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L’héritage maritime scandinave

I/ L’apport du vocabulaire scandinave : problématiques et tentatives d’identifications Au sein de l’espace russe, on constate qu’un certain nombre de vocables relatifs à l’univers de la navigation sont empruntés au scandinave. Cependant, bien souvent, le sens de ces étymons n’a pas forcément été établi. C’est ce que nous nous proposons de faire ici, afin de voir plus en détail à quels types de navires les auteurs russes se référaient quand ils employaient tel ou tel terme, mais aussi de saisir si ce transfert de vocabulaire s’est accompagné d’une variation de sens. Cette restitution de sens n’aura d’intérêt que si elle s’accompagne d’une tentative d’identification morphologique, car ces mots désignaient des objets clairement définis dans la culture scandinave. Toute la question est donc de savoir s’il y a une correspondance entre les noms de navires d’origine scandinave employés et les types qu’ils désignent. Partons d’abord du postulat selon lequel pour avoir une idée plus concrète des navires russes de cette époque, il est tout à fait raisonnable de faire appel aux descriptions fournies par les sources scandinaves et par l’archéologie. Cependant, assimiler totalement les navires vikings et russes reviendrait à nier toute possibilité d’évolution technique, surtout pour les navires des XIe-XIIe siècles, dont il serait hasardeux je pense, d’en faire des répliques exactes de navires vikings. Il ne faut donc pas écarter la possibilité d’évolutions techniques, d’influences extérieures et de traditions locales.

A/ Skyd’/skedija et chnieka : deux navires de guerres d’origine scandinave

Les skedij/ Скедиӣ

L’emploi de ce terme dans les sources russes est en ceci remarquable qu’il ne s’opère qu’une seule fois dans la Povest vremennykh let (PVL), à propos de l’expédition d’Igor contre Byzance. L’auteur de la chronique nous indique qu’au cours de l’année 941, le prince Igor, à

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la tête d’une flotte composée de dix mille vaisseaux (Скедий 10 тысящъ), s’avança contre Constantinople, mais qu’après avoir pillé et saccagé les régions alentour, les Russes furent défaits par la marine byzantine1. Or dans la PVL, les termes lodj’a (ладья) et korabl’ (корабль) représentent les termes usuels pour désigner les embarcations russes. Le vocable

korabl’ y est ainsi utilisé à dix-neuf reprises, tandis que lodj’a y est utilisée quarante-quatre

fois2, ce qui contraste très largement avec cette unique utilisation. D’autant que plus loin dans ce passage, ce terme est remplacé par lodj’a, puisque c’est sur des lod’i que le prince Igor parvint à s’enfuir après son échec devant Constantinople3

. Ce terme d’origine slave désigne des embarcations génériques qui naviguent sur les fleuves et lacs de la Rus’ septentrionale, mais qui franchissent aussi la Baltique, et qui peuvent parfois s’opposer à des navires plus importants. Il en existe plusieurs types selon les particularités de leur construction, leur destination, leur gréement, le nombre de rames. L’utilisation conjointe de ces deux termes traduit donc une différence à la fois technologique mais aussi dans l’usage qui est fait de ce navire : ces skedij sont des navires de guerre d’origine étrangère, tandis que la lodj’a est un navire de transport local permettant le rapatriement du prince Igor et de ses troupes après leur défaite.

Concernant les origines de ce terme qui a été conservé dans les dictionnaires modernes sous les formes cкыдь/cкедия (skyd’/skedija), bien qu’il s’agisse là d’archaïsmes, puisque ces vocables ne sont plus en usage de nos jours, certains historiens voudraient y voir un emprunt au terme grec σκεδία qui signifie radeau, car la forme génitif pluriel cкедий devrait se décliner au nominatif singulier sous la forme cкедия4. Pour ma part, je me rallie à l’avis de Piotr E. Sorokin qui penche pour une origine scandinave5. En effet, il semblerait que ce terme ne se retrouve qu’en grec moderne et qu’un examen des textes à notre disposition ne démontre aucunement son existence à l’époque byzantine. Pour en juger, référons-nous directement aux sources. À partir de l’année 852, le récit de la PVL est tributaire de la traduction russe du

1

PVL, entrée 6449/941, dans Повесть временных лет, Д. С. Лихачева (éd.), Москва-Ленинград, 1950 ; A. Кошелев, Лаврентьевская летопись, ПСРЛ, Москва : Языки русской культуры, 2001

2 E. Santos Marinas, op. cit., 2008, p. 485-503.

3 PVL, op. cit, entrée 6449/941 : « ils embarquèrent de nuit sur des bateaux et s’enfuirent », le terme russe utilisé pour désigner ces embarcations est ici le terme lodie.

