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Cadre géologique et échantillonnage

III.2 Le granite de Soultz-sous-Forêts

Depuis sa mise en place pendant l’orogenèse hercynienne, le granite de Soultz-sous-Forêts a subit une histoire tectonique polyphasée (cf. § III.1) favorisant le développement d’un réseau de failles et de fractures propices aux circulations fluides. Cette situation a entraîné une altération plus ou moins importante de la roche, et a engendré des variations de faciès et de porosité localisées en grande partie autour des structures faillées ou fracturées.

III.2.1 Géologie structurale

Grâce aux cinq puits réalisés dans le socle granitique, de nombreuses informations concernant la fracturation ont pu être rassemblées.

Figure III.3 : Orientation des fractures dans les forages de Soultz-sous-Forêts d’après les analyses de carottes (pour EPS1) et les imageries de puits (pour les autres forages). Les distances indiquées représentent le début et la fin de chaque section analysée (en distance parcourue le long du puits). Diagrammes de densité de fracture

en projection de Schmidt, hémisphère inférieur : (1) 10%, (2) 30%, (3) 50%, (4) 70%, (5) 90 % (d’après Desayes et al. 2005).

D'une part, l'étude complète du carottage continu d’EPS1 a fourni des renseignements sur l'orientation, l'épaisseur et le remplissage de près de 3000 fractures (Genter et al. 1997). D’autre part, les méthodes d'imagerie de puits (Ultrasonic Borehole Imager notamment) ont permis de mettre en évidence un minimum de 7300 fractures (seules les structures ouvertes, bien orientées par rapport aux structures et non cimentées sont visibles), de mesurer leur orientation locale dans le puits, et d'estimer leur épaisseur (Genter et al. 1997 ; Desayes et al. 2005). L'ensemble constitue une base de données de plus de 10300 éléments renseignant sur la géologie structurale du granite de Soultz-sous-Forêts au voisinage des différents puits. Ces données sont synthétisées dans la figure III.3 par Desayes et al. (2005).

Dans le granite de Soultz-sous-Forêts, l'orientation des failles et fractures est globalement N-S, avec un fort pendage (70 à 80°) orienté vers l'Est ou vers l'Ouest. Cette géométrie est à mettre en relation avec le contexte extensif à l'origine de la formation du fossé rhénan.

A plus grande échelle, il existe également une série de structures héritées de l’orogenèse varisque d’orientation N 30-40° (Edel et al. 2007).

III.2.2 Les faciès observés

Selon les structures et les circulations hydrothermales qui l’ont affecté, le granite de Soultz-sous-Forêts présente des faciès d'altération variables. Ce paragraphe constitue une synthèse de la pétrographie et des différents faciès d’altération tels que les ont décrits Genter (1990), Jaquemont (2002) et Surma (2003).

III.2.2.a Le granite sain

Le granite de Soultz-sous-Forêts est un granite à texture porphyrique avec des cristaux d'orthose de plusieurs centimètres (1 à 7 cm avec une moyenne de 2 cm), automorphes, et contenant des inclusions d'autres minéraux comme la biotite, le quartz, mais aussi des zonations de plagioclases. La matrice est composée de grains de l'ordre du centimètre (fig. III.4a).

La description quantitative de ce faciès sain a été réalisée par Ledésert et al. (1996), par analyse d'images ; la nature et la proportion des différents minéraux en présence (dont l'orthose) sont données dans le tableau III.1 :

Minéraux primaires Proportions (% vol.)

Quartz 28,4

Plagioclase 39,9

Orthose 18,8

Biotite + chlorite 8,4

Hornblende 4,5

Tableau III.1 : Proportions volumiques relatives des minéraux du granite sain de Soultz-sous-Forêts (d'après Ledésert et al. 1996)

La proportion volumique de plagioclase observée est de 40 %. De par sa composition et ces proportions, ce minéral joue un rôle-clé dans les processus d'altération du granite de

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sous-Forêts (Genter 1990). Les résultats de modélisations numériques simulant l’altération du granite de Plombières en contexte hydrothermal (Fritz 1981) montrent également l’importance des plagioclases dans un tel processus, et souligne notamment la formation de minéraux secondaires comme l’illite ou la chlorite.

