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{Surf. de R. de genre 1}/biholom

{Réseaux de C}/homothétie Λ7→C //{tores complexes}/isom

OO

1.2 Formes modulaires

Γ désigne toujours un sous-groupe d'indice ni dans SL2(Z).

1.2.1 Fonctions modulaires de poids0. On rappelle qu'une fonction méromorpheX 99K Csur une surface de RiemannX(donc dénie en dehors de ses pôles) se prolonge de manière unique en une application holomorphe X −→ P1(C). On note MX le corps des fonctions méromorphes sur X. Par exemple MP1(C) 'C(z). Un résultat spectaculaire de la théorie (dont nous n'avons pas besoin) dit que X 7→ MX est une équivalence entre la catégorie des surfaces de Riemann compactes munie des applications holomorphes non-constantes, et la catégorie des corps à engendrement ni et degré de transcendence1 surC. C'est une motivation pour étudier le corps MX(Γ).

Soit ϕ une fonction méromorphe X(Γ) −→ P1(C). Notons f la composée H −→

X(Γ) −→ϕ P1(C). C'est une fonction méromorphe Γ-invariante sur H. Réciproquement, si on se donne une telle fonction f, celle-ci descend bien à Y(Γ) mais pour pouvoir la prolonger à X(Γ), il faut une condition de méromorphie aux pointes.

Pour expliciter cette condition, partons plus généralement d'une fonction méromorphe f surH qui est horizontalement périodique au sens où il existe un entier non nul h tel que f(z) = f(z+h)(autrement dit,f est invariante par une matrice[10 1h]). Elle s'écrit comme une fonction méromorphe en q= exp(2iπz/h)∈D\ {0} et admet donc un développement

f(z) = X

n∈Z

anqn

au voisinage de q = 0 (donc de z = ∞). On dit que f est méromorphe à l'inni si cette fonction de q est méromorphe en 0, c'est à dire si an= 0 pourn <<0. On note alors

ord∞,h(f)le plus petit n∈Z tel que an6= 0,

et on dit que f est holomorphe à l'inni si ord∞,h(f) > 0. On peut remarquer que ces notions ne dépendent pas du choix de h tel que f soit [10 1h]-invariante (mais bien-sûr l'entier ord∞,h dépend deh).

Revenons à une fonction méromorphe Γ-invariante. Pour une pointe x ∈ P1(Q), on choisit τ ∈ SL2(Z) tel que τ x = ∞, et on dit que f est méromorphe ou holomorphe à la pointe x si τf :z 7→ f(τ−1z), qui est horizontalement périodique, est méromorphe ou holomorphe à l'inni. Cela ne dépend pas du choix de τ, pas plus que l'entier

ordx,h(f) := ord∞,hf).

Les fonctions f :H−→C invariantes parΓ et méromorphes sur Het aux pointes sont appelées fonctions modulaires de niveau Γ et poids 0. Elles correspondent aux fonctions méromorphes sur X(Γ).

Les fonctions f : H −→ C invariantes par Γ et holomorphes sur H et aux pointes sont appelées formes modulaires de niveau Γ et poids 0. Elles correspondent aux fonctions holomorphes sur X(Γ), et sont donc ... constantes !

1.2.2 Formes modulaires de poids 2. Après les fonctions méromorphes, il est naturel de regarder les formes diérentielles méromorphes surX(Γ). Sur un ouvertU deCune forme diérentielle holomorphe, resp. méromorphe, s'écrit ω =f(z)dz avec f holomorphe, resp.

méromorphe. Si ϕ :V ∼

−→U est un biholomorphisme sur un autre ouvert de C, on peut transporter ω en ϕω = f(ϕ(z)).ϕ0(z)dz. Sur une surface de Riemann X plus générale, une forme diérentielle est la donnée, pour chaque carte X ⊇O ∼

−→U ⊂C, d'une forme diérentielle sur U, et ce de manière compatible avec la formule de changement de carte ci-dessus.

Soit π:H−→X(Γ)la restriction de la projection canonique àH⊂H. Une forme dif-férentielle méromorpheωsurX(Γ)induit une forme diérentielle méromorpheΓ-invariante πω=f(z)dz. La condition d'invariance s'écrit :

∀γ ∈Γ, f(γz)d(γz) =f(z)dz

et un calcul montre que pour γ = [a bc d], et en posant jγ(z) =cz+d on a d(γz) =jγ(z)−2dz.

