• Aucun résultat trouvé

En Guyane

Dans le document en fr (Page 70-72)

3 Troisième partie : Discussion et perspectives

3.1 Les politiques de santé publique à destination des migrants au niveau international, en

3.1.4 En Guyane

En Guyane, malgré son importance numérique, la population immigrée fait l’objet de peu d’attention spécifique.

En matière de santé, les Agences Régionales de Santé (ARS) ont pour mission d’assurer le pilotage de la politique de santé publique en région. Pour l’ARS-Guyane, une des premières priorités régionales est de réduire les inégalités d’accès à la prévention et aux soins (projet régional stratégique de santé PSRS 2011-2015).

Une recherche des termes « migrants » et « immigrés » dans le PSRS et ses différentes déclinaisons - Schéma Régional de Prévention (SRP), Schéma Régional de l’Offre de Soins (SROS), Programme Régional d'Accès à la Prévention et aux soins (PRAPS) - ne retrouve ces termes que dans l’introduction (descriptif de la population). Les termes « populations vulnérables », « populations socialement ou géographiquement isolées », « publics précaires » ou « publics marginalisés » sont préférentiellement utilisés. Dans le PRAPS, la définition proposée des personnes cibles est la suivante : « les personnes sont notamment celles qui présentent le plus de difficultés d’accès aux droits, qui ont des difficultés de repérage dans le parcours de soins ainsi que des difficultés d’accès aux soins et qui sont isolées socialement ou géographiquement ». La prise en compte des spécificités linguistiques et culturelles des populations de la Guyane est une des mesures qui revient le plus souvent, notamment à travers le développement de la médiation culturelle dans les domaines de la santé mentale, de la santé maternelle et infantile, des soins palliatifs, ou encore de l’éducation thérapeutique (SROS).

Les plans VIH/SIDA (que ce soit localement le « Plan Stratégique VIH/SIDA Guyane (2011-2015) » ou à l’échelle nationale le «Plan national de lutte contre le VIH/SIDA et les IST (2010-2014) en direction des populations d’outre-mer ») font là encore exception puisque des actions spécifiques sont proposées à destination des migrants , que ce soit en matière de prévention, de dépistage ciblé, de recherche, ou de qualité de la prise en charge (interprétariat, médiation)… Toutefois, aucune définition ou précision sur les groupes de migrants spécifiquement ciblés ne sont précisées.

Sur le terrain, l’adaptation des pratiques au contexte multiculturel est le principal défi en Guyane. Depuis quelques années, un réseau d’acteurs se met progressivement en place. Se développent

69

également des actions de santé communautaire et de coopérations transfrontalières en matière de santé [144].

La question des médiateurs de santé est particulièrement intéressante, car si le besoin et leur intérêt sont bien reconnus par les acteurs, le métier de « médiateur de santé » n’est pas reconnu en tant que tel et il n’existe pas de filière professionnelle spécifique, ni en France, ni en Guyane11 et encore très peu de formations reconnues. Des exemples de professionnalisation existent au Brésil par exemple où le métier d’ « agent de santé communautaire » est reconnu par le Ministère de la santé, mais la Guyane (et la France) tardent à s’inspirer de tels modèles.

Il n’existe pas non plus de traducteurs attachés aux hôpitaux de Guyane : libres à eux de proposer ce service ou non, ce qui n’est pas le cas, ou de manière très superficielle.

Pour toutes les raisons citées ci-dessus, les politiques de santé en Guyane ne semblent pas à la hauteur des enjeux.

Le tableau suivant reprend les principales recommandations que nous pourrions émettre pour le terrain guyanais. Ce tableau reprend les idées précédemment exposées, et adaptées au contexte guyanais.

Tableau 4 : Recommandations d’actions pour la Guyane

Connaissances Améliorer les connaissances sur l’état de santé et les pathologies rencontrées chez les migrants et les différents groupes ethniques en Guyane. Analyse des bases de données (hospitalières, CGSS) et enquêtes existantes (Enquête Migrations, Familles et Vieillissement notamment) et conduite d’enquêtes ad-hoc en populations générale et au sein de groupes ciblés

Médiation culturelle et interprétariat

Développer l’offre de médiation culturelle et d’interprétariat au sein de toutes les structures sanitaires et médico-sociales

Formation Assurer une formation continue des professionnels de santé sur : les liens entre migrations, santé et soins ; les inégalités de santé et les déterminants de la santé ; les discriminations dans l’accès aux soins ; les principaux problèmes de santé rencontrés chez les migrants ;

Sensibiliser les professionnels de la santé aux aspects culturels de la prise

11

Compte rendu des ateliers « Médiateur : un métier incontournable pour la promotion de la santé en Guyane » Organisés par GPS et MDM (Nov 2010).

70

en charge de la santé des populations

Développer les compétences interculturelles et linguistiques des soignants Coopération

Internationale

Développer la coopération avec les pays frontaliers (Surinam, Brésil) ; S’inspirer des modèles d’organisation sanitaire qui ont montré leur efficacité dans ces pays frontaliers

Santé communautaire Développer la santé communautaire et l’empowerment des communautés ethniques ou des communautés de migrants

Cadre politique et juridique

Mettre en œuvre des politiques régionales qui favorisent l’égalité d’accès des migrants aux services de santé ; étendre la protection sociale à la santé et améliorer la sécurité sociale pour tous les migrants.

Hormis le dernier point qui reste largement dépendant des politiques locales et nationales, les autres points semblent réalisables par une mobilisation des acteurs de terrain et des chercheurs.

Enfin pour reprendre les éléments de la Figure 7, la réduction des inégalités sociales de santé doit dépasser le champ de la politique de santé. L’amélioration des conditions d’accès à un travail, à l’éducation, et à un logement sont des champs prioritaires en Guyane. Dans le cadre d’une analyse des tendances démographiques et migratoires dans les régions ultrapériphériques de l’Europe [145], Claude-Valentin Marie met l’accent sur le renforcement de l’emploi des jeunes. Dans le contexte guyanais de forte immigration, de forte natalité et de forte croissance démographique, l’ensemble des questions relatives l’éducation, à la scolarisation, à l’échec scolaire ou de l’insertion professionnelle des jeunes adultes, s’y trouvent posés avec une intensité plus vive encore que dans les autres DOM. Continuer de le méconnaitre en leur appliquant une gestion institutionnelle visant à l’homogénéité est facteur de nouvelles et profondes inégalités.

Dans le document en fr (Page 70-72)