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Fraude et contrebande des articles de mode français

« Le pays où les droits de douane sont les plus

exorbitants est celui où il y a le plus de contrebandiers habiles, parce que la fraude y est la plus lucrative »229.

Il est difficile de mettre en doute le lien profond qui existe entre les échanges des articles de mode et la contrebande. Les droits de douanes trop élevés, souvent prohibitifs, imposés par les législateurs russes en 1700-1825 tendent à favoriser les transactions illégales. D ’

227 ibidem, «Lettre de Boensch du 8 avril 1824», p. 15 228

ibidem, « lettre 37», p.37

229 Jacques PEUCHET, Dictionnaire universel de la géographie commerçante, contenant tout ce qui a rapport à

la situation et à l’étendue de chaque état commerçant; aux productions de l’agriculture, et au commerce qui s’en fait; aux manufactures, pêches, mines, et au commerce qui se fait de leurs produits; aux lois, usages, tribunaux et administrations du commerce. Volume 5, Paris, 1799, p. 515

81 fraude. Il est à noter cependant que le commerce interlope de certains articles de mode est particulièrement avantageux, il s'agit notamment de dentelles, étoffes de soies et autres objets onéreux de petit de volume. D'après un exemple tiré d'un mémoire sur le commerce de la foire de Leipzig (1822), le quintal de tissus de soie (50 kg), l'un dans l'autre, peut avoir une valeur de 4 à 5 milles francs, mais ne donne qu'un volume d'environ 4,5 pieds cubes (0,13 m3) sans emballage. L'auteur déduit de cette évaluation approximative qu'il est plus « facile de faire passer par le moyen de la contrebande pour 100 000 francs de soieries que pour 10 000 francs d'étoffes de laine, de coton ou autres »230.

Étant donné que les sources de la première moitié du XVIIIe siècle gardent peu de traces de la contrebande des articles de mode français sur le marché russe, selon notre hypothèse, le nombre de spéculations est moins important par rapport à la seconde moitié du . Mê ’ L yž ' ectionnistes de Pierre le Grand, toutes les boutiques de la Russie étaient remplies de marchandises importées par contrebande231, nous ne pouvons pas dire avec exactitude si les articles de mode français en faisaient partie. Un argument important qui vient à ’ y ’ ’ ù T imposant les droits excessifs était en vigueur (1724-1731), la première moitié du XVIIIe siècle se caractérise par la modération des droits douaniers prélevés. Dans ces ’ contourner la lettre de la loi.

L’ E z Ière

a eu pour conséquence ’ . ’y t russe a multiplié le nombre ’ 232

. Les récompenses ont été promises pour la saisie des marchandises clandestines, notamment, les dénonciateurs récupéraient la moitié des objets confisqués. Malgré ces mesures, la contrebande est florissante, ce dont témoigne un mémoire de 1765. Ce document anonyme rédigé en français présente une réflexion sur les y ’E : « L’ î ’ ’y e douane qui ne soit défraudée et que toutes le sont plus ou moins en raison ... des droits imposés sur les marchandises, on sait de même que la vigilance des

230 Archives du Ministère des Affaires Etrangères, Mémoires et documents, Allemagne, microfilm P/10778, «Mémoire sur le commerce de la foire de Leipzig (1822)», f° 102

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Konstantin LODYŽENSKI , Istorijâ russkogo tamožennogo tarifa/L’histoire du Tarif douanier russe/, Saint- Pétersbourg, 1886, Typographie de Balachov, page 76

232 Polnoe sobranie zakonov Rossijskoj imperii /Le Registre complet des lois de l’Empire russe/, Sous la direction de Speranskij, Saint-Pétersbourg, Typographie de la chancellerie de Sa Majesté, 1830, vol. 14, N° 10269, p. 190

82 ’ â ’ de 30, 40 et quelquefois de 100 %»233. Nous constatons donc que la contrebande omniprésente aux frontières russes est principalement due à la politique douanière . ’ mémo ’ douanes234.

I ’ de la Russie facilitait considérablement les ’ travail des agents de douanes. La frontière terrestre séparant la Russie de la Pologne était particulièrement exposée à la ’E O y F . L prince Viazemsky, en tant que Pro G P C ’ public, condamnait à multiples reprises la fraude existante à la frontière occidentale. Le prince M ’ celui pratiqué dans les boutiques de Saint-P . z y ’ ’ . E ’ ’introduire les importations à travers la frontière terrestre entre La Russie et la Pologne et en fermeture de ’y 235

.