On a donc la propriété suivante d' automorphie sur la fonctionf

∀γ ∈Γ, f(z) =jγ(z)−2f(γz).

Puisquej±[10 1h](z)2 = 1, on voit que toute fonctionf satisfaisant cette propriété d'automor-phie est horizontalement périodique. De même, pour toutτ ∈SL2(Z), la forme diérentielle τ(f.dz) = jτ(z)−2f(τ z)dz est invariante sousτ−1Γτ donc la fonctionjτ(z)−2f(τ z)est ho-rizontalement périodique. On dit alors que f est méromorphe ou holomorphe à la pointe τ∞ si la fonction z 7→ jτ(z)−2f(τ z) est méromorphe ou holomorphe à l'inni. Cela ne dépend pas du choix de τ, pas plus que l'entier2

ordx,h(f) := ord∞,h(jτ(z)−2f(τ z)).

Une fonction modulaire de niveau Γ et poids 2 est une fonction sur H qui satisfait la propriété d'automorphie ci-dessus et est méromorphe sur H et aux pointes. Une telle fonction correspond donc à une forme diérentielle méromorphe surX(Γ).

Une forme modulaire de niveau Γ et poids 2est une fonction modulaire qui est de plus holomorphe sur Het aux pointes.

Attention. L'holomorphie de f n'est pas équivalente à celle de ω! ! Pour expliquer cela, introduisons la notationordP(f)pour l'ordre du zéro ou du pôle en un point P d'une fonction méromorphe f sur une surface de Riemann. Si on développe f = g(z) dans une coordonnée locale z au voisinage de P on a ordP(f) = ord0(g). De même, si dans cette coordonnée on développe une forme diérentielle méromorphe sous la forme ω = g(z)dz, alors l'entier ord0(g)ne dépend pas du choix de la coordonnée et se noteordP(ω). Bien sûr ω est holomorphe en P si et seulement si ordP(ω)>0.

2. on remarquera que cette dénition de ordx,h(f) est diérente de la précédente (sauf si x = ), qui s'appliquait à une fonctionΓ-invariante. Ici, c'est f dzqui estΓ-invariante. La notation peut paraitre ambigüe, mais l'ambiguité n'existe que pour une fonctionf telle quef etf dz sontΓ-invariantes. Or une telle fonction est nulle.

Lemme. Soit ω une forme diérentielle méromorphe sur X(Γ) et soit f la fonction méromorphe sur H telle que πω =f(z)dz. Alors on a les égalités suivantes :

i) ordP(f) = ordπ(P)(ω) si P est un point de H ordinaire pour Γ.

ii) ordP(f) =e.ordπ(P)(ω) +e−1siP est un point elliptique d'ordre e (égal à 2 ou 3).

iii) ordx,h(f) = ordπ(x)(ω) + 1 si x est une pointe d'ordre h.

Démonstration. i) et ii). On a vu qu'au voisinage d'un point P de H, il existe une coor-donnée locale z0 =τ(z) telle que π est de la forme z0 7→z0e, avece = 1si P est ordinaire.

La fonction u=z0e descend donc en une coordonnée locale autour de π(P). Il s'ensuit que si ω = g(u)du au voisinage de π(z0), alors πω = g(z0e)d(z0e) = ez0e−1g(z0e)dz0 et donc ordP(f) = ordPω) = ord0(z0e−1g(z0e)) = e.ord0(g) +e−1 = e.ordπ(P)(ω) +e−1.

iii) Quitte à translater par un τ ∈ SL2(Z) on peut supposer que x= ∞. Dans ce cas, on a vu que q = exp(2iπz/h) est une coordonnée locale autour de π(x). Ainsi si ω est de la forme g(q)dq, πω est de la forme 2iπ/h.g(exp(2iπz/h)).exp(2iπz/h)dz = f(z)dz, de sorte que f(z) = 2iπ/h.q.g(q), et nalement ord∞,h(f) = ord0(q.g(q)) = ord0(g(q)) + 1 = ordπ(x)ω+ 1.

Notons

M2(Γ) leC-espace vectoriel des formes modulaires de niveau Γ et poids 2

S2(Γ)le sous-espaces des formes modulaires paraboliques (aussi appelées cuspidales, et en anglais cusp forms), qui par dénition sont celles qui s'annulent aux pointes (ieordx,h(f)>0 pour chaque pointex).

