du champ atomique
Onze ans apr`es leur obtention en laboratoire, les condensats de Bose-Einstein gazeux
sont devenus un “outil” pr´ecieux pour de nombreuses exp´eriences b´en´eficiant d’une source
d’atomes ultrafroids et denses. L’utilisation des condensats en m´etrologie, en physique non
lin´eaire, ou encore pour r´ealiser des mod`eles de la mati`ere condens´ee est `a pr´esent l’objet
d’un travail de recherche tr`es actif.
Ce qui m’int´eresse particuli`erement est d’utiliser des condensats de Bose-Einstein pour
la production d’´etats quantiques non triviaux ; pour l’investigation des fronti`eres entre le
monde quantique et le monde classique ainsi que pour le traitement quantique de
l’in-formation. C’est bien dans cette direction que je vais orienter mes recherches futures.
J’entends mener une activit´e th´eorique et j’esp`ere entamer au mˆeme temps une
collabo-ration fructueuse avec le groupe exp´erimental “Microcircuits `a atomes” dirig´e par Jakob
Reichel.
6.2.1 Compression de spin avec les condensats de Bose-Einstein
Un premier th`eme sur lequel je vais travailler est la dynamique de spin des condensats
de Bose-Einstein `a 2 composantes dans le but de produire des ´etats fortement comprim´es
3
utilis´e, qui a son origine dans la non commutativit´e des trois composantes du spin S selon
trois directions orthogonales n
1, n
2, n
3. Pour d´efinir les ´etats comprim´es de spin
7on
introduit un param`etre de squeezing
ξ
2= N∆S
2 n1hS
n2i
2+ hS
n3i
2(6.3)
qui est directement li´e `a la sensibilit´e maximale que l’on peut obtenir dans une mesure
de “spectroscopie de population” (franges de Ramsey pour les horloges atomiques) d’une
part
8, et `a l’intrication dans le syst`eme d’autre part
9. Pour les ´etats comprim´es de spin
ξ
2< 1. En 2001 il a ´et´e propos´e d’utiliser la non lin´earit´e intrins`eque du champ atomique
pour produire des ´etat intriqu´es et fortement comprim´es de spin (ξ
2∼ 10
−3avec N = 10
5atomes) avec des condensats de Bose-Einstein
10. Dans cet article les auteurs proposent
d’utiliser l’atome de sodium.
Avec Jakob Reichel et Li Yun, qui d´emarre sa th`ese sur ce sujet, nous nous proposons
d’analyser la faisabilit´e d’une exp´erience de compression de spin avec un condensat de
rubidium. Le rubidium est l’´el´ement le plus courant dans les exp´erience de condensats et
aussi un bon candidat pour les horloges atomiques.
Si l’on veut limiter la sensibilit´e aux fluctuations de champ magn´etique, il y a deux
choix possibles d’´etats internes. Le premier choix est celui des ´etats |F = 1, m
F= −1i et
|F = 2, m
F= 1i pi`egeables magn´etiquement. Ce choix impose la contrainte (ou
l’avan-tage) de devoir s´eparer les deux composantes de spin pendant un temps d’interaction
bien choisi car la sym´etrie particuli`ere des interactions entre atomes dans ces ´etats fait
que la dynamique de spin est quasiment “gel´ee” lorsque les deux composantes sont
super-pos´ees. Le deuxi`eme choix, plus compliqu´e `a mettre en œuvre, consiste `a utiliser les ´etats
|F = 1, m
F= 1i et |F = 2, m
F= −1i, qu’il faut pi´eger optiquement, et pour lesquels il y
a une r´esonance de Feshbach `a bas champ qui permet de changer la force de l’interaction
entre esp`eces.
En 1999 j’ai d´ej`a ´etudi´e la dynamique de phase (c’est-`a-dire la dynamique du spin
moyen hS
xi) en tenant compte de (i) la dynamique spatiale des condensats dans le r´egime
de gros condensats o`u le mode du condensat d´epend du nombre d’atomes via le potentiel
de champ moyen, (ii) les fluctuations du nombre total de particules et (iii) l’effet des
pertes de particules. Avec Yvan Castin, suite `a des exp´erience faites au JILA, nous avons
4
Il s’agit du spin collectif (observable `a 1 corps) obtenu en faisant la somme des spins 1/2 de chaque
atome. Par exemple pour S
xen premi`ere quantification
S
x=X
i
(|aihb|
i+ |biha|
i)/2 (6.1)
o`u |ai et |bi sont deux ´etats orthogonaux `a une particule, par exemple 2 ´etats internes diff´erents. En
deuxi`eme quantification
S
x= (a
†b + b
†a)/2 . (6.2)
5
D.J. Wineland, J.J. Bollinger, W.M. Itano, D.J. Heinzen, Phys. Rev. A, 50, 67 (1994).