4

On peut trouver la référence au mot dans le dictionnaire d’E. Talbot, Dictionnaire français-grec

suivi d'un vocabulaire des noms propres, 13ème éd., Paris : Delalain, 1894, p. 415 ; E. Santos Marinas, op. cit.,

2008, p. 485-503. 5

П. Е. Сорокин, Водные пути и судостроение на Северо-Западе Руси в средневековье, С.-Петербург, 1997 ; E. Santos Marinas, op. cit., 2008, p. 491-492.

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Continuateur de Georges le Moine (Hamartôlos) qui date de la moitié du XIe siècle6. Pour cette raison il est possible de comparer le lexique de ces deux œuvres, mais aussi de recourir à la version originale en grec de l’œuvre de Syméon le Logothète, le Continuateur de

Hamartôlos. Dans la version grecque, on remarque que c’est le terme ploîon/πλοἱoν qui est

utilisé pour désigner les navires composant la flotte du prince Igor7, tandis que les navires byzantins en présence sont des drômones/δρόμωνες et des trières/τρίήρεις. Le terme ploîon désigne dans l’historiographie byzantine une embarcation de manière générale, mais sans précision quant à son utilisation8. Or, ce vocable est ici traduit successivement par skedij puis par lod’i, ce dernier étant d’ailleurs plus proche de la signification de ce terme. De ce fait, si la forme génitif pluriel cкедий/skedij employée par l’auteur avait été une translitération slavonne du terme grec σκεδία/skedia on aurait pu imaginer une transmission de ce terme du Logothète vers la version russe du Continuateur de Georges le Moine. Cependant, ce terme n’apparaît pas chez le Logothète, ni dans aucun autre passage de l’historiographie byzantine concernant les Russes. Il ne semble donc pas forcément recevable que ce terme soit le produit de la translitération du vocable skedia/σκεδία passé dans le langage courant vieux russe comme le pense Enrique Santos Marinas9.

En réalité, la PVL ne reprend pas non plus littéralement le texte de la version russe du Continuateur de Georges le Moine. Elle mentionne ainsi qu’« Igor a marché contre les Grecs. Les Bulgares ont envoyé des nouvelles à l’Empereur lui disant que les Rus’ marchaient contre Constantinople avec dix mille skedij. Ils arrivèrent en naviguant sur la mer et ravagèrent la région de Bithynie »10. De son côté, la version slave du Continuateur de Hamartôlos raconte qu’« Ils sont descendus, les Rus’ vers Constantinople avec dix mille barques, qu’on appelle aussi skedij, qui sont d’origine varègue »11. L’origine scandinave de ces embarcations est ainsi attestée par le traducteur slave du Continuateur de Georges le Moine. Dès lors, l’emploi du terme et son sens semblent admis au sein de la PVL au point que le chroniqueur ne daigne pas reprendre l’explication de ce terme. Sa présence s’expliquerait donc par le fait que le traducteur du Continuateur de Georges le Moine a vraisemblablement utilisé un terme

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Книги временныя и образныя Георгія Мниха, Хроника Георгія Амартола въ древнемъ славянорусскомъ

переводѣ, текстъ изслѣдованіе и словарь, B. M. Истрин (éd.), Томъ 2, Петроградъ : Россіская Академія

Наукъ, 1920, p. 306.

7 Μετά πλοίων χιλιάδων δέκα, Symeonis Magistri et Logothetae Chronicon, Recensuit Stephanus Wahlgren, CFHB, 44/1, W. de Gruyter (éd.), Berlin, 2006, p. 334-335.

8

H. Ahrweiler, Byzance et la Mer, La Marine de Guerre, La politique et les institutions maritimes de Byzance

aux VIIe-XVe siècles, Paris : Presses Universitaires de France, 1966, p. 408-416. 9 E. Santos Marinas, op. cit., 2008, p. 485-503.

10

PVL, op. cit., entrée 6449/941.