La théorie des diviseurs de Weil et en particulier le théorème de Riemann-Roch montre que ces espaces sont de dimension nie et permet de calculer leur dimension. Faisons quelques rappels à ce sujet.

Un diviseur sur X est une somme P

P∈XaP[P] où aP ∈ Z est nul sauf pour un nombre ni de points. L'ensemble des diviseurs Div(X) est donc le groupe abélien libre de baseX. Il est partiellement ordonné par la relation P

PaP[P]6P

P bP[P] siaP 6bP pour toutP.

Le dégré d'un diviseur est déni par deg(P

PaP[P]) =P

PaP ∈Z.

A toute fonction méromorphe non-nulle f on associe son diviseur div(f) :=X

P

ordP(f)[P].

On adiv(f g) = div(f)+div(g)etdiv(f+g)>inf(div(f),div(g)).3On obtient ainsi un homomorphisme de groupe M×X −→div Div(X) dont l'image est notée Div.pr(X). Un tel diviseur est dit principal. Le quotientDiv(X)/Div.pr(X)s'appelle groupe de Picard de X et se note Pic(X). (C'est l'analogue du groupe des classes d'un corps de nombres).

3. Ici la notation inf est à prendre comme un pgcd pour la relation d'ordre partiel sur les diviseurs.

C'est donc l'élément maximal parmi les élements inférieurs àdiv(f)et div(g).

L'applicationdegse factorise parPic(X). En eet, si l'on considèref ∈ M×X comme une application holomorphe X −→P1(C) dont on note eP l'indice de ramication en un pointP ∈X, alors

div(f) = X

P7→0

eP[P]− X

P7→∞

eP[P] donc son degré est nul.

De même à toute forme diérentielle méromorphe on associe div(ω) = X

P

ordP(ω)[P].

Commediv(f ω) = div(f) + div(ω),∀f ∈ M×X, l'image deω dansPic(X)ne dépend pas deω, s'appelle le diviseur canonique de X, et se note K.

Si D∈Div(X), on note

L(D) :={f ∈ M×X, div(f) +D>0} t {0}.

C'est unC-espace vectoriel dont la dimension`(D) :=dimCL(D)ne dépend que de l'image de D dans Pic(X), puisque pour f0 ∈ M×X, la multiplication par f0 induit un isomorphisme linéaire L(D) ∼

−→L(D+ div(f0)). Le théorème de Riemann-Roch arme que

`(D) = deg(D) + 1−g+`(K−D)

oùgest le genre deX. Sachant que`(0) = 1(fonctions holomorphes surXcompacte, donc constantes) , on voit en particulier, en prenant D= 0 puis D=K, que

`(K) =g et deg(K) = 2g−2.

Il s'ensuit que si deg(D) > 2g−2, alors deg(K −D) < 0 donc L(K −D) = {0}

(puisqu'un diviseur positif a un degré positif) et

`(D) = deg(D) + 1−g.

Revenons à X = X(Γ) et notons Dπ :=P

P∈X(Γ)(1−1/eP)[P]∈ Div(X(Γ))⊗ZQ où eP vaut1pour un point ordinaire, 2ou3pour un point elliptique, et+∞pour une pointe.

On a donc deg(Dπ) = 12n2+ 23n3+n. Corollaire. On a les égalités

dimC(M2(Γ)) =`(Dπ+K) =g−1 +n, dimC(S2(Γ)) =`(K) =g.

Démonstration. Le lemme précédent nous dit que l'application ω 7→ f dénie par πω = f(z)dz induit un isomorphisme

{ω, div(ω) +Dπ >0} t {0} ∼

−→ M2(Γ).

Fixons une forme diérentielle méromorphe ω0 sur X(Γ)4, et écrivons les autres sous la forme ω=g.ω0, alors puisquediv(ω) = div(g) + div(ω0), l'applicationg 7→gω0 7→f induit un isomorphisme

L(div(ω0) +Dπ) ∼

−→ M2(Γ).

La même application induit l'isomorphisme L(div(ω0) +Dπ− X

P7→∞

[P]) ∼

−→ S2(Γ).

Notons bDπc la partie entière de Dπ, c'est-à-dire bDπc =P

P7→∞[P]. Alors bien-sûr, on a L(div(ω0) +Dπ) = L(div(ω0) +bDπc). Il s'ensuit que

dimC(M2(Γ)) =`(div(ω0) +bDπc) =`(K+bDπc) = `(K+ X

P7→∞

[P]).

