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Chapter 4 - Interactive effect of soil macrofauna and prolonged drought on nematode

6.2. Perspectives

6.2.1. Vers une gestion forestière plus résiliente et protégeant la biodiversité

Indépendamment du contexte pédoclimatique, nos résultats montrent que les forêts plus diversifiées accueillent la même diversité spécifique et la même abondance de macrofaune du sol que les forêts monospécifiques, et qu’elles peuvent même favoriser la richesse, la diversité et l’équitabilité lorsque celles-ci sont mesurées à l’échelle des grands ordres de macrofaune (chapitre 1). Ces résultats confirment donc au moins partiellement l’importance de la diversité des arbres pour la diversité des communautés du sol, ce qui s’explique probablement par la mise à disposition simultanée d’une ressource en moyenne de meilleure qualité, ainsi que de microhabitats plus nombreux et diversifiés. Sur l’ensemble des parcelles

159 du projet FunDivEUROPE (dont font partie les 64 parcelles échantillonnées dans cette thèse), il avait déjà été démontré que la diversité des arbres (variant de 1 à 5 espèces) favorise la diversité des araignées, et de certains champignons ainsi que l’abondance des araignées et mammifères ongulés (Ampoorter et al. 2019). Cette thèse apporte donc davantage de support pour l’importance des mélanges d’arbres pour le maintien de la biodiversité forestière dans son ensemble.

En plus de favoriser la biodiversité, les peuplements mixtes sont également de plus en plus étudiés pour leur capacité à augmenter la résistance et résilience des écosystèmes forestiers à différentes perturbations. Conjointement à l’étude de la macrofaune, le projet SoilForEUROPE s’est intéressé à la diversité et aux fonctions microbiennes. En exposant les sols provenant des mêmes parcelles forestières à deux cycles de séchages / réhumectation en microcosme, Gillespie et al. (2020) ont montré que la résistance de la respiration microbienne était plus élevée dans les peuplements d’arbres mixtes. Par ailleurs, une récente méta-analyse a démontré l’effet positif de la diversité végétale sur la biomasse microbienne, dans des écosystèmes très variés (forêts naturelles, forêts plantées, prairies, cultures) (Chen et al.

2019). L’ensemble de ces résultats, obtenus sur une large diversité de sites, soutient l’intérêt des peuplements d’arbres mixtes pour le maintien de la diversité des organismes édaphiques et des processus écologiques auxquels ils participent, avec comme conséquence une plus grande résistance des forêts aux changements globaux (Scherer-Lorenzen et al. 2005).

6.2.1.2. La composition fonctionnelle

Les effets positifs globalement observés de la diversité spécifique des arbres sont toutefois à pondérer au regard de l’importance de la composition fonctionnelle des arbres (chapitre 1 et 2). En effet nos résultats montrent que les communautés de macrofaune sont plus largement influencées par la dominance des arbres à feuillage persistant, et les modifications de la qualité et de la quantité de litière qui en découlent. Ces résultats concordent avec les précédents travaux du projet FunDivEUROPE sur les vers de terre (De Wandeler et al. 2018) et plusieurs taxons dont les araignées (Ampoorter et al. 2019). De la même façon, les fonctions microbiennes ainsi que la diversité des guildes fongiques et des activités enzymatiques dans les sols des mêmes forêts ne semblent pas sensibles à la diversité des arbres, mais plutôt aux

160 traits des racines, notamment des racines absorptives et de leur degré de colonisation mycorhizienne (Gillespie et al. submitted; Prada-Salcedo et al. submitted). Ces résultats suggèrent qu’au-delà de favoriser le mélange d’espèce d’arbre par rapport aux forêts en monoculture, il est important de choisir les espèces constituant le mélange suivant les communautés ou fonction que l’on souhaite favoriser. A partir des 209 parcelles du projet FunDivEUROPE, Baeten et al. (2018) ont étudié l’effet de la diversité et de la composition des forêts sur la provision de 30 différentes fonctions et services écosystémiques (recyclage des nutriments, productivité primaire, régénération, résistance aux perturbations, provision d’habitats) et la multifonctionnalité des forêts. Cette étude montre que les peuplements les plus productifs (et donc intéressants pour la sylviculture) montrent également un haut de niveau de multifonctionnalité et qu’il est possible d’identifier des espèces d’arbre favorisant cette multifonctionnalité au sein de chaque type de forêts (hémi-boréale : Picea abies, hêtraie : Fraxinus excelsior, forêts décidues thermophiles : Quercus ilex et Q. cerris, forêts méditerranéennes : Pinus sylvestris) (Baeten et al. 2018). Ces résultats témoignent des progrès encourageants réalisés dans notre compréhension du rôle de la composition spécifique des forêts pour le maintien de leur fonctionnement à l’avenir.

6.2.1.3. Gestion de la structure du peuplement forestier

Cette thèse a étudié des forêts matures où l’activité humaine est basse comparée à d’autres systèmes dans lesquels la gestion humaine peut être plus présente, ceci dans le but de maintenir une production de produits sylvicoles maximale. Il existe quatre types principaux de pratiques de gestion des forêts en régénération naturelle : 1) l’entretien au stade jeune de la forêt par la réduction de la densité de tiges et la sélection des espèces, 2) l’élimination des arbres les moins beaux, et l’élagage du houppier des arbres maintenus dans les peuplements plus matures, ceci dans le but de limiter la compétition pour la lumière, 3) la récolte d’arbres, avec maintien des semenciers, créant des zones ouvertes de différentes dimensions plus ou moins homogènes à large échelle, et 4) la régénération naturelle et/ou la plantation de nouvelles pousses pour remplacer les zones ouvertes et potentiellement changer la composition spécifique. Ces différentes pratiques sont déterminantes pour les interactions entre individus et espèces d’arbres, et donc pour les mécanismes de coexistence qui sont à la base de la réalisation des processus écologiques (Cordonnier et al. 2018). L’entretien et la

161 régénération vont être primordiaux pour déterminer la composition du peuplement, pendant que l’élagage et la coupe vont fortement affecter la structure du couvert forestier qui est un des paramètres les plus importants pour la structure taxonomique et fonctionnelle des communautés de macrofaune (chapitre 1 et 2). L’ouverture de la canopée semble influencer positivement les organismes du sol et notamment les macro-prédateurs, probablement du fait de l’augmentation de la température au sol qui favorise l’activité de ses organismes (Mueller et al. 2016). A l’inverse, l’ouverture de la canopée induit de fort changements dans la composition et la couverture de la végétation sous arborée, pouvant limiter la diversité de la macrofaune sapro-géophage (Henneron et al. 2015; Mueller et al. 2016). L’effet de la structure de la canopée sur la macrofaune dépend du groupe considéré et suggère que l’élagage et l’exploitation des arbres doivent être précautionneusement planifiées pour ne pas drastiquement affecter certains groupes de la macrofaune du sol. Ce type de gestion et son effet sur le microclimat doivent être d’autant plus étudiés qu’il a été montré que l’influence de l’identité des arbres sur les conditions microclimatiques affecte fortement le processus de décomposition de la matière organique (Joly et al. 2017; Gottschall et al. 2019). L’ensemble des parcelles du projet FunDivEUROPE ont été récemment équipées de sondes microclimatiques qui permettront une meilleure description de ces mécanismes dans les projets à venir.