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contemporain de la présence viking qui serait alors passé dans le langage vieux slavon, puis dans le vieux russe. Car avant d’être traduite en vieux russe, une grande partie de l’historiographie byzantine fut d’abord adaptée en slavon liturgique, que ce soit pour les périodes les plus anciennes sous l’impulsion de Cyrille et Méthode en Moravie, ou en Bulgarie pour le Xe siècle notamment. Toute la question est donc de savoir si ce terme pouvait déjà figurer dans une éventuelle traduction effectuée en Bulgarie, pour ensuite être transmis en vieux russe. Hélas la plus ancienne copie dont nous disposons date du dernier quart du XIVesiècle et ne peut nous renseigner sur la question. Il semble cependant plus aisé d’imaginer que ce terme fut introduit à l’initiative des copistes russes, conscients de sa signification et de la tournure résolument scandinave de cette expédition plutôt que par un moine bulgare, bien que ceux-ci fussent vraisemblablement au courant de l’origine ethnique de ces Rus’. Par ailleurs il semblerait que ce terme, à l’image comme nous allons le voir de ce qui se fait en Occident, serve davantage à désigner un navire de guerre lié au pouvoir plutôt qu’une morphologie particulière.

Origines du terme et signification

Ce terme dériverait donc du vocable scandinave skeið (f. pl. skeiðr ou skeiðar), qui dans le monde scandinave représente un long navire de guerre utilisé tout au long des Xe-XIe siècles. Son utilisation n’a donc rien de surprenant pour des hommes installés sur le sol russe depuis seulement quelques générations. Il s’agit du terme le plus fréquemment employé par le corpus scaldique pour désigner des bateaux qui pour l’essentiel sont des navires de guerre : sur quarante-neuf utilisations au sein des stances, il n’y a que deux exemples de skeið utilisées à des fins non guerrières12. Il est en revanche beaucoup moins clair d’identifier le type morphologique de navire auquel renvoie ce terme. D’un point de vue étymologique, Peter Foote et David M. Wilson notent que le terme skeið signifie à la fois « celui qui coupe à travers les eaux » et peut renvoyer à « une pièce de bois longue et en forme de sabre »13. Les différentes occurrences du mot dans les stances scaldiques nous donnent toutefois une idée de

12

J. Jesch, Ships and Men in the late Viking Age : the Vocabulary of Runic Inscriptions and Skaldic Verse, Woodbridge, Suffolk : Boydell and Brewer, 2001, p. 123-126. Pour les références des stances, voir l’Annexe I intitulée « Typologie des navires scandinaves ».

13

P. Foote, D. M., Wilson, The Viking Achievment, Great Civilization Series, London : Sigwick and Jackson, 1974, p. 236-237.

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l’aspect général de ce type de navire. Ils sont décrits comme langar (longs)14

, súðlungar (avec de longues virures)15, et mævar (élancés)16. En tant que navires de guerre, ils sont

(há)brynjaðar (armés), protégés au niveau des sorties de rames et peuvent être lourdement hlaðnar (chargés), avec notamment des hommes armés17.

Le terme skeið n’est repris que deux, voire trois fois dans le corpus runique. L’inscription la plus intéressante est sans doute celle que l’on trouve dans le corpus

Södermanlands runinskrifter sous l’indexation Sö 17118. Il s’agit d’une inscription

commémorative à propos d’un skeiðar vísi, le capitaine d’une skeið, qui suggère une bataille navale au cours de laquelle il serait tombé à Hólmgarðr, c’est-à-dire à Novgorod. Elle a été découverte près de Rönö en Suède. La gravure se trouve sur la partie ouest d’un grand bloc de pierre grise, sur la montagne qui se trouve au sud-est d’Esta, et sur la partie nord-est de la grande route à l’extrémité du lac asséché de cette même Esta. Cette pierre se trouve à l’extrémité ouest de plusieurs pierres au pied de la montagne et se trouve à 120 pas à l’est de la partie nord de la montagne. Le côté gravure mesure 2,10 m de haut mais la partie gravée ne va pas jusqu’en bas. La gravure fait 1,60 m de haut et 1,03 m de large. La partie tracée dans la roche qui opère une boucle fait 8 cm de largeur. La gravure est profonde mais très abîmée par l’usure dans ses parties inférieures. Cette inscription aurait été réalisée au cours de la période comprise entre 950 et 1050, une datation plus précise demeurant hélas impossible. L’inscription est la suivante : « Ingefast a fait graver la pierre en l’honneur de Sigvid, son père. Il est tombé à Hólmgarðr en tant que capitaine de navire avec son équipage »19.

14 Tindr Hákdr 4 = Tindr Hallkelsson, Hákonardrápa, fragment 4. Lorsque nous ferons référence à des stances scaldiques nous utiliserons les mêmes principes que ceux mis en place par l’Université d’Aberdeen dans sa base de données Skaldic Poetry of the Scandinavian Middle Ages.

