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Revue Bibliographique

I.5 L’oxydation haute température

I.5.1.3 Formation de pores à l’interface métal/oxyde

De nombreuses études ont montré que lors de l’oxydation de -NiAl et ’-Ni3Al, des cavités

se forment à l’interface métal/oxyde [25, 127, 138-142]. Certains auteurs ont proposé que ces cavités se forment par coalescence de lacunes. Deux hypothèses, faisant appel à des phénomènes de diffusion, sont proposées. Tout d’abord, la consommation de l’aluminium pour former la couche d’alumine provoque l’appauvrissement en aluminium dans l’alliage NiAl se trouvant sous l’oxyde, et donc l’apparition d’un gradient de concentration en aluminium et la diffusion de Al vers la surface. En conséquence, un flux de Ni, opposé à celui de Al apparaît. Le coefficient de diffusion de Ni dans -NiAl est plus grand que celui de Al et augmente rapidement quand la teneur en Al diminue [19]. Un flux de lacunes vers l’interface métal/oxyde apparaît donc, les lacunes coalescent et forment des cavités à l’interface métal/oxyde comme cela est schématisé à la Figure I- 22 [102, 122]. Une autre source de lacunes est possible si la croissance de l’oxyde est cationique, pour chaque atome d’aluminium consommé il y a formation d’une lacune d’aluminium VAl. On parle alors

d’injection de lacunes à l’interface métal/oxyde et la coalescence de ces lacunes peut former des cavités [143]. La présence de ces cavités réduit l’adhérence de l’oxyde et leur formation est d’autant plus importante que le coefficient de diffusion du nickel est élevé et que la teneur en aluminium est faible, c’est à dire pour des alliages NiAl riches en nickel [138].

Figure I- 22 : Schéma expliquant la formation de cavités à l’interface métal/oxyde [122].

De nombreuses études ont montré que le soufre, présent comme impureté dans les alliages, pouvait favoriser la formation des cavités à l’interface métal/oxyde [144, 145]. Même une faible concentration de soufre dans NiAl peut provoquer sa ségrégation à la surface des cavités et fissures déjà présentes à l’interface métal/oxyde. Cette ségrégation du soufre diminuerait fortement l’énergie de surface des cavités et accélérerait ainsi leur croissance, conduisant à la formation de pores plus profonds [104, 107, 140, 142]. Malgré la présence de ces cavités, l’oxyde continue de croître [102, 138, 140]. Plusieurs calculs et expériences [140, 146] ont montré que l’aluminium pouvait être transporté en phase vapeur, la quantité d’aluminium s’évaporant de la surface des cavités étant suffisantes pour former l’oxyde. D’après Grabke [146], l’apport de Al en phase vapeur est possible à 1200°C, mais à 900°C les vitesses d’évaporation de l’aluminium pour NiAl en composition stœchiométrique ou avec du nickel en excès, sont toujours inférieures aux vitesses de consommation en aluminium par oxydation. Ce paramètre devient alors limitant et la couche d’oxyde au-dessus des cavités est moins épaisse. Seul l’alliage avec un excès d’aluminium peut avoir des vitesses d’évaporation suffisantes. Notons enfin que Oquab et al. [55] ont montré, grâce à des observations sur NiPdAl en ESEM (MEB environnemental), que les cavités interfaciales se formaient dès les

premiers instants de l’oxydation. Ce qui corrobore le lien entre formation des cavités et formation rapide des alumines de transition.

I.5.2 L’oxydation cyclique

Les cycles thermiques provoquent l’écaillage de la couche d’oxyde. L’écaillage résulte de la combinaison de différents phénomènes. Tout d’abord, d’une mauvaise adhérence de l’oxyde, due, par exemple, à la présence de soufre ou de cavités à l’interface métal/oxyde. Puis, des contraintes de croissance qui apparaissent lors de la formation de la couche d’oxyde pendant le maintien à haute température. Et enfin, à des contraintes d’origine thermique lors du refroidissement, liées à la différence de coefficients d’expansion thermique entre l’oxyde et le revêtement (rev>ox) [147]. Habituellement l’oxyde est en compression, le revêtement en

tension. L’écaillage conduit à une consommation en aluminium plus rapide du fait de la réoxydation du revêtement mis à nu par l’écaillage. Cette succession d’écaillage/ réoxydation accélère la détérioration du revêtement en appauvrissant en aluminium la phase -NiAl constituant le revêtement. La formation d’oxydes moins protecteurs survient donc plus rapidement. La forme globale de la courbe (Figure I- 23) est due à une compétition entre prise de masse due à l’oxydation et perte de masse due à l’écaillage. Pour les FeCrAl, le « breakaway » (fin de vie du système) est marqué par une prise de masse rapide, due à la formation de l’oxyde FeO [148-150]. Dans le cas des alliages aluminoformeurs à base de nickel, nous n’avons pas connaissance d’une telle observation, mais le « breakaway » serait plutôt marqué par l’accélération de la perte de masse comme cela est représenté en pointillé Figure I- 23.