On a deg(K +P

P7→∞[P]) = 2g −2 + n > 2g −2 de sorte que la forme simpliée du théorème de Riemann-Roch s'applique pour donner

`(K+ X

P7→∞

[P]) = deg(K+ X

P7→∞

[P]) + 1−g =g−1 +n. Par le même raisonnement, on obtient que

dimC(S2(Γ)) =`(div(ω0) +bDπc − X

P7→∞

[P]) =`(K) = g.

1.2.3 Formes modulaires de poids k ∈N. Pour un entier k ∈Z, on dénit une action de GL2(R)+ sur MX par la formule

f[γ]k(z) := det(γ)k/2jγ(z)−kf(γz).

Le fait que ce soit une action, i.e. que [γγ0]k = [γ]k0]k, découle de la formule jγγ0(z) = jγ0z)jγ0(z) que l'on vériera sans peine.

On espère que le paragraphe précédent rend plus naturelle la dénition suivante : Définition. Soit Γ un sous-groupe d'indice ni de SL2(Z). Une forme modulaire de niveauΓ et poids k ∈N est une fonction f :H−→C satisfaisant les propriétés suivantes :

i) ∀γ ∈Γ, f[γ]k=f (propriété d'automorphie).

ii) f est holomorphe surH ainsi qu'aux pointes5.

4. Il en existe toujours. Par exemple, surX(1) =P1on peut prendre dz(qui adiv(dz) =−2[∞]) puis tirer en arrièredzviaX(Γ)−→X(1)

5. Comme dans le cas de poids2, l'holomorphie à la pointeest bien dénie carf est horizontalement périodique. Pour une pointex=τ∞,τSL2(Z), on dit quef est holomorphe ou méromorphe enxsi la translatéef[τ]k, qui est aussi horizontalement périodique, l'est à l'inni. Cela ne dépend pas du choix de τ, pas plus que l'entier ordx,h(f) := ord∞,h(f[τ]k).

Ces fonctions forment un C-espace vectoriel que l'on note Mk(Γ). On dit que f est para-bolique (ou cuspidale, et en anglais cusp form) si f s'annule aux pointes. L'espace des formes paraboliques est noté Sk(Γ).

On dira aussi d'une fonction satisfaisant ces propriétés avec méromorphe au lieu de holomorphe que c'est une fonction modulaire de niveau Γet poids k.

Remarque. Sikest impair et−1∈Γ, alorsMk(Γ) =Sk(Γ) = 0puisquef[−1]k=−f. Remarque. Pour vérier qu'une fonction est automorphe pour(Γ, k)il sut de vérier l'égalité f[γ]k = f pour un ensemble de générateurs de Γ. Par exemple, si Γ = Γ(1) et k pair, il sut de vérierf(z+ 1) =f(z) etf(−1/z) = zkf(z).

Remarque. Si f est méromorphe et automorphe de poids k, pour vérier que f est holomorphe aux pointes, il sut de montrer que pour tout τ ∈ Γ(1), la fonction τf(z) admet une limite lorsque =(z)→ ∞.

Remarque. La multiplication des fonctions induit un produit Mk(Γ)⊗ Mk0(Γ) −→

Mk+k0(Γ), qui fait de M(Γ) := L

k∈NMk(Γ) une C-algèbre graduée, et de S(Γ) :=

L

k∈NSk(Γ) un idéal de cette algèbre.

Remarque. LorsqueΓ = Γ(1), il est intéressant d'exprimer la propriété d'automorphie en termes de fonctions sur les réseaux. Une fonction surR est dite homogène de poids k si

∀Λ∈ R, ∀α∈C×, ϕ(αΛ) =α−kϕ(Λ)

Notons Λz := zZ⊕Z. L'égalité Λγz =jγ(z)−1Λz montre que l'application ϕ7→ f dénie par f(z) =ϕ(Λz)est une bijection

{Fonctions homogènes de poids k surR} ↔ {Fonctions Γ(1)-automorphes de poids k} dont la bijection réciproque est donnée par ϕ(Λ) = ω−k2 f(ω12) où ωω12

est n'importe quelle base de Λ telle queω12 ∈H.