15 Þkolb Eirdr 1. 16

Þkolb Eirdr 4.

17 Bǫlv Hardr 2 ; Bǫlv Hardr 8 ; ÞjóðA Sex 22.

18Sveriges runinskrifter, Vitterhets historie och antikvitets akademien, Stockholm : Kungl, 1900 ; Södermanlands runinskrifter, E. Brate, E. Wessén (éds.), Stockholm, 1924-1936, p. 58, 97, 124, 126, 184.

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Pierre runique Sö 171

Cette inscription est en ceci intéressante que l’utilisation du terme skeið dans le corpus runique est très rare, et reflète donc sûrement un choix délibéré de la part de son auteur. Néanmoins, il est difficile de croire que de tels navires de guerre puissent se rendre à Novgorod en empruntant les différents rapides que nous avons énumérés dans les chapitres précédents. De plus, pour ce qui est du contexte évoqué, nous ne pouvons savoir s’il s’agit d’un accident ou d’un conflit scandinavo-russe, voire juste russe. De fait, si l’on admet qu’il s’agissait d’un long navire de guerre, il est peu probable qu’il ait pu dépasser le golfe de Ladoga voire le lac Ladoga, seul un navire de plus petite taille pouvant descendre le Volkhov jusqu’à Novgorod.

Identification morphologique

L’archéologie nous fournit aussi des informations sur ce type de navire. À la lumière des recherches récentes, il est admis que l’épave de Skuldelev 2, d’une longueur de 30 m et de 3,8 m de large, correspond à ce type de navire, généralement compris dans la catégorie des embarcations de vingt-cinq à trente bancs de rames20. Il s’agit d’un navire de guerre long et

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étroit de 26 tonnes, avec un tirant d’eau d’un mètre, une voilure d’approximativement 112 m2. Construit en chêne à Dublin en 1042, il fut réparé dans la seconde moitié du XIe siècle en mer d’Irlande21

. Ce navire fut construit pour les eaux houleuses de la mer d’Irlande et fut capable de traverser la mer du Nord ce qui explique quelques particularités au niveau de la quille et de la flexibilité de la coque. Il présente un bon plan de dérive dû à la présence d’une quille profonde et d’un pincement du fond de la carène très accentué. Par ailleurs, le renforcement de la charpente interne contribue à en faire un navire solide22.

Schéma

Diffusion non autorisée

Coupe transversale de Skuldelev 2 au maître bau (source : Navis 1)

Cependant, établir une analogie entre nom de navire et épave n’est pas évident. Toute la question est de savoir s’il y a une correspondance entre les noms de navires d’origine scandinave employés en Russie et les types qu’ils désignent. Assimiler totalement les navires vikings et russes reviendrait à nier toute possibilité d’évolution technique. Ceci est particulièrement valable pour les navires des XIe-XIIe siècles dont il serait hasardeux de faire des répliques exactes des navires vikings. Il ne faut donc pas écarter la possibilité d’évolutions techniques, d’influences extérieures et de traditions locales. D’autant qu’aux vues de ses caractéristiques techniques, il semble peu évident que des navires aux dimensions comparables à Skuldelev 2 aient pu faire partie de l’expédition du prince Igor. L’analyse de la

ibsvrag fra « Peberrenden » i Roskilde Fjord, ud for Skuldelev, Vrag 2 : « Det store krigsskib », Copenhague,

NNU, rapport 32, 1999 ; N. Bonde, O. Crumlin-Pedersen, The Dating of Wreck 2, the Longship, from Skuldelev, Denmark, NewsWARP, n° 7, 1990, p. 3-6.

21 Ibid. 22

J. Bill, Ships and Seamanship, The Oxford Illustrated History of the Vikings, P. H. Sawyer (éd.), Oxford, 1997, p. 181-201 ; O. Crumlin-Pedersen, O. Olsen : The Skuldelev Ships I, Roskilde, 2002, p. 141-167.

