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La gestion de la carrière par le Conseil Supérieur de la Magistrature 16

B- La mise en œuvre de l’indépendance de la justice administrative à Madagascar 13

2) La gestion de la carrière par le Conseil Supérieur de la Magistrature 16

de garantir une certaine indépendance des magistrats malgaches, des réformes sont à prévoir pour renforcer les acquis (b).

1° être national Malagasy ou avoir acquis depuis cinq ans au moins, à quelque titre que ce soit, la nationalité Malagasy ;

2° avoir 21 ans révolus ;

3° jouir de ses droits civils et politiques, être de bonne moralité ;

4° remplir les conditions d’aptitude physique exigées des candidats aux fonctions publiques ; 5° être en position régulière à l’égard des lois et règlements sur le service national ; (…) »

48 Cf. Loi n° 2004-021 du 19 août 2004 modifiant certaines dispositions de la loi n° 2001-025 du 9 avril 2003 relative au Tribunal Administratif et financier.

a) La Magistrature malgache, le Conseil Supérieur de la Magistrature et le système de carrière

À travers le monde, il existe principalement deux (2) systèmes pour organiser la magistrature. Le premier, comme celui qu’on retrouve au Canada, repose sur un système d’emploi. Cela signifie que le juge est recruté pour occuper un emploi précis. Dans le cadre de ce recrutement, le lieu d’affectation et les principales missions du juge sont connus d’avance.

Et tout au long de la période pendant laquelle il occupe son poste, c’est-à-dire entre sa nomination et son départ à la retraite, il est impossible de songer à un changement de situation comme une mutation ou une quelconque promotion.

À l’opposé du système d’emploi, nous retrouvons le système de carrière. Dans ce régime, la nomination du juge va lui permettre de faire une carrière sur une période plus ou moins longue, allant jusqu’à une quarantaine d’années. Au cours de sa carrière, contrairement au système d’emploi, le juge est sujet à des évolutions : il sera appelé plusieurs fois à changer de spécialité et de fonctions. Le système de carrière est ainsi étroitement lié à l’idée de notation et de promotion. C’est ce système qui est appliqué dans la Magistrature malgache.

Selon les dispositions de l’article 107 de la Constitution de la IVe République de Madagascar, le Conseil Supérieur de la Magistrature49 (CSM) est l’organe qui est chargé d’assister le Président de la République, garant de l’indépendance de la Justice. Dans cette optique, les rédacteurs de la Constitution ont chargé ledit Conseil de veiller à la sauvegarde de l’indépendance. En outre, il s’occupe de la gestion de carrière des magistrats ainsi que des sanctions dans le cadre des mesures disciplinaires.

Pour assurer l’indépendance des juges administratifs, notamment pour éviter toutes formes de discriminations et de pressions tout au long de leur carrière, les textes ont été organisés de façon à ce que leur avancement d’échelon se fasse automatiquement tous les

49 Cet organe est régi par la Loi organique n° 2007-039 du 14 janvier 2008 portant Loi organique relative au Conseil Supérieur de la Magistrature.

deux (2) ans50. Cet automatisme prévu par les textes offre une certaine garantie d’indépendance par rapport au pouvoir Exécutif. En effet, celui-ci, à travers le ministre de la Justice, ne dispose d’aucun pouvoir que de constater par voie d’arrêté l’avancement du magistrat51.