Exemple. (Séries d'Eisenstein) La manière la plus naïve de fabriquer une fonction de poidsk surR est de poser

Gk(Λ) := X

ω∈Λ

1 ωk

oùΛ = Λ\ {0}. Cette somme converge absolument pour k >3(exercice) et, comme il se doit, est nulle sik est impair. La fonction correspondante sur Hs'écrit

Gk(z) = X

(m,n)∈(Z2)

1 (mz+n)k.

Pour étudier l'holomorphie, choisissonsε >0susamment petit pour qu'il existezε tel que

|zε|= 1−εet2<(zε) = 1 +ε. Considérons le voisinage ouvertDε du domaine fondamental D¯ donné par les inégalités|z|>(1−ε)et |2<(z)|<1 +ε. Pour z dans Dε, l'inégalité

|mz+n|2 =m2zz+ 2mn<(z) +n2 >m2(1−ε)2−mn(1 +ε) +n2 =|mzε−n|2

montre que Gk converge normalement surDε et y est donc holomorphe. Par automorphie, Gk est donc holomorphe sur toutH. Pour montrer qu'elle est aussi holomorphe à la pointe

∞, il faut montrer queGk(z)possède une limite lorsque=(z)→ ∞. Par invariance sousT, on peut garderz dans D¯, et la convergence normale nous montre que, puisque k est pair,

lim

z∈D,=(z)→∞¯

Gk(z) = X

n∈Z\{0}

1

nk = 2ζ(k).

AinsiGk ∈ Mk(Γ(1)) et Gk(∞) = 2ζ(k)(avec toujours k pair).

Exemple. (Fonction ∆) Pour une raison qui apparaitra quand nous parlerons de courbes elliptiques, il est d'usage de poser g2 := 60G4 et g3 := 140G6. Admettant mo-mentanément que ζ(4) = 2.3π24.5 et ζ(6) = 33π.5.76 (cf feuille d'exercices), on constate alors que

∆ :=g23−27g32 ∈ S12(Γ(1)), donnant donc un premier exemple de forme parabolique.

1.2.4 Pôles et zéros des fonctions modulaires. Lorsque k = 2k0 est pair, on peut interpréter les formes modulaires de poids k comme certaines k0-formes diérentielles sur X(Γ). Une k0-forme diérentielle sur un ouvert de C est une expression de la forme ω = f(z)(dz)k0. Si ϕ est une application biholomorphe entre deux ouverts on transporte une telle forme par la formule ϕω =f(ϕ(z))ϕ0(z)k0(dz)k0. Ceci permet de dénir ce qu'est une k0-forme diérentielle sur une variété comme la donnée d'une k0-forme sur chaque carte deX, avec compatibilité au changement de carte. On se retrouve alors dans une situation semblable au poids2, avec notamment une correspondance

{Fonctions modulairesf de poids k niveau Γ}

↔{k0-formes diérentiellesω méromorphes sur X(Γ)}

donnée par l'égalité πω = f(z)(dz)k0. Comme pour le poids 2, on a la relation suivante entre pôles et zéros de f et ω.

ordP(f) = e.ordπ(P)(ω) +k0(e−1) si P ∈Het e est son indice de ramication ordx,h(f) = ordπ(x)(ω) +k0 si x est une pointe d'ordreh

Proposition. Soit f une fonction modulaire non nulle de poidsk et niveauΓ. Alors X

P∈Γ\H

ordP(f)/eP + X

x∈Γ\PΓ

ordx,hx(f) = k

2(2g−2 + 1

2n2+ 2

3n3+n) = kd 12 où l'on rappelle que d= [Γ(1) : Γ{±1}].

Démonstration. Lorsque k = 2k0 est pair, les égalités ci-dessus montrent que le terme de gauche s'identie à deg(div(ω)) + k0deg(Dπ). Le degré deg(div(ω)) ne dépend pas de ω (puisque les autres sont de la forme gω avec g ∈ M×X(Γ)). On peut le calculer en prenant

ω0 de la formeω1k0 oùω1 est une 1-forme diérentielle méromorphe surX(Γ)etω1k0 désigne la k0-forme diérentielle donnée par ωk10 = f(z)k0(dz)k0 sur une carte où ω1 =f(z)dz. On obtient deg(div(ω)) =k0deg(div(ω1)) =k0(2g−2), dont on déduit la première égalité. La seconde vient de la formule donnant le genre.

Lorsque k est impair, il sut d'appliquer le cas pair à f2.

