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Une gestion complexe et source de malentendus Des compétences spécifiques segmentées au sein de divers organismes

Dans le document Gestion du passif minier. Rapport scientifique (Page 110-113)

De manière générale la disponibilité du foncier (habitable et cultivable) est plus fortement

10. UNE REMEDIATION A QUOI, POUR QUOI ?

10.2. QUELS OUVRAGES POUR QUELLES FONCTIONS ?

10.2.4.2. Une gestion complexe et source de malentendus Des compétences spécifiques segmentées au sein de divers organismes

La problématique d’engravement fait intervenir aujourd’hui une multitude d'individus relevant de directions et services des collectivités gouvernementales et provinciales (divers secteurs sont concernés), de consortiums, de bureaux d’étude, etc. Ces acteurs, qu’ils soient de la DIMENC, de la DAVAR, ou encore du Fonds Nickel et de SOPRONER pour ne prendre que quelques exemples, participent plus ou moins régulièrement aux réunions se déroulant sur la commune (l’équipe du projet a entre autres participé à l’un des comités de pilotage « cours d'eau »18) . Ces réunions rassemblant parfois jusqu’à une vingtaine de personnes peuvent être longues et ne sont pas toujours conclues par des décisions, les négociations à 20 étant difficiles. De plus, chaque organisme a des compétences bien spécifiques se chevauchant parfois. Il est donc complexe pour les élus et les techniciens de la commune de savoir vers quel acteur se tourner pour résoudre les problématiques sur la rivière et d'articuler les différentes compétences de chacun. À cela s’ajoute la question de la responsabilité de gérer les impacts causés. L'année 1975 est une référence clef puisqu'elle démarque la responsabilité attribuée aux dommages causés à l'environnement. Avant cette date, il s'agissait plutôt de responsabilités partagées entre les opérateurs miniers et le gouvernement. Toute dégradation pouvant être rattachée aux années après 1975 suit le schéma de type « pollueur-payeur ». Or, du fait de l'ampleur des dégradations sur l'environnement et les rivières et du coût des réparations, il est fréquent de voir les différents acteurs en charge de la gestion de cette question discuter leur responsabilité.

Ambigüité des rapports à l’industrie minière

Le fait que les élus de la commune soient parfois salariés du principal exploitant accentue la complexité de gestion de la problématique d'engravement et d’hyper-sédimentation. Une partie de la population de Thio voit comme problématique les mandatures pendant lesquelles des élus sont à la fois élus et salariés du principal exploitant. Ce conflit d’intérêt potentiel ne

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L'adhésion à cette assurance permet de bénéficier d'un système d'indemnisations relatif aux « calamités agricoles » http://www.davar.gouv.nc/portal/page/portal/davar/secteur_rural/interventions/calamites_agricoles

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Mis en place par la Province Sud du fait des inondations de 2013 pour faire aboutir les travaux prévus par le Protocole d'accords de cette même année. Il réunit les services derrière le Gouvernement, la Province, la mairie, la SLN et le Collectif

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peut pas selon eux permettre à la mairie d’adopter des choix politiques suffisamment engagés dans les négociations avec la SLN. Bien que l’histoire de l’activité minière sur la commune n’implique pas qu’un seul exploitant, il s’avère que c’est aujourd’hui avec la SLN que se joue la majorité des négociations. Lors des COPIL et des COTECH comme lors des réunions rassemblant des représentants de la SLN et de la population ou du collectif, il est rare aujourd’hui que les élus prennent la parole. La situation évolue donc actuellement très lentement.

En outre, le rôle historique joué par la SLN dans la commune de Thio, intervenant comme instance publique par le passé, a des répercussions aujourd'hui dans la relation des habitants à l'exploitant. Il en résulte une ambiguïté dans les attentes de la population par rapport aux dédommagements et au rôle que l'entreprise peut effectivement remplir. L’ancien chef de centre de la SLN rencontré en 2016, a clairement expliqué d’une part sa volonté de sortir des négociations en « face à face » avec la population comme cela a pu être le cas historiquement ; et d’autre part, de conserver avant toute chose son rôle d’industriel : « c’est de s’assurer dans tout ça qu’aujourd’hui chacun assume ses responsabilités et reste dans son domaine de compétences ». Les habitants se questionnent sur le positionnement adopté par l'entreprise : les arguments avancés ne sont-ils pas un moyen de se désengager des actions à mener ? Ces doutes portent aussi sur les explications données concernant les inondations et le fait qu'elles aient toujours été présentes dans la commune.

