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Généralités sur la molécule d’azobenzène

d’Azobenzène/Stilbène

I. Généralités sur la molécule d’azobenzène

Les composés azoïques doivent leur nom au groupe azo N=N associé aux deux phényles pontés par la liaison N=N. Il a été montré que la géométrie du groupement azo est similaire à celle

d’une liaison éthylénique (C=C). Cependant, deux stéréoisomères existent: la forme E (trans) et la forme Z (cis) (Figure 51).

Figure 51. Réaction d'isomérisation E/Z de l'azobenzène.

H. Rau a pu mettre en évidence que l’isomère (E) est plus stable thermodynamiquement que l’isomère (Z)(~12 kcal∙mol−1) [1]. La barrière énergétique de l’état excité est de ~23 kcal∙mol−1

ce qui montre que l’isomère trans est plus dominant dans le noir à température ambiante [2].

Par conséquent, l’isomérisation reste une des caractéristiques majeures de l’azobenzène. La

forme trans (E) peut facilement s’isomériser pour donner la forme (Z) par irradiation avec une

longueur d’onde entre 320 et 350 nm. Cependant cette réaction est réversible et l’isomère (Z) peut donner l’isomère (E) soit par irradiation avec une langueur d’onde située entre 400 et 450

nm soit par chauffage. Celle-ci a été mise en évidence pour la première fois par Hartley en 1937 [1].

Ainsi le processus d’isomérisation provoque une diminution de la distance entre les deux carbones situés en position 4 des noyaux aromatiques de l’azobenzène de 9 Å dans la forme trans à 5 Å pour la forme cis.

[1] H. Rau, Angew. Chem. Int. Ed. Engl., 12, 3, 1973, 224–235.

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Les spectres UV-Visible des azobenzènes présentent deux bandes d’absorptions. Une bande d’absorption intense à haute énergie située dans l’UV, qui correspond à des transitions de type

S-S*. La deuxième est située dans la région du visible et qui est attribuée à des transitions

n-S* (figure 52) [3].

L’isomère E : La bande d’absorption dans le visible est très intense caractérisée par un coefficient d’extinction molaire de l’ordre de (Ha×0cm La deuxième bande est beaucoup plus faible (Ha0cmcar cette transition est interdite de symétrie (D2h) L’isomère Z : La bande d’absorption dans le visible est déplacée vers les faibles longueurs d’onde et caractérisée par un coefficient d’extinction molaire (Ha×0cmLa

deuxième bande est caractérisée par un coefficient d’extinction plus élevé que dans le cas de

l’isomère trans (Ha0cm

Figure 52. Spectre d'absorption de l'azobenzène pour les deux isomères (E et Z) [3].

Ces différences permettent la réalisation d'une interconversion photochimique par irradiation avec de la lumière à une certaine longueur d'onde, donnant des proportions différentes des formes cis et trans. Du fait d'une barrière énergétique trop importante, l’isomérisation de l’azobenzène de la forme E à la forme Z n’est pas favorisée thermiquement. En revanche, l’excitation de la molécule d’azobenzène par une lumière peut la porter à une énergie suffisante

pour atteindre cette barrière énergétique donnant lieu à la forme Z. Il a été montré que même

dans ces conditions le mécanisme d’isomérisation n’est pas toujours réalisable.

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Plusieurs études ont été consacrées à cette réaction pour bien expliquer l’influence de certains

facteurs comme l’effet des substituants portés par les cycles phényles [4,5,6,7].

Pour l’isomérisation de l’azobenzène deux mécanismes ont été avancés (Figure 53):

Mécanisme de rotation : Il suggère que les cycles phényles tournent autour de la double liaison

centrale (N=N) pour donner la forme Z, et qui est attribué à une transition de type S-S* (S0 S2). Ce mécanisme est similaire à celui de l'isomérisation du stilbène [8].

Mécanisme d’inversion : Il suppose l'inversion dans le plan de la molécule de l'un des cycles phényles [9,10] et il est attribué à une transition de type S-S* (S0 S1). Ce mécanisme est similaire à celui de l'isomérisation des imines [11].