Application. (Calcul de M(Γ(1))) Pour Γ = Γ(1), la formule devient ord∞,1(f) + 1

2ordi(f) + 1

3ordj(f) + X

P6=i,j,∞

ordP(f) =k/12.

On sait queMk(Γ(1)) est nul si k est impair. Si on faitk = 2, puisque chacun desord?(f) est>0, on constate qu'il n'y a pas de f satisfaisant cette égalité. Donc

M2(Γ(1)) = 0.

Si on fait k = 4, on obtient que toute f ∈ M4(Γ(1)) possède un zéro simple en j, et ne s'annule nulle part ailleurs. Cela s'applique à G4, et montre que f /G4 est une forme modulaire de poids 0 donc constante, donc

M4(Γ(1)) =C.G4.

De même avec k = 6, on obtient que G6 possède un zéro simple en i et ne s'annule nulle part ailleurs, puis que

M6(Γ(1)) =C.G6.

Le même raisonnement montre que M8 et M10 sont de dimension 1et plus précisément M8(Γ(1)) =C.G8 =CG24 et M10(Γ(1)) =C.G10 =CG4G6.

Enn pour k = 12, toute forme parabolique f ne peut s'annuler en dehors de ∞, et son zéro en∞ est d'ordre 1. Ceci s'applique à ∆, et on en déduit que

S12(Γ(1)) =C.∆.

Maintenant, puisque ∆ est inversible en tant que fonction sur H, l'application f 7→ ∆.f induit un isomorphisme

Mk(Γ(1)) ∼

−→ Sk+12(Γ(1))

pour tout k ∈ N. Par ailleurs, puisque Sk(Γ(1)) est de codimension 1 dans Mk(Γ(1)) (noyau de l'applicationf 7→f(∞), et puisque Gk n'est pas parabolique, on a pourk >12

Mk(Γ(1)) =CGk⊕ Sk(Γ(1)).

Grâce aux calcul des Mk pourk <12 on en déduit dimC(Mk(Γ(1)) =

0 sik impair

b12kc sik ≡2 (mod 12)

b12kc+ 1 sik ≡0,4,6,8,10(mod 12) En fait, on a encore mieux :

Proposition. L'algèbre M(Γ(1)) est l'algèbre des polynômes en G4 et G6.

Démonstration. Il s'agit de montrer que pourk ∈2N, la famille desGn4Gm6 oùn, m∈N et 4n+ 6m=k est une base de Mk(Γ(1)). On l'a déjà vérié pour k610.

Montrons par récurrence que cette famille est génératrice pourk>12. Choisissons pour celan, mtels que 4n+ 6m=k, et soit f ∈ Mk. PuisqueGn4Gm6 ne s'annule pas à l'inni, il existeλtel quef−λGn4Gm6 soit parabolique. Mais alorsf−λGn4Gm6 = ∆.gpourg ∈ Mk−12, et par récurrence, on conclut quef ∈C[G4, G6](rappelons que∆ = (60)3G34−27(140)2G26).

Montrons maintenant que cette famille est libre. Soit (n0, m0) tel que 4n0+ 6m0 = k avecm0 maximal. En divisant parGn40Gm6 0, une relation de dépendence linéaire fournit un polynôme dansC[T]qui annule la fonction méromorpheG34G−26 , laquelle devrait donc être constante, ce qui n'est pas le cas.

Exemple. (L'invariant modulaire j) Puisque ∆ est de poids 12 avec un seul zéro simple en ∞, la fonction

j := 1728g23

∆ = 1728g32 (g23−27g32)

est une fonction modulaire de poids 0, holomorphe surH et avec un pôle d'ordre 1en ∞. En particulier,j descend en une fonction holomorphe¯j :Y(1) = Γ(1)\H−→C, restriction d'une application holomorphe ¯j :X(1) −→P1(C).

Proposition. ¯j est un isomorphisme de surfaces de Riemann. En particulier, on a MX(1) =C(¯j) et {Fonctions modulaires de poids 0 niveau Γ(1)}=C(j).

Démonstration. Puisque ¯j possède un unique pôle simple en ∞, elle est de degré (ou valence) 1 et par suite est un biholomorphisme X(1) ∼

−→ P1(C). Le reste en découle.

[Alternativement, on peut utiliser la proposition ci-dessus pour voir que la fonction¯j−λ possède un unique zéro simple pour tout λ∈C, puis conclure par le théorème d'inversion locale].