Figure I- 23 : Evolution de la prise de masse au cours d’une oxydation cyclique, formation d’oxydes moins

protecteurs après successions d’oxydation/écaillage.

En plus de l’appauvrissement en Al, un autre mécanisme de dégradation est observé lors de l’oxydation cyclique. Il s’agit d’un effet thermo-mécanique qui est appelé « rumpling » ou plissage [36, 151, 152], dont une illustration est donnée à la Figure I- 24. L’intensité du

plissage dépend de la composition du revêtement mais aussi de la méthode utilisée pour le dépôt [152].

Figure I- 24 : Observation au MEB du plissage (« rumpling ») de la surface d’un revêtement aluminiure de

platine déposé sur René N5, après 50 cycles de 1h à 1200°C sous air [153].

Ce type de dégradation a souvent été attribué à la différence de coefficients d’expansion thermique entre le revêtement et le substrat [152] ou aux oxydations et écaillages répétés [36, 151]. Tolpygo et al. [153] ont montré que le plissage n’est pas dû aux écaillages et oxydations répétés. En effet, au bout de 50 cycles à 1200°C à l’air, subis par des revêtements -(Ni,Pt)Al sur René N5, aucun écaillage n’apparaît alors qu’une ondulation de surface est observée. Ils attribuent plutôt le plissage à l’apparition de déformations différentes entre le revêtement et l’oxyde. La relaxation des contraintes de croissance, pourrait être la cause de ces déformations et donc du plissage. Mais dans leur étude, ils ont montré que le plissage est deux fois plus prononcé lorsque les contraintes de croissance sont faibles que lorsqu’elles sont élevées. Ainsi l’hypothèse selon laquelle le plissage est dû à la relaxation des contraintes de croissance, n’est pas vérifiée. Ils constatent également que le plissage n’est pas relié à la variation d’épaisseur de l’oxyde formé. Une autre hypothèse suggère que le plissage soit dû à la différence de coefficients d’expansion thermique entre le revêtement et le superalliage [152]. Dans ce cas, l’étendue du plissage devrait augmenter avec le nombre de cycles et, plus important, l’effet produit par le cycle thermique ne devrait pas dépendre de la durée du cycle. Or Tolpygo et al. [153] ont constaté que le temps d’oxydation, plutôt que le nombre de cycles, détermine l’étendue du plissage. Cependant, l’oxydation isotherme ne conduit pas à une surface plissée similaire à celle produite par oxydation. Le plissage paraît donc être la conséquence de la combinaison de l’oxydation et du cyclage. L’étude de l’évolution microstructurale d’un revêtement (Ni,Pt)Al durant l’oxydation isotherme et durant l’oxydation cyclique [153], montre que :

- la morphologie de l’oxyde formé est la même,

- l’oxydation isotherme entraîne la formation de cavités dans le revêtement et un léger plissage,

- l’oxydation cyclique produit un fort plissage mais le revêtement reste dense.

Ces différences de microstructure du revêtement suggèrent que le plissage sans formation de cavités (pour l’oxydation cyclique) et la formation de cavités (pour l’oxydation isotherme) peuvent, en fait, être deux manifestations différentes d’un même processus de diffusion. Tolpygo et al. proposent que le plissage et la formation de cavités sont dus à la transformation de la phase -NiAl en ’-Ni3Al, qui s’accompagne d’une diminution locale de volume. Dans

le cas de l’oxydation cyclique, les contraintes d’origine thermique provoqueraient l’affaissement des pores, entraînant le plissage de la surface. Cette hypothèse ne fait cependant pas l’unanimité. En effet, l’observation de coupes de systèmes oxyde/NiPtAl/superalliage, après oxydation cyclique, montre souvent qu’il n’y a pas de

correspondance spatiale entre l’affaissement de la couche d’oxyde et le lieu de la transformation   ’-Ni3Al. Il faut aussi noter que la transformation martensitique, qui

s’accompagne d’un changement de volume important (cf. paragraphe I.5.1.2c) peut aussi être responsable de la déformation de la surface au cours d’une oxydation cyclique [134, 135].

