• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 5  DISCUSSION GÉNÉRALE 131 

5.1  Histoire thermomécanique du matériau soudé 131 

L’intérêt du développement d’un modèle numérique pour simuler un procédé de soudage ou de mise en forme est de pouvoir déterminer quantitativement, par un calcul, l’impact des paramètres de soudage sur l’histoire thermomécanique du matériau. Cette approche peut s’avérer particulièrement utile lorsqu’elle permet d’obtenir des résultats qui sont difficiles, voire impossibles à obtenir par l’expérience. Dans le cas des procédés de soudage, les cycles de température peuvent être mesurés, mais il est difficile, dans le cas de tôles minces, d’évaluer précisément les gradients de température dans l’épaisseur. En mise en forme, la déformation plastique généralisée constitue un résultat indispensable pour interpréter certaines transformations microstructurales, mais la mesure de ces grandes déformations ne peut être faite directement. Ainsi, l’étude du soudage par frottement-malaxage, un procédé de soudage au cours duquel une déformation plastique importante se produit, nécessite l’utilisation de la modélisation numérique. Les phénomènes physiques qui se produisent lors du FSW peuvent être divisés en trois catégories : mécaniques, thermiques et métallurgiques.

5.1.1 Phénomènes mécaniques

Les deux phénomènes mécaniques en jeu sont le frottement à l’interface entre l’outil et les pièces soudées et la déformation plastique du matériau. D’abord, le contact de l’outil en rotation avec le matériau génère du frottement. Le frottement est caractérisé par une contrainte de cisaillement à l’interface, dont l’ampleur dépend du coefficient de frottement α. Ce cisaillement a deux effets : il induit un phénomène mécanique, la déformation plastique du matériau qui est entraîné par l’outil, et, si le contact est glissant, un phénomène thermique, la création de chaleur par le frottement. La déformation plastique est importante dans la région située sous l’outil. Elle est due à l’entraînement du matériau dans un mouvement de rotation sous l’effet du frottement à l’interface. L’ampleur de la déformation plastique dépend de la condition de contact à l’interface entre l’outil et le matériau. Plus le frottement est fort, plus la déformation plastique est grande et profonde. Par exemple, un contact collant produit une déformation plastique d’environ 20 par tour de l’outil, alors qu’un contact avec glissement où α = 0.7 produit une déformation plastique dix fois plus petite. La déformation plastique engendre elle aussi un phénomène thermique en dissipant de la chaleur. La quantité de chaleur créée par la déformation plastique dépend de la température du matériau : plus la température est élevée, moins la contrainte d’écoulement du matériau est importante. La puissance de déformation plastique diminue donc au fur et à mesure que le matériau s’échauffe.

5.1.2 Phénomènes thermiques

Deux phénomènes thermiques se produisent lors du FSW: la création et la conduction de la chaleur. Il y a d’abord une source de chaleur surfacique due au frottement à l’interface et une source volumique due à la déformation plastique du matériau. La répartition de la création de la chaleur entre ces deux sources dépend de la condition de contact entre l’outil et le matériau. En effet, pour un contact presque collant, la chaleur est principalement générée par la déformation plastique du matériau. Au contraire, pour un contact glissant, une plus forte proportion de chaleur est créée par le frottement.

La chaleur créée est évacuée du joint principalement par conduction. La conduction de la chaleur dépend de deux variables. Premièrement, elle dépend de la conductivité thermique du matériau soudé. L’aluminium est caractérisé par une grande conductivité thermique, ce qui contribue à évacuer rapidement la chaleur créée. En second lieu, la chaleur est évacuée dans les objets en contact avec les pièces soudées. L’ampleur du transfert thermique dépend de la résistance des interfaces aux transferts thermiques, c’est-à-dire du coefficient de transfert de chaleur h, et de la différence de température entre les deux corps en contact (équation 1.19). Le FSW est réalisé en déposant les pièces soudées sur une surface rigide, généralement en acier. Ce support inférieur de grande taille est un puits thermique. La chaleur est aussi évacuée dans l’outil de soudage.

5.1.3 Phénomènes métallurgiques

La combinaison des phénomènes mécaniques et thermiques, qui sont interdépendants, mène à des phénomènes métallurgiques qui entraînent une modification de la microstructure du matériau et de ses propriétés. Le premier phénomène métallurgique est la modification de l’état de précipitation du matériau. Le second est la recristallisation du matériau.

L’alliage 7075 est caractérisé, à l’état T6, par la présence de petits précipités métastables qui durcissent le matériau. L’état de précipitation est modifié lors de l’élévation de température durant le soudage. Dans les zones atteignant les températures les plus élevées, les précipités subissent d’abord une remise en solution dans la matrice. Lors du refroidissement les précipités évoluent vers l’état d’équilibre, ce qui diminue la dureté finale du matériau en-dessous de celle du métal de base, mais les précipités reprennent plutôt une forme métastable, au cours d’un vieillissement naturel, produisant un durcissement qui s’accentue lentement avec le temps. Il est possible que le vieillissement naturel modifie le profil de dureté sur une période pouvant aller jusqu’à plusieurs mois. Dans les zones plus éloignées, où la température atteinte lors du soudage est moins élevée, les précipités ne sont pas dissous. Sous l’effet de la chaleur, ils ont plutôt tendance à grossir et à perdre leur cohérence avec la matrice. La dureté du matériau dans ces régions est donc plus faible que dans le métal de base. L’ensemble de ces phénomènes produit un profil de dureté en forme de « W ».

D’autre part, une recristallisation dynamique se produit sous l’effet combiné d’une température élevée et de la déformation plastique. La déformation plastique provoque une multiplication des dislocations dans le matériau. À température élevée, ces dislocations montrent une forte tendance à migrer pour former des sous-joints de grain, qui donnent ensuite naissance à de nouveaux grains plus petits et équiaxes. Lors du FSW, la déformation plastique est si importante que plusieurs recristallisations successives peuvent se produire (Mishra et Ma, 2005). La taille des grains diminue à chaque « cycle » de recristallisation. La taille finale des grains témoigne donc indirectement de la quantité de déformation plastique subie par le matériau.

5.2 Modélisation de l’histoire thermomécanique à l’aide d’un