L’avancement de grade est plus complexe que l’avancement d’échelon et fait intervenir plusieurs acteurs dont le chef hiérarchique du magistrat concerné, le ministre de la Justice, le Conseil Supérieur de la Magistrature et le Président de la République, en sa qualité de Président du CSM. D’une part, comme le prévoit l’article 41 alinéas 6 et 7 de l’Ordonnance n ° 2005 -005 du 22 mars 2006 portant Loi organique relative au statut de la magistrature, les activités du juge administratif sont appréciées annuellement « pour les magistrats du siège d’un Tribunal Administratif (…), par le premier président de la Cour Suprême après avis du procureur général de ladite Cour, au vu des notes attribuées par le président du Conseil d’État (…) et de celles attribuées par le président du Tribunal Administratif (…) après avis du chef du parquet de cette juridiction ; pour les magistrats du parquet d’un Tribunal Administratif (…), par le procureur général de la Cour Suprême après avis du premier président de ladite Cour, au vu des notes attribuées par le commissaire général de la loi (…) et de celles attribuées par le chef du parquet du Tribunal Administratif (…) après avis du président de cette juridiction ». Ces notes et appréciations seront ensuite présentées au ministre de la Justice, par ordre de mérite, par les chefs de Cour52. Et à son tour, le ministre transmettra la proposition au secrétariat du Conseil Supérieur de la Magistrature pour l’établissement de la liste contenu dans le tableau d’avancement. Le tableau définitif contenant la liste des magistrats susceptibles d’être promus à un grade supérieur sera ensuite arrêté définitivement, par ordre de mérite, par le Président dudit Conseil qui n’est autre, rappelons-le, que le Président de la République.

L’avancement de grade se fait donc au mérite, et le Conseil Supérieur de la Magistrature joue un rôle majeur dans la décision d’accorder ou non une promotion de grade.

50 cf. article 39 alinéa 1er de l’Ordonnance n° 2005-005 du 22 mars 2006 portant Loi organique relative au statut de la magistrature : « Les magistrats bénéficient, dans le même grade, d’un avancement automatique d’échelon au bout de deux ans d’ancienneté dans l’échelon immédiatement supérieur ».

51 cf. article 39 alinéa 2 de l’Ordonnance n° 2005-005 du 22 mars 2006 précité : « Les avancements d’échelon des magistrats (…) sont constatés par arrêté du Ministre de la Justice ».

52 cf. article 44 de l’Ordonnance n° 2005-005 du 22 mars 2006.

Bien que celui-ci soit indépendant, il n’est pas exagéré d’affirmer que le Conseil dispose d’une large marge de manœuvre et un certain pouvoir discrétionnaire dans ce domaine. Or, compte tenu du fait que, d’une part, c’est le Président de la République, en tant que Président dudit Conseil, qui arrête le tableau d’avancement et, d’autre part, en l’absence de dispositions légales qui prévoient qu’il est lié par la proposition de liste émise par les chefs de Cour, le pouvoir Exécutif dispose toujours d’une mainmise sur la carrière et l’indépendance des magistrats.

b) La réforme nécessaire de la promotion de grade : le système de concours Le pouvoir que dispose l’Exécutif, à travers le Président de la République, sur la carrière des magistrats administratifs est considérable. De par sa simple volonté, celui-ci peut refuser l’inscription d’un juge administratif dans la liste du tableau d’avancement. C’est pourquoi il est temps de mettre en place un système plus objectif pour assurer pleinement l’indépendance des magistrats dans leur carrière ainsi qu’une réelle réforme dans le domaine de la gouvernance du personnel judiciaire.

La promotion de grade par voie de concours, organisée sans l’intervention du Ministère de la Justice, à quel que stade que ce soit, serait l’idéal pour assurer l’objectivité et écarter toute idée de favoritisme ou de représailles. Il serait louable, par exemple, qu’un organe indépendant tel que le Conseil Supérieur de la Magistrature prenne en main l’agencement des épreuves prévues à cet effet. Les avantages de cette procédure sont nombreux. Il y a lieu, par exemple, de souligner le fait qu’il permet d’assurer la compétence et le savoir-faire des magistrats aspirant à un grade plus élevé. Le système, outre qu’il écarte toute possibilité d’intervention du pouvoir Exécutif et du pouvoir Législatif, rehaussera considérablement la qualité de la justice en général.

II- Les menaces réelles à l’indépendance du juge administratif : une