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A ce jour, les effets développementaux du récepteur 5-HT6 ont été principalement associés à son interaction avec Cdk5 ou la protéine Gs. Cependant, d’autres protéines dont l’implication dans le développement neural a déjà été mis en évidence, figurent dans l’interactome du récepteur 5-HT6. L’étude de l’interaction fonctionnelle avec ces autres partenaires constitue une approche qui promet de

60 mettre en lumière d’autres rôles du récepteur 5-HT6 dans le neurodéveloppement. Parmi ces partenaires, GPRIN1 (G Protein inducer of neurite outgrowth 1) apparait particulièrement prometteur. En effet, GPRIN1 a été mis en évidence dans une étude précédente de « GST pull-down » utilisant l’extrémité C-terminale du récepteur 5-HT6 comme appât. (Duhr et al. 2014).

Cette protéine de 827 acides aminés a initialement été découverte lors du crible d’une banque de cDNA, ayant pour but d’identifier de nouveaux partenaires des sous-unités Gα, en utilisant la protéine Gαz liée au GTPγS comme appât (L. T. Chen, Gilman, et Kozasa 1999; Iida et Kozasa 2004). La séquence protéique de GPRIN1 ne possède aucune homologie avec des domaines ou motifs connus, rendant l’étude de sa fonction difficile. Deux autres variants ont été identifiés, GPRIN2 et GPRIN3, dont les rôles ont été peu étudiés. Ces variants présentent 48% d’homologie de séquence au niveau de leur région C-terminale. GPRIN1 est l’isoforme la plus longue et la GPRIN2 la plus courte. Si peu d’études ont à ce jour été consacrées à GPRIN1, les résultats obtenus suggèrent un rôle majeur de cette protéine dans le développement neuronal.

Tout d’abord, GPRIN1 est retrouvée spécifiquement dans le système nerveux central au niveau de la membrane des axones et dendrites. Elle n’est pas détectée dans les cellules gliales. Plus spécifiquement, l’expression de GPRIN1 est dynamique et varie au cours du temps (Masuho et al. 2008) : elle apparaît à E9,5 dans le domaine ventral de la moelle épinière puis se répartit progressivement en dorsolatéral, et on la retrouve finalement de façon quasi ubiquitaire dans le manteau embryonnaire (figure 13).

Figure 13- Expression de GPRIN1 durant le développement.

Coupes transversales d’embryons de souris mettant en évidence l’expression des transcrits de la protéine GPRIN1 dans l’encéphale, par hybridation in situ à différents jours du développement embryonnaire. La représentation schématique figurant au-dessus des photos décrit les niveaux de coupe. L’expression de GPRIN1 est très forte durant le développement embryonnaire. On la trouve enrichie dans le télencéphale, le diencéphale et les bulbes olfactifs de façon similaire au profil d’expression du récepteur 5-HT6. Te = télencéphale ; Di = diencéphale ; Rh = rombencéphale ; DRG = Ganglion Rachidien Dorsal ; OB = bulbes oflactifs ; SCG = ganglion sympathique ; SpC = Moelle épinière ; les chiffres romains I à XI représentent les ganglions des nerfs crâniens correspondants. Echelle = 1mm. D’après Masuho et al, Dev Dyn 2008.

61 Durant l’embryogénèse, son expression augmente pour atteindre un pic à E16,5 et décroit après la naissance. A l’âge adulte, la localisation de GPRIN1 est restreinte à des zones bien précises incluant l’hippocampe, le striatum ventral et certaines régions corticales (Masuho et al. 2008). La dynamique de son expression est corrélée aux étapes de migration et de maturation neuronale. Des expériences d’immunohistochimie montrent un enrichissement dans le cône de croissance et dans les neurones en cours de différenciation (Iida et Kozasa 2004).