Cependant, le projet du prince Viazemsky n'a pas été mis en place, notamment à cause ’ ' C C M , qui affirmait que le meilleur moyen de combattre la fraude serait de diminuer les droits de douanes imposés par le tarif de 1766. Minich essayait de démontr ’ Viazemsky ne pouvait pas servir de preuve du développement de la contrebande dans ’E . L’ û M ’ S -Pétersbourg, disait-il, car, premièrement, les commerçants de Moscou font moins de profits sur leurs marchandises que leurs confrères de la capitale du Nord. Deuxièmement, le transport par terre à travers la Pologne, nécessite moins de frais que par mer à Saint Pétersbourg, puisque les cochers de Biélorussie sont prêts à parcourir t P ’

233 RGADA, fonds 19 « Finances», inventaire 1, dossier 298, « Réflexions sur la contrebande, 1765», p. 1-2 234 ibidem

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Konstantin LODYŽENSKI , Istorijâ russkogo tamožennogo tarifa/L’histoire du Tarif douanier russe/, Saint- Pétersbourg, Typographie de Balachov, 1886, p. 124-125

83 leur permettrait de se nourrir236. Cependant, l'affirmation sur la cherté des transports maritimes par rapport à ceux terrestres est loin d'être fiable, car Minich cite l'exemple de la Pologne qui ne représente qu'une partie du trajet qu'effectuent les voituriers transportant les articles de mode de la France vers la Russie. L'ensemble des frais d'acheminement par la voie de terre tendent à être supérieurs à ceux par la voie de mer237.

L’ ê r la protection de la frontière occidentale a convaincu Minich et C C ’ . « L ’ î démarcation. Les postes de surveillance sont éloignés les uns des autres, à certains endroits les gardes ont donc du mal à observer les gens qui passent et à intervenir en cas de nécessité; la densité de la forêt empêche la visibilité. Plusieurs villages polonais et russes se trouvent à proximité, et ne sont séparés que par un ruisseau facile à franchir même en été »238. Les frontières maritimes étaient également exposées à la fraude. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, Saint-Pétersbourg, comme tout grand port, est devenu un haut lieu du commerce et de contrebande. Les fausses déclarations à la contrebande étaient fréquentes : on faisait ainsi passer les étoffes lyonnaises brochées dont l'archine coûtait de 80 à 120 kopecks pour les étoffes plus simples à 30 ou 40 kopecks l'archine239. Pour déclarer les marchandises au dessous de leur réelle valeur, les marchands avaient recours aux douaniers qu'il fallait soudoyer généreusement : « Si un marchand doit payer 900 roubles de droit à la douane, il peut toujours s'adresser aux agents et payer 600 roubles, mais ces 600 roubles ne sont pas destinés à la trésorerie de l'État...seulement 300 roubles sont déclarés, les autres 300 roubles restent dans les mains des douaniers »240.

Les capitaines des navires de commerce étaient également impliqués dans la contrebande, leurs services étaient considérés moins chers que ceux des préposés aux douanes241. Le négociant de Saint-Pétersbourg passait une commande à son correspondant d'Angleterre, Hollande, France ou Lübeck, qui après avoir emballé et cacheté les marchandises interdites et aux droits excessifs, les expédiait vers la Russie. La plupart des capitaines des navires allant en direction de Saint-Pétersbourg, se chargeaient des paquets de

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Konstantin LODYŽENSKI , Istorijâ russkogo tamožennogo tarifa/L’histoire du Tarif douanier russe/, Saint- Pétersbourg, Typographie de Balachov, 1886, p. 125

237 sur ce point, voir infra chapitre 8, p. 280-282 238 ibidem, p. 126

239 SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 556, « Dossier sur la contrebande », XVIIIe siècle p. 288 240

ibidem, p. 286 241 ibid. p. 282

84 ce genre. « Habituellement, les capi ’ contrebande par le Sund pour le compte des maisons allemandes, françaises et autres »242, selon un rapport transmis au directeur du Collège de commerce Vorontsov. Le capitaine obtenait une 7 10 % ’ information sur le négociant de Saint-P ’ . E Saint-Pétersbourg, le capitane remettait le paquet à celui qui lui présentait le même cachet qui avait été posé sur son paquet. Ainsi, le négociant de Saint-Pétersbourg courait peu de risques pour un prix raisonnable de 7 à 10 % de la valeur de marchandise243. Les matelots arrangeaient sur les navires des cachettes bien dissimulées, impossibles à trouver même pour le meilleur agent de douane. Au cas où les douaniers tombaient sur un paquet, le capitaine affirmait ne pas connaître le propriétaire. Même si un matelot était mis en prison, le capitaine y ’ .