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carène et du creux nous permet de voir que Skuldelev 2 se destinait à la haute mer23, et s’adapterait mal à la navigation fluviale en Russie une fois dépassé le réseau de rivières et de grands lacs des régions du Nord. Il est ainsi difficile d’imaginer un navire de ce type descendre le long du Dniepr et affronter les rapides décrits par Constantin VII dans le De

Administrando Imperio24, ce d’autant plus que les récents voyages d’essais ont eu tendance à

montrer qu’il était compliqué voir presque impossible pour ce type d’embarcations d’emprunter l’ensemble de la « Voie des Varègues aux Grecs »25

. Cette corrélation entre épaves et sources écrites n’a pour but que de visualiser dans son ensemble l’apparence de ce type d’embarcations. Il ne faut pas oublier de tenir compte des variations architecturales locales inhérentes au milieu dans lequel le navire est censé évoluer. Au regard des différentes épaves disponibles, il apparaît que les navires présentent un continuum, une même conception de la construction navale synthétisant proportions optimales et emploi réservé au navire. Le terme skyd’ servirait ainsi à désigner chez les Rus’ des navires de guerres de plus petite dimensions que leurs équivalents scandinaves qui ne pouvaient que difficilement dépasser la région de Ladoga.

La chnieka/chniaka

Dans la Rus’, le vocable snekkja (f., pl. snekkjur) s’est transmis sous la

forme шнека/šneka/chnieka qui peut aussi prendre localement la

forme шняка/šnjaka/chniaka26. La période chronologique pendant laquelle s’emploie ce terme s’étend du XIe siècle au XIXe siècle. Si la forme šneka/chnieka est employée au XXe siècle en littérature, d’après le Dictionnaire de la langue littéraire russe contemporaine de 1967, il s’agit en fait d’un emprunt au vieux russe, exactement comme en français où pour

23 Variation du creux : profondeur de la coque mesurée à partir de la quille jusqu’au dessus du maître-bau qui constitue la plus grande largeur d’un bateau.

24 I. Sorlin, Le témoignage de Constantin VII Porphyrogénète sur l'état ethnique et politique de la Russie au début du Xe siècle, Cahiers du monde russe et soviétique, vol. 6, n° 2, Paris, 1965, p. 147-188.

25 R. Edberg, Expedition Holmgård, Vikingabåten Aifurs färd från Sigtuna till Novgorod, Ett arkeologiskt äventyr, Sigtuna museers skiftserie, 5, Sigtuna, 1994 ; R. Edberg, From the Varangians to the Greek, The

Experimental Voyage with the « Aifur » in 1994-1996, Södertörns högskola, Research reports No. 1, 1999, p. 60-64 ; R. Edberg, The Daugava 2001 expedition, its background and purpose, A short Summary, article délivré lors du séminaire international Cross-Cultural Interaction of the Peoples in ethe Western Dvina-Daugava River

Basin : History and Prospects, Polotsk State University, Novopolotsk, Belarus, June 21, 2001 ; R. Edberg,

Dnjeprs försvunna forsar fängslar vikingaforskare, Populär Arkeologi, 4, 2004, p. 34-36 ; R. Edberg, River Lovat – a Varangian tour de force : two experimental voyages on a legendary route through Russia, The

International Journal of Nautical Archeology, 43.2, 2014, p. 449-451. 26

Les formes chnieka et chniaka correspondent à la transcription courante du russe vers le français, mais la translitération internationale remplace dorénavant le ch- par un š et le –ia par un –ja.

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des raisons littéraires et historiques nous avons fait ressurgir le terme esnèque, auquel un accent a parfois été ajouté pour moderniser l’orthographe, alors que ce dernier n’était plus employé depuis le XIIe siècle27.

La chnieka dans l’historiographie médiévale russe

La première mention de la chnieka dans l’historiographie russe remonte à la première moitié du XIIe siècle. Sous l’entrée 1142, la Chronique de Novgorod raconte que le Knyaz des

Svei, c'est-à-dire le roi des Suédois, accompagné d’un archevêque, dans soixante chnieka,

s’attaqua à des marchands russes qui revenaient de mer à bord de trois lod’i28

. Outre les interrogations qui demeurent sur les personnages et le contexte de cet événement, nous remarquerons seulement que pour le XIIe siècle29, les compilateurs de la chronique différencient explicitement les navires de type chnieka des autres navires (lodj’a et korabl’). Cela est confirmé sous l’année 1283 lorsque des Nemtsy30, à bord de chnieka, pénétrèrent le lac Ladoga par la Neva pour ensuite s’attaquer aux marchands d’Obonezh31. Dans ces deux cas, le vocable chnieka est utilisé pour désigner des navires venant de Scandinavie dans le but de piller les régions côtières.

Toujours dans la Chronique de Novgorod, sous l’année 1190, ce sont des hommes

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