désertion totale
2grâce à la simulation
conjointe des porteurs majoritaires et minoritaires au sein d’une même structure [4].
Simuler toute la zone de désertion (pouvant s’étendre jusqu’à 1µmpour les dopages
les plus faibles) augmente néanmoins considérablement le temps de calcul par
rap-port à la simulation de la zone “quantique” proche de l’interface. Il faut attendre
la fin des années 1990 et les travaux de A. Spinelli et A. Pacelli pour voir des
si-mulations auto-cohérentes de la zone de désertion utilisant une méthode quantique
proche de l’interface et une approche classique pour le reste de la zone simulée [5,6].
Il est important ici d’insister sur le rôle d’accompagnement et de support à la
caractérisation électrique de la simulation Poisson-Schrödinger. Les années 1990 ont
ainsi vu la communauté scientifique se pencher plus particulièrement sur la
modélisation quantique du régime d’accumulation et de la transition accumulation
-désertion au voisinage de la tension de bandes plates V
FB[7, 8,9]. En régime
d’in-version et de forte accumulation, toute la charge est située sur les niveaux quantifiés
et donc décrite par un unique traitement quantique 2D. Au voisinage deV
FB, vu la
faible courbure de bandes, la prise en compte des charges 3D non-confinées est
né-cessaire, comme indiqué Figure2.3. Les effets quantiques seront tout d’abord pris en
compte grâce à un “découpage” 2D+3D [8,9], puis un traitement quantique unique
sera considéré comme pertinent pour décrire à la fois la transition 2D → 3D et le
2. En régime de désertion, la charge des dopants n’est plus compensée par les majoritaires dans une zone tdep s’étendant dans le substrat. Dans l’approximation de la désertion totale,tdep a un profil abrupt et la charge associée est simplement donnée parQdep=−eNatdepavec Na la concentration volumique de dopants.continuum (ou plutôt quasi-continuum) de charges pour des énergies supérieures à
la profondeur du puits [6,10]. Dans ce dernier cas, une boîte quantique de 20-30nm
est jugée suffisante pour rendre compte d’un niveau de charge 3D avec une approche
2D.
Niveaux quantifiés, gaz 2D
Continuum, gaz 3D
E
VFigure 2.3 – Représentation schématique de la répartition des charges en régime
de faible accumulation nMOS, au voisinage de la tension de bandes plates V
FB.
La modélisation de la pénétration des fonctions d’onde dans le(s) diélectrique(s)
de grille va également s’avérer de première importance dès le début des années 2000.
Bien que ponctuellement considérée dans certains travaux publiés antérieurement,
l’influence de la prise en compte de ce phénomène est jugée importante dès lors que
l’épaisseur du diélectrique de grille devient inférieure à 2nm : en effet, la part
évanes-cente des fonctions d’onde induit une probabilité de présence non-nulle de charges
dans l’oxyde interfacial
3. De l’ordre de quelques angströms, cette pénétration n’est
plus négligeable et la résolution auto-cohérente doit inclure le ou les diélectriques de
grille dans la structure simulée [11,12,13]. La Figure2.4illustre ce phénomène.
La simulation Poisson-Schrödinger, comparée à une caractéristiqueC(V
g)
expé-rimentale, permet également l’extraction de la tension de bandes platesV
FB. Cette
extraction, et donc sa modélisation, est importante pour toute étude relative au
travail de sortie du métal de grille ou à la quantité de charges fixes indésirables
présentes dans l’empilement. L’intérêt d’une définition précise de V
FBs’est accru
avec l’introduction de matériaux high-κ, susceptibles de présenter des charges fixes
en volume ou de créer un dipôle à l’interface high-κ - oxyde interfacial [14].
En 1999, Pacelli et al. [6] soulignent l’importance des effets quantiques en
condi-tion de bandes plates, c’est-à-dire sans confinement. Dans une approche classique,
la charge des porteurs majoritaires est compensée par la charge des dopants en tout
point du substrat etV(z) = cte = 0 eV. Dans une approche quantique, l’annulation
des fonctions d’onde des porteurs majoritaires au voisinage de l’interface y induit
2. Etat de l’art
-2 -1 0 1 2 3 4 5 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 0 1 2 3 4 E n e r g i e p o t e n t i e l l e [ e V ] Position z [nm] high-SiO 2 Avec pénétration Sans pénétration F o n c t i o n s d ' o n d e [ u . a . ]Figure2.4 – Fonctions d’onde du premier niveau quantifié des électrons L obtenues
au cours de simulations incluant ou non les diélectriques de grille dans les structures
simulées.
un déficit de charge : une légère courbure de bandes est alors présente à V
g=V
FBpour garantir la neutralité électrique Q(V
FB) = 0. Pacelli et al. insistent alors sur
l’importance de ce déficit, d’autant plus important que le dopage est élevé, pour la
simulation de grilles Polysilicium fortement dopées. Malgré l’introduction de grilles
métalliques, les valeurs de dopage utilisées aujourd’hui pour le substrat Silicium et la
précision d’extraction deV
FBrequise imposent la prise en compte de ce phénomène.
Il est également intéressant de relever que l’ensemble des travaux sur le
confine-ment présent dans la littérature (pour étude de l’empileconfine-ment de grille) approxime
les bandes de conduction et de valence du Silicium comme paraboliques. Néanmoins,
des simulations avancées ont montré que cette approximation n’est valable que dans
une gamme d’une centaine de meV [15]. En régimes d’accumulation ou d’inversion,
les porteurs confinés dans un gaz 2D atteignent des énergies supérieures et cette
description peut être remise au cause. Une description des bandes de conduction et
de valence dans une large gamme énergetique est également nécessaire pour l’étude
du transport dans le Silicium contraint [16], pour des gaz 2D comme 3D.
Parmi les différentes approches permettant le calcul de structure de bande
(mé-thode des liaisons fortes, pseudo-potentiel, ab initio...), la mé(mé-thode k · p est une
résolution de l’équation de Schrödinger s’apparentant à un développement limité
de la structure de bandes autour du centre de la zone de Brillouin. On distingue
ainsi des simulations k · p prenant en compte plus ou moins de bandes, pour une
description plus ou moins complète des bandes de conduction ou de valence. Les
bases de cette théorie ont été posées dès les années 50 par Luttinger [17, 18] puis
affinées par Kane [19].
Dans le cadre de l’étude du confinement dans le Silicium, Van Der Steen et al. ont
23
validé l’approche parabolique pour la bande de conduction [20]. Le cas de la bande
de valence est plus litigieux : l’approximation parabolique est remise en question
dans les années 90 [21] en comparant sa structure de bandes avec celle obtenue
dans l’approche k ·p 6 × 6, puis dans le cadre de l’étude de la mobilité des trous
dans le Silicium contraint présentant différentes orientations [22]. A noter qu’une
description avancée de la bande de valence du Silicium non-contraint n’a jamais été
considérée dans un simulateur Poisson-Schrödinger pour l’étude du confinement et
l’extraction de paramètres à partir de relations expérimentales C(V
g).
Dans le document
Etude de la conduction électrique dans les diélectriques à forte permittivité utilisés en microélectronique
(Page 34-37)