Pour sortir du navire les paquets contenant des articles interdits, les capitaines et leurs aides les transportaient dans les grandes poches intérieures de leurs pantalons et vestes de matelots244. Pendant que le navire était dans le port, les femmes de marchands y venaient ’ - ’ . À navire les femmes présentaient aux gardiens des achats insignifiants, sans révéler que leurs « ’ ’ élevé fut imposé »245. La douane envoyait deux gardes sur chaque navire, mais il était facile de les tromper, ou acheter leur confiance « ’ ’ laisser à leur proximité de la vodka »246.

Une partie de navires marchands, surtout les plus grands, restaient dans le havre de C ’y ’ . L ’ . S Département des douanes, « cela peut être consi ’ ’ C »247

. Souvent les officiers marins arrivaient vers

242 SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 556, « Dossier sur la contrebande », XVIIIe siècle p. 283 243

L. Semenova, Byt i naselenie Sankt-Peterbyrga/Les habitants de Saint-Pétersbourg et leur mode de vie, Saint- Pétersbourg, Blitz, 1998, p. 122

244 SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 556, « Dossier sur la contrebande », XVIIIe siècle p. 283-284

245 ibidem, p.52 246

ibid., p.264-265 247 ibidem, p. 70

85 les navires avant les douaniers, ce qui favorisait le développement de la contrebande. Les douanes avaient des difficultés à maîtriser les officiers, dans quelques cas rares ces derniers ont été mis en garde à vue.248 Ainsi, en 1790, un agent de douane a vu un officier avec un grand sac qui venait de quitter un navire français « En le soupçonnant de faire une affaire illégale, le douanier a pris ’ ê . L’ ê ’ »249. L’ . Heureusement, ses cris ont été entendus par un contre-amiral Khanykov qui a envoyé ’ . L’ de bas de soie.

L ’ droits aux douanes était également une affaire courante. Selon le comte Minich, les juifs polonais et allemands étaient réputés pour la fabrication habile des plombs de douanes de manière qu'il était impossible de distinguer le vrai du faux250. Un procès verbal de 1765 porte sur les français Demorest, Magnan et Petitome qui ont été accusés de la contrefaçon des plombs de douane. Ceux-ci étaient fabriqués à partir des matériaux chimiques que Demorest a emmenés de France en 1764. Les faux plombs étaient apposés sur les produits importés en fraude de Riga, dans les caisses à double fond251. Les articles d'or et de dentelles introduits illégalement dans l'Empire russe, en mars 1765, ont été confisqués et vendus pour une somme de 17 706 roubles. Les fraudeurs ont également reconnu avoir déjà importé de la même manière de France sept caisses de marchandises dont quatre avaient été saisies à Riga et trois avaient été acheminées avec succès jusqu'à Saint-Pétersbourg. Le Collège de Commerce a pris une décision approuvé par le Sénat qui consistait à expulser ’ 252. Afin de régler les dettes de fraudeurs, les marchandises de Magnan, estimées à 2695 roubles, . L’ y appartenant à Magnan. Nous y trouvons des gants de castor, des gants en cuir, des tabatières, des éventails en nacre, des montres, des rubans de soie et de taffetas, des étoffes en taffetas

248 Lidiya SEMENOVA, Byt i naselenie Sankt-Peterbyrga/Les habitants de Saint-Pétersbourg et leur mode de

vie, Saint-Pétersbourg, Blitz, 1998, p. 124

249 SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 556, « Dossier sur la contrebande », XVIIIe siècle p. 283-284

250 Konstantin LODYŽENSKIJ, Istorijâ russkogo tamožennogo tarifa/L’histoire du Tarif douanier russe/, Saint- Pétersbourg, 1886, Typographie de Balachov, p. 126

251

SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 550, « Divers documents sur le commerce », XVIIIe siècle, p. 210

252

RGADA, fonds 276, inventaire 3, dossier 1158, «Dossier sur l'ordre du Sénat de renvoyer de la Russie des sujets de la France Demorest, Menian et Petitome, accusés de la fraude douanière, 1765», p. 3

86 noire, des agréments destinés aux femmes en blonde, des blondes ou des manchettes brodées253.

De toute é ’E ’ étaient souvent impliqués dans la fraude, confirme le mémoire de le Gendre datant de 1784254. « De là, ’ y t aucun fond se procurent de petits envois de France sur lesquels ils doublent leurs argent ’ leurs ’ ’ avec leur correspondants, ’ »255

. Selon Le Gendre, les confiscations de marchandises illicites ont monté en 1765 à 800 milles livres256, le chiffre qui est invérifiable, mais qui permet de constater que les agents diplomatiques étaient au courant de ’ F y adoption.