Pourquoi 1728? Pour avoir un résidu égal à 1 en ∞. On peut calculer que avec q = exp(2iπz) on a j(z) =q−1 + 744 +· · ·. Remarquons que 1728 = 2633.

1.2.5 À propos des q-développements. Posons q = exp(2iπz). Les formes ou fonctions modulaires ci-dessus ont des q-développements remarquables obtenus à une époque où les fonctions spéciales étaient peut-être mieux maitrisées que maintenant. Un exercice de TD expliquera le développement

Ek(z) := 1

2ζ(k)Gk(z) = 1− 2k Bk

X

n=1

σk−1(n)qn où les Bk sont les nombres de Bernoulli, rationnels, et σk−1(n) = P

d|ndk−1. Un autre résultat classique dû à Jacobi, cf ci-dessous, est l'expression

∆(z) = (2π)12q

Y

n=1

(1−qn)24

qui montre que, dans le développement (2π)112∆(z) =P

n=1τ(n)qn, la fonctionn 7→τ(n)est à valeurs entières. Cette fonction a été étudiée par Ramanujan qui a énoncé les conjectures suivantes :

i) τ(nm) =τ(n)τ(m)pour(m, n) = 1, etτ(pr+1) =τ(pr)τ(p)−p11τ(pr−1)sippremier.

ii) |τ(p)|62p

p11 pour p premier.

Nous montrerons/expliquerons plus loin comment ces conjectures ont été résolues et géné-ralisées. Enn, le résultat de Jacobi montre aussi que dans le developpement

j(z) =q−1+ 744 +

X

n=1

c(n)qn

lesc(n) sont entiers ! (il faut aussi utiliser le fait que 1/B2 est entier)

Remarque. (Sur une preuve de la formule de Jacobi) Le but est de montrer que la fonctionf(z) =qQ

n=1(1−qn)24 est modulaire de poids 12. Elle est alors clairement para-bolique, donc un multiple de ∆ puisque S12(Γ(1)) = C.∆, et en comparant les termes dominants on trouve le facteur (2π)12. Puisque f(z) = f(z + 1), il sut de prouver f(−1/z) =z12f(z). Chose remarquable, la dérivée logarithmique def s'écrit

d

où l'on reconnait leq-développement de ce qui devrait être la série d'Eisenstein (normalisée) de poids 2, si la somme P

m,n 1

(mz+n)2 convergeait. Or, si on suit la méthode utilisée pour calculer le q-développement de Gk (cf TD), on s'aperçoit que

2ζ(2)E2(z) = X convergence. Si on inverse le sens de sommation, on a encore convergence mais le résultat change. On peut montrer (cf livre de Serre) que

X

1.2.6 Dimension des espaces de formes modulaires. Revenons au cas d'un sous-groupe de congruenceΓplus général. Pour calculer la dimension des espaces de formes modulaires dans le cas où k est impair, on a besoin de la notion de pointe irrégulière. Cette notion vient de l'observation suivante : si f est une fonction telle que f(−1 h

0 −1

z) = −f(z),

c'est-à-dire f(z + h) = −f(z), alors elle est 2h-périodique et dans son développement f(z) = P

n∈Zanq2hn oùq2h = exp(2iπz/2h), tous lesanavecnpair sont nuls. En particulier, si elle est holomorphe à l'inni, elle s'y annule nécessairement.

Forts de cette observation, on dira que x est une pointe irrégulière pour (Γ, k) si i) k est impair et −1∈/Γ

Théorème. Pour k > 2 on a les formules de dimension suivantes, où l'on suppose

−1∈/ Γ lorsque k est impair.

dimC(Mk(Γ)) = (k−1)(g−1) +bk4cn2 +bk3cn3+ k2nreg +bk2cnirr dimC(Sk(Γ)) =dimC(Mk(Γ))−nreg

Remarque. i) Dans le cas impair (et donc −1∈/ Γ), on an2 = 0. Exercice ! ii) En utilisant la formule donnant le genre, on peut aussi écrire

dimC(Mk(Γ)) = kd avecω1 une1-forme), on note f la fonction modulaire de poidsk associée et on déduit des formules

ordP(g)f) =eP.ordπ(P)(g) +eP.ordπ(P)0) +k0(eP −1) si P ∈H

ordx,hx(g)f) = ordπ(x)(g) + ordπ(x)0) +k0 si x est une pointe que l'application g 7→π(g)f induit des isomorphismes

L(div(ω0) +k0Dπ) ∼

On utilise alors la formule de Riemann-Roch pour calculer dimMk(Γ), aidés par le fait quedeg(k0K+bk0Dπc)>2g−2. Pour calculer la dimension deSk(Γ)il sut de remplacer div(ω0) par div(ω0)−P

P7→∞[P]. Dans ce cas on a bien deg >2g−2 dès que k >2.