De nombreuses études réalisées par Rau [1] ont montré que l’isomère Z comme l’isomère E peuvent être excités dans le visible vers l’état le moins énergétique (S1) et également dans le

visible ou dans l’UV vers l’état (S2).

Figure 53. Mécanismes d'isomérisation de l'azobenzène.

[4] C.-W. Chang, Y.-C. Lu, T.-T. Wang, and E. W.-G. Diau, J. Am. Chem. Soc., 126, 32, 2004, 10109

10118.

[5] D. Gegiou, K. A. Muszkat, and E. Fischer, J. Am. Chem. Soc., 90, 1, 1968, 12–18.

[6] S. Malkin and E. Fischer, J. Phys. Chem., vol. 66, 12, 1962, 2482–2486.

[7] T. Asano, T. Yano, and T. Okada, J. Am. Chem. Soc., vol. 104, 18,1982, 4900–4904.

[8] N. Tamai and H. Miyasaka, Chem. Rev., 100, 5, 2000, 1875–1890.

[9] B. Marcandalli, L. P.-D. Liddo, C. D. Fede, and I. R. Bellobono, J. Chem. Soc. Perkin Trans. 2, 4,

1984, 589–593.

[10] N. Nishimura, T. Tanaka, M. Asano, and Y. Sueishi, J. Chem. Soc. Perkin Trans. 2, 11, 1986, 1839, 1845.

[11] A. G. Cheetham, M. G. Hutchings, T. D. W. Claridge, and H. L. Anderson, Angew. Chem. Int. Ed., 45, 10, 2006, 1596–1599.

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Selon Brown, les composés à base d’azobenzène sont regroupés en trois catégories selon l’ordre

des états énergétiqueS-S* et n-S*, cet ordre dépendant de la nature électronique des cycles

aromatiques de l’azobenzène. Ainsi, il a été montré que chaque catégorie de l’azobenzène est caractérisée par une couleur prédominante qui définit le maximum d’absorption (Figure 54).

Les azobenzènes : Cette famille des azobenzènes est caractérisée par une bande d’absorption

(n, S*) intense dans le visible et une bande (S, S*) dans l’UV de faible intensité (couleur jaune). La nature électronique des cycles aromatiques est très similaire aux azobenzènes simples (Ph-N=N-Ph).

Les amino-azobenzènes : Ces composés sont caractérisés par des énergies comparables pour

les deux états (S, S*) et (n, S*). Dans ce cas, la substitution sur l’azo est en position ortho ou

para (couleur orange).

Les pseudo-stilbènes : Ces composés sont caractérisés par une bande (S, S*) déplacée vers le

rouge. Dans ce cas l’azobenzène comporte des substituants portants des groupements donneur et accepteur respectivement en position 4 et 4’ de l’azo (couleur rouge) appelé aussi « push/pull».

Figure 54. Les différentes catégories d’azobenzènes

A ce jour, l’azobenzène constitue une unité clé pour un nombre conséquent d’applications dans

divers domaines (Figure 55). On peut citer, par exemple son utilisation pour la construction de capteurs chimiques [12] pour la synthèse de colorants [13], pour les commutateurs optiques

[12] A. G. Cheetham, M. G. Hutchings, T. D. W. Claridge, and H. L. Anderson, Angew. Chem. Int. Ed., 45, 10, 2006, 1596–1599.

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[14] ainsi que dans le domaine du stockage d’énergie [15] et plus souvent dans des applications

en optique et optoélectronique citons l’exemple mentionné par A. Natansohn et al. [16].

Figure 55. Exemples d’application d’azobenzène.