Dans les années 1770, la Commission de commerce et le Collège de commerce élaborent un projet de la lutte contre ’ S -Pétersbourg de marchandises interdites selon le tarif de 1766. Les auteurs du document soulignent que « la contrebande et la consommation des produits illégaux ne cesse de croître au point où dans les deux capitales les mousselines brodées en or et en argent, des blondes et autres choses de ce genre prohibées ’ gens les achètent et les portent sans les considérer comme interdites »257. Afin de mettre fin à ’ savoir 1000 roubles pour la première infraction, 2000 roubles pour la deuxième infraction et ’ nfraction.

Malgré ces mesures, il était difficile de lutter avec la fraude compte tenu du fait que les ’E ’ . D mémoires le comte de Ségur, ambassadeur de France en Russie, relate une anecdote qui révèle ’ ’ . À ’ -il, les ambassadeurs étaient ’

253

ibidem, p. 15

254 Archives du ministère des affaires étrangères, Documents et mémoires, Russie, microfilm 12375, «Mémoire sur le commerce de la Russie, rédigé par le Gendre», f. 149

255 ibidem 256

ibid.

257 SPbF IRI RAN, fonds 36, inventaire 1, dossier 550, « Divers documents sur le commerce », XVIIIe siècle, p. 170

87 ’ oduction illégale des marchandises interdites258

. Cependant, malgré cette règle, la fraude ê ’ . son valet Evrar était chargé de ramener en Russie le traité de commerce de 1786 ratifié par Versailles, le gouvernement russe a donné un ordre à la douane de le laisser passer sans ô ’ F russes. Le valet en a profité « pour venir à Kiev, dans un carrosse rempli de dentelles et de divers produits prohibés »259. Un jour, lors du petit déjeuner chez Potemkine avec ses nièces, le comte de Ségur se rendit compte que certains parmi ceux qui étaient présents, partaient dans la pièce contigüe en prenant soin de bien fermer les porte derrière eux. «À chaque fois ’ y ’y ’ . C ’ ; ’ ’ ’ ’ ’ fut remplie de multiples marchandises interdites que mon valet de chambre présentait en ». ’ e France après avoir surpris les aristocrates russes en flagrant délit, a voulu renvoyer le valet contrebandier, cependant, il est revenu sur sa décision car Potemkine lui-même a demandé de ne pas disgracier le coupable260.

Une autre pratique frauduleuse qui était très répandue consistait à déclarer les marchandises étrangères chargées de droits excessifs fort au-dessous de leur valeur et de leur poids et mesures. « La même diminution a lieu dans la déclaration de celles qui ne sont pas spécifiées dans le tarif »261. C'était un véritable fléau pour les douaniers car les appellations et les prix de marchandises étaient établis dans le tarif de manière très approximative. Les ’ y ’ ’ . Les législateurs russes en étaient conscients car très souvent les tarifs comprenaient un article ’ ’achat au profit des services ’ -estimation de la valeur, les agents de douanes pouvaient acheter les marchandises aux prix intéressants, en payant au

258 Louis-Philippe DE SÉGUR, Zapiski grafa Segura o prebyvanii v Rossii v carstvovanie Ekaterini II/Les

mémoires du comte de Ségur sur son séjour en Russie lors du règne de Catherine II/, Saint-Pétersbourg,

Typographie de Maykov, 1865, p. 167 259 ibidem

260

Louis-Philippe DE SÉGUR, Zapiski grafa Segura o prebyvanii v Rossii v carstvovanie Ekaterini II/Les

mémoires du comte de Ségur sur son séjour en Russie lors du règne de Catherine II/, Saint-Pétersbourg,

Typographie de Maykov, 1865, p. 167-168 261

Archives du ministère des affaires étrangères, Documents et mémoires, Russie, microfilm 12375, «Mémoire sur le commerce de la Russie, rédigé par Le Gendre», f. 33

88 commerçant un dédommagement de 10 ou 20 %262. I ’ensuit que le fraudeur était privé de la possibilité de vendre lui-même ses produits, et perdait de la sorte une grande partie de ses profits.

À la suite de la Révolution française, toutes les marchandises françaises étaient ’ pendant, comme en témoignent plusieurs cas de contrebande que nous avons analysés dans le chapitre consacré au facteur politique, la fraude était omniprésente. « Autrefois les gants de Grenoble étaient tarifés en Russie, et la France en exportait pour des ’ 1792 y ’ ê ’ en a diminué considérablement la consommation »263. Ce passage, tiré de la correspondance 1806 ’ prohibitives.