6G. Santarelli, Ph. Laurent, P. Lemonde, A. Clairon, A.G. Mann, S. Chang, A.N. Luiten, C. Salomon,
Phys. Rev. Lett. 82, 4619 (1 999).
7
M. Kitagawa, M. Ueda Phys. Rev. A 47, 5138 (1993).
8D.J. Wineland, J.J. Bollinger, W.M. Itano, D.J. Heinzen, Phys. Rev. A, 50, 67 (1994).
9A. Sorensen, K. Molmer, Phys. Rev. Lett. 86, 4431 (2001).
10d´evelopp´e une m´ethode pour ´etudier ce syst`eme num´eriquement et, dans certains cas,
analytiquement [11]. Il paraˆıt donc naturel d’´etendre ces ´etudes aux fluctuations du spin
c’est-`a-dire `a la compression de spin, avec une attention particuli`ere `a ce qui peut ˆetre
r´ealis´e exp´erimentalement dans l’´equipe Microcircuits `a atomes.
6.2.2 D´ecoh´erence `a temp´erature non nulle
Un effet que nous avions n´eglig´e `a l’´epoque dans notre ´etude sur la coh´erence de
phase, et qui pourrait expliquer le d´esaccord entre la pr´ediction th´eorique du temps de
coh´erence et l’exp´erience du JILA, est la pr´esence d’une fraction d’atomes non condens´es.
Le probl`eme de la coh´erence d’un condensat de Bose-Einstein `a temp´erature non nulle
est par ailleurs un probl`eme fondamental et int´eressant en soi, qui n’a pas encore ´et´e bien
explor´e exp´erimentalement.
Effet de la temp´erature sur la coh´erence de phase d’un condensat
Avec Emilia Witkowska que j’ai eu la possibilit´e d’accueillir `a Paris pendant 5 mois,
avec un contrat europ´een QuFAR, nous avons commenc´e le programme d’´etude de la
dynamique de phase `a temp´erature non nulle.
Notre premier objectif simple est de d´eterminer le temps au bout duquel la phase
accu-mul´ee par un condensat `a l’´equilibre thermique est brouill´ee, en fonction de la temp´erature
du gaz. Nous voulons aussi savoir si la phase du condensat “diffuse” (variance qui croˆıt
lin´eairement en temps), comme pr´edit dans la litt´erature avec des mod`eles inspir´es par
l’optique quantique
11, ou si elle pr´esente une autre d´ependance temporelle
12. La strat´egie
que nous utilisons est d’une part un calcul analytique bas´e sur la th´eorie “Number
conser-ving” de Castin et Dum, d’autre part des simulations de champ classique [17], [18], [20].
`
A terme, apr`es une premi`ere ´etude fondamentale et “th´eorique” pour un condensat
homog`ene `a l’´equilibre, nous voulons analyser des situation plus r´ealistes sur des
conden-sats `a deux composantes, mˆelant donc les effet de la temp´erature aux effet de brouillage
de phase, ou dynamique de spin, et ´eventuellement de dynamique spatiale.
Limites ultimes de la compression de spin
Une analyse `a temp´erature nulle sugg`ere qu’avec les condensats on peut r´eduire le
param`etre de squeezing d’un facteur proportionnel `a N
−2/3o`u N est le nombre d’atomes.
Toutefois, d’un point de vue fondamental mais aussi pratique, il est important d’´etablir les
limitations ultimes du spin squeezing que l’on peut obtenir avec les condensats d´ecoulant
du fait que le gaz n’est pas `a temp´erature nulle.
Un premier travail a ´et´e fait par Sorensen
13dans l’approximation de Bogoliubov. Ils
serait `a mon avis int´eressant de v´erifier num´eriquement ses r´esultats et d’essayer d’aller
au del`a de Bogoliubov en incluant les interactions entres modes de Bogoliubov (comme
les processus de Beliaev-Landau) pour avoir une pr´ediction fiable aux temps longs.
Petits condensats et chats de Schr¨odinger
Un r´egime diff´erent mais non moins int´eressant, concerne des petits condensats dans
lesquels le nombre de particules perdues pendant la dur´ee de l’exp´erience est inf´erieur
11
D. Jaksch, C. W. Gardiner, K. M. Gheri, P. Zoller, Phys. Rev. A 58, 1450 (1998) ; R. Graham Phys.
Rev. Lett. 81, 5262 (2001) ; R. Graham, Phys. Rev. A 62, 023609 (2000).
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