Les points de vue divergents de la population et de l’industriel à propos des aménagements

Le nombre d’acteurs à participer aux décisions (autour de la table des négociations) ayant des points de vue différents sur ce qu’il serait bon de faire, rend difficile les prises de décision des élus. La divergence entre l’industriel et la population est notoire à propos des aménagements.

L’ancien chef de centre a mentionné que la multitude d’acteurs présents dans les négociations ne permettait pas une gestion efficace de la problématique d’engravement. Il souligne également l’importance qu’il y ait de « manière concertée, une vision globale de la rivière, du haut jusqu’en bas » et un schéma d’aménagements réfléchissant à ce qui doit être priorisé et protégé. Il est selon lui important de stabiliser certaines zones en amont qui alimentent en charge solide la rivière et dans certains contextes d’effectuer également des travaux sur le lit de la rivière comme ceux qui ont été faits sur la Nakalé et la Nebürü afin de sécuriser les habitations. L’idée d’un curage de l’embouchure n’était pas une solution viable selon lui, dans la mesure où il ne serait pas durable et impliquerait une enveloppe budgétaire importante pour le financer et le maintenir en l’état. A l’inverse, les habitants ont maintenu leurs attentes en matière de curage de l’embouchure de la Thio et d’autres embouchures (comme celle de la Kouaré par exemple). La notion de « bouchon » bloquant le bon écoulement est souvent reprise par la population.

Par ailleurs, les logiques suivies selon les acteurs ne sont pas les mêmes et ne sont pas fondées sur les mêmes registres. Les habitants ont reproché la logique économique suivie par les instances ayant réalisé les curages des rivières de Nebürü et de Nakalé en 2015. La mise en œuvre des travaux et les quantités de matériaux enlevés auraient été évaluées selon une enveloppe budgétaire disponible. Or pour eux, la manière dont les travaux ont été effectués n’est pas durable et ne permettra pas d'éviter de futures inondations. Même s'ils sont bien conscients de la quantité faramineuse de matériaux présents et du coût que leur retrait implique, ils mettent en avant l'importance d'assurer la sécurité de la population et de leurs habitations. La logique qu'ils suivent est donc éminemment sociale et entre en contradiction avec celle suivie lors des curages.

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Un manque d’écoute ressenti par les habitants

« Ça fait des années qu'on est là, mais on voit pas le travail fait. Il fallait un gros blocage, un gros cri de guerre pour que les autorités se disent « peut-être qu'il faut qu'on voit l'argent qu'on doit déverser pour les gens qui habitent au pied de la mine » »19.

Les habitants ont confié leur sentiment de délaissement vis-à-vis des instances responsables de la gestion de l'engravement. Ils ne se sentent pas entendus et ont souvent la sensation que les travaux et les aménagements réalisés sont avant tout mis en œuvre dans le but de conserver la « paix sociale ». En effet, beaucoup ont évoqué que la prise en compte des conséquences de l'engravement n'était effective que suite à une réaction virulente de leur part. Elle serait donc ponctuelle mais pas durable. Dans la commune plusieurs ouvrages ont été réalisés au cours des années 80. La plupart se trouvent près de l'estuaire et à proximité des décharges. Parmi ceux-ci on retrouve : les digues situées à l'embouchure de la Thio, les « épis » qui se trouvaient dans la rivière en face de la tribu de St Philippo 1, les « peignes » et les bassins de décantation situés au pied des décharges. Les travaux d'entretien des creeks et des rivières à cette période (curage) par l'entreprise Sodder ont également été cités par les habitants avec le regret qu'ils ne soient plus effectués. Les perceptions des aménagements effectués sont reprises dans la partie sur la typologie des aménagements (9.3).

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11. DEMARCHE GLOBALE D’ELABORATION D’UNE

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