Des études fonctionnelles se sont focalisées sur le rôle de l’interaction de GPRIN1 avec les protéines Gαi. En effet, une interaction préférentielle avec les formes activées des sous unités α de la famille Gi dont Giα, Goα, Gzα a été mise en évidence. Si l’expression de GPRIN1 seule dans les cellules Neuro2A n’a pas de conséquence spécifique, sa co-expression avec une sous-unités Gαi/o activée (mutants constitutivement actif GαoQ205L) induit l’initiation de la pousse neuritique. En revanche, aucun effet morphologique de GPRIN1 n’a jusqu’à présent été observé en présence des sous-unités Gαs ou Gαq activées. La délétion du domaine d’interaction de GPRIN1 avec les protéines Gα (GPRIN1 Δ717–827) lui confère la capacité d’induire la pousse neuritique de façon constitutive même lorsque ce mutant est exprimé seul. Ces résidus semblent donc cruciaux pour l’activité de GPRIN1 dépendant des protéines G activées.

Par ailleurs, la localisation de GPRIN1 à la membrane ne semble pas requise puisque la mutation des domaines d’adressage à la membrane ne change ni son interaction avec les protéines Gα activées ni leur effet synergique sur la pousse neuritique. En revanche, différentes études indiquent un rôle important des petites GTPases Rac1 et Cdc42. Leur inhibition par l’expression d’un mutant un dominant négatif abolit les effets de la co-expression de GPRIN1 et de GαoQ205L sur la pousse neuritique (Nakata et Kozasa 2005).

Outre son interaction avec les protéines Gαi/o, d’autres partenaires de GPRIN1 ont été identifiés, incluant Cdk5, le récepteur Mu des opioïdes, le récepteur nicotinique α7 de l’acétylcholine, le facteur de transcription E2F4, le facteur de croissance NEll2 et la protéine Sprouty2 (Hwangpo et al. 2012; Contreras-Vallejos et al. 2014; Nordman et Kabbani 2012). Ces partenaires sont tous connus pour leur

62 rôle dans la différenciation neuronale et constituent autant d’arguments en faveur du rôle de GPRIN1 dans la régulation du développement neuronal.

Une interaction de GPRIN1 avec le récepteur Mu des opioïdes a été identifiée par une approche de spectrométrie de masse. Les domaines du récepteur impliqués dans l’interaction avec GPRIN1 ont ensuite été étudiés : En plus de son interaction avec la sous-unité Gαi, GPRIN1 peut interagir avec la 3ème

boucle intracellulaire et l’extrémité C-terminale du récepteur Mu (Ge et al. 2009). Les auteurs ont également démontré que GPRIN1 joue un rôle majeur dans l’ancrage du récepteur Mu au niveau des radeaux lipidiques et amplifie de ce fait l’activation de la voie Src par le récepteur. De plus, GPRIN1 augmente la pousse neuritique induite par la stimulation du récepteur Mu par l’étorpine, un effet nécessitant l’intégrité des radeaux lipidiques (Ge et al. 2009).

De la même façon, GPRIN1 a été identifiée dans l’interactome du récepteur nicotinique α7 de l’acétylcholine, un autre récepteur connu pour son implication dans le développement des synapses et la pousse neuritique (Nordman et al. 2014; Nordman et Kabbani 2012). Ainsi, dans les cultures de neurones de cortex et d’hippocampe, la régulation de la pousse neuritique par le récepteur nicotinique α7 de l’acétylcholine dépend en partie de la présence de GPRIN1 (Nordman et Kabbani 2012; Nordman et al. 2014).

Enfin, il est particulièrement intéressant de souligner que GPRIN1 est un partenaire et un substrat de Cdk5. En effet, GPRIN1 peut être phosphorylée par CDK5 sur deux sites : la sérine 369 et la sérine 691 (Contreras-Vallejos et al. 2014). Si le rôle de l’interaction et de la phosphorylation de GPRIN1 par Cdk5 n’a pas encore été élucidé, il constitue une piste prometteuse dans la compréhension de ses fonctions neurodéveloppementales.

La protéine GPRIN1 a donc un pattern d’expression spatio-temporel proche de celui du récepteur 5-HT6, interagit avec Cdk5, et est impliquée dans la pousse neuritique.

Dans ce contexte, l’interaction entre la protéine GPRIN1 est le récepteur 5-HT6 est particulièrement intéressante à étudier pour découvrir de nouvelles fonctions neurodéveloppementales du récepteur.

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Le récepteur 5HT

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: rôle dans la pathogénèse des maladies