Mê ’ Ier

, le libre-échange est rétabli, certaines marchandises prohibées au cours de la période révolutionnaire, restent interdites à ’ ’ê . U 1808 L M P M ’ anciens de Moscou, mais aussi connu grâce aux petites annonces insérées régulièrement dans les journaux264, a été accusée de contrebande. En rentrant de France à Moscou, la marchande transportait « des dentelles, des agréments de dentelles, un mouchoir blanc, un mouchoir noir, une paire de manchettes de dentelle, une tabatière et un petit flacon»265. Elle était arrêtée le 5 décembre 1807 à Viazma, par un contrôleur des douanes Nikiforov qui a effectué « ’ le plus sévère pas uniquement dans la calèche, les valises, et les caisses, mais également dans les poches de ma chemise sans le moindre respect à mon sexe »266. Malgré le fait que Louise M ’ -même et que celles-ci étaient cachées dans ses vêtements pour préserver leur qualité, le douanier ne l'a pas crue car la largeur des dentelles cachées dépassait les dimensions autorisées par le tarif.

262

Konstantin LODYŽENSKIJ, Istorijâ russkogo tamožennogo tarifa/L’histoire du Tarif douanier russe/, Saint- Pétersbourg, 1886, Typographie de Balachov, p. 156

263

Archives du ministère des affaires étrangères, Correspondance consulaire et commerciale, Saint-Pétersbourg, Tome 10, «Avis du conseil général du commerce sur les représentations de la chambre de Lyon relatives au commerce de gants de Grenoble du 14 mars 1806 », p. 35

264

Moskovskie vedomosti/Journal de Moscou, 25/02/1792, 1/01/1799, 8/03/1805

265 RGADA, fonds 276, inventaire 3, dossier 2027, «Dossier sur la confiscation des marchandises de la marchande Montagne passées par la douane de Grodno à la suite de la délation de l'assesseur de collège Nikiforov, 1808», p. 21

89 Nikiforov ’ ’ marchandises, qui ont été envoyées en conséquence au Collège de Commerce pour des vérifications. Une partie de marchandises confisquées était vendue aux enchères à 861 roubles, donnés en récompense à Nikiforov. Le reste des marchandises importées de manière légale ont été rendus au mari de Louise Montagne, car la marchande de modes avait décédé. L ’ contrôles de plus en plus pressants ’ y . D douaniers étaient très motivés par la promesse de récompense, qui explique leur extrême ’ . E stratégies utilisées par les commerçants afin de dissimuler les marchandises interdites.

Cependant, alors que les autorités russes mènent une lutte acharnée contre la fraude, ’ « ’ passive ». En effet, au lieu de condamner la contrebande pratiquée par leurs concitoyens, les consuls insiste ’ F . « La fraude que nous sommes loin de vouloir autoriser et sans laquelle, cependant, notre … ce rapport, nos ’ ’ ê ’ ê R ’ ’ tat ne peut tourner à son avantage »267

. Malgré les craintes des autorités françaises face aux mesures visant à entraver la contrebande des articles de mode, celle-ci continue à faire rage, nous informe un rapport consulaire de 1815. « Vous serez étonné de ne point voir sur la liste des draps étrangers, mais comme les fabriques du pays ne peuvent fournir le quart de consommation et que cependant il ’ »268

. L’ ment, Bourgeois, occupant le poste du consul général de France à Saint- P ’ y ’ « savent où acheter leurs entrées »269. Ces spéculateurs agissent le plus souvent sous couvert de seigneurs puissants et de ministres étrangers. Il en résulte que « le consommateur paye ces objets un prix énorme,

267

Archives du ministère des affaires étrangères, Correspondance consulaire et commerciale, Saint-Pétersbourg, Tome 9, «Rapport de Lesseps du 4 ventôse, an 12», p. 242

268 ibidem, Tome 11, «Lettre de Bourgeois du 5/17 octobre 1815», p. 172 269

Archives du ministère des affaires étrangères, Correspondance consulaire et commerciale, Saint-Pétersbourg, Tome 11, «Lettre de Bourgeois du 5/17 octobre 1815», p. 172

90 ’ ’ fortune, quitte le pays où il ne veut pas, en continuant ce commerce dangereux, perdre »270. L ’ y . L’ L yž er relevant du Département du commerce extérieur, ’ ’ R ê trois catégories: la première, la plus grande, comprenait 99 % de la population, à savoir, les gens qui étaient prêts à payer des prix exorbitants pour des objets qui n'étaient pas de première