III.2.2.b Le granite hydrothermalisé

D'après Genter et Traineau (1992), ce phénomène d'altération hydrothermale est dû aux circulations fluides dans le réseau de fracture du granite. Il affecte la roche au voisinage de ce réseau, et trois sous-faciès ont pu être identifiés :

- altération hydrothermale à chlorite.

Ce faciès présente des feldspaths potassiques rouge brique, des biotites, du quartz, mais surtout des plagioclases verts (colorés par la chlorite). La texture reste porphyrique, et différentes veines cimentées avec du quartz, de la chlorite ou de la pyrite recoupent les orthoses (fig. III.4b).

- altération hydrothermale à illite.

Deux caractéristiques distinguent le faciès d'altération hydrothermale à illite. D'un côté, les orthoses peuvent être entourées d'auréoles de plagioclases plus ou moins altérés (structure « rapakivi »), de l'autre les plagioclases de la matrice sont dégradés en argile (principalement de l'illite), et prennent une couleur blanche à verdâtre. Par ailleurs, les biotites ont des teintes allant du gris au vert (fig. III.4c).

- altération hydrothermale à hématite.

Ce faciès se distingue par la couleur blanc-crème à violet des plagioclases (colorés par l'hématite), et une faible proportion de biotite. La texture est toujours porphyrique avec des phénocristaux d'orthose pouvant présenter des taches d'altération blanche (fig. III.4d).

Ces trois sous-faciès présentent de fines fractures et fissures d’épaisseur inférieure au millimètre, souvent cimentées, et visible dans les phénocristaux d'orthose, ainsi que dans la matrice en moindre proportion.

II.2.2.c Le granite hydrothermalisé cataclasé

Le faciès hydrothermalisé cataclasé se différencie du faciès hydrothermalisé par la présence en plus grand nombre de fractures millimétriques (Jacquemont 2002), visibles aussi bien dans les phénocristaux que dans la matrice. L'intensité de cette fracturation donne au granite une structure cataclasée. Deux sous-faciès ont été identifiés :

- un sous-faciès à hématite

La description pétrographique est identique au faciès hydrothermalisé à hématite. La densité de fracture y est plus importante, et le remplissage de ces dernières est composé principalement d'hématite (fig. III.4e).

Figure III.4 : Les différents faciès d’altération d’après les descriptions de Jacquemont (2002) et Surma (2003).

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- un sous-faciès silicifié

La structure est fortement affectée, et une réduction de la taille des grains implique la disparition de la texture porphyrique. La proportion de quartz est plus importante, ce dernier se trouvant surtout sous forme de remplissage de veines, incluant parfois de l'illite (fig. III.4f).

III.2.3 Les faciès replacés dans la zone de faille

En 2002, Jaquemont propose une répartition des faciès dans la zone de faille en fonction de l’intensité de l’altération et de la fracturation (fig. III.5). Cette répartition reste néanmoins une vision idéalisée. En effet, les différents éléments de la zone de faille peuvent voir leur volume varier fortement.

Figure III.5 : Répartition des faciès d’altération dans les zones de faille (d’après Jacquemont 2002).

Ce mode de répartition en fonction de la déformation et de l’altération est à rapprocher du modèle de Caine et al. (1996). Les faciès hydrothermaux cataclasés sont à mettre en relation avec la zone de gouge, et les faciès hydrothermaux non déformés avec la zone endommagée (fig. III.6), ce qui permet d’identifier, à partir des données de forage, une succession de zones de faille plus ou moins bien développées dans les différents puits (Surma 2003 ; Dezayes et al. 2005).

Figure III.6 : Mise en relation du modèle de Caine et al. (1996) et des faciès d’altération ; exemple de la zone comprise entre -2154 et -2166 m (d’après Surma 2003).