I.5.3

Oxydation haute température des aluminiures modifiés

au platine

De nombreuses études ont montré que l’addition de platine pouvait nettement améliorer la résistance à l’oxydation des revêtements aluminiures de diffusion, dont la phase majoritaire est -NiAl [20, 22-46, 95, 154, 155]. Récemment, Gleeson et al. [66] ont montré que l’ajout de platine a aussi un effet bénéfique sur la résistance à l’oxydation d’alliages +’. Cependant, les mécanismes par lesquels le platine améliore les performances des aluminiures de diffusion sont encore débattus. Les évolutions microstructurales observées lors de l’oxydation d’un revêtement aluminiure simple sont identiques pour les aluminiures modifiés au platine. La perte en aluminium pour former la couche d’oxyde et par diffusion vers le substrat provoque la transformation de la phase -NiAl présente initialement en ’-Ni3Al puis . Mais le temps

au bout duquel ces transformations ont lieu est différent pour les deux revêtements. Dans le cas des revêtements aluminiures modifiés au platine initialement biphasés PtAl2/-NiAl, il

faut rajouter la transformation de la phase PtAl2 en -NiAl qui, selon la température, se

produit dès les premières heures de maintien à haute température (cf. paragraphe I.2.2.2). I.5.3.1 Effets bénéfiques du Pt

L’effet bénéfique essentiellement observé est l’amélioration de l’adhérence de la couche d’oxyde [23, 24, 35, 36, 42, 156]. Divers mécanismes ont été proposés pour expliquer cet effet du Pt sur l’adhérence :

 Tout d’abord, certains auteurs ont reporté que le platine diminue les contraintes de croissance de la couche d’oxyde [24],

 D’autres estiment qu’il favorise l’accrochage mécanique de la couche d’oxyde par formation de « chevilles » [23],

 Un autre mécanisme suggère que le platine atténue l’effet néfaste du soufre [35, 36, 42, 46] décrit au paragraphe I.5.1.3. Une étude récente [157], effectuée sur des monocristaux de Ni50Al50 et Ni40Pt50Al10, dopés avec différents taux de soufre a montré que le Pt

diminue la ségrégation du soufre en surface,

 D’autres études ont montré que le platine empêche ou réduit la formation de vides à l’interface métal/oxyde [35, 36, 42, 46, 157, 158]. Cet effet peut être lié à l’effet du platine sur la ségrégation du soufre, puisque ce dernier augmente la formation de cavités. D’autres études suggèrent que le platine augmente la diffusion de Al [88, 159] et par conséquent diminue le flux de lacunes du métal vers la surface et donc inhibe le mécanisme décrit au paragraphe I.5.1.3.

 Wright et al. [158] montrent que 2,5 %at de platine diminue le coefficient d’expansion thermique de la phase -(Ni,Pt)Al enrichie en Al et donc réduit la différence de coefficients d’expansion thermique entre le revêtement et la couche d’alumine.

Certains auteurs ont aussi reporté un effet du platine sur l’interdiffusion, en ralentissant la diffusion d’éléments réfractaires depuis le substrat vers le revêtement pendant l’oxydation [26, 27, 31, 35, 41, 62], réduisant ainsi la formation d’oxydes néfastes à l’adhérence de la

couche d’oxyde [35], ou la formation de précipités dans la zone d’interdiffusion [27]. Il a aussi été noté que le platine favorise la formation sélective d’une couche d’alumine [26, 30, 31, 64, 158, 160] et accélère sa reformation après écaillage [35]. En revanche certains auteurs avaient proposé que le platine ralentissait la vitesse de formation de la couche d’alumine [30]. Mais cette hypothèse s’est révélée inexacte, puisque au contraire le platine semble augmenter la vitesse de croissance de l’oxyde [35, 157, 158] et ralentir la transformation de l’alumine de transition -Al2O3 en -Al2O3. Ceci pourrait favoriser la relaxation des contraintes dans la

couche d’oxyde [157]. Enfin le platine aurait un effet sur la stabilité de la phase -NiAl [35] et retarderait ainsi sa transformation en ’-Ni3Al [30] et donc les détériorations liées au

changement de volume, provoqué par la transformation de phase. Mais d’après le diagramme NiPtAl établi par Gleeson et al. [66] Figure I- 7, l’addition de platine ne semble pas avoir d’effet significatif sur la stabilité thermodynamique de la phase -NiAl lorsqu’elle s’appauvrit en aluminium. Il est possible que l’effet du platine sur la stabilité de la phase -NiAl soit lié à l’effet de celui-ci sur la diffusion. En ralentissant, par exemple, la diffusion d’éléments réfractaires, néfastes à la stabilité de la phase -NiAl comme le tungstène, le tantale ou par l’augmentation du coefficient de diffusion de l’aluminium, permettant de maintenir une teneur en aluminium suffisamment élevée à l’interface revêtement/oxyde. Pour finir, il est intéressant de noter que la transformation martensitique est aussi observée pour les aluminiures modifiés au platine [135, 161, 162] et la température de départ de la transformation martensitique, Ms, semble augmenter avec la teneur en platine [163] (Figure

I- 25).

Figure I- 25 : Influence de la teneur en Pt sur la température de transformation martensique Ms.[163].