Dans le contexte de l’optique non linéaire, auquel nous nous sommes intéressés, on peut

citer certains exemples obtenus par notre équipe. Récemment, des matériaux à base de TTF ont été préparés incorporant l’unité pyridine comme site de coordination (figure 56) [17]. La complexation de ce ligand (1) par un équivalent de chlorure de zinc (ZnCl2) dans un mélange DCM/ACN a bien abouti à la formation du complexe neutre monomère LZnCl2 nommé (2). Pour bien comprendre l’effet de la complexation de cations métalliques sur les propriétés ONL, des mesures utilisant la technique Z-scan ont été effectuées sur le ligand libre ainsi que sur son complexe de zinc.

[14] L. K. D. Ed. D, Am. J. Clin. Hypn., 18, 3, 1976, 200–203.

[15] V.I. Gavrilov, Acta Virol., 19, 6, 1975, 510.

[16] W. G. Ng, G. N. Donnell, R. Koch, and W. R. Bergren, Birth Defects Orig. Artic. Ser.. 11, 6, 1975. 335–339.

[17] K. Iliopoulos, I. Guezguez, A. P. Kerasidou, A. El-Ghayoury, D. Branzea, G. Nita, N. Avarvari, H. Belmabrouk, S. Couris, and B. Sahraoui, Dyes Pigments, 101, 2014, 229–233.

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Figure 56. Structures étudiées dans [17]

Ces études ont bien montrées l’augmentation de la réponse non linéaire après complexation

avec le zinc (II) (ligand : γ (10-32 esu) = 1.25, pour son complexe de zinc : γ (10-32 esu) = 10.24). Cependant, à ce stade, le rôle du cation métallique est bien la possibilité de pouvoir contrôler la réponse non linéaire du matériau après la complexation (figure 57).

Figure 57. Courbes de transmission non linéaire normalisées en fonction de la position z pour le ligand et pour son complexe du zinc [17]

Un autre exemple que l’on peut citer, toujours concernant un ligand portant une unité TTF

mais cette fois en incorporant le motif terpyridine comme unité de coordination (Figure 58). La complexation de ce ligand par le fer (II) et de ruthénium (II) a menée aux complexes schématisés ci-dessous [18].

[18] K. Iliopoulos, A. El-Ghayoury, H. E. Ouazzani, M. Pranaitis, E. Belhadj, E. Ripaud, M. Mazari, M. Sallé, D. Gindre, and B. Sahraoui, Opt. Express, 20,. 23, 2012, 25311–25316.

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Figure 58. Structures étudiés dans [18]

Une étude comparative des réponses optiques non linéaires a été effectuée par la technique Z-scan (figure 59). L'absorption non linéaire des complexes de fer (II) et de ruthénium (II) est supérieure à celle du ligand. De fait, une inversion du caractère de réfraction non linéaire de l'auto-défocalisation à l'auto-focalisation a été observée. Elle est probablement due à

l’augmentation du transfert de charge intramoléculaire suite à la complexation [18].

Ligand Fe(II) Ru(II)

γ (10-30 esu) = 0.57 γ (10-30 esu) = -0.33 γ (10-30 esu) = -0.021

Figure 59. Courbes de transmission non linéaire normalisées en fonction de la position z pour le ligand et pour les complexes métalliques [18].

En 2000, il a été prouvé que les paramètres non linéaire, et plus précisément, la valeur de

l’hyperpolarisabilité β du premier ordre est augmentée par la forte interaction intramoléculaire située entre les groupements accepteur et donneur [19, 20]. Sur la base de ces résultats, nous nous

[19] R. Dembinski, T. Bartik, B. Bartik, M. Jaeger, and J. A. Gladysz, J. Am. Chem. Soc., 122, 5, 2000, 810–822.

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sommes intéressés à développer une nouvelle famille de molécules à base d’azobenzène ou de stilbène associé à l’unité iminopyridine construites sur la base structurale suivante (figure 60).

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Dans une première partie, et comme mentionnés précédemment, nous nous sommes intéressés au développement de nouveaux matériaux (ligands et complexes métalliques) à base

d’azobenzène associant le fragment imino-pyridine comme site de coordination et comportant un groupement électro-donneur ou un groupement électro-attracteur (Schéma 1).

Schéma 1 : Structure des ligands cibles