Dans le cas impair, pour suivre un raisonnement similaire, il nous faut connaitre l'exis-tence d'une fonction modulaire de poids k. Admettons momentanément l'existence d'une telle fonction f (à condition que −1 ∈/ Γ). Alors f2 est de poids 2k et correspond à une k-forme diérentielle méromorphe ω0 surX(Γ). Vu les formules

ordP(g)2f2) = 2eP.ordπ(P)(g) +eP.ordπ(P)0) +k(eP −1) siP ∈H

ordx,hx(g)2f2) = 2ordπ(x)(g) + ordπ(x)0) +k six est une pointe on constate que l'application g 7→π(g)f induit des isomorphismes

L

Pour Mk, il faut alors calculer la partie entière du diviseur 1

On obtient donc formule de Riemann-Roch simpliée s'applique et on obtient la dimension annoncée pour Mk(Γ).

Pour calculer la dimension de Sk(Γ), il faut calculer la partie entière du diviseur

1

2div (ω0) + k2Dπ12P

P7→∞[P]. Seule la discussion aux pointes est aectée, et les détails sont laissés en exercice.

Remarque. (Que se passe-t-il pourk= 1?) La preuve précédente dit que (sous réserve de l'existence d'une fonction modulaire de poids 1), en notant ω0 une forme diérentielle méromorphe sur X(Γ))

Le diviseur qui apparait est bien entier malgré les apparences, et son degré estg−1+nreg/2. Lorsque nreg >2g−2, on peut conclure que dimC(M1(Γ)) =nreg/2. Sinon, la formule de Riemann-Roch ne permet pas de conclure, mais fournit la minoration dimC(M1(Γ)) >

nreg/2. Dans tous les cas dimC(S1(Γ)) =dimC(M1(Γ))−nreg/2.

Remarque. (Existence de fonctions modulaires de poids 1) Dans le cas k impair de la preuve précédente on a supposé l'existence de fonctions modulaires de poids k lorsque

−1 ∈/ Γ. Il sut bien-sûr de la prouver en poids 1. Voici un argument qui utilise le fait, que nous verrons plus tard, que pour une surface de Riemann compacte, le groupePic0(X) des diviseurs modulo les diviseurs principaux de degré 0 est un groupe divisible.

Ainsi, si P est un point de X(Γ), l'élement K −(2g −2)[P] de Pic0(X) est divisible par 2. Il s'ensuit que, si ω0 est une forme diérentielle méromorphe sur X(Γ), il en existe une autre, ω, telle que div(ω) = 2(div(ω0)−(2g−2)[P]). Soitf2 la fonction modulaire de poids 2 et niveau Γ telle que f2(z)dz =π(ω). Alors ordz(f2) est pair en tout point de H qui est simplement connexe, donc il existe une fonction f : H −→C, méromorphe sur H, telle que f2 =f2. Cette fonction n'est pas nécessairement automorphe de poids 1, mais il existe au moins un caractère χ: Γ −→ {±1} tel que pour tout γ ∈Γ on a f[γ]1 =χ(γ)f.

Ainsi, si P est un point de X(Γ), l'élement K −(2g −2)[P] de Pic0(X) est divisible par 2. Il s'ensuit que, si ω0 est une forme diérentielle méromorphe sur X(Γ), il en existe une autre, ω, telle que div(ω) = 2(div(ω0)−(2g−2)[P]). Soitf2 la fonction modulaire de poids 2 et niveau Γ telle que f2(z)dz =π(ω). Alors ordz(f2) est pair en tout point de H qui est simplement connexe, donc il existe une fonction f : H −→C, méromorphe sur H, telle que f2 =f2. Cette fonction n'est pas nécessairement automorphe de poids 1, mais il existe au moins un caractère χ: Γ −→ {±1} tel que pour tout γ ∈Γ on a f[γ]1 =